Partie 10
Rose était en train de déposer les différentes mignardises salées sur la table basse alors que Lorna remplissait deux verres de rosé. Le duo s’était entendu pour continuer le drama ensemble et depuis cinq semaines, elles se voyaient tous les vendredis soir pour regarder le nouvel épisode. Lorna arrivait chez Rose vers 19 h 30 quand elle avait fini ses heures à la bibliothèque et restait au plus tard jusque 22 h 30. Elles préparaient de quoi grignoter devant la télévision tout en discutant de leur semaine.
Rose chérissait ces moments simples pendant lesquels chacune se dévoilait un peu plus à l’autre. Du sport à la politique, du jardinage à la lecture, elles ne s’interdisaient aucun sujet. Elles s’étaient découverte des tas de passions communes, ce qui avaient naturellement resserré leur lien. Leur dernier en date était leur amour des tournesols.
« Au fait, tu as vu ? Les BLACKPINK vont faire le Zenith dans quelques mois, dit Rose
— Ah oui, je l’ai lu sur twitter, répondit Lorna en remplissant les verres de vin. En mai, non ?
— Oui, vous pensez y aller ?
— Avec Jade ? Surement pas ! On n’est pas très girls bands et puis ce sont des petites joueuses. Du pipi de chat comparé à leurs aînées.
— Écoutez-moi cette condescendance !
— Je m’excuse, mais-
— Oui, on sait mamie, la K-pop c’était mieux avant, la chambra Rose.
— Vas-y moque-toi ! rebondit Lorna en posant les verres sur la table basse. Un jour tu comprendras gamine ! »
Rose rit à sa blague et la rejoignit sur le canapé, verre à la main. Lorna plongea son regard dans celui de Rose :
« Tu vas y aller ?
— C’est le groupe favori de Sarah, j’ai déjà promis de l’accompagner et de la loger. Peut-être qu’on sera quatre ou cinq.
— Tu me présenteras tes amis ? demanda Lorna.
— Humm, je ne sais pas. Tu sais on est que des gamins qui ont loupé la vraie K-pop ! déclara-t-elle avec humour. Tu vas être déçue !
— Laisse-moi vérifier de mes propres yeux !
— Soit, c’est toi qui l’auras voulu ! » conclut Rose avec un sourire diabolique.
Lorna la regarda avec défi et lança l’épisode. Rose s’installa confortablement, sa tête posée sur la poitrine de la chimiste. C’était pour ce moment qu’elle endurait tout le reste. Au plus proche de Lorna elle se sentait sereine ; dans ses bras elle oubliait tout.
L’histoire battait son plein, les protagonistes étaient au milieu d’un quiproquo qui accaparait toute l’attention de Rose. Elle attrapa deux mini quiches et en donna une à Lorna. Cette dernière prit sa part et reteint les doigts de Rose. « Je dois te dire quelque chose. » chuchota la chimiste d’un air grave.
Rose mit en pause, se releva et s’assit en face d’elle.
« Je … ce n’est pas facile, dit Lorna, le regard fuyant.
— Prends ton temps, l’encouragea Rose, anxieuse.
— Je … Voilà … Marie m’a quittée. » lâcha-t-elle.
Rose ne sut quoi répondre, tout se bousculait dans sa tête. Elle avait espéré que les deux jeunes femmes se séparent, mais cette révélation la désarçonna. Elle prit les mains de Lorna dans les siennes et demanda :
« Ça va ?
— Oui, ne t’en fais pas pour moi. Je voulais te le dire avant que Jade ne s’en charge.
— Je comprends, répondit Rose en esquissant un sourire.
— Je suis célibataire maintenant. » conclut Lorna, les yeux brillants.
Le cœur de Rose s’arrêta avant de s’emballer et battre dans un tempo désordonné. Elle détailla Lorna comme si c’était la première fois. Rose s’attarda sur ses cheveux frisés dans lesquels elle aimait glisser ses doigts, sur ses prunelles pétillantes qui volaient toujours son attention, puis sur ses lèvres. Ces lèvres qui l’avaient tentée plus d’une fois et s’invitaient dans ses rêves. Ces lèvres étirées dans un sourire qui faisait chavirer Rose. Ces lèvres qui l’hypnotisaient depuis plus d’un mois. Ces lèvres qui l’attiraient toujours dangereusement.
Rose écrasa une nouvelle fois l’appel de sa raison, s’approcha de Lorna et l’embrassa. Le contact était doux, chaud et enivrant. Elle avait imaginé ce baiser plus d’une fois, sans jamais frôler le bonheur qu’elle éprouvait en cet instant.
En ce bref instant.
Lorna la repoussa violemment. Rose tenta de parler mais la chimiste prit les devants : « Je ne veux pas t’entendre. » assena-t-elle en détachant chaque syllabe. Lorna se leva, récupéra ses affaires et disparue du petit studio en claquant la porte.
Rose resta seule, assise sur son canapé dans un silence lourd. Il n’y avait plus de mélodie ou de bruit pour rythmer ses émotions ou même les cacher. Juste le vide et les acouphènes désagréables d’un concert trop fort.
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