Passé de Stella

Alors que je finis de me maquiller, mon portable se met à sonner pour m’annoncer l’arrivée d’un message. Avant de regarder, je termine d’étaler mon rouge à lèvres : un joli rouge avec de légères paillettes. Dans le miroir, mon reflet me sourit.

Je récupère mon téléphone posé sur la table du salon. Il affiche un SMS de Théa. Je l’ouvre.

« Prête pour faire la fête jusqu’au bout de la nuit ? »

À la lecture, je secoue la tête en riant.

« J’espère qu’ils ont de bons sodas ! Je pars de chez moi dans 10 minutes. »

Une réponse n’est pas longue à venir.

« 10 minutes normales ou 10 minutes Ela ? »

J’imagine déjà sa sœur râler à cette évocation.

« Je vous dis quand je pars. »

En attendant, je range mon portable dans mon sac à main. Il ne me manque plus qu’une veste et une paire de chaussures. J’en choisis des confortables avec de petits talons. La pire des choses serait d’avoir mal aux pieds pour danser. Cela dit, je ne sais pas si je vais le faire ce soir.

J’éteins la lumière dans mon appartement puis m’assure d’avoir bien verrouillé la porte avant de partir chercher mes amies. Elles m’attendent toutes les trois chez Théa. Ela sa sœur, est venue plus tôt. Quant à Adrienne, elle n’a qu’à sortir de chez elle et rejoindre la maison d’à côté.

Dans la voiture, l’anxiété me prend. Ai-je eu raison d’accepter cette soirée ? Au début, je n’étais pas pour, mais Adrienne, mon ancienne belle-sœur, a su me motiver. Elle a décidé que j’avais besoin de sortir pour me remonter le moral. Rester chez moi à déprimer ne m’aidera pas à faire face à une rupture. Faire la fête ne me paraît pas être la manière de réagir, mais comme résister lorsque trois de vos amies vous poussent dans la même direction ?

Avant de partir, j’envoie le SMS. Ensuite, je roule vers le sud de la ville. À croire que tout le monde vit là-bas. Par chance, la route est dégagée et les feux au vert. Du coup, je me gare en vitesse, devant la maison. Je leur téléphone afin qu’elles me rejoignent.

Je les entends avant même de les voir, il faut avouer que le rire d’Ela est assez particulier. Le genre que personne ne peut louper. Adrienne se glisse sur le siège avant alors que les sœurs passent à l’arrière.

– C’est bon, vous êtes attaché, on peut y aller ?

Après, une réponse positive, je me remets en route.

– C’est une soirée pour remonter le moral de Stella, donc c’est elle la reine de la fête !

Aussitôt, Ela passe la tête entre les deux sièges.

– C’est pour moi que tu dis ça ?

Théa intervient.

– Tu voudrais qu’elle le dise pour qui ?

La situation nous déclenche un éclat de rire partagé. Ela me tapote sur l’épaule.

– Ne t’en fais pas, je te laisserai tous les beaux mecs de la boîte.

– C’est quoi le critère pour être un beau mec ? Être vraiment beau ou d’avoir adressé la parole ? la raille Théa.

Pendant que sa sœur râle, nous arrivons en vue du bâtiment circulaire. Des néons bleus entourent le logo duquel se détache un palmier. Une tentative pour faire venir la plage jusqu’à nous ? C’est raté.

Ela jaillit de la voiture pour se précipiter vers l’entrée. Nous avançons plus lentement. Théa me complimente sur ma tenue, pendant qu’Adrienne me rassure. J’avoue que si elles n’avaient pas été là, je serais restée chez moi. Il y a toujours une appréhension. J’ai peur que quelqu’un me reconnaisse par rapport à mes photos. Seule, j’ignore comment je réagirais.

– Tu ne fais rien de mal, me répète Adrienne alors que nous avançons. Mon frère et toi n’êtes plus ensemble. Tu as le droit de sortir de ton côté.

J’ai beau le savoir, je pense toujours à lui. Mon deuil de la relation n’a pas encore été fait. Je doute d’être prête à rencontrer quelqu’un, mais les filles ont tendance à croire le contraire. Ou du moins, que je devrais essayer pour voir.

Nous retrouvons Ela qui trépigne d’impatience. Elle, au moins, ne se fait pas de soucis. Elle sait pourquoi elle est là : s’amuser et si elle peut trouver un homme qui lui plait, elle n’hésitera pas.

– Allez les filles ! On va tout manquer !

Théa leva les yeux au ciel.

– Je crois qu’on ferait bien de la rejoindre. On va finir par la perdre, plaisanté-je.

Alors que je m’avance vers la porte d’entrée, j’ai l’impression que mes mains deviennent moites. Ce n’est pourtant pas la première fois que je viens.

Une fois à l’intérieur, Ela nous fait un petit signe. Nous approchons, et elle m’attrape par le bras. Surprise, je me penche vers elle. Avec un sourire, elle me chuchote à l’oreille.

– Tu as vu le beau mec ? Il regarde dans ta direction.

Pour le coup, moi, je n’ai rien vu.

– Qui ?

– L’agent de sécurité !

Forcément, je n’étais pas venu là pour observer les agents de sécurité. Plus encore parce que je n’ai pas envie d’aller embêter des gens qui travaillent.

– Ils regardent tout le monde.

Je jette tout de même un coup d’œil vers l’inconnu. Grand, il porte un t-shirt noir sur lequel je peux lire le mot « sécurité ». Les lettres sont tendues sur son torse qui met en valeur sa musculature. Ses cheveux bruns sont coiffés en bataille et sa barbe taillée pour donner l’impression qu’il ne l’entretient pas.

Nos regards se croisent l’espace de quelques instants. Je me sens mal à l’aise et détourne les yeux, pourtant il continue à observer ceux qui rentrent avant de s’intéresser à nouveau à ce qui se passe dans la salle.

– Alors ? Beau gosse ?

Ela s’enflamme. Je hoche la tête pour ne pas la vexer.

– Stella a trouvé sa proie, déclare-t-elle d’un air convaincu.

Je me sens mal à l’aise.

Théa nous prend chacune par le bras pour nous entraîner vers le bar.

– On libère le passage. Sinon on va se faire limoger !

La musique résonne dans nos oreilles alors que nous nous rapprochons de l’intérieur de la salle. Au moment où nous passons devant l’agent de sécurité, je ne peux m’empêcher de tourner la tête vers lui. À nouveau, il me regarde. Je me sens ridicule. Pour peu, je crois rougir. Il ne manquerait plus que ça.

L’homme se déplace. L’espace d’un instant, je l’imagine s’approcher de moi. Mais il s’enfonce dans la foule et disparaît. Pour l’oublier, je commande ma boisson pétillante préférée. Ensuite, nous allons nous installer ensemble, nos verres à la main.

– Où est ton admirateur ? me demande Ela.

– Parti travailler !

Elle grimace.

– Je vais aller te trouver un mec sur la piste de danse !

Une minute et elle s’élance. Malgré sa petite taille, elle se fait une place entre les corps.

– Tu iras danser, Stella ?

– Je finis ma boisson avant.

– D’accord. Ma sœur devrait réussir à ne pas s’attirer des ennuis, dans ce laps de temps.

Nous commençons à discuter. Alors que je reprends une gorgée de soda, j’aperçois l’agent de sécurité qui surveille la foule. Son visage est concentré. Il a l’air professionnel. Je ne sais même pas pourquoi je m’intéresse à lui.

Adrienne se redresse.

– Allez ! On danse !

J’accepte, me lève et les suis. Autant profiter de la musique et s’amuser. Surtout que j’aime particulièrement le titre qui passe en cet instant. Je m’agite sur la piste, face à mes amies qui rient. Nous profitons de notre soirée ensemble.