Serres les Alpes, 6 mai 2021

Bonjour Klaus!

Me voici enfin de retour dans ma petite maison au milieu des nuages. J'ai encore accepté de présenter mon numéro de force prodigieuse, en région parisienne cette fois-ci, et maintenant je suis contente de pouvoir à nouveau me coucher tôt, me lever tôt, de manger quand bon me semble et de m'occuper de mon association.

J'ai enfin réussi à discuter avec ton frère au téléphone et j'ai appris que tu es vivant. C'est un véritable soulagement, même si au fond je le savais déjà, parce que j'ai toujours l'impression que ce n'est pas possible qu'il en soit autrement. Mais sais tu seulement combien c'est difficile de faire la différence entre ses désirs et ses peurs et ce que l'on ressent au plus profond de soi? Et de ne jamais savoir quelle sera ta prochaine destination? J'avais peur de te blesser en te disant qu'à chaque fois que je croise un homme sans abri, j'imagine que tu es peut être dans la même situation que lui et que tu as peut être renoncé à ce comportement que je trouvais quelquefois insupportable. Mais je t'avais déjà suffisamment blessé dans le passé en te rejetant, tellement je te trouvais prétentieux, et il serait difficile de faire pire. Je me rends compte aujourd'hui que c'est justement cette fierté qui t'as permis de garder la tête hors de l'eau jusqu'à présent et j'ai envie que tu sois resté le même. Et j'enrage lorsque j'entends les gens dénigrer ceux qui n'ont plus rien. Ils ne savent même pas de quoi ils parlent...

Peut être que tu réussiras bientôt à faire publier le livre que tu avais prévu d'écrire lorsque tu étais encore à la clinique. C'est ce que je souhaite de tout mon coeur et j'espère être présente lorsque tu feras ta première dédicace.

Marie Alix.