Il ne s’était pas encore baladé hors du palais royal du roi de Siar, mais ce pays n’attirait pas spécialement Kilian. Il lui semblait assez malsain. Il ne connaissait pas encore les règles, ni les coutumes de ce clan, néanmoins, il avait l’impression qu’il n’y avait pas beaucoup de liberté dans ce pays. C’était un point qui dérangeait particulièrement Kilian. Tous ce qui touchait au liberté le dérangeait. Le jeune homme soupira et regarda le nom qui était inscrit sur les deux côtés de la porte de sa suite. Il y avait bien son prénom sur la porte, mais ce n’était plus son nom de famille. Ce n’était plus Mallow mais Flow. La seule chose que le jeune homme regrettait, c’était que les de noms de familles se finissaient de faon similaire car cela lui rappelait tout de même son vrai nom de famille. C’était le nom de famille de la conseillère Victoria. Les conseillers avaient jugé que ce n’étaient pas crédibles de faire croire qu’ils étaient tous les enfants de Sophia et Bertrand. D’autant plus qu’ils n’y avaient déjà aucunes grandes ressemble entre les adolescents, et encore moins avec les deux plus vieux conseillers. Ils avaient donc trouvé des techniques parfaites : certains d’entre eux allaient se faire passer pour des enfants d’autres conseillers, qui allait donc les représenter à leur place. Liam était censé être le petit fils de Bertrand, Cassandra la petite fille de Sophia. Charles se faisait passer pour le fils de Chrisitan, celui qui leur avait expliqué la situation par rapport à la maladie, et Charles était le jeune frère de Camille. Seul le conseiller Baptiste Clay n’était pas encore représenté, mais s’il avait bien compris les dire des deux conseillers les accompagnant, Ethan, le fils de ce conseiller allait les rejoindre. Aucun des jeunes de la bande était très emballé à le revoir. À l’époque des bâtiments, Ethan s’était retrouvé dans le même bâtiment qu’eux et usait des pouvoirs que possédait son père pour pouvoir être plus avantagé que les autres. Cela avait coûté de douloureuses punitions pour Kilian, Liam et Charles. Surtout pour le premier qui avait fait son rebelle dans son bâtiment jusqu’à l’arriver d’Iris. Kilian n’avait vraiment pas envie de revoir le fils du conseiller, il en était de même pour le principal concerné. Et cette fois-ci, le groupe aurait bien aimé que le père obéisse au caprice de son fils chérit. Cela les aurait évité de revoir Ethan, qui, pour eux, était loin d’être le garçon le plus sympathique sur terre. Personne n’avait hâte de le revoir mise à part les deux conseillers.

Kilian sourit en relisant le nom inscrit sur sa porte. Kilian Flow. Tout compte fais, ce nom de famille lui allait assez bien, très bien même. Ce changement de nom de famille lui donnait comme l’impression qu’il était parfaitement libre et qu’il pouvait faire tout ce qu’il lui plaisait sans limite. C’était faux, il n’était pas libre de toutes ses actions, mais il se sentait plus heureux avec ce nom de famille qu’avec le sien. Dommage qu’il ne puisse pas le garder toute sa vie. Il ne voulait pas repasser à Mallow. Il pouvait toujours essayer de négocier pour garder le nom de famille de la conseillère Victoria. Peut-être que la concernée ne serait pas contre, il s’entendait bien avec elle. Le jeune homme ne lui avait pas parlé très souvent, mais pas rarement non plus. Il trouvait que c’était la conseillère la plus agréable avec Camille. Malgré leur statut, il trouvait qu’elles restaient compréhensives. Kilian ne savait pas pourquoi, mais il ressentait beaucoup d’affection pour elle. S’ils parlaient plus, elles auraient pu devenir une mère et une sœur de procuration. Kilian rêvait d’une mère présente, et il s’était souvent senti seul lors de son enfance puisqu’il était fils unique. Iris avait été sa meilleure amie, une sœur pour lui, cela avait compensé. Mais ce n’était pas le même sentiment fraternel que l’on ressentait pour un membre de sa famille, c’était différent. Sauf que niveau famille, Kilian ne connaissait pas grand-chose, Iris non plus d’ailleurs. Les deux ex-meilleurs amis n’avaient pas eu la chance d’avoir une grande famille et de les voir tout le temps. Iris avait un cousin qu’elle n’avait plus vu depuis très longtemps. Les parents de Kilian, eux, les avaient coupés de toutes familles possibles. Le jeune homme ne connaissait aucun autre parent. Aucun grand-parent, aucun oncle, aucune tante, aucun cousin, aucune cousine. Et il n’avait jamais eu de frère et sœur, enfin pas qu’il ne sache. Cela dépendait si c’était avant lui, ou lorsqu’il était encore un nourrisson. De la part de ses parents, tout pouvait être possible. Kilian le savait très bien. Ils l’avaient étonné plus d’une fois, que ce soit en bien ou en mal. Son avis et son intuition se dirigeaient beaucoup plus sur le fait que c’était mal que bien.

Il était vrai que Kilian ne savait dire que très peu de chose de bien qu’avait pu faire ses parents. Le jeune homme voulait les renier, à tous jamais, s’émanciper, pour toujours. En quelque sorte, c’était déjà un peu fait car en choisissant le parti des conseillers, il était certain de ne pas les retrouver de si tôt. Ce qui était bien avec eux et le reste du groupe, c’était qu’aucun d’entre eux ne lui posait des questions, ou alors, on ne lui imposait aucunement de répondre s’il n’en avait pas envie. Il trouvait cela assez chouette. Il allait mal et semblait dépérir, personne ne lui faisait la remarque. Il savait utiliser remarquablement une arme à feu, personne n’avait l’idée dans la tête de lui poser la question « comment cela se fait que tu manies aussi bien une arme alors que tu n’as que seize ans et que tu en as jamais touché ? ». Il avait été le seul à refuser de recevoir des visites de ses parents lorsqu’il était encore en Opartisk, personne ne tiltait sur ses remarques. De toute manière, cela pouvait rester crédible : la plupart des adolescents n’entretenaient pas forcément de très bonne relation avec leur parent. Tout le monde lui fichait la paix, et c’était temps mieux. En réalité, Kilian avait peut-être envie qu’on le secoue un peu, qu’on le prenne par les épaules en le secouant, qu’on le force à regarder les autres gens dans les yeux, qu’il communique un peu plus que par des sifflements, des grognements, des murmures insignifiants et des mots jetés comme cela dans l’atmosphère pour montrer aux autres personnes que si, il est là, et oui, qu’il peut un minimum communiquer. Si des individus devaient le rencontrer hors de sa façade ‘‘fils de Victoria Flow, qui est là pour la représenter, elle, conseillère d’Opartisk, très occupée dans son pays pour se joindre à ses nobles collègues’’, il le prendrait sûrement pour un muet ou un dépressif.

Bon, Kilian se devait de s’avouer qu’il était légèrement dépressif sur les bords… légèrement ? Très fortement. Les seules personnes qui remarquaient que quelques choses sonnaient faux et bizarre étaient Fred et Cassandra. Charles et Liam avaient autres choses à faire, et les conseillers ne posaient aucunes questions sur ses parents au jeune homme, pour son plus grand soulagement, même si ses réponses en cas de questions étaient déjà toutes préparées : il n’y en aurait aucune, il n’aurait pas répondu, jamais. Cassandra et Fred le connaissaient depuis longtemps, cela dépendait sûrement de cela. Les êtres l’appréciant depuis longtemps s’inquiétaient plus pour lui que les autres. Cela faisait chaud au cœur à Kilian, de se rendre compte que certaine amitié était bien réelle et peut-être même indestructible. Sauf qu’il avait bien de mal à y croire. Cassandra était sa meilleure amie, et elle voyait bien qu’il allait mal, mais elle n’insistait pas assez car elle ne voulait pas le froisser. Venant de la douce et fragile brune, Kilian le comprenait, mais il ressentait un arrière-goût de déception. Elle ne creusait pas. Quelques fois elle essayait d’obtenir des informations, malheureusement elle se cognait à un mur beaucoup trop épais et solide, et cela la dissuadait d’essayer de le casser. Comme si elle savait dès le départ qu’elle n’y arriverait pas. Elle n’avait pas totalement tort, Kilian ne voulait rien livrer et confier à personne.

Puis Fred, ce n’était pas la même chose. Fred n’était pas Cassandra. L’amitié n’était pas la même. Finalement, Kilian ne savait pas vraiment ce qu’il ressentait réellement pour l’autre jeune homme, il n’était pas certain que cela ne soit que de l’amitié. Il n’était pas certain que cela soit de l’amitié tout court. L’ex-meilleur ami d’Iris se perdait dans les profondeurs de ses nombreuses pensées et réflexions. Pourquoi y avait-il certaine personne où il n’arrivait pas à mettre d’étiquette sur ses relations ? Et pourquoi est-ce que Fred faisait-il fâcheusement parti de ses personnes pour Kilian ? Ce dernier en était perdu car il aimait savoir exactement ce que représentait chaque personne pour lui, bien qu’il ne sache pas ce qu’il se représentait pour lui-même. Au final, Fred avait changé par rapport à l’époque où ils étaient amis, et leur relation aussi avait changé d’une certaine manière depuis qu’ils s’étaient retrouvés, Kilian avait comme l’impression que c’était en mieux et au fond de lui, il voudrait être encore plus proche de l’ancien rebelle. Ce qu’il avait aussi compris, c’était aussi que Fred n’était pas comme les autres. Et cela, c’était intensément fondamental. Il ne ressemblait à personne d’autre. Fred se souciait vraiment de Kilian, presque comme si après les bâtiments et leur retrouvaille, il en consacrait toute sa vie. En tous cas, c’était l’impression que Kilian avait, et cela lui faisait vraiment chaud au cœur parce qu’il n’avait pas l’habitude que l’on donne autant d’importance à son bien être et à lui tout simplement. Ce minuscule détail prouvait à Kilian que Fred était spécial, unique, sensible, généreux et profondément bon. Kilian était prêt à tout lui pardonné de ce qu’il avait fais pendant ses années de rebelle. Il l’avait déjà pardonné depuis longtemps finalement.

Fred avait changé, il s’était apaisé, il avait mûri. Les événements terribles avaient eu un gros impact sur lui, mais il s’efforçait de rester fort. Il avait compris que jouer le rebelle n’était pas la solution, et que les très peu d’être cher pour lui, auraient eu honte de lui, il n’honorait pas leur mémoire, sa mémoire, et le jeune homme s’en était voulu. Kilian se rappela de sa relation d’avant avec Fred. Dès le début elle avait été profonde, sensible, complice et fusionnel malgré le fait qu’il y ait des non-dits. Le fait que ce soit les deux garçons et pas seulement un seul qui n’est pas tout dis avait sûrement équilibré la balance. Ils s’étaient éloignés en mauvais termes juste parce que cela avait été trop brutal. S’ils avaient dit ce qu’ils avaient sur le cœur à l’époque, peut-être qu’ils n’auraient pas sombré, peut-être que Kilian n’aurait pas choisis Iris, peut-être que Fred n’aurait pas choisi les voyous. En définitif, Kilian ne regrettait tout de même pas cette séparation même si elle avait fait de la peine. Désormais, il ne savait pas ce qu’il ressentait exactement pour Fred même s’il avait l’impression que cela se précisait de plus en plus, mais avait retrouvé cette relation si brute et précieuse qui les avait unis. Elle n’était pas comme avant, mais quelque chose lui disait que plus tard, cela allait être encore mieux que par le passé. Cette relation était toujours profonde et sensible, malgré tout, elle recommençait à redevenir complice et fusionnelle, mais il y avait plus que cela. Les non-dits demeuraient encore plus présents, mais cette fois, ils étaient réellement évoquer même s’ils ne dévoilaient pas ce qu’ils cachaient à l’autre. Un soupçon de noirceur et de mélancolie c’étaient rajoutés directement au mélange alors que tout était devenu pudique lorsqu’il se refait dans sa tête les discussions qu’il avait pu avoir avec Fred. Il y avait comme un respect mutuel et le respect du bien à être de l’autre.

Par rapport au passé, tout était plus sérieux et grave mais plus doux et respectueux. C’était tellement bon, Kilian savourait chaque instant avec Fred. Depuis toujours il avait fait cela. L’adolescent se remémorait les moments qu’il avait passés avec son ami. Lorsqu’ils n’étaient que des enfants, lorsqu’ils étaient à l’école des trois à dix ans comme c’était nommé, et le début des dix à dix-huit ans. Kilian se souvenait de la porte vitrée de l’immeuble qu’ils avaient cassé en jouant avec un ballon, il se remémora aussi la fois où ils avaient poussé Iris dans une piscine car elle n’osait pas y aller. Ils avaient sauté juste après qu’elle était rentrée dans l’eau. Elle avait presque tenté de les noyer après cela, et pour sa vengeance, la petite fille que son ex-amie était à l’époque, faisait fonctionner son cerveau était utilisait la ruse. La petite Iris avait mixé du piment, une goutte d’huile, des grains de poivre ainsi que du sel dans les boissons que la mère d’Iris avait concocté (elle faisait les meilleures boissons sucrées et fuité que Kilian n’avait jamais goûté). Le jeune homme sourit, Iris avait toujours réussi à trouver un moyen de prendre sa revanche sur les petites bêtises de lui et Fred. Est-ce que cette fois, l’adolescente qu’elle était voudrait se venger de lui ? C’était assez probable pour Kilian. Quand elle le voulait, Iris pouvait devenir extrêmement rancunière, beaucoup plus que n’importe qui dans certaine situation.

L’adolescent savait qu’il l’avait blessée même s’il ne s’imaginait pas que cela lui avait fais très mal au fond d’elle. Iris lui était devenue une inconnue depuis son retour des bâtiments des surdoués, ils avaient divergé, ils n’avaient plus les mêmes centres d’intérêts ou de préoccupations, ils n’étaient plus sur la même longueur d’onde. Puis Kilian c’était laissé rattrapé par son passé à son plus grand désespoir, et celui de ceux qui tenaient à lui. Le sourire du jeune homme ne mit pas longtemps à se dissiper. Une habitude comme une autre, ces derniers temps, il ne durait pas longtemps, il disparaissait aussi vite qu’il était apparût. Presque comme à la vitesse d’une ombre. Celui-ci avait tout de même la chance d’être restée plus longtemps que les autres. Un vague d’angoisse remua dans son corps, proche de son cœur au moment où il fermait les yeux. Ils avaient été un trio soudé. Lui, Iris et Fred. Puis, à certain moment, c’était lui et Fred. Ensuite cela avait été Kilian et Iris. S’éloignant énormément de Fred jusqu’à ne plus lui parler, devant même ennemi pour Iris et Fred.

Désormais, c’était revenu à Kilian et Fred. Les deux uniques, les deux moitiés de cœurs comme les surnommaient leurs autres amis à l’époque. Puis s’était redevenu presque comme avant : Kilian et Fred sans Iris. Et si le prochain binôme était Iris et Fred ? Ce binôme ne risquait pas d’arriver, car ils ne s’appréciaient pas particulièrement, c’était Kilian qui liait les deux même s’il ne s’en rendait pas compte. Le jeune homme n’osait même pas l’imaginer, le jeune homme ne voulait pas perdre une nouvelle fois Fred. Pas maintenant, c’était beaucoup trop tôt, et il ne le supporterait pas. Fred demeurait la seule personne, qui, étrangement, arrivait à le calmer, ne le jugeait pas et semblait le comprendre aussi bien que lui-même, bien que cela ne soit pas très compliqué non plus. Kilian, avait l’impression, qu’en quelque sorte, Fred était tout ce qu’il rêvait avoir : le problème, c’est qu’il ne savait pas vraiment ce qu’il rêvait d’avoir. Le blond enviait pas mal de chose depuis son enfance. Il enviait ses personnes qui avaient la chance d’avoir une grande famille, des sœurs et frères pour partager de bon moment, des cousins à qui se confier et raconter des ragots, des oncles tantes qui donnaient des cadeaux et qui faisaient des réflexions, des grands parents qui radotaient en se rappelant l’époque d’antan ainsi que des parents qui montraient leur affection. Il enviait aussi ses personnes pour qui, tout allait bien. Ces personnes-là étaient dans les normes de la société, possédait donc un corps de rêves selon la société, à en affaiblir plus d’un, avec des amis, fidèles ou non, ils retrouveraient toujours, des amants, quelqu’un de présent pour les accompagnés dans leur vie. En gros, ses personnes pour qui tout souriait dans tous les domaines et qui évoluaient dans des situations confortables.

Kilian n’avait rien de tout cela. Il se trouvait petit, moche et incapable, de toute manière, on n’avait cessé de lui répéter cela durant toute sa vie jusqu’à maintenant. Sauf que c’était vraiment tard pour que cela ne laisse aucune séquelle irréversibles sur lui. Les séquelles demeuraient là, tapies en lui et sur lui. Oui, le pire c’était cela : il ne pourrait malheureusement jamais s’en débarrasser totalement même s’il arrivait à faire abstractions des souvenirs qui remontaient dans son esprit pour mieux le désarçonner pour mieux le surprendre, et donc, mieux le détruit. Il s’autodétruisait. Comment pouvait-il sortir du gouffre, si lui-même se savait une cause perdue, et en plus, s’aidait lui-même à se faire sombrer ? Kilian eut envie de se donner une baffe. Il était stupide ! Mais si stupide qu’il avait encore plus honte de lui-même qu’il l’était déjà. Il se plaignait de ne pas réussir à s’en sortir alors qu’il ne faisait aucun réel effort pour le permettre, mais il se retrouvait quand même là à penser, à débattre et réfléchir dans sa tête. Peut-être qu’il n’allait pas si mal… L’adolescent était terriblement perdu depuis toujours, sauf que ses derniers tant tout s’accentuait. Le fait qu’il soit perdu, le fait qu’il fasse de plus en plus de cauchemar, le fait qu’il avait peur de prendre des décisions importantes, et aussi tous ce qu’il éprouvait pour n’importe qui.

Qu’est-ce qu’il se trouvait ennuyant à mourir ! Comment Fred pouvait-il s’intéresser en lui ? Comment Fred pouvait être certain qu’il méritait d’être aidé et d’être heureux ? Comment Fred pouvait être convaincu qu’il n’était pas une cause perdue d’avance ? L’ancien rebelle paraissait si amicale et mystérieux à la fois, Kilian en était tout ébranlé, et il se retrouvait, après chaque une de leur discussion, totalement perturbé. Fred le perturbait et le chamboulait totalement. Kilian se leva du lit et sortit le pistolet dans ses mains. Il avait obtenu le droit au port d’arme sur lui dans n’importe quel moment malgré le fait que Fred essayait dans dissuader. Et, sans savoir pourquoi, avoir une arme auprès de lui, avec lui le rassurait et l’apaisait. Surtout dans un pays et entouré de gens étrangers. Le jeune homme était content que Cassandra ne lui ait pas demandé des renseignements sur le fait qu’il maniait l’arme comme un expert. Lui-même ne savait vraiment. Il avait une brève idée, mais c’était la première fois qu’il en utilisait une. Son ange gardien c’était énormément inquiété, mais il avait remarqué qu’il n’obtiendrait aucune information sur cela pour le moment. Fred n’était pas le seul à s’inquiéter. Après le petit test avec le pistolet, Kilian se savait tout le temps inquiet au sujet de Fred. Ce dernier manipulait très bien l’arme à feu lui aussi. L’ancien meilleur ami d’Iris se demandait pourquoi et comment Fred avait utilisé des armes. Il avait peur pour lui.

L’adolescent et regarda par la baie vitrée. La nuit commençait à tomber, le soleil filtrait déjà des filets de lumières orangés dans le ciel bleu-gris sans aucun nuage. Les dîners diplomatiques avaient pour habitude de commencer très tard en Siar. Cela ne le dérangeait pas, c’était juste une habitude à prendre. Malgré tout, tout était dépaysant, il n’avait pas beaucoup vu l’extérieur, mais cela semblait assez différent de l’Opartisk. De toute façon, chaque pays avait son essence. Kilian regarda longuement sa chambre. Elle était prestigieuse. Une chambre de palais comme une autre. Grand lit à baldaquins, grands armoires, tapisseries rouges, bais vitres donnant sur une large balcon, énorme salle de bain. Tout sans exception était en grande proportion. Sauf lui, pensa-t-il. Il n’avait pas fermé la porte à clé, Fred y pénétra sans un bruit. Il se faufila juste derrière Kilian, étant un peu plus grand que lui, il s’inclina très légèrement pour murmurer à l’oreille de son ami d’enfance :

— Qu’est-ce que tu comptais faire avec cette arme ?

— La poser sur la table de chevet la plus proche de moi, répondit Kilian d’un ton narquois avant d’appliquer ce qu’il venait de dire.

Cela lui faisait chaud au cœur de voir Fred si attentionné envers lui même si cela l’agaçait que ce denier puisse penser qu’il essayerait de se suicider à la moindre occasion. Justement, si Fred n’était revenu dans sa vie, il l’aurait peut-être fait, mais plus maintenant qu’il était là, avec lui, à s’occuper de lui comme s’il était la chose la plus précieuse qu’il n’avait jamais vu. Était-ce le cas ? Pour Fred, oui, Kilian en valait excessivement la peine. Kilian se retourna et observa le visage de Fred détail par détail. Ses cheveux châtain-blond mal coiffé formant des boucles qui lui semblait magnifique, le grain de beauté presque invisible en plein milieu de sa joue droite, ses lèvres toutes minces qu’il ne pouvait empêcher de fixer, ses yeux d’un brun si empathique et une cicatrice qui fendait son sourcil droit. Kilian se demanda si Fred avait d’autre blessure sur le corps mais qu’il cachait. Lui, il faisait cela, pour éviter les multiples questions de n’importe qui.

— Les deux conseillers veulent te voir. Ils estiment que tu dois laisser ton vœux aujourd’hui. C’est à ton tour maintenant, je crois qu’il ne restait plus que toi d’ailleurs. Sais-tu ce que tu voulais souhaiter ? On a une chance en or, rare sont les personnes en qui les conseillers laissent une faveur au choix, sans aucune limite en plus.

Oui, il savait ce qu’il allait décider depuis que Christian leur avait dis l’histoire de ce fameux vœu dans le bâtiment du désert. Cela l’avait considérablement aidé à faire son choix. Depuis le début, Kilian savait exactement quel vœu il allait formuler. Pourtant, il préférait mentir à Fred sur cela, il ne voulait vraiment pas s’étendre sur le sujet, absolument pas. Cela faisait sourire, la naïveté de son ami. Le jeune homme savait que les vœux étaient juste posés sur la table car il aidait l’État pour il ne savait pas quoi. Peut-être que le conseiller Bertrand et la conseillère Sophia allaient enfin lui révéler les vraies raisons de leur présence en Siar mise à part les accords entre les deux pays qui pouvaient devenir précieux avec le temps. Il ne fallait pas les sous-estimer.

— Non, je n’ai même pas encore une vague idée de mon vœu, broda Kilian les mains moites en priant intérieurement que Fred ne remarque pas son soudain coup de stress. Il n’a aucun doute, que je finirais par trouver le moment venu même s’il approche. De toute manière, je ne suis pas si certain que les conseillers arriveront à réaliser tous les vœux de nous tous. Ils prendront déjà celui d’Ethan en premier car son père est le conseiller Baptiste. Puis, peut-être que certain vœu qui les autres ont formulé sont infaisables. Je crois bien que Cassandra va devoir refaire le sien, elle m’a dite. Et toi ? Il va se réaliser sans embrouille le tien ?

— Je pense, en tout cas je l’espère. Il y a des rêves inaccessibles, mais j’ai donné un vœu, qui pour moi, est largement réalisable. Peut-être que je me trompe, mais je verrais bien. Si je vois que les effets voulus ne sont pas présents, j’irais harceler les conseillers jusqu’à ce que cela fonctionne. Il y a certaines choses, et certaines personnes qui compte beaucoup trop pour moi, et que je n’oublierais jamais.

Cela paraissait assez prétentieux, mais Kilian sentait sincèrement qu’il faisait parti de ses personnes que Fred venait de le décrire. Cela le peinait de devoir lui mentir, de ne rien lui avouer. Malheureusement, Kilian savait qu’il n’était pas prêt. Néanmoins, chaque soir, il essayait de sortir de sa bouche les phrases qui allaient lui servir à expliquer son état, en vain, car très peu se trouvait un chemin pour imprégner ses cordes vocales. Kilian lança un regard à la dérober à son arme alors qu’une question lui brûlait les lèvres maintenant qu’il y pensait. Il n’arriverait pas à la sortir de sa tête, il en était persuadé. De toute manière, rien ne lui coûtait de la poser. Il laissa son regard plonger dans les iris perçants de Fred qui, même s’il en avait l’habitude, restait tout de même déstabiliser comme à chaque fois.

— Depuis quand est-ce que tu as utilisé des armes ? Tu veux essayer de me faire croire que non, n’est-ce pas ? Si tu mens, je le saurais. C’est instinctif.

Il eut l’impression d’avoir été trop dur, alors qu’au contraire, sa voix avait été d’une douceur compatissante. Son ton n’avait même pas paru insistant, comme s’il avait réussi à contrôler ses nerfs et ses émotions. Il les avait juste oppressés au fond de lui pour paraître le plus aimable possible. Si Fred ne répondait pas, il ne lui en voudrait aucunement. L’ancien voyou soupira et s’assit sur le lit de Kilian, les mains serrées entre elle, la tête baissée. Kilian en eut mal au cœur. Finalement, il regrettait d’avoir posé la question.

— Tu n’es pas obligé de répondre, déclara-t-il d’une voix brisée.

Fred sourit en relevant la tête, il prit Kilian par la main pour le tirer vers lui et le lit, et plaça son autre main sur l’épaule pour le faire s’asseoir à ses côtés. Il ne le lâcha pas. Une vague de chaleur en continue et partout. Un sourire, un regard. Une connexion. Tout était intense.

— C’est dingue, même quand c’est moi qui dois avouer des trucs toujours pas faciles à retracer, c’est toi qui te mets dans un état pas possible.

— Je ne veux pas que cela soit pénible pour toi. Tu ne mérites et ne méritais pas de souffrir.

— Oui mais tu vois, maintenant tout roule, chou. Moi, je vais bien par rapport à toi, même si cela peut m’arriver quelques fois d’avoir des baisses de moral. Mais maintenant que tu me laisses le choix… Je t’ai déjà confié des choses vois-tu, mais toi, pas encore. Tu restes aussi muet et communicatif qu’une page vierge. Bon, peut-être pas totalement vierge, mais ce n’est pas l’écriture rouge pour souligner les trucs mégas importants et révélateurs.

— Je sais… j’aimerai. Je n’y arrive pas. C’est comme si que quoi que je fasse, ils trouveraient le moyen de me punir d’une manière ou d’une autre alors qu’il n’y a aucun risque. Absolument aucun. Je n’arrive tellement pas à m’ouvrir quand ce sont des choses qui sont restés secrètes pendant plus de seize ans. Mais si cela peut te rassurer, je sais que quand j’arriverai un jour à parler, si j’ai le déclic, c’est toi et rien que toi. Parce qu’une personne c’est déjà suffisant.

Fred lâcha une main pour la passée dans le dos du jeune homme comme pour exercer une petite pression l’amenant vers lui. Au passage, il avait volontaire effleuré la joue de Kilian. Pour la première fois, il remarqua que c’était volontaire et il en sourit. Tant de douceur pour lui, il risquait vite d’en redemander !

— Relax ! Je te laisse le temps Kilian. Faut pas commencer à te mettre dans des états pareils ! J’attendrais le temps qu’il faudra pour que tu te confies à moi. J’ai déjà toute ta confiance, c’est déjà pas mal. Je t’ai déjà confié des choses, de confier encore plus n’est rien de grave. Il y a, juste une chose que j’ai passé sous silence la première fois.

Kilian se tordit le cou pour scruter Fred, son visage essentiellement. Il ne laissait rien paraître pour le moment. Mais un pressentiment soufflait à Kilian, que cette fois-ci, il aurait encore plus d’émotion que la dernière fois. Il ruminait sa curiosité, cela menait à des choses trop profondes. La profondeur n’était pas toujours bonne, surtout vis-à-vis des souvenirs, des émotions et des sentiments. Kilian était aussi intrigué par la fameuse chose qui avait l’air importante, que Fred n’avait pas dis. Il ne l’avait pas dit pour se soulager, pour moins souffrir, pour ne pas paraître pommé au malheureux et blessé. Sauf que ce qu’il s’était ôté de dire était événements qui avaient vraiment fais basculer sa vie dans un tourment de péripéties aussi sombre les unes que les autres. Qui donnait aussi lieu de parler d’une nouvelle personne que Fred voulait oublier à tout prix : son père. Les relations avec ce dernier étaient loin d’être au beau fixe, Kilian en avait conscience. Tout l’immeuble savait que le père de Fred n’avait jamais été présent pour sa famille, et avait loin d’être un père et un mari exemplaire. A l’époque, son ami ne lui en parlait pas, mais Kilian n’était pas abruti, il le ressentait sans que Fred ait besoin d’en parler. Cette capacité ne s’était pas dissipée avec le temps.

— Ma mère est quasiment morte, avoua douloureusement Fred.

La première réaction de Kilian fut de tousser. Il avait avalé sa salive de travers. Comme un sentiment d’urgence, le jeune homme resserra encore plus sa main sur celle de Fred. Il prit la deuxième et s’agenouilla au bord du lit pour le regarder. Le regarder vraiment, regarder son visage, ses yeux.

— Explique-moi, rajouta Kilian.

Fred releva la tête et fit un sourire triste. Cela faisait si longtemps que quelqu’un ne s’était pas véritablement attaché à lui. La dernière personne devait sûrement être… Sa mère.

— Comme je te l’ai dit il y a quelques semaines, ma mère a fini en dépression parce que mon père nous a tellement négligé qu’il en est parti de l’immeuble et aussi de la ville accessoirement.

Kilian fronça les sourcils avant de compter les mois. Le jeune homme venait de réaliser qu’il n’avait plus aucun repère temporelle. Ils étaient restés presque deux mois dans les bâtiments, presque un mois dans les bâtiments sécurisés de l’État.

— Les grandes vacances commencent dès Mars. On est en Mai, Kilian. Le dix Mai. Iris a eu dix-sept il y a une semaine, et tu les auras dans deux mois. Cassandra aura dix-huit ans en décembre et…

— Tu auras dix-sept ans demain, murmura Kilian surpris.

C’était bon d’avoir retrouvé des repères dans l’année même si sans, Kilian ne se retrouvait pas particulièrement perdu. Il était déjà habitué à perdre des repères annuels. Cela lui était déjà arrivé plus jeune. Ce qui le surprenait surtout, c’était qu’il allait vivre son premier anniversaire sans Iris, et elle, l’avait déjà vécu. Ce qui le sidérait encore plus, c’était qu’il avait failli ne pas souhaiter son anniversaire, pourtant, c’était bien la première date qui lui venait à l’esprit après la sienne, ainsi que le douze Juillets, deux jours après son anniversaire. Celui de ses douze ans. Kilian se concentra parce que Fred recommença à éclairer les points d’ombres qu’il avait laissé intentionnellement dans l’obscurité.

— Il y a environ deux ans, elle était tombée en dépression suite à notre situation désastreuse. En vérité, ma mère était déjà dans une position compliquée depuis très longtemps. Elle s’était fait renvoyée car elle avait été estimée comme une employée femme qui n’était pas importante mais qui coûtait trop cher. Ma mère était la meilleure. Cela la meurtrie au fond d’elle, cela l’a touché au plus profond d’elle-même. Si elle n’avait pas été renvoyée, elle n’aurait pas perdu pied. Suite à cela, elle a dépéri. Au début je ne comprenais, parce qu’elle était forte donc qu’elle laisse tombé si facilement… La vérité c’était qu’elle était en dépression. Au début, quand j’ai entendu parlé de la maladie, je me suis dit que c’était peut-être le mal de ma mère, mais au final, non, c’était bel et bien une dépression.

— Je crois que seul les adolescents, les enfants et les nourrissons sont touchés.

— Je pense que cela prend juste plus de temps lorsque l’on est adulte, et cela dépend de l’organisme. Bref, je n’aime pas trop parler de ce sujet, il est trop d’actualité. Je préfère l’histoire, c’est super de se plonger dans le passé. Ma mère était donc malade psychologiquement, elle avait totalement renoncé bien que j’étais encore là. Mon père en profitant, jusqu’alors, je ne l’avais jamais vu céder et accepter lorsqu’il essayait de la battre. Mais à partir de ce moment-là, il détruisait ma mère à chaque instant, même si j’essayais de la protéger de mieux que je le pouvais. Des fois, je me prenais des coups à sa place, cela la soulageait, sur le moment j’étais content d’avoir pu la soulager. Mais cela n’était pas suffisant.

— Ce n’est pas ta faute si ton père est timbré. Ne te sens pas coupable.

Kilian avait l’impression qu’il était en train de sourire. C’était lui qui donnait ce conseil alors qu’il n’était même pas foutu de l’appliquer. Une blague parmi tant d’autre après tout. Cette fois-ci, Fred esquissa un sourire en passant d’un geste sec et rapide un doigt sur la joue de Kilian.

—Tu n’es tellement pas préparé à la violence de la vie. Tu es si innocent.

— Si tu savais à quel point c’est faux, souleva Kilian en souriant malgré.

Cela lui faisait tout de même plaisir d’entendre cela. Fred ne fit aucune remarque, mais il n’attendait que de savoir. Il s’étonnait lui-même à ne pas s’agacer de l’attente qui lui semblait tout de même interminable, vraiment beaucoup trop longue, pour, quelque chose, qu’il avait peur d’être juste anodin. Kilian était de nature très sensible. C’est Kilian donc c’est normal que je sois aussi patient, songeait-il en souriant intérieurement malgré les révélations qu’il s’apprêtait à lui faire. Le jeune homme se demandait aussi comment son ami manipulait aussi bien une arme, sauf qu’il avait bien observé qu’il n’en avait pas utilisé. Il avait semblé sincèrement surpris après le test de Past. Fred ne voulait pas perturber encore plus son copain.

— Tout vient de mon père malheureusement. Il n’était pas barjot. Ce que je veux dire, c’est que cela ne tournait pas rond dans son cerveau, mais il n’avait aucun problème psychiatrie. Il se bourrait la gueule, fumait et se droguait. Tous mes foutus problèmes venaient de lui, et il a pratiquement tué ma mère. Pas à proprement parler puisqu’elle a raté sa tentative, mais à force de la violer et de la tabasser, elle était devenue un légume qui ne se voyait plus d’avenir. Je ne voulais pas partir dans le désert, je crois que je l’ai enterré dans ma tête. Sans moi à ses côtés, il n’y a personne pour la surveiller.

— Pourquoi n’es-tu pas allé à la police ?

Et pourquoi lui ne l’avait-il pas fait ?

— C’est un manipulateur hors pair dans toute situation.

Exactement cela.

— Bon, avançons un peu avant que les conseillers viennent eux-mêmes te chercher, reprit Fred. Mon père, en plus d’être un drogué, était un dealer. Il faisait des affaires hors de la ville. Lorsque ma grand-mère est arrivée pour m’aider à surveiller ma mère, il s’est tiré avec tout l’argent qu’il possédait. Mais vois-tu, il peut être désespérément stupide quand il veut. Un peu plus tard, il est revenu. Nous nous sommes battues, et bien évidemment, il m’a totalement explosé.

— C’était le jour où tu avais un hématome à la joue, la lèvre fendue et un œil au beurre noir ?

— Je vois que cela t’a marqué. Oui, c’était ce jour-là. Il m’a donc expliqué sa situation : en plus de faire ses petits marchés avec de la drogue, il allait au casino et se trouvait totalement ruiner, en plus de cela il avait des dettes envers je ne sais quelle autre personne.

— Et que t’a-t-il demandé, exactement ? s’enquit Kilian.

— De l’aider à braquer une banque très riche dans une autre ville ainsi que de l’aider à tuer ses concurrents qui le menaçaient de morts. Lorsqu’ils m’ont vus, ils se demandaient à quoi jouait mon père, je pouvais comprendre leur ressentie. J’étais un gamin, je ne les préoccupais pas, ils ne se méfiaient pas de moi. Ils arrivaient même à être très sympa avec moi quelques fois.

— Quoi ! En plus tu as accepté ! s’exclama Kilian encore plus ébahit.

Il pensait que sous l’effet de la surprise il allait lui lâcher la main, sauf que se fut l’inverse : il la serra tellement fort que Fred comprima son envie de serrer les dents car sa main devenait totalement broyée. L’ex-meilleur ami d’Iris le remarqua quand même et délaissa totalement la main de Fred sans le lâcher du regard pour autant. Ils n’avaient aucunement besoin d’un lien physique entre eux, ils avaient cette connexion du regard.

— Disons que… Son offre était à une hauteur assez conséquente que je ne pouvais ignorer pour mon bien et celui de ma grand-mère. Ils me donneraient la plus grande partie du braquage pour vivre en paix sans que j’arrête les études pour longtemps, et ils sortiraient de ma vie sans que je ne le revoie plus jamais. Pour une rare fois, il a tenu sa parole et ça à fonctionner. J’ai pu continuer les cours en faisant vivre ma grand-mère, sans plus jamais le revoir dans ma vie. Les armes, je les ai utilisés lors du braquage et du règlement de compte entre droguer. Du calme ! Fais pas cette tête ! Je n’ai pas de sang sur les mains. Je devais juste m’occuper de les blesser, je n’ai tué personne et je ne tuerai personne. Si j’avais tué quelqu’un, je ne serais pas là. Je sais d’avance que je ne tiendrais pas le coup.

Kilian resta immobile, les paupières papillonnantes. Le jeune homme connaissait pratiquement tout le passé de son ami désormais. Fred ne savait rien du sien, mais il savait qu’un un moment où un autre, Kilian allait réussir à lui parler de ce qu’il avait vécu. Parce que le jeune homme ressentait un profond respect envers son ami. Fred avait enduré. Lui avait subit aussi. Le passé de son ami était horrible. Le blondinet pensait que le sien était tellement moins mauvais comparé à celui de l’ancien gangster. Il se trompait. Dire que des passés étaient comparables étaient déjà une profanation de soi-même et aussi d’autrui, mais en plus, ils avaient tous les deux vécu des événements marquants. Aucune vie, aucuns événements qui s’y trouvaient ainsi qu’aucunes relations n’étaient comparables. Tout était absolument unique lorsqu’une personne le vivait, car personne à la même personnalité, personne ne ressent exactement la même chose qu’une autre personne face à un événement. Toutes sensations étaient uniques. Tous étaient spécifiques à une personne, sauf que très peu de gens ne s’en rendaient compte, y comprit Kilian.

— C’est dingue ! Tu connais maintenant toute ma vie alors que je ne connais qu’une infime partie de la tienne.

— Non c’est faux, protesta doucement Kilian. Je n’étais pas avec toi lorsque tu étais avec les autres idiots qui se prenaient pour des terreurs que tout le monde redoutait… Même si pour certaine personne c’était le cas.

— Bon, ce n’est pas que je n’aime pas les discussions avec toi, loin de là, mais, il se trouve que tu dois faire attendre les conseillers depuis un petit long moment. Tu ferais mieux de te dépêcher sinon ils seraient capables de venir eu-même te chercher ou d’envoyer un de leur garde personnel.

Hélas, Fred avait raison. Kilian ne pouvait pas rester avec lui pour le moment. Les conseillers le demandaient, et il ne fallait pas irriter les conseillers, ni les décevoir. Ils comptaient vraiment sûre eux pour accomplir leur mission… Sauf qu’ils devaient savoir en quoi elle constituait. Pour le moment ils ne savaient pas encore ce qu’était leur mission, mais en plus de son vœu déjà choisi, Kilian comptait bien gratter quelques informations sur. Ce n’était pas le plus diplomate, ni le plus bavard par excellence. Cependant il pouvait se montrer persuasif avec des arguments solides à force d’observer son entourage. Cela pouvait donc bien servir de ne pas être très causant, à la limite du muet, mais de cacher son jeu sous une façade impassible.

Kilian adressa un clin d’œil à Fred avant d’ouvrir la porte. Charles faillit se la prendre en pleine tête s’il n’avait pas eu la chance d’être quelqu’un d’assez réactif. Ses cheveux bruns bouclés qu’il ne prenait plus la peine de coiffer retombèrent sur son front après qu’il est effectué un bond le projetant contre le mur d’en face, fermant par la même occasion une porte entre-ouverte avec son bras ouvert.

— Kilian ! Tu peux pas faire gaffe ? Tu as failli m’encastrer dans ta porte, ou dans le mur, ça reste à voir ! Tu as de la chance que le conseiller Bertrand et la conseillère Sophia ont trouvé un passe-temps qu’ils disent « très divertissant » à la place de transmettre quelques petites phrases en te faisant un peu la morale.

— Que font-ils pour m’attendre ?

— Un jeu bizarre qui mélange la bataille, le jeu de carte mais aussi le morpion. Étrange, je sais. Tu ne te dépêches pas ?

— Non. Ils jouent aux cartes. Je vais prendre le temps de faire un détour pour qu’ils aient le temps de finir. Je suis certain que cette attention leur fera plaisir, déclara Kilian avec une expression désinvolte sur le visage.

— Il ne faut pas trop défier les conseillers…

— Ils ont bientôt fini leur parti je crois.

— Alors c’est parfait ! Je vais faire un détour moins long, mais avec un peu de chance, ils auront terminé. À tout à l’heure les gars !

Fred lança un regard compatissant à Charles qui semblait exaspéré par son ami, qui, à certains moments, s’efforçaient à rester rebelle, gardant en lui son âme d’enfant qui ne faisait pas partie du clan des riches. C’est trace de leur identité restait en eux bien évidemment, mais à quelques moments, Kilian la laissait ressortir. Peut-être parce qu’il avait l’impression que pour une fois, il pouvait décider de lui-même sans restriction importante. Les conseillers restaient tout de même assez compatissants même s’ils ne connaissaient pas leur vie, ils savaient que cela n’avait pas été tous roses pour, en plus de cela, ils mettaient cela sous la cause de la crise de l’adolescence. C’était possible pour Kilian, il n’avait jamais eu l’occasion de la faire avant d’être interné dans les bâtiments. Charles rejoignit Fred dans la chambre de Kilian pour essayer de lui expliquer le jeu étrange des anciens.

Kilian parcourait les immenses couloirs du palais du roi de Siar. Ils étaient si larges et longs que cela semblait être des rues dans une ville, le palais en lui-même semblait déjà être une ville dans une bâtisse. Sauf que ses rues se ressemblaient toutes : portes à toutes les cinq mètres (quelques fois, exceptionnellement dix, voir, encore plus rare, vingt), ses portes blanches aux poignets d’ors avec un lion doré au plein milieu, les murs recouverts de tapisseries rouges parsemées de colombes de toutes formes qui se répétaient sous le cycle refermé, relevage de la tête, déploiement des ailes puis l’envol et le sol qui était une interminable moquette aux plusieurs nuances bleues de la plus foncée à la plus claire qui formaient des losanges dans des losanges comme sous le système des matriochkas. Seuls les salles ne se ressemblaient pas. Le palais qui était surnommé la ville noyau surplombait la capitale de la Siar. C’était juste un emplacement géographique selon le palais, si un palais plus prestigieux que celui-ci se faisait construire, la ville de ce dernier serait emménagée par le roi et dictateur Jean-François II. L’adolescent n’avait pas encore visité tous les endroits du grand palais, il doutait de réussir tout visite un jour. Il n’aurait sûrement pas d’autre opportunité pour revenir dans ce palais grandiose. Toutes les couleurs étaient similaires. Ils se ressemblaient à tous à en être déconcertant. Pas pour Kilian.

Il ne se trompa pas de salle, et il toqua. Lorsqu’au bout d’un moment d’attente, personne ne lui ordonnait d’entrer, ou vain l’ouvrir, il ouvrit la porte. Ce n’était pas la salle la plus grande du palais, mais elle lui semblait horrible dans cet environnement très beau et emplit de richesse. Les murs de ses salles étaient en fait des miroirs, la face intérieur de la porte aussi. Kilian n’aimait pas les miroirs, il préférait les briser en mille morceaux plutôt que de voir son reflet. Sauf que là, il ne pouvait pas, s’était un inviter. Il était donc obligé de se confronter s’il regardait le mur. Il ne le fit donc pas, il fixa le sol, mais leva le regard fais les deux conseillers, qui étaient absolument pris dans la tourmente de leur jeu. Comme si plus rien n’apportait à par leur jeu et rien d’autre. Et après cela ce disait représentant d’un pays… Kilian se racla la gorge pour signaler sa présence. Un petit sourire satisfait s’illusionna sur son visage lorsque les deux vieux gens tressaillirent. Ils n’étaient finalement pas si prêts que cela à l’attendre. Lui, il était prêt à parler d’un pied ferme.

— Me voilà, s’annonça-t-il simplement en attendant qu’ils lui disent de s’asseoir.

— J’ai gagné la partie, conclue la conseillère Sophia en rassemblant les cartes.

Le conseiller Bertrand grogna de désapprobation. Le plus vieux conseiller était âgé de soixante-et-onze, néanmoins, il avait une santé de fer et ne semblait pas mal au point. Il avait des cheveux blanc-gris en petite quantité, qui permettait devoir quelques morceaux de son crâne par intermittence, dont un gros grain de beauté à l’avant du crâne. Il était d’une blancheur et d’une minceur déconcertant, presque squelettique et seuls les rides de son front se voyait alors que celle de ses joues étaient cachées par une barbe grise au reflet argenté, coiffées avec sois et précautions qui lui arrivaient presque à la poitrine. À l’égard de Kilian, même si son apparence demeurait irréfutablement soignée, Bertrand n’avait vraiment pas la carrure d’un représentant politique d’un pays. De toute manière, il n’effectuait plus de représentation publique dans son pays. Néanmoins, Kilian n’en avait pas honte pour l’Opartisk. La conseillère affichait une mimique lasse, la dame, d’un an plus jeune que l’aîné avait eu de nombreux problèmes de santés durant sa vie, ce qui ne l’empêchait pas de garder son poste. Elle y tenait à sa position de conseillère. Elle avait des cheveux noirs raides et coupés très court, dans lesquels des mèches blanches se faisaient intrus. La conseillère paraissait plus vieille et fatiguée que son collègue, pourtant, elle rejoignait les autres lors de leur apparition publique. Kilian commençait à être ennuyé de la situation. Ces conseillers-là étaient relativement lents, et il n’aimait pas la lenteur, il la haïssait. Il croisa son propre regard dans une glace et tressaillit. C’était donc comme cela qu’il était ? Un blond de taille moyenne, de corpulence légèrement mince au regard aussi vague et sombre que cela ? Au moins, ses amis n’avaient pas peur de lui, c’était déjà cela de gagner. Comment les deux conseillers faisaient-ils pour ne pas se trouver ennuyant ? Ils avaient juste l’habitude de traîner ensemble.

— Assieds-toi, petit ! Ne reste donc pas debout, tu es assez grand comme cela, commenta Bertrand, posant son regard ver clair sur lui.

Kilian n’était pas spécialement grand. Liam et Fred étaient plus grands que lui. Mais les deux vieux conseillers étaient remarquablement petits. Ils faisaient la taille d’Iris, la dernière fois que Kilian l’avait vu. Et son ex-amie n’était pas la fille la plus grande de la terre, loin de là, tout le monde la dépassait d’au moins une tête. Oui, les deux conseillers les plus vieux faisaient la taille d’adolescent petit de base presque. Ils le vivaient plutôt bien. Le jeune homme tira la sorte de chaise-fauteuil blanc parsemé de petites étoiles dorés et de colombes rouges. Pourquoi ses couleurs et les colombes se retrouvaient partout dans ce palais ? Il y avait forcément une explication ! Et elle devait sûrement être politique et historique. Sauf que Kilian n'avait pas envie de causer beaucoup, il aimait être muet face au adulte quelques fois, surtout que les deux seniors n’avaient pas l’air offenser pas son retard qui les avaient obligés à trouver une occupation le temps de sa venue. La dame rangeait les cartes avant de relever la tête, elle venait de réaliser que c’était elle que les deux hommes attendaient. Elle fit un sourire laissant apercevoir un écart entre ses deux dents supérieurs. Kilian relevait les yeux, sa mère aussi avait les dents du bonheur, il s’estimait heureux de ne pas avoir hérité de cela. Il ne voulait pas ressembler à ses parents. Il avait réussi ce qui lui semblait être un exploit. Il est bien loin de ressembler à eux.

— Tu m’as l’air tendu, mon garçon. Ne t’inquiète pas, j’avoue que ton retard nous a permis de jouer à un jeu que nous aimions beaucoup. Je ne pensais plus, qu’avec tout ce travail à charge, nous allions y rejouer un jour. Tu es tout pardonné, petit. Tu me fais penser à mon petit-fils. Il ne parle jamais, paraît toujours sombrement dans ses pensés qui n’ont l’air guère joyeuses mais reste à l’écoute. Tu guettes tout autour de toi. C’est bon de t’avoir, car nous ne sommes pas assez observateur, tes amis aussi, mais toi tu l’es et c’est essentiel pour nous comme pour toi. Le futur te le prouvera si tu dois te sortir de situation compliquée.

Kilian lorgna la tablette qu’elle venait de sortir de son tiroir. Elle bougonna car elle n’arrivait pas à faire ce qu’elle voulait. Kilian ne put s’empêcher de s’en amuser même s’il proposa son aide très vite. Mais la conseillère refusa, voulant réussir de son propre chef. L’adolescent ne la contredit pas, mais il savait d’avance qu’elle ne parviendrait pas à faire ce qu’elle cherchait à accomplir. Cette dame aurait pu être l’incarnation parfaite de sa grand-mère s’il en avait une. Pour le moment, il ne s’en connaissait pas. Il ne savait pas s’il en était chagriné ou si peu importait pour lui, au fond, cela lui faisait un pincement au cœur d’imaginer qu’il aurait pu faire des gâteau avec sa grand-mère plus jeune, ou l’aider dans les tâches quotidiennes lorsqu’il allait mal. Quelques minutes plus tard, la conseillère Sophia n’avait toujours par réussi, son collègue, se mit lui aussi à chercher le fonctionnement de l’appareil électronique. Kilian lâcha un soupire pour tenter de faire rappeler sa présence. Il se retrouvait assez ennuyé de devoir passer autant de temps avec des adultes, qui plus ait, à ne rien faire pour le moment. Il fit craquer ses phalanges et agacé, arracha des mains la tablette et releva le regarda en même temps que ses sourcils.

— Vous voulez faire quoi avec cette tablette ? questionna-t-il d’une intonation doucereuse.

— Victoria est ta conseillère tutrice, murmura la vieille conseillère d’une voix dépitée.

La dame avait prononcé cela comme si c’était impossible de réaliser ce qu’elle souhaitait. Réellement, c’était juste qu’elle n’était pas très dégourdie. Bertrand non plus d’ailleurs. Kilian ne savait pas s’il en était amusé ou exaspéré. Le jeune homme prit moins de trente secondes pour appeler la conseillère Victoria, et posa la tablette sur le support pour l’objet, juste en face de lui car la femme devait le voir. L’adolescent se renfonça dans sa chaise. Que cela se finisse enfin ! Il détestait se retrouver avec des adultes, seul. Même s’ils pouvaient paraître gentils. Quelques fois, cela pouvait être un masque, Kilian avait déjà remarque cet effet d’illusion qui consistait à duper le monde extérieur. Une blonde aux yeux verts apparut sur l’écran le sourire aux lèvres, sauf qu’il ne réussit pas à tromper l’adolescent. Ce sourire sonnait trop faux, trop crispé, trop tout. Kilian aimait beaucoup sa conseillère tutrice, cela le chagrinait qu’elle puisse aller mal ou qu’elle ait d’autre problème hors de ceux de conseiller.

— Mon cher Kilian ! J’aurais une proposition à te faire en fin de conversation. Puisque c’est un détail pour le futur, réglons déjà les quelques autres affaires que nous avons à régler avant de t’annoncer ses quelques nouvelles que moi, j’ai à t’annoncer.

Kilian devait avouer, que cela piquait beaucoup sa curiosité. Il allait devoir réussir à trouver le bon moment pour poser ses questions sur la mission qu’ils devaient accomplirent entre son vœu et les petites annonces de Victoria. Ce qu’avait dis la conseillère intriguait Kilian. Quelles annonces pouvait-elle bien déclarer ? Qui plus est, qu’elle s’était directement adressée à lui, cela voulait dire que cela le concernait. Qu’avait-il pu bien faire de grave ? Ou alors les arguments de Fred fonctionnait, et il allait se voir retirer son arme, qui, pourtant, lui donnait l’impression d’être constamment en sécurité lorsqu’elle était avec lui.

— Bien, bougonna le conseiller Bertrand qui ne semblait plus trop d’humeur, sûrement sa défaite vue le sourire provocateur de sa collègue présente en chaire et en os en Siar. Expédition, nous attendons donc votre vœu suite à l’accord que nous avons passé. Nous ne voulons plus perdre de temps, si votre vœu n’est pas réalisable, vous devrez en retrouver un autre pour la prochaine fois.

Kilian n’aimait pas le ton utilisé par le conseiller. Il avait été assez sec. Bertrand ne semblait plus du tout d’humeur. Le jeune homme, qui demeurait très observateur avait bien remarqué qu’il y avait des affinités plus proches que d’autres. Bertrand et Victoria ne s’appréciaient à guère, mais cela venait plus du vieillard, qui lui, s’entendait bien avec Sophia et Baptiste. Victoria s’entendait assez bien avec tout le monde mais était particulière amie avec Camille, la plus jeune du lot. Cette dernière ne supportait pas Christian qui se retrouvait être le meilleur ami de Baptiste. Les relations entre les conseillers pouvaient être parfois compliqués en conséquent de leur avis divergeant et tranchant qui régissait tout un pays qui devenait une puissance militaire hors-paire. Kilian humidifia ses lèvres, la gorge soudainement assécher. Il n’avait qu’un seul vœu en tête, et il n’était pas certain qu’il puisse se réalisait. Malheureusement, c’était la seule chose qui comptait vraiment pour lui, aider les pauvres n’était rien à côté de ce que son vœu représentait pour lui. Ce vœu c’était une part de lui, une envie de son corps, un morceau de son esprit, un fragment de son âme.

— Je… Je ne suis pas certain qu’il soit réalisable, balbutia le jeune homme en baissant le regard.

— Sauf que cela a l’air d’être très important pour toi, constata la conseillère Sophia.

— Dis-nous, gamin. Si tu ne sors pas cela de ta bouche, tu ne sauras pas s’il est exécutable, grommela le vieillard.

— J’aimerai… Que quelques choses soient mises en place pour que les gens victimes de problèmes psychiatrique soient repérés plus tôt et interné, divulgua Kilian d’une traite sans s’arrêter pour reprendre son souffle.

La mâchoire de Sophia se décrocha alors qu’à côté d’elle, le vieux bougon le fixa les yeux écarquillés et le teint aussi rouge que des tulipes. Victoria, elle, affichait une expression extrêmement sérieuse. Le jeune homme sentit son visage tout entier, des racines des cheveux jusqu’au menton, le brûlé si ardemment qu’il eut envie de trouver une bassine d’eau pour plonger la tête. La vieille conseillère s’apprêtait à formuler une phrase mais la plus jeune la devança sans s’en apercevoir vu qu’elle ne pouvait pas la regarder.

— Je te fais le serment de faire tout mon possible pour le réaliser, déclama-t-elle d’un sérieux si déstabilisant.

— Mais… Victoria, comment vas-tu t’y prendre ?

— Je ne sais pas encore, mais j’y parviendrais, répliqua-t-elle avec conviction.

Le cœur de Kilian se réchauffa. À partir de ce moment-là, il considéra Victoria comme sa mère, la vraie. La femme lui avait déjà dit qu’elle le prenait sous son aile, qu’il devenait comme son fils, et qu’elle serait là pour argumenter sa défense en cas de problème ou s’il sentait de se confier à quelqu’un. Elle lui tendait les bras, mais Kilian ressentait toujours cette peur de l’abandon, il avait peur de les saisir. Ce n’était même pas contre elle.

— Merci, souffla-t-il en souriant.

Elle hocha la tête, affichant, plus que jamais, un sérieux fortement inquiétant. Kilian savait que son amie allait annoncer ce qu’elle voulait dire, mais il voulait obligatoirement connaître les enjeux de sa mission et ce qu’il allait devoir réaliser. Il devait l’intercaler à ce moment-là, et non après.

— Je voulais savoir, en quoi consistait la mission.

— Ce n’est pas le moment, le rembarra Bertrand.

Le vieux conseiller n’était décidément plus d’humeur, mais il commençait à agacer, pas seulement Kilian, qui gardait son sang froid, habitué à des humeurs et des paroles déplaisantes, mais sa collègue lui jetait des regards aussi glaciaux que l’endroit le plus froid de l’univers, mais il l’ignorait et ne lui accordait aucun regard. Victoria ne faisait aucune remontrance, mais Kilian voyait dans ses yeux qu’elle en mourait irrémédiablement d’envie et qu’elle se faisait violence pour ne pas les sortir et défendre son poulain. L’adolescent en était tellement ému, jamais un adulte l’encourageait autant d’aller de l’avant. Entre elle et Fred, il devait vraiment montrer qu’il pouvait aller mieux. Kilian osait espérer que cela soit possible. Il n’en était pas certain, mais de savoir que deux personnes le soutenaient et ne voulaient que sa protection et son bien, l’aidait énormément à se sentir mieux moralement. Finalement, il commençait peut-être à aller un peu mieux. La Siar ne semblait pas être un pays chouette et lumineux, il lui réussissait sans conteste.

— Pourquoi on te parlerait de la mission ? enchaîna l’homme.

— J’aimerais bien m’y préparer un peu psychologiquement, et j’estime, que l’on a le droit de savoir en quoi et dans quel but consiste cette mission. Nous en sommes tout de même les principales protagonistes. Je ne vois pas pourquoi nous ne le savons pas déjà.

— Tu as raison mon garçon, dit Sophia en laissant apparaître ses dents blanches. Tu es observateur, et tu manipules très bien les arguments, je te nommerais bien ambassadeur, tu sauras te méfier des autres dirigeants et percer ce qu’il cache. Je soumettrai cela à l’ensemble des conseillers. Je suis certaine qu’ils seront d’accord. Bienvenue dans le monde de la politique mon cher ami !

— Et la mission ? insista Kilian qui ne lâcherait pas son deuxième objectif.

— Tu ne perds pas le nord ! J’aime cela, tu seras un parfait ambassadeur, se félicita-t-elle en claquant rapidement des mains brièvement. En faites, un autre jour, il ne restera plus que toi et Fred puisque les trois autres partent après le dîner, de ce soir. Nous allons visiter un laboratoire de recherche contre la maladie. D’après nos informateurs de qualités et fiables, ils gardent leur information précieuse, dans un coffre dans une pièce difficile d’accès dans le sous-sol. Vous allez devoir la récupérer pour connaître ce que nous n’arrivons pas à saisir.

L’ex meilleur-ami d’Iris prit le temps de digérer, de traiter et d’analyser : en gros ils partaient en mission risquée, et vue les lois qui dictaient la Siar, s’ils se faisaient prendre, ils étaient morts. Kilian ressentit un profond malaise, cela aurait été Victoria et Camille avec eux, il aurait été rassuré sur son sort, mais Bertrand et Sophia, non. Il restait hostile par rapport à eux. Kilian n’était pas encore au bout de ses surprises.

— Je… Kilian, je voudrais bien que tu continues à garder mon nom de famille, commença Victoria.

— J’en serais ravie ! s’écria Kilian.

— Je vais devoir envoyer une lettre à tes parents, même si leur autorisation n’apporte peu puisque c’est ma décision.

— Tant qu’ils ne rentrent pas en contact avec moi, c’est tout ce qu’il compte.

Son visage redevient aussi sombre qu’avant même si le jeune homme était content. Il ne s’appellerait plus jamais Kilian Mallow! Qu’il était heureux que Victoria lui fasse cette demande. Il se demandait pourquoi elle le voulait, mais finalement il s’en fichait un peu, il n’était plus un Mallow ! Il se sentait tellement fier.

— En plus de cela, si le souhait de Sophia se réalise, tu seras conseiller-ambassadeur. Tu es déjà nommé conseiller depuis quelques heures. Je tenais à te l’annoncer de moi-même.

L’adolescent ne put cacher sa surprise. Lui, conseiller ? Venant de son amie, il aurait plus croire qu’elle blaguait, mais elle s’affichait beaucoup trop sérieuse pour que cela soit une blague, par ailleurs, les deux autres avaient été mis au courant puisqu’ils ne semblaient guère étonnés par cette annonce, qui, lui, le prenait totalement de court. Il était trop jeune… Certes, il n’était pas seul, mais il n’était pas encore majeur, il n’était pas encore adulte. Pourtant Kilian réalisait peu à peu que ce n’était pas une blague. Mais diable qu’est-ce qui avait piqué les conseillers ? Kilian venait d’être nommé conseiller et peut-être même ambassadeur en plus !

— Comment ? Pourquoi ? Pourquoi moi ? Je ne serais jamais à la hauteur, vous êtes fous !

Le conseiller Bertrand semblait être du même avis au jeune homme pour une rare fois, mais s’abstint. Ses collègues ne reviendraient pas en arrière, et il le savait.

— Tu seras à la hauteur même si au début tu te feras sûrement timide. Tu seras un sang neuf qui pourra éclaire avec de nouvelle idée peut-être meilleur que les nôtres. Aie confiance en toi un peu ! Tu devrais l’être. Nous t’avons choisi en lisant ton questionnaire. Tu te souviens ? Dès que vous avez débarqué on vous avait fais faire un questionnaire à l’écrit. C’était aussi une manière de savoir si vous étiez fais pour un poste par rapport à l’État. Et Kilian, tes résultats aux questionnaires pour devenir conseiller son irréfutable, et dès que j’ai causé avec toi j’ai tous de suite sentie que tu aurais le potentiel pour prendre la relève et permettre à l’Opartisk de devenir plus forte que jamais. Tu y arriveras avec tes collègues. Je crois en toi. Je ne suis pas la seule.

Fred croyait aussi en lui. Kilian essayait de se remémorer les questions de ce fameux test, mais il n’arriva pas à s’en rappeler. Il n’avait jamais eu une mémoire très bonne si les événements ne le marquaient pas considérablement. Il se demandait ce qu’il avait peut mettre dans ce test et pourquoi rien qu’en parlant avec lui, il leur semblait digne d’un bon conseille que tout le monde adorerait. Comment les autres allaient réagir quand il allait dire cela ? Et les dirigeants alliés ? Le roi de Siar ? Le peuple d’Opartisk ? Les manifestations redoubleraient-elles encore plus ? Des manifestations contre lui ? Il appréhendait beaucoup. Il n’avait même pas son mot à dire.

— Mais… pourquoi ? Je remplace quelqu’un ?

— Tu ne remplaces pas, tu prends la place tout court, fit Victoria avec un sourire navré. J’ai eu le droit de choisir mon successeur. Je t’ai choisi toi. Tu prendras ma place. Je ne peux plus assurer mes fonctions.

— Mais pourquoi ! s’exclama Kilian abasourdie, les larmes aux yeux.

Qu’avait-elle pour qu’elle puisse arrêter définitivement ses fonctions ? Pourquoi elle…

— Mon garçon, ne t’inquiète pas. Ce n’est pas si grave que ce que tu peux penser, le rassura Victoria mais il vit dans son regard que ce n’était pas totalement vrai. Mes enfants sont malades, je les ai fais rapatrier à la maison pour profiter d’eux au maximum et qu’ils ne finissent pas leur vie enfermée.

— La maladie ?

— Oui, la maladie. Puis moi… Pendant des années où j’étais au service de l’État, j’ai eu quelques dysfonctionnements des protections humanitaires, notamment les globules blancs. Cela me fatiguait plus mais je résistais. Mais maintenant que j’ai une tumeur à l’estomac, c’est vraiment compliqué de supporter le rythme de vie.

— Si tu te désistes, tu ne pourras plus jamais être conseillère, souffla Bertrand accablé tout comme Sophia.

Kilian avait envie de fondre en larme. Il ne supporterait pas que son soutient meurt. Elle avait essayé d’engager la discussion, de le mettre en confiance, de lui assurer qu’il irait mieux. Il ne pouvait pas l’abandonner. Néanmoins il sentit de l’eau au bout de son menton. Je suis tellement faible, se disait-il dans sa tête. Il ferma les poings alors qu’il sentait ses doigts tremblés et souffla.

— Kilian, appela la conseillère que l’on voyait à l’écran. Tout ira bien, (il releva la tête) je te le promets. Tu feras un superbe conseiller, et je finirais bien par guérir. Je ne suis plus conseillère, mais je peux toujours revenir dans nos bâtiments, si tu as besoin d’aide, appelle-moi. Si tu n’es pas sûr de faire le bon choix, il y a ton téléphone pour m’appeler. Tu pourras passer à la maison. Je serais quand même là pour t’épauler dans ta nouvelle fonction. Et je réaliserai ton vœu même si je ne suis désormais plus conseillère. Les anciens conseillers ont tout de même quelques pouvoirs.

— Quand est-ce que je commence ? s’inquiéta Kilian en pâlissant.

Le jeune homme savait que cette décision était maintenant irrévocable. Même s’il restait hébété par cette nouvelle et qu’en son for intérieur, il aurait bien envie de refuser, il n’avait pas le choix. Il avait été choisi, et un conseiller était obligé de l’être au minimum cinq ans avec de se désister. Pendant cinq ans, Kilian allait devoir endosser le rôle de conseiller, alors qu’il n’était même pas majeur, il n’avait même pas encore ses dix-sept ans. En plus de cela, si les autres conseillers le jugeaient apte et fait pour ce métier, ils objecteraient son retrait. Il ressentait déjà l’appréhension et la peur lui faire une boule dans le ventre et un nœud dans la gorge rien que de penser qu’il déciderait pour tout un pays et que son opinion ait vraiment une influence et une existence concrète. Pourquoi lui ? L’adolescent cherchait dans sa tête en essayant de se souvenir de ses réponses aux questions, mais il n’y arriva pas. Il n’aurait pas dû répondre sincèrement… Désormais, il ferait, sois partie des personnalités les plus appréciés d’Opartisk (car certain conseiller comme Camille et Victoria gardaient une bonne image), soit il serait détesté par tout le pays. Le blond ne savait pas ce qui allait pouvoir jouer en sa faveur et en sa défaveur, mais très peu de personnalité mitigeaient les sentiments du peuple puisque ce dernier était presque souvent sur la même longueur d’onde, les pauvres étaient numériquement supérieurs aux riches. Sauf qu’il ne venait pas des riches bourgeois et aristocrates du nord d’Opartisk et il se trouvait qu’il n’était même pas majeur, et donc logiquement, même pas prédestiner à avoir la moindre chance d’être choisi. Kilian serra les lèvres doucement. Il pensait savoir dans quelle fraction il faisait partie.

— Techniquement aujourd’hui, claironna la conseillère Victoria laissant le sang de Kilian se glacer dans ses veines. Du calme ! Tu es désormais conseiller, mais comme nous n’avons fait aucune annonce officielle, tu n’as pas à prendre tes responsabilités tout de suite. Le roi de Siar n’en sera rien pour le moment, il te considéra toujours comme mon fils qui me remplace car j’ai déjà beaucoup à faire. Mon garçon, cela t’effraie et je comprends tout à fait, mais je t’assure que tout va bien se passer.

— Mais tout se passe mal dans le monde, lâcha Kilian d’une voix si fragile et sincère qu’ils parurent déboussolés.

— Justificatif du vœu ? reprit Bertrand d’une voix sèche.

— Je prends mon délai de trente jours.

Pourtant, même avec ce délai, il ne savait pas s’il allait avoir le courage d’en parler. Peut-être que cela pouvait être possible s’il arrivait à obtenir un appel qu’avec Victoria, ou alors de se retrouver en tête à tête Sophia. Pas Bertrand. Kilian trouvait le vieillard beaucoup trop antipathique et railleur pour cela. Il était loin de l’apprécier et c’était tout aussi réciproque du côté du vieux conseillers. Le blond ne savait même pas pourquoi ils se détestaient mutuellement. Pour la communication entre conseiller, pour prendre les décisions, cela allait être encore plus compliqué que d’arrêter la guerre. Il fallait qu’il s’entende bien avec les autres, mais s’ils l’avaient choisi, c’était déjà qu’il ne le détestait pas forcément même s’il ne l’aimait pas non plus, puis Camille était son alliée. Il frissonna sans savoir pourquoi en sachant que tous les regards étaient fixés sur lui, mais il ne les soutenait pas, il venait de baisser les yeux, trouvant, soudainement intéressant d’examiner ses baskets, les trois traits blanches épaisses de trois côtés sur un bleu entre le bleu ciel et normal. Ses traits étaient elles-mêmes ornés de traits noirs sur la largeur, alternant donc bout de largeur blanche et partie de largeur noir. Les lacets changeaient aussi les deux couleurs à largeur égales.

— Ne peux-tu pas cesser d’être différent ? gronda le conseiller Bertrand.

Kilian referma ses poings en silence. C’était exactement le genre de remarque désobligent et cassant que son père pouvait sortir à n’importe qui, mais plus particulièrement à lui. Il ne voulait absolument pas de deuxième père qui le suivrait partout ici et avec qui il devrait finir par collaborer pour le bien d’un pays. Le jeune homme soupira, se sentant obliger de réagir, mais il n’y avait que dans le domaine de l’insolence qu’il arrivait à exprimer ce qu’il voulait faire savoir alors que les deux femmes le fixaient pour recevoir une quelconque justification pour le délai. Il n’en donnerait pas car cela résumait à ne pas en faire du tout. Des fois, l’adolescent se sentit espérer à devenir muet. Sauf que ce n’était pas une solution, et au début, les adultes avaient bien dû le prendre pour un muet dépressif, à ne pas parler, à ne regarder personne. Kilian se retrouvait donc en profond désaccord avec Bertrand. Il ne se trouvait pas différent des autres puisque tous le monde demeurait différent car il était eux-mêmes. Kilian se différenciait sûrement avec ses choix, mais c’était les siens, et personne ne les orientait, il les prenait tout seul comme un grand en prenant compte des détails importants qui l’entouraient sur le moment. Il devait peut-être songer réfléchir aux conséquences aussi, mais Kilian était mauvais pour prédire les choses, ce n’était pas simple. Il se leva et tapa les poings contre la table en essayant de ne pas perdre le contrôle. Sa colère ne remporterait pas totalement sur lui.

— Vous savez quoi ? riposta-t-il à l’adresse de Bertrand qui avait les yeux grands écarquillés par cet excès de colère et de rébellion que Kilian n’avait jamais fais preuve auparavant. Allez vous faire foutre, cracha-t-il les dents serrées. Je ne vois même pas pourquoi le terme de différent est énoncé dans la société alors que nous ne sommes tous pas pareille. Vous êtes stupide ! Allez vous faire soigner, vous savez autant que je viens de le comprendre que quelques choses ne tournent pas rond dans votre cerveau. Arrêtez de manipuler les gens qui vous entoure et soyez honnête avec eux et aussi avec vous-même. Prenez votre retraite que la plupart des gens penseront que soit c’est un bon débarras, ou alors qu’elle est bien méritée car vous avez loyalement servir le pays pendant des années. Cette dernière est assez fausse, d’autres rendent service beaucoup mieux que vous. Bref, vous devriez songer à prendre retraite ou congé. Et oui, je prendrais le délai de trente jours pour réussir ou réfléchir à vous donner mes arguments pour mon vœu, quoique ça n’a pas trop d’importance, puisqu’il ne me suffirait que de dire un truc faux pour justifier comme l’a fait Charles. Et non, je ne vous expliquerais pas pourquoi je le prends. Sur ceux, à tout à l’heure !

Il partit d’un pas furibond et claqua la porte derrière lui, décrochant un petit miroir tout en haut qui était accroché à un petit clou métallique que l’on ne distinguait à peine. Le miroir se brisa en mille morceaux, juste à côté de la conseillère Sophia qui enfouit son visage entre ses mains. Victoria se mordit la lèvre, n’osant pas trop parler, son amie prit l’initiative d’elle-même de tourner la tablette pour qu’ils puissent débattre de cet entretien tumultueux.

— Qu’est-ce qu’il peut être colérique ce garçon, ricana Bertrand en essayant de salir la réputation de Kilian auprès de ses deux consœurs.

Ce conseiller n’était pas stupide mais manipulateur. Il savait que les demis-accusations de l’adolescent était vrai, mais il devait s’assurer que les autres n’aient aucun doute. Ce poste au sein de l’État, tous les pouvoirs exécutifs et législatives qu’il possédait, il y tenait trop fermement pour pouvoir tout abandonner. Ce n’était pas un misérable garçon venant de la partie pauvre qui allait le mettre à jour. Le vieillard était excédé de voir que ses collègues avaient confié un rôle beaucoup trop important pour un gamin trop perdu et défiant. Il en était certain, dès la première occasion, Kilian pourrirait les relations entre les alliés pour amener ses collègues a décidé la fin de leur activité en guerre. Sous ses airs de vieux conseillers intolérants et rabougris, il souhaitait le pouvoir et soumettre tous les autres pays. Sauf qu’il fallait être plus malin que la Thuath et la Siar, et ne pas forcément s’allier à eux. Malheureusement, il fallait savoir exactement ce que les deux dirigeants de ses pays comptaient faire par la suite dans cette guerre infernale. Kilian était un élément perturbateur à l’égard de Bertrand mais les autres conseillers l’appréciaient bien. Le vieux fit un sourire un peu machiavélique qu’il dissimula à temps pour ne pas faire remarquer ses pensées. La seule solution qu’il voyait, c’était d’éliminer cet élément perturbateur en question, d’éliminer sa nouvelle menace : Kilian.

— Il a du caractère, se lamenta la conseillère Sophia en s’enfonçant dans son siège. Lors des débats et des choix, il va sans peine réussir à faire entendre son avis, et je pense qu’il serait même assez malin pour l’imposer.

— Oui, et c’est ce qui nous fallait, affirma Victoria avec envie tout en secouant légèrement la tête sur les côtés. Du sang neuf ne nous ferra aucun, ce garçon sera brillant.

Bertrand n’était absolument pas d’accord avec elle, mais il préféra ne pas affirmer son opinion. Elles le trouveraient beaucoup trop louche tout à coup. Il laissa donc les deux femmes parler alors qu’il tentait de planifier un plan sans être déconcentré par les voix des deux femmes. Le conseiller commença à se rêver à retourner dans sa jeunesse, où il était plus fort, plus souple, plus grand, beaucoup plus puissance. Il jugea cela dommage qu’il soit trop vieux à l’heure d’aujourd’hui pour accomplir tous ce qu’il souhaitait faire. Il émit un grognement qui rappela brièvement sa présence avant qu’il soit oublié pour la discussion. Il avait mis trop de temps à tout faire : à grandir, à saisir la vie, à préparer des magouilles le permettant d’arriver au pouvoir. Maintenant qu’il avait obtenu la confiance et le respect de tout le monde, il n’était plus assez en forme pour faire exactement ce qu’il voulait faire. Un marché ainsi que la suite des événements se schématisa peu à peu dans sa tête.

Kilian ne rentra pas immédiatement dans sa chambre pour rejoindre Fred et Charles. Il fit un détour dans le petit parc intérieur du palais du roi Jean-François II. Un endroit de nature dans une immense bâtisse au trait de ville, cela paraissait insensé et étrange, mais il existait vraiment. Le parc ne couvrait pas une longue distance mais c’était un petit paradis irréel dans une demeure des plus confortable et somptueuse. Kilian finit par l’atteindre. Cet endroit semblait tellement surréaliste. Des graviers traçaient des chemins entre les différents parterres de fleurs et d’herbes verdoyants, ses chemins convergeaient vers le centre du parc ou quatre énormes arbres au bout des parterres surplombaient de toute leur splendeur une magnifique fontaine à l’eau limpide. Cette fontaine possédait une statue du roi de Siar forgé dans la même pierre grise polie, les yeux remplacés parce ce qui ressemblait fortement à des petits émeraudes. Jean-François II de Siar n’avait pourtant pas les yeux verts. Cela servait juste à rajouter de la richesse et de la superbe au monument. La statue du roi était très élevé et souder à une sorte de plateau de pierre ou plusieurs jets d’eau avait été installé. Six jets d’eaux minces en rejetaient vers le haut continuel, entourant la statue d’un rideau de liquide qui l’aspergeait alors que six autres qui étaient cette fois épaisses remplissaient le bassin, l’eau qui débordait s’écoulaient des bords comme une descente de cascades pour former les quatre petites rivières qui traversaient les quatre parterres. Ses rivières ne prenaient pas de chemins droits mais des détours et détours, avec des virages aux bords arrondis et non droit. Ses cours d’eaux, eux, reflétaient les quelques rayons de soleils qui apparaissaient entre les nuages menacent de pleuvoir. Le temps était orageux et Kilian s’en félicitait, ils étaient accordés.

Le futur conseiller ne mit pas longtemps à remarquer que Cassandra se trouvait assise sur un des bancs, à contempler la fontaine. Depuis combien de temps était-elle là ? Kilian se le demandait bien, la jeune fille n’était pas avec Liam. Cela l’étonnait assez, depuis qu’ils s’étaient mis ensemble, ils étaient tous le temps ensemble. Ce qui n’empêchait pas Charles et Kilian d’être content pour eux même s’ils les abandonnaient un peu, heureusement, il y avait Fred. Charles avait beaucoup sympathisé avec Fred, il ne s’entendait pas spécialement bien avec lui avant. Désormais, les deux adolescents étaient amis, ce qui soulageait Kilian qui n’avait pas franchement envie de faire la police pour arrêter des disputes cinglantes. Leur trio commençait vraiment à se souder. Un nouveau trio… Celui-là ne serait pas une catastrophe émotionnelle. Kilian essayait de se rassurer. Il n’y aurait absolument aucune raison pour laquelle ce trio s’effondre. Sauf si un d’eux mourait. L’adolescent ne préférait même pas y penser. Le bruit de ses pas sur les graviers firent du bruit mais Cassandra était apparemment dans une torpeur tenace. lorsqu’il s’assit à ses côtés, il lui jeta un regard avant de regarder l’eau couler de toutes parts. Des feuilles s’étaient immiscées dans le bassin.

— Tu ne t’es pas disputée avec Liam, rassure-moi ? s’enquit Kilian en levant les yeux pour essayer de percevoir le ciel.

Ce n’était pas facile avec les nombreuses feuilles épaisses. Cassandra tressaillit alors que ses joues s’empourprèrent. Elle afficha un sourire qui détendit Kilian sur l’avenir du couple du groupe. Ils n’étaient juste pas au même endroit pour une rare fois.

— Non, pas du tout. Tout va superbement bien autre nous. Je t’attendais, je savais que tu viendrais ici.

— Il doit être assez égocentrique ce roi, constata Kilian en dissimula sa surprise par l’aveu de son amie.

Ils ne l’avaient pas vu en vrai, juste une photo donner par la conseillère Sophia afin de les préparer à la puissance et au charisme oppressant de cet homme. D’après ce qu’il avait entendu, le roi ne passait jamais inaperçu, et se faisait toujours remarquer pour être sous le feu des projecteurs.

— Tu as formulé ton vœu aujourd’hui…

— C’est vrai. Bertrand ne m’aime toujours pas à ce que j’ai senti. Tant mieux, il est louche et nul.

— Qu’est-ce que tu as encore fais.

— Pas grand-chose. Je n’en viens pas aux mains, tu le sais très bien, encore moins sur une personne âgée.

— Qu’est-ce tu lui as dis ? insista Cassandra sur un ton de réprimande.

— Deux fois rien, je t’assure. Je lui ai juste dit d’aller se faire voir en plus vulgairement et de démissionner.

— Quoi ! s’étrangla Cassandra en tournant la tête vers son meilleur ami.

— Je suis le nouveau conseiller, révéla-t-il d’un calme olympien qui l’étonna beaucoup.

Sa meilleure amie en resta bouche bée. Kilian crut d’abords qu’elle allait éclater de rire, pensant qu’il blagua, sauf que la jolie brune voyait le sérieux sur le visage de son ami. Cela la perturbait et l’amusait en même temps. Finalement, elle rigola en imaginant Kilian parler dans des conférences politiques et d’annoncer des choix. Jamais elle n’aurait imaginé son ami en conseiller. Le regard de Kilian se fit électrique en la voyant rigoler comme si elle se moquait. Elle leva le bras pour exhiber sa main tremblante sous le nez du garçon.

— Que veux-tu que je fasse avec ta main, marmonna-t-il. Je ne suis pas ta sœur, ni ta copine, ni ta cousine. Ce n’est pas moi qui te ferais une manucure.

Cassandra réussie à se calmer malgré le fait que ce que venait de dire Kilian l’avait tellement fait sourire qu’elle aurait cru laisser un rire. Kilian et le sarcasme… La jeune fille souffla avant de laisser tomber son bras.

— Je ne te fais pas confiance pour une manucure de toute manière ! J’étais juste en train de m’imaginer toi, qui tenait une conférence politique. Je trouve cela assez amusant. Donc… Tu remplaces Bertrand.

— J’aimerais bien que cela soit lui pour nous en débarrasser, mais non, bougonna Kilian en se tournant les pouces puis releva sa tête vers Cassandra qui fronçait les sourcils. Victoria s’est retirée. Je la respecte, je ne dirais pas les raisons de son désistement. Bertrand était en colère lorsqu’elle m’a annoncé cela. Visiblement, cette nouvelle n’entraîne pas son engouement.

— Et toi ? Comment tu le prends ? sonda Cassandra.

— Je suis anxieux, mais je sais que je n’ai pas le choix. Il va falloir que je voie comment ça se présente…

— Tu t’en sortiras.

Kilian regarda son amie de haute en bas avec un regard noir qu’il ne voulait pas. Mais pourquoi tout le monde le voyait-il donc comme un futur bon conseiller ? C’était stupide de croire, il devait faire ses preuves avant tout jugement et considérations.

— Cass’. Quand tu partiras avec Liam et Charles pour Kuyinto, rester avec Charles. Ne t’isole pas avec Charles. Il est avec moi et Fred ici, mais on ne sera pas là là-bas. Je n’ai pas envie que Charles se retrouve seul juste parce que vous voulez passer du bon temps après les missions.

Cassandra observa Kilian d’un œil considérer, avant de pincer sa lèvre.

— Et Charles ne se sent pas un peu seul avec toi et Fred ? voulut-elle savoir.

— Pourquoi est-ce qu’il se sentirait seul avec moi et Fred ? s’étonna le blond en haussant les sourcils.

— Bah, toi et Fred…

— Quoi moi et Fred ?

Cassandra baissa la tête, gênée alors que Kilian insistait encore et encore pour obtenir une réponse. Le jeune homme eut soudainement la sensation que Victoria ne s’était peut-être bien pas trompée à son sujet. Il ne savait pas pourquoi il venait de ressentir cela, mais il fut apaisé sur ce point-là même si une partie de lui était tout de même effrayé. Il ne devrait plus faire n’importe quoi désormais ! Les bêtises ne seraient plus permises. La rébellion serait finie. Bientôt, il allait devoir se comporter comme un adulte digne de responsabilité et de confiance. Il n’était pas adulte. Mais il était suffisamment mature pour comprendre, analyser les choses, et prendre des décisions, bonnes ou mauvaise qui ait un réel impact sur une situation. Kilian l’avait déjà vécu. Pas plus tard qu’il y a environ un mois. Et dans sa vie, il allait en prendre encore des décisions comme cela, certaines d’entre elles auront en plus de cela un impact national et mondial, cela lui paraissait légèrement effrayant.

— Qu’est-ce qu’il a avec Fred ?

Cassandra réprima un ricanement et releva la tête en souriant. Elle scruta le visage et le regard de Kilian. Le jeune homme avait eu tort face à Fred. Il était innocent. Cassandra finit par retourner son attention sur la fontaine.

— Je crois que tu l’aimes.

Le jeune homme se sut pâlir sans vraiment en connaître la raison. Pourquoi est-ce que Cassandra trouvait exactement les remarques par rapport à la réflexion qu’il se faisait en ce moment dans sa vie ? Elle remuait tout, et les pensées de Kilian refirent surface. Il s’empêcha de se plaindre et de lancer des injures alors que Cassandra ne le regardait plus. La brune fixait la statue, dissimuler par le filet d’eau.

— Je ne sais pas, lâcha Kilian.

— Moi, j’en suis certaine.

Kilian soupira. Il n’aimait pas parle de ses choses là, même avec une personne en qui il avait entièrement confiance. À personne. Cette conversation devenait assez embarrassante pour lui. Sans un mot de plus, il quitta l’espace nature incroyable du palais, laissant Cassandra s’approcher seule de la fontaine pour toucher l’eau. La jeune fille se retourna en et sourit en regardant son ami de dos, qui s’éloignait. Le blond retrouva donc Fred et Charles dans sa chambre avec un blond aux yeux bleus, Liam. Ce dernier souriait, assis au bout du lit. Charles appuyé contre la fenêtre à rire, et Fred assit sur le lit, contre le rebord, il avait ramené ses jambes et serrait l’oreiller de Kilian contre lui, tout en essayant d’étouffer son rire contre l’objet. Ce n’était pas suffisent pour le cacher. Kilian aimait bien le rire de Fred. Il pouvait égailler sa journée quelques fois. Les deux autres jeunes hommes se calmèrent lorsqu’ils virent Kilian. Ce dernier ferma la porte puis se retourna. Ils attendaient qu’il dit quelques choses, alors il annonça la nouvelle. Ils semblèrent encore plus surpris que lui, cela fit sourire le futur conseiller. Il vint s’asseoir au côté de Fred et raconta le début, la provocation avec Bertrand et ce qu’il lui avait répliqué. Si d’un côté, Fred se méfiait de Bertrand, Liam félicita Kilian pour sa réplique, Charles nomma cela comme une prise de bravoure ! Le groupe de garçons continua à parler entre eux, puis Liam repartit voir Cassandra qui n’avait sans doute pas changé d’endroit. Le parc était hypnotisant.

— Vous vous rendez compte que je vais devoir passer des semaines avec ce couple ! Je vais tellement me sentir seul, moi. Vous avez de la chance les gars d’être tous les deux. Profitez-en !

— On pensera à toi pendant tout le reste du séjour à l’étranger ! s’exclama Kilian en plaçant sa main droite sur son cœur. Nous serons joyeusement en train de penser que nous ne supporterons ni les mots doux, ni les regards du couple Caim. Pitié ! Il va falloir que je remercie les conseillers pour cela, peut-être qu’ils m’accepteront mieux.

Charles lui assena un coup de main à la voler en plein sur le derrière du crâne. Kilian lui répondit par un léger coup de pied dans le tibia. Ils rigolèrent alors que Fred regarda le spectacle devant lui, d’un œil attentif fixé sur Kilian. Il releva sa manche et leva son poignet jusqu’à ses yeux pour lire sa montre. Il s’éclaircit la gorge pour que les deux autres l’entendent.

— Le dîné commence dans trente minutes. Nous devrions nous préparer. Les conseillers et le roi ne supporteront sûrement pas que l’on soit en retard, avertit l’ancien gangster en reposant l’oreiller pour se lever du lit.

Les deux autres hochèrent leurs têtes puis chacun retour dans sa chambre. Kilian se sentit un moment seul. Au lieu de directement se préparer, il s’affala sur le lit et ferma les yeux. Il ne voulait pas être conseiller. Il démissionnerait dans cinq ans, directement après les limites passées. Le garçon ne comprenait pas ce que les autres conseillers avaient eu dans la tête. Ils étaient fous. La voix d’Iris lui martelait la tête de « prépare-toi ! », pourtant elle n’était pas avec lui. Cela pouvait être égoïste, mais il avait le sentiment qu’il avait fais le bon choix. Il bondit du lit et ouvrit le dressing. Les deux vieux conseillers leur avait imposé des tenues pour l’occasion, pour qu’ils se montrent dignes de leur hôte ! Kilian ne voulait être digne que des personnes auxquelles il tenait, mais il n’avait pas vraiment le choix. Il fut content de remarquer que c’était Sophia qui avait choisi sa tenue. Il ne l’aimait pas spécialement, mais si cela avait été Bertrand, le vieillard aurait tout fais pour choisir des vêtements que Kilian détestait. Ses habits étaient sobres : un t-shirt noir, un costume noir aussi ainsi qu’un jean bleu marine et le jeune homme était soulagé de pouvoir porter des baskets. Il enfila l’ensemble et se posta devant un miroir, il boutonna deux boutons sans plus. Kilian se trouvait trop sérieux dans ses habits, sauf que c’était le but escompté. Il passa sa main dans les cheveux dans l’espoir de les décoiffer, malheureusement, ses cheveux étaient difficiles à leur faire adopter une coupe décoiffée. Il se résigna à appliquer du gel pour pouvoir faire ressortir quelques mèches. Il souffla… Il n’était pas bien, finalement, il laissa sa chemise ouverte en décontracté.

Il contempla les rayons orangers du soleil couchant dans le ciel assombrit en un bleu marine. C’était un paysage certes fois, mais incontestablement beau. Le roi de Siar savait choisir les endroits les plus beaux de son pays. Kilian prit l’arme entre les mains. L’arme pointait droit sur sa tête, la balle percuta sa cheville droite. Il l’accrocha à son jean et décida de descendre son t-shirt et de mettre quelques boutons pour la dissimuler. Jean-François II de Siar trouverait sûrement cela malvenu d’avoir une arme dans l’enceinte de son palais. Il ne devait pas la voir. Kilian sortit de sa chambre en même temps que Fred. Puisqu’ils passaient plus de temps en Siar que les trois autres, ils occupaient des chambres voisines. Cela fit sourire Fred. Il était habillé d’un t-shirt et d’une chemise blanche avec un jean bleu clair. Tout l’opposé.

— Sophia à bien relever ton humeur du moment, commenta-t-il en sortant la clé pour la tourner dans la serrure.

— Heureusement que Bertrand n’était pas chargé de ma garde-robe sinon je ne sortirais plus de ma chambre. Bah, je ne sais pas, je vais mieux aujourd’hui. Pourtant je ne suis pas emballé à l’idée de devenir conseiller, c’est sordide ! Je pense que c’est notre discussion l’origine. Merci d’être là… Merci de me faire confiance, et merci d’être aussi gentil et patient. Tu es ce qu’il me faut, sourit Kilian.

— Ne t’en fais pas, tu seras un bon conseiller.

— Est-ce que quelqu’un, pourrait m’expliquer, pourquoi tout le monde me voit comme un bon conseiller ? Parce que je ne comprends pas et ne partage pas votre avis !

— C’est ta personnalité. Tu vas mieux, et même si tu penses le contraire tu te bats, tu t’affirmes, et tu n’hésites pas à exposer tes idées ou tes opinions, quitte à froisser ou agacer certaine personne. Victoria sera présente pour te soutenir je suis sûr, et je serais là tout le temps je te rappelle. Je ne te lâcherais plus.

Kilian se retourna, un sourire béat. Ils allèrent chercher leurs amis où leur chambre se trouvait dans le couloir d’avant. C’était jean clair et chemise rouge pour Charles, jean foncé et costume bleu marin pour Liam. Cassandra portait une belle robe rouge à bustier près du corps mais avec froufrou, Kilian savait pertinemment qu’elle détestait les froufrous, il lui lança un regard compatissant. Son amie restait très belle dans cette robe et le regard illuminé de Liam disait tous. Ce fut le moment que les deux conseillers choisirent pour faire leur apparition près de la bande. Il était élégamment et sobrement habillé, les deux en costumes. Sophia glissa une broche dorée en forme de colombe dans les cheveux de Cassandra. Les garons n’eurent pas le droit à d’accessoire, de toute manière, Kilian s’en serait passé sans problème. Il n’aimait pas les trucs qui brillaient qui paraissaient riches et qui faisaient te repérer un kilomètre à la ronde. Ici, les propriétaires avaient bien le goût inverse, il allait s’en accommoder.

— Il y aura des seigneurs des plus grands fiefs du pays, signala Bertrand d’une voie grave et caverneuse.

La Siar était séparée en plusieurs petites parties dirigés par des seigneurs à la botte du roi. La Siar fonctionnait sous ce système qui semblait assez bien marcher. Ses seigneurs n’avaient aucuns pouvoirs, pas au niveau national. Ils devaient juste appliquer ce que le roi ordonnait sur leur vallée qu’ils dirigeaient. Kilian avait tout de même compris que les seigneurs les plus doués des grandes parties avaient le droit de soumettre des idées au roi. Il y aurait toujours des inégalités partout de toutes manières, cela n’étonnèrent guère le groupe d’adolescent. Ils pénétrèrent dans une très grande salle lumineuse. Les murs étaient dorés à croire que c’était de l’or, le parquet avait été nettoyé de fonte en comble et un gigantesque chandelier au semblant de cristal servant d’ampoule pendait au centre de la pièce et éclairait toute la salle. Les grandes tables marrons formaient un rectangle, mais les tables de la largeur étaient plus élevée que celle des longueurs. Ces dernières étaient déjà remplies par les seigneurs et la reine, une brune aux yeux verts étaient assises sa place, sur une largeur. Kilian, en conclu que leur place était sur l’autre largeur. Un grand homme, aux yeux noirs brutes et une tresse lui arrivant aux fesses s’approcha du grand Opartiskain. Ses lèvres maigrichonnes bougèrent mais avec tout le boucan dans la salle, aucunes personnes du groupe n’entendit. Ils se rapprochèrent.

— Mes chers amis ! J’espère que vous ne vous êtes pas perdue dans l’immensité de cette demeure ! Prenez place en face de nous je vous pris, nous parlerons affaire lors du désert ! Le repas est prévu d’être délicieusement copieux, j’espère que vous avez un bon appétit ! Bonne soirée à vous tous !

Le roi avait une voie dans les médiums qui ne trahissait aucune émotion et aucun sentiment. Il parlait d’une manière calme et mesurée, comme s’il savait exactement ce qu’il allait dire ou ne pas dire. Il choisissait ses mots diplomatiquement et avec soin pour se garantir bonne conscience en cas de conflit et ainsi préserver son image, qui, pouvait quelques fois paraître froid dans le dos. Jean-François II ne partit pas immédiatement après son petit discours privé, il fixa les adolescents un à un. Soutenir son regard, ou non ? Kilian décidait que finalement si, il était roi, certes, mais cela ne l’empêchait pas d’être regarder, et l’homme souhaitait être regardé. Alors Kilian allait le regarder bien dans les yeux comme lorsqu’il voulait défier des personnes. Il avait retrouvé son intérieur rebelle sans trop l’utiliser non plus, et en sachant pertinemment que l’État faisait de son mieux pour tout diriger. Il n’en voulait plus aux conseillers d’avoir pris des mauvaises décisions comme leur entré en guerre, parce que maintenant, il comprenait que ce n’était pas simple. Il commençait à connaître la personnalité des conseillers, et en plus de cela, les commerces permettaient de mieux les nourries et aidaient à produire. Si les conseillers avaient remis la mondialisation en marche, c’était aussi car l’agriculture commençait à défaillir. Tout un pays devait être nourri. Ils n’avaient pas eu d’autres choix.

Le jeune homme ne regarda finalement pas directement le roi de Siar dans les yeux, mais il ne baissa pas la tête. L’adolescent se mordilla la lèvre, Jean-François II émanait une puissance et quelques fois une certaine forme de cruauté, mais c’était aussi un homme imposant qui avait pleinement confiance en lui et qui en profitait beaucoup. C’était comme si le gouverneur de Siar était un joueur d’échec. Et les pions, c’étaient tous les autres personnes de son pays. Des pions pour les seigneurs, des pions pour les militaires qui attaquaient, des pions pour les alliés, des pions pour ses ennemis, des pions pour sa propre famille et des pions pour le peuple. Lui, il n’en faisait pas partie, il était extrêmement intouchable. Il demeurait trop puissant, c’était de la folie qu’un homme comme lui, aux idées bien arrêter, au choix si important existe. Il pouvait presque faire peur, peut-être qu’il faisait un peu peur à Kilian finalement, mais il n’en montra rien. Il lorgna Cassandra dans sa belle robe rouge qu’elle n’aimait pas avant de revenir sur Kilian. Le jeune homme regarda Bertrand pour essayer de savoir si le vieillard avec dis quelques choses sur lui au roi, cela ne risquait pas d’être positif.

— Tu as l’air d’aller mieux que depuis ton entré, garçon. Heureux de voir que la Siar à l’air de te faire un peu de bien et te rend moins maussade, déclara le roi avant de partir.

Kilian en resta interloqué, il avait parlé à lui. Le roi Jean-François II les avait donc vu dès leur première entrée dans son palais. Kilian ne l’avait pourtant pas remarqué. Le groupe, sous le regard de tout le monde, cette fois, se dirigèrent à leur place, et s’assirent. Kilian se retrouva entre Sophia à et Fred. Il sentit la matière froide de l’arme contre sa peau, le faisait frissonner. Il devait la cacher, il n’avait pas le choix autrement, mais il ne se sentait pas à l’aise. Il se retrouvait juste en face de roi, et il avait bien l’impression que ce dernier le fixait sans rien faire. Jean-François II de Siar était définitivement flippant pour Kilian. Étrange aussi. Le blond se pencha légère vers Sophia, les sourcils froncés.

— Vous êtes certaines qu’il n’y a que nous qui savons que je suis le futur conseiller ? chuchota le jeune homme.

— Bien évidement. Avant de parler au allié, nous devons en parler officiellement au peuple. C’est une question de respect ! Pourquoi une telle question ?

— Il me fixe. Je n’aime pas être fixé de la sorte par quelqu’un que je ne connais pas, articula Kilian d’un ton sec.

— Ce n’est rien voyons, pouffa la conseillère Sophia. Je suis consciente que cette attitude peut paraître très étrange, mais ce n’est rien. La dernière fois, il fixait Camille. Je me demande bien comment sa femme peut-elle supporter cette attitude irrespectueuse envers elle. Aucun tracas à vous faire. Faites comme si c’était un détail.

La femme balaya le sujet d’un geste de la main pour fixer les domestiques qui apportaient l’entrée. Kilian n’aimait pas voir cela. Les domestiques existaient sûrement dans la partie nord d’Opartisk, mais pas dans la partie Sud. Mais il avait cru comprendre que l’usage de domestique était très répandu dans certains autres pays. Dans la Thuath d’antan, mais aussi et toujours en Siar. Le jeune homme n’aimait vraiment pas cela. Il regardait les plats qui avaient l’air si bon. Les cuisiniers du palais…

— Je ne suis pas Camille, contredit Kilian ne voyant pas où était l’intérêt du roi en lui.

— Oui, je le conçois bien que vous n’êtes pas Camille ! Vous êtes un homme, et vous êtes plus jeune. Mais au fond vous avez quelques points communs.

— D’accord, vous me l’avez déjà dit, marmonna-t-il. Mais je ne vois pas en quoi je suscite l’intérêt du roi de Siar.

— En plus d’être proche de nous à votre âge, il suppose aussi que l’on vous a promis un poste haut placé à l’État, je suppose.

— Et donc ?

— Vous restez tout de même intriguant.

Il but de l’eau comme si cela allait l’aide à se reprendre. Il ne voyait pas vraiment en quoi il pouvait être intriguant. Fred rigola en voyant sa tête, Charles à sa suite alors que Cassandra et Liam affichèrent des regards d’incompréhension. Kilian se demandait s’il devait être offensé au fier qu’on le considère comme tel : intriguant. Il se renfonça dans son siège et remercia le domestique qui le servit comme le reste des adolescents. Les domestiques les servant affichèrent des yeux exorbités. Kilian se ravisa de leur poser la question de leur surprise, c’était sûrement malvenu de sa part. lorsqu’ils furent éloignés, et que les adolescents virent que tout le monde commençait à manger, ils débutèrent eux aussi leur repas.

— Il n’est pas coutume de remercier un domestique lorsqu’il sert. Vous n’auriez pas du les remercier. Je pense que c’est compris pour la prochaine fois, grogna Bertrand.

Les adolescents ne lui obéiraient pas. Ils trouvaient cela juste normal de devoir remercier quelqu’un qui rendait un service. C’était les premiers mots de Bertrand de la soirée, et il était toujours aussi aimable qu’à son habitude. Kilian avait envie de le gifler. Quel imbécile était ce vieux ! Sans état d’âme, sans la moindre once de gentillesse. Cela ne l’étonna même pas. Kilian ne ressentit aucun regret de l’avoir envié sur les roses pendant l’espace d’un instant. Le repas débutait donc sur une note assez désagréable pour les Opartiskains.

— Je me demande si les rumeurs sur le roi sont vraies, partagea Charles alors que le plat principal venait tout juste d’arriver devant eux.

— Les rumeurs sont souvent fausses. Qu’est-ce qu’elles disent sur lui ? répliqua Kilian.

Le repas était succulent. Kilian décréta que c’était le meilleur banquet de sa vie tout en entière même si au cours de sa vie, il allait sûrement être présent à plusieurs festins politiques. Il tourna la tête vers ses amis pour obtenir des réponses. Ce n’était pas un fana des ragots, il ne rapportait jamais des rumeurs, c’était toujours les autres qui lui rapportaient les rumeurs sur un tel. Mais il se demandait bien comment une rumeur sur le roi de Siar avait pu naître en Opartisk, alors que pendant longtemps, le pays s’était coupé de toute communication avec les autres pays du monde. Avant que Charles lui réponde, la conseillère Sophia qui avait entendu le devança :

— Malheureusement, aussi effroyable que cela paraît. La rumeur est vraie.

Kilian insistait du regard auprès de Charles alors que les mâchoires des autres se décrochèrent petit à petit, le temps qu’ils réalisent ce que tout cela voulait dire. Kilian souffla avant de porter sa fourchette à sa bouche, ne lâchant pas Charles du regard. Il jeta un coup d’œil à la famille royale, à son grand soulagement, le roi ne le fixait plus comme au début du repas.

— Jean-François II a donc bien assassiné son père Jean-François premier pour obtenir le pouvoir et le contrôle de la Siar, annonça Charles d’une voie faussement calme.

Kilian en resta bouche bée et regard le roi de Siar avec effroi. Comment pouvait-il faire cela ? Combien d’autres personnes avaient-ils assassinées ? Il espérait qu’il n’y ait pas beaucoup de fou en Siar. Le jeune homme serait alors beaucoup moins rassuré sur son sort et ceux de ses amis. Cela lui avait totalement coupé l’appétit. Juste avant le dessert, Bertrand s’absenta en justifiant une envie présente, mais Kilian avait le pressentiment qu’il mentait. La posture le trahissait, mais son regard restait de glace. Il le regarda partir avant de grommeler qu’il avait oublié quelques choses dans sa chambre, pour le suivre. Il suivit Bertrand, sans faire le moindre bruit. Le conseiller ne se retourna pas une seule fois, mais Kilian réussit à le perdre. Il tourna la tête mais il ne le voyait pas dans le couloir. Comment avait-il pu le perdre ? L’adolescent ne sut même pas s’il allait réussir à regagner la salle du repas. Il remarqua qu’une porte était ouverte. Plissant les yeux, il se déplaça juste devant la porte, la salle était à peine allumée cependant la porte était ouverte. Kilian ne savait pas ce qu’était et à quoi servait cette salle où il y avait un bureau, mais Bertrand n’avait pu qu’aller là. Il avança dans la pièce, mais il avait beau tourner sur lui-même, il ne vit aucune trace du conseiller. Il s’était totalement volatilisé. Le jeune homme se passa une main sur le visage avant de baisser la tête. Un papier qui dépassait d’une pile attisa sa curiosité, il la tira vers lui et la tourna pour la lire. Il venait de comprendre que ce bureau appartenait à roi Jean-François II, et sur cette liste, était programmée plusieurs attaquent, contre chaque pays différent, tous les pays étaient ciblés. Tous les autres pays, même si alliés. Jean-François II doit mourir, pensa Kilian. Sauf qu’il ne pouvait pas le tué, l’enquête les trouverait, et les conseillers seraient tous contre. Mais la guerre devenait catastrophique. Beaucoup trop. Kilian allait prendre la feuille avec lui lorsqu’il sentit quelque chose de froid conte l’arrière de son cou. Il se crispa et sa main descendit sa main près de sa hanche.

— Retourne-toi doucement, siffla une voie glaciale derrière lui.

Kilian retint son souffle et ferma les yeux. Il ne savait pas qu’il avait son arme, il devait juste la dégainer au bon moment, en essayant de ne pas le tuer, ni de le blesser tout en restant lui-même en vie.

— Retourne-toi doucement j’ai dis, répéta-t-il.

Kilian sentit le métal qui s’était réchauffé se faire plus fort contre son cou. C’était un couteau, cela le rassura. Un couteau face à un pistolet, s’il arrivait à éloigner l’arme blanche de son cou, il pourrait déjà espérer de ne pas être tué par son agresseur. Il se pencha en avant pour se retourner sans se faire trancher la gorge. La mâchoire crispée, il fit face à Bertrand, un couteau à la main, qu’il brandissait fermement devant Kilian. Il n’était pas spécialement impressionné par le vieux conseiller, mais juste inquiet. Sa main descendit et rencontra son arme à feu. Kilian ne voulait tuer personne, même s’il n’aimait pas la personne concernée et que cette dernière, avait, très visiblement envie de le tuer avec son couteau pointer sur lui.

— Vous n’êtes qu’un malade ! cracha Kilian en se collant au bureau.

— Ah oui, tu penses ? ricana l’ancien en s’amusant à parcourir le couteau sur les bras de Kilian. Tu as l’air d’avoir l’habitude, ou je me trompe ? Je ne suis pas malade. Je veux juste le pouvoir, juste tout posséder.

— A vote âge ? C’est stupide. Vous allez bientôt mourir de toute manière.

— Ne me prends pas pour plus vieux que je suis compris ! Je vais accomplir de grande chose ! Plus grande que ce que tu pourrais faire. De toute manière, tu n’as aucune ambition. Tout le monde m’admirera et sera à mes pieds ! Je serais le maître du monde !

Son ricanement glaça le sang de Kilian. Le jeune homme sortit son arme en se baissant et se décalant pour éviter le coup de couteau du conseiller fou. Les mains moites et tremblantes, il le pointa droit sur le conseiller qui semblait toujours dans une transe sans fin. Il faisait peur avec son couteau, son sourire tortureur et machiavélique ainsi que ses yeux aux éclats inhumains. Il leva sa main comme la statue de la liberté mais avec un couteau et l’abaissa lentement pour la pointer sur Kilian qui frissonna.

— Calmez-vous… S’il-vous-plaît, sortez de cette transe de folie, supplia Kilian en murmurant.

— Lâchez ce couteau ! Nous ne voulons pas tirer.

C’était Fred. Kilian le regarda furtivement. Il était en sueur et tenait lui aussi une arme aux mains, la pointant lui aussi sur le vieillard qui le regardait méchamment. Depuis quand avait-il eu le droit du port d’arme ? Kilian n’était pas au courant, contrairement à ce qu’il aurait pu penser, cela ne lui fit rien que Fred lui ait omis ce détail, il lui en était même reconnaissant. Soudain, le conseiller Bertrand s’immobilisa, son couteau tomba d’un coup et Kilian le prit rapidement en s’éloignant, rangeant son arme où elle était. Le vieil homme se laissa tomber contre le mur, et restait tel un légume. Cela faisait froid dans le dos. Kilian le fixa avant de relever la tête. Fred le regardait.

— Je ne sais pas comment t’a su. Mais je te dois vraiment ma vie, bordel, dit Kilian.

— Oh mon dieu ! s’écria une voix féminine avant que Fred n’ait eu le temps de répondre.

Kilian se retourna, la conseillère Sophia était arrivée en même temps que Fred. Le jeune homme ne les avait pas entendus, mais il leur en devait beaucoup. Il n’essayerait plus de faire cavalier seul, il venait de retenir la leçon pour les prochaines fois. La conseillère Sophia semblait tellement sous le choque qu’il crut qu’il allait devoir la retenir. Mais la dame avança près de Bertrand, toujours en été végétatif. Kilian restait sur les quais vifs prêt à protéger la vieille dame qui était catastrophée.

— Nous allons devoir chercher un nouveau conseiller. Kilian, tu n’auras pas besoin de justification de vœu.

Deux nouveaux conseillers au même moments, Kilian se sentirait moins seul. Fred le regardait les sourcils foncés. Il ne comprenait pas le rapport entre le vœu de Kilian et Bertrand. Il fit quelques enjambés pour rejoindre Kilian.

— Merci, susurra Kilian en le regardant dans les yeux.

— Je n’allais quand même pas te laisser mourir.

Ils se sourirent.

— Qu’est-ce que j’ai raté du repas ? se renseigna Kilian.

— Oh, pas grand-chose d’important, répondit Fred en haussant les épaules. Le roi de Siar, toujours aussi flippant à passer un marcher pour que l’Opartisk et la Siar entretiennent une relation cordiale, aucun des deux ne ‘aident, mais aucun des deux attaquent l’autre sinon c’est une déclaration de guerre entre les deux pays qui les attend… Sophia a accepté, elle était énervée que Bertrand ne soit pas là. Mais il n’a plus vraiment l’air d’être lui-même.

— C’est une crise de folie qui a l’air de passer. Mais déjà en temps normal, quand il n’est pas en crise il ne tourne pas rond.

Fred avait envie de demander à son ami son vœu mais renonça. S’il ne voulait pas en parler, c’était son choix, il le respectait. Il s’agenouilla au côté de Sophia et Kilian profita de l’inattention des deux autres pour prendre la feuille qu’il avait lue, la liste et la plia en quatre pour la laisser dans sa poche. Pour le moment, il n’en parlerait à personne, cela perturberait à coup sûr, et ce n’était pas le moment d’être perturbé. Pas avec la mission qui arrivait. Sophia se leva, accablé, soutenue par Fred qui lui porta son aide. La dame leva les yeux vers son collègue.

— Je suis désolé, tes obligations commencent dès maintenant, nous n’avons plus le choix. Cela va sans doute faire jaser. Nous annoncerons qu’il prendra sa retraite pour problème de santé, mais nous ne préciserons pas mentaux. Il va falloir trouve un nouveau conseiller désormais.