Prologue I
Les yeux restaient ouverts mais les appareils de mesure étaient formels. Les tracés des électro-cardiogramme et encéphalogramme ne frémissaient plus que de la négligeable tension électrique persistante. Toute trace de vie avait cliniquement disparu du corps flottant, dont les seuls mouvements ne résultaient plus que des ondulations résiduelles à la surface de l'eau, provoquées par ses dernières convulsions.
Derrière la large vitre épaisse, tous restaient assis, attentifs à leurs écrans.
Un seul homme se tenait debout derrière eux. Il referma son carnet et le glissa dans une poche de sa blouse.
« On peut arrêter les enregistrements. Notez l'heure. »
Il s'approcha de la vitre, manipula un interrupteur. En une fraction de seconde, des cristaux liquides intégrés au verre la rendirent totalement opaque.
Il sortit de la petite pièce, prit le couloir, fit une dizaine de pas et s'arrêta à la hauteur d'une porte métallique. Il composa un code sur un clavier disposé à hauteur d'yeux, et un écran miniature s'éclaira. Un rapide coup d'oeil par précaution, l'homme valida et la porte s'ouvrit sur un sas aveugle. Le scientifique s'avança et entendit la première porte se refermer derrière lui, et le claquement de ses loquets qui se remettaient en place. Presque immédiatement, une lumière verte au-dessus de la porte qui lui faisait face s'alluma. Il manoeuvra le volant disposé en son centre jusqu'à la butée et tira le lourd battant qui s'ouvrit sur une pièce recouverte de métal inoxydable sur toutes ses surfaces. Une odeur maritime l'assaillit aussitôt. Un pan de la cloison sur sa gauche s'ouvrait à hauteur d'homme et donnait accès au bassin par un escalier sur le côté. Quelques gouttes d'eau au sol témoignaient encore de l'agonie turbulente de l'homme.
« Préparez-vous, messieurs. »
Deux hommes répondirent par un signe de tête. L'un d'eux empoigna un boîtier qui commandait un palan relié à un rail au plafond et muni d'un berceau métallique. L'autre s'était emparé d'une gaffe et vint se placer au bord du bassin. Il atteint le corps à la première tentative et le ramena doucement vers le bord. Avec précaution, il se pencha et débrancha les différents câbles qui le relient encore aux appareils de mesure.
Ils placèrent le berceau sous le corps de l'homme et actionnèrent le palan. Les câbles se tendirent sous son poids lorsqu'il fut extrait de l'eau.
L'ensemble glissa le long du rail fixé au plafond, et les opérateurs le firent tourner sur lui-même pour le placer dans l'axe d'une ouverture au fond de la pièce. Le moteur électrique fit avancer la structure métallique dans une petite pièce aux parois grillagées dont la porte fut fermée hermétiquement.
Après un court moment, un bruit de soufflerie résonna et le sol vibra pendant précisément huit minutes. Un claquement se fit entendre à travers la cloison, puis le chuintement des roulettes sur le rail qui diminuait indiquait que le corps était emmené.
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