Message affolé

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L'homme continue sa route vers la jeune femme alors que cette dernière danse comme si c'était sa dernière fois. Elle ne tente pas tout de suite de trouver celui qu'elle ramènera chez elle, elle veut simplement profiter de cette musique qui lui casse les oreilles pour paraitre normale, oublier qu'elle sera peut-être toute seule toute sa vie et que le prince charmant est la pire des ordures. Son regard passe vaguement sur les gens avec qui elle partage son souffle et sa chaleur pour se poser sur son admirateur secret. Elle lui fait un sourire et l'invite à la rejoindre. Il sera peut-être satisfait si elle se déhanche un peu avec lui juste pour dire. Elle ne désire pas l'inviter chez elle, quelque chose chez lui la gêne, un air familier, des yeux qui la fixent un peu trop.

Elle finit par devoir s'arrêter, trop essoufflée pour continuer à se trémousser entre tous ces hommes qui l'entourent. Elle marche vers le bar en bougeant fièrement ses hanches d'un côté à l'autre. Une fille, qui n'a certainement pas l'âge légal pour mettre les pieds dans un tel endroit, gifle son copain qui semble regarder un peu trop intensément le spectacle. Elle enfonce ensuite ses longs ongles manucurés et traine sa proie derrière elle comme un simple objet. Après ce spectacle un peu gênant, elle décide que personne exceptée elle-même ne viendra chez elle. Ce soir, elle n'a pas l'envie de jouer ni de s'occuper de quelqu'un d'autre. Ses soirées de folie se fanent entre ses doigts. La seule chose qui l'empêche de s'enfuir, c'est celui qui observe chacun de ses mouvements et n'attend que l'opportunité de savoir où elle habite. Si elle rentre seule, elle est persuadée qu'il la suivra de près, beaucoup trop près.

Elle accoste le premier venu, danse avec lui et joue de tous ses atouts pour qu'il désire la suivre. Déjà bien saoul, il se montre assez docile et propose vite qu'ils finissent la soirée dans un endroit plus intime. Elle se montre enthousiasme, peut-être même un peu trop, mais ça ne fait qu'enflammer ses envies. Tout ce qu'il craint, c'est de ne plus se souvenir de cette nuit dont il espère beaucoup. Les deux s'éclipsent en vitesse dans un taxi. À peine assis, il n'hésite pas à coller ses lèvres sur les siennes. Elle le laisse jouer un peu avant de repousser ses mains qui sont un peu trop entreprenantes. Elle demande au chauffeur de s'arrêter à quelques rues de son appartement et lui glisse quelques billets pour qu'il conduise son pseudo sauveur à l'hôtel le moins cher. Elle réussie à quitter la voiture en disant qu'elle allait simplement faire un petit tour au dépanneur pour acheter des condoms comme elle n'en avait plus. Elle ne prévoit pas revenir, elle voulait juste qu'il reste gentiment assis.

Elle n'a jamais été aussi heureuse d'être seule avec son vieux chat miteux dans son petit 3½. En se démaquillant, elle soupire en repensant à quel point elle s'était servie du premier venu pour s'échapper en douce. Elle aurait pu l'embrasser sur la joue et le remercier au lieu de le laisser en plan ainsi, mais elle rêvait d'être libérée de cette charge épuisante qu'elle se mettait sur les épaules de vendredi soir. Toutes ces nuits gâchées qu'elle aurait pu passer à danser sur une musique qui réveille chaque parcelle de son corps et enflamme ses mouvements. Elle ne dansait plus en s'amusant depuis bien longtemps, la dernière fois était avec son ex qui savait exactement quoi faire jouer pour qu'ils finissent cette dernière au lit.

Elle ferme la musique. Elle s'assoit la tête entre les mains. Elle laisse ses yeux s'humidifier. Elle ne combat pas les larmes. Sur sa table de salon, un papier attire son attention. Un numéro, des indications. Sa supérieure, un moyen de changer. Elle n'a rien à perdre. Elle ne sent plus les touchés, trouve les baisés froids, ignore les caresses brutales. Tout revient au même. Laisse toutes libertés à un homme et il finira par enrouler ses doigts autour de ton cou, il pensera que tu approuves sa violence. Oublier, juste oublier. Une seule phrase tapée puis envoyée. Elle doit vieillir, mettre les pieds dans le monde des adultes.

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