Ch 1 (2/3)
L’épéiste souriait de toutes ses dents. Il avait passé deux ans à se préparer pour ce jour et à présent il était prêt : il allait devenir un aventurier. Mais tandis qu’il remontait la rue en direction de la guilde, une voix familière résonna dans son esprit :
« C’est donc le grand jour gamin ! Toi et moi allons enfin entrer dans la cour des grands !
Le guerrier ne répondit à la phrase que par la pensée, car il savait que personne d’autre ne l’avait entendu.
- C’est exact Sable, on va pouvoir se mettre au travail.
Le jeune homme vit alors la silhouette sableuse et fantomatique du djinn apparaitre à ses côtés. Cet esprit du désert suivait l’épéiste depuis son enfance, et depuis toujours il semblait être le seul à pouvoir le distinguer, bien que certains mages et autres lanceurs de sort expérimentés aient déjà réussi à sentir sa présence. Mais autrement le djinn était le seul à pouvoir décider si le commun des mortels pouvait le voir ou non.
Donc en dépit de son apparence, et de sa taille avoisinant les 2 mètres, aucun passant ne remarqua la présence du djinn. Malgré tout cela n’empêchait pas certaines personnes de dévisager le guerrier. Son accoutrement, son physique et surtout son rapace, attiraient quelque peu l’attention. L’épéiste, âgé de 17 ans avait déjà une stature et une musculature dignes d’un adulte. Cela venait de son entrainement intensif au combat et du style de vie de son peuple, son affinité avec le hibou également. Pour les habitants des pays de l’ouest, cela-dit, un jeune homme accompagné d’un rapace de cette taille n’était pas habituel. L’épéiste ne prêta cependant pas attention aux regards des passants, et poursuivit son chemin.
Après dix bonnes minutes de marche, le guerrier arriva au bâtiment local de la guilde. Dès qu’il en passa la porte, plusieurs regards se braquèrent sur le nouveau venu. Rien d’anormal, une nouvelle tête se remarquait toujours à la guilde, surtout en pleine matinée.
-Les regards des occidentaux lorsqu’ils te voient m’étonnera toujours.
Souffla le djinn à l’oreille de son compagnon. L’épéiste répondit à cette remarque par un sourire silencieux.
Le jeune homme se dirigea vers le comptoir, derrière lequel se tenait une jeune employée aux cheveux couleur blé et aux yeux dorés. Lorsqu’elle entendit l’épéiste, la réceptionniste leva les yeux. Son visage afficha un bref instant un aire surpris qu’elle s’empressa de remplacer par un sourire radieux.
-Bonjour ! Bienvenue à la guilde des aventuriers. Comment puis-je vous aider ?
-Je voudrais m’inscrire, s’il vous plait.
-Très bien. Il va falloir remplir ce document, savez-vous lire et écrire ?
L’épéiste acquiesça et remplit le document de sa plus belle écriture.
Nom : Guerrier du désert
Sexe ;
Âge ;
Caractéristiques physiques ;
Classe ;
Capacités… ;
etc.
Lorsqu’il eut terminé il tendit le papier à la jeune femme, elle relut le document et le guerrier lut en elle comme dans un livre ouvert. En dépit de son calme apparent, la jeune employée était impressionnée. Elle avait déjà été surprise par l’apparence de l’épéiste mais elle en lisant le document d’inscription, sa surprise grandit encore. L’âge du jeune homme, 17 ans, n’avait rien de si étonnant que ça, à première vue.
Mais lorsque l’on savait que l’âge habituel des débutants, était 15 ans on pouvait se poser quelques questions. Les capacités du jeune homme étaient vraiment surprenantes : en plus de ses attributs de guerrier et de ranger, il connaissait la magie. Évidement il arrivait que des aventuriers maîtrisent la magie en parallèle de leurs compétences principales. Mais seuls les rangs bronze voire argent possédaient un tel éventail de capacités.
La guilde classait les aventuriers selon 10 rangs :
Rang 10 : Porcelaine
Rang 9 : Obsidienne
Rang 8 : Acier
Rang 7 : Saphir
Rang 6 : Émeraude
Rang 5 : Rubis
Rang 4 : Bronze
Rang 3 : Argent
Rang 2 : Or
Rang 1 : Platine
Les deux rangs, les plus élevés n’avaient été atteints que par une poignée d’élus de légende, surtout les platines. Dans toute l’histoire on pouvait les compter sur les doigts d’une main, et ils n’intervenaient que pour des problèmes à l’échelle d’un pays.
Les rangs argent et bronze étaient des vétérans toujours actifs sur le terrain. Du rubis au saphir, c’étaient les niveaux intermédiaires, et enfin de l’acier à la porcelaine étaient les aventuriers débutants.
C’est tous ces détails, qui rendaient le profil du guerrier du désert si anormal aux yeux de la réceptionniste. Ce jeune homme était un débutant de 17 ans, et selon ses dires il avait des aptitudes équivalentes à un vétéran.
La jeune femme dévisagea longuement l’épéiste, puis elle dit d’un ton sévère :
-Est-ce que c’est une blague ?
Le guerrier, dans un premier temps surpris, comprit rapidement ce qu’elle voulait dire. Ce à quoi il répondit d’un ton bas et serein.
- Je vous assure que je ne me moque pas de vous. Ce sont mes vraies capacités que j’ai mentionnées.
-Vraiment ? Vous pouvez utiliser la…magie des sables ? C’est une vraie magie au moins ?
-Oui, si vous préférez ça se rapproche du chamanisme.
La jeune femme ne semblait pas convaincue, elle se retourna et fit un signe à l’une de sa collègue assise un peu plus loin, une autre femme aux longs cheveux bruns. Cette dernière se leva et rejoignit le duo. L’épéiste déglutit, il n’aimait pas la façon dont la situation évoluait. La voix de sable se fit à nouveau entendre dans sa tête :
- Cette femme est une prêtresse, elle sert le dieu suprême.
Le guerrier du désert ne répondit pas. Il connaissait le dieu suprême, le représentant de la loi et de la vérité. Mais le jeune homme ne savait pas ce que les ecclésiastiques à son service pouvaient réaliser comme miracle. Il ne voyait donc pas le but de la présence de cette femme. Son compagnon spectral répondit à sa question :
-Tu as oublié tes cours sur la théologie et les miracles. Les prêtres du dieu suprême peuvent lancer le miracle de détection du mensonge, autrement dit avec elle tu prouveras que tu dis la vérité.
Le guerrier se détendit à cette nouvelle. Les deux femmes échangeaient des murmures depuis plusieurs secondes. La prêtresse jetait des coups d’œil mauvais au guerrier du désert. Après presque deux minutes de discussion à voix basse, les deux femmes reportèrent leur attention sur l’épéiste. Leurs yeux, transperçaient littéralement le jeune homme.
La réceptionniste, se pencha par-dessus le comptoir avant de dire :
- Je vais vous reposer la question. Avez-vous écrit des mensonges sur ce document, oui ou non ?
- Non. Répondit l’épéiste du tac au tac. Je n’ai écrit que la vérité.
Un court silence s’ensuivit, la prêtresse avait fermé les yeux et semblait se concentrer. Elle serra un talisman représentant une épée et une balance, l’emblème de la justice. Une faible lueur illumina le talisman pendant quelques instants, avant de s’éteindre. L’observatrice rouvrit les yeux, elle fixa longuement le guerrier du désert, il put lire de la surprise sur son visage. De la sueur perlait sur son front. Enfin elle prit la parole :
- Il dit la vérité.
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