Toxique
de Iwerzohn
Serait-ce pour satisfaire sa peur profonde de rester seule ? Quand bien même, il nous incombe le choix du partenaire qui va partager notre vie parmi tous.
Pour une sensation de lumière et d’espoir, on fonce. Trop vite. Les désillusions se dévoilent jour après jour. Alors on se dit qu’il faut tenir, qu’une relation a du bon et du mauvais, que ça se travaille, toujours garder espoir. Mais lorsque les larmes coulent, le discours change.
« Arêtes de pleurer, tu as 27 ans ! me dit ma mère.
- ET ALORS ?! C’est normal pour toi de se faire manquer de respect comme ça sans cesse ?
- Harmony. Quand c’est comme ça tu dis deux trois mots et puis tu arrêtes. Ça ne sert à rien. Sinon ça se dispute toujours.
- Alors il faut se laisser parler comme de la merde, juste dire deux trois mots alors qu’il en a rien à foutre parce que « stop » et c’est tout. C’est comme ça. Toujours se laisser se faire manquer de respect. Et ne rien dire. C’est comme ça que tu vois la femme toi ? C’est comme ça que tu vois les relations de couples ? Et surtout ne pleure pas ». Elle n’a pas su quoi répondre.
Toujours faire attention à prendre des pincettes pour lui parler, au risque de déclencher une dispute. Toujours prendre le risque de se faire mal parler pour des banalités, parce qu’on n’est pas d’accord, qu’on ne comprend pas ou simplement parce qu’on ne l’a pas entendu. Chaque matin se lever en se demandant si l’on va se disputer aujourd’hui et à quel niveau sur l’échelle du chaos. En avoir peur. Car à n’importe quel moment de répit le conflit peut démarrer. Très vite, il s’exprime tantôt à coup de claque dans sa main faisant raisonner le bruit de la violence. Me ramenant à cet accès de colère qui un jour, a ravagé tout mon appartement. Le chaos autour de moi, mon chat disparu et la violence conjugale n’étant même pas la chose qui m’ait le plus marqué. Le chaos dans lequel je m’étais moi-même jetée et laissée pour compte est la chose que je ne me souhaitais pas étant petite me dis-je.
« Stop c’est Stop ! ». Quand il n’essaie pas de tout contrôler en te disant de faire ci ou ça comme ceci ou comme cela, eh bien "tu devrais faire ça" comme ça. Sa bouche ne lui sert quasi exclusivement qu’à sortir des reproches, se plaindre, être négatif envers le monde, la société, ou moi-même. Et il ne s’en rend même pas compte.
« Pourquoi tu ralentis d’un coup ? » et la sensation qu’on me demande de marcher au pas comme chez les militaires.
« Je partirai un jour, ce n’est pas possible de vivre comme ça à s’engueuler tous les jours, vivre cette pression, cette dictature, ce n’est pas une relation de couple saine » me dis-je presque chaque jour. C’est déjà énorme, je le sais.
« Vous vous disputez presque chaque semaine. On ne peut pas être heureux comme ça. S’il n’y a pas de calme, il n’y a pas moyen d’être heureux et de vivre ensemble. Ça ne peut pas marcher avec des disputes tout le temps, puisqu’il n’y a pas de calme ». Mais ce que ma mère sait encore moins, c'est que les disputes sont en réalité quotidiennes. Elle ne sait pas que mon père a déjà été témoin un jour d’une scène horrible, où il a vu ce garçon que j'étais censée aimer, me cracher à la figure et me gifler, juste sous ses yeux, impuissant. "Neurchis d’escalade vélos", pour une biesse banalité. Comme d’habitude. Parce que j’essayais de l’aider ce jour-là pour des démarches administratives et que l’on ne se comprenait pas. Le manque de respect est toujours ce qui me fait décoller. Et lui le fait de ne pas respecter son Stop.
Son stop qui est en réalité un stop au respect de ton amour-propre. Et de devoir l’accepter ou en payer le prix fort du crachat dans ta figure. « C’était pour l’éviter que j’ai dit stop. Mais toi tu continues, tu continues, tu ne me laisses pas me calmer et voilà ce qui arrive ».
Pourtant moi je réussis toujours à l’éviter. Je n’ai jamais tout cassé autour de moi, je n’ai jamais craché au visage de quelqu’un par réflexe. Mais quel réflexe, l’inconsidération ultime de l’être humain ? Les mots m’ont toujours suffi. Et ce sont ces mêmes mots qui me font payer le prix fort. Et pourquoi ne pas mettre un Stop au manque de respect un peu trop facile pour commencer, au lieu de mettre un Stop à la personne qui outrée par ce comportement irrespectueux initial ? Car on a tous le droit au respect, H24. Quand quelqu’un se fait mal parler dans la rue, je pense que la personne en face a le droit de se défendre de prime abord et de répliquer. Je ne pense pas, que cette même personne qui a engagé les hostilités gratuitement envers autrui, puisse se permettre en plus de lui mettre un Stop pour qu’il ne puisse pas se défendre, si ? Et bien dans son monde à lui, il peut se le permettre, et qu’on ne lui dise rien sinon c’est Stop. Et quand c’est Stop, c’est Stop.
Constamment avoir la sensation de vivre dans la matrice et sous les règles d’un autre. Au lieu de ne former qu’un, ensemble, devoir se plier à l’autre sans cesse. Et tu te dois de supporter ce manque de respect, de laisser passer, de serrer les dents pour peut-être pouvoir en discuter calmement plus tard. Sauf que ce plus tard fini en général aussi mal qu’il n’a commencé. Car ce plus tard ne dure jamais assez longtemps et que plus tard la personne en face de toi n’a pas changé. Elle n’accepte pas les critiques. Pas facile pour quelqu’un de susceptible à la base, je le conçois. Tant d’efforts qui passent inaperçus. Pire même, tu es la cause de tout et c’est lui qui se plie en mille pour toi. Ingrate.
Vos deux mondes sont séparés par une galaxie mais tu tentes de continuer à construire ce pont. Alors que tu sais que tu finiras par en tomber. Car tu te dis que tout le monde a le droit de trouver l'amour, tout le monde sur cette Terre. Tu sais que tu pourrais arrêter les frais, et que demain est de mauvais augure, du moins tu en as peur chaque matin car il ne se rend compte de rien et ne te comprend pas.
Il n’a pas l’air si méchant pourtant ? Il te dit que tu pourrais lui demander ce que tu voudrais, un coup de main, que ça ne le dérangerait pas. Ah, les bonnes volontés. Pourtant l’on te reproche plus tard de ne pas avoir pu faire ça toute seule comme une grande. Pourquoi Seigneur, l’avez-vous rendu si compliqué ? Et irrespectueux à la moindre occasion.
Tout est du stade nucléaire, pourtant vu de tout en haut, ces problèmes-là ne sont même pas visibles à l’oeil nu. Sur l’échelle des problèmes graves mondiaux et importants, ils sont pourtant moindres. Comment peut-on réussir à semer le chaos pour si peu, sans cesse ? Être incommodé par le monde, voilà tout.
Et lorsque tu essaies de lui expliquer que telle ou telle chose ne se fait pas, que ce n’est pas juste, pas correct, (en somme le rôle d’un parent, donc déjà assez chiant comme ça) il prend ces messages pour des « punchlines ». Donc le message que tu essaies de communiquer, est une punchline. Donc gratuite et injuste ? Ce qui signifie qu’au lieu d’essayer de comprendre les mots de l'autre et d’en faire quelque chose, pour le bien commun du couple, on réduit ça à des « punchlines ». Je veux bien concevoir que ce soient des phrases chocs, mais c’est bien parce que les situations qu’il me fait vivre le sont tout autant pour commencer. Que son comportement est un choc de prime abord et que j’aimerais que cela ne se reproduise plus à l’avenir (c'est beau de rêver). Le mal-être de devoir supporter ces comportements et de vouloir lui expliquer, est vu comme un battle de rap où le chanteur lâche punchline sur punchline pour anéantir son adversaire.
Je voulais simplement que l’on me respecte sans entrer dans une énième guerre mondiale pour faire valoir mes droits. Que pour une fois il puisse reconnaitre ses torts, et lui, passer à autre chose. Pour changer. Que pour une fois il me laisse pointer du doigt ce que je n’accepte pas, dans le calme. Au lieu de ça il est tellement pris de colère lorsque j’essaie de lui expliquer que ce qui vient de se passer n’est pas correct, qu’il lui faut d’emblé mettre un Stop et couper court à la " discussion ". Il faut à chaque fois passer par tout ce cycle dramatique au lieu d’essayer de comprendre que son comportement a été inadéquat sur l’instant T pour autrui, tout simplement. Mais je ne pense pas qu’il ait permis que cela se passe dans le calme au moins une fois. Me reprochant seulement cette situation et de ne pas le laisser se calmer. Mes mots sont destinés à passer au travers du filet quoi qu’il advienne pour le pire des résultats.
Serait-ce ma seule initiative ? Bien sur que non. Et il le sait. Mais qu’en pense-t-il réellement lorsque ces comportements se répètent, ainsi que les disputes, et le bruit de ses mains qui claquent violemment ? Et tout ceci quotidiennement. Quotidiennement.
Le nombre de dispute ne devrait-il pas l’alerter ou il ne voit que le simple fait de ne pas respecter sa volonté à chaque fois ? Donc me placer comme fautive. Pourquoi autant de Stop posés d’ailleurs s’il ne déclenche jamais aucune bombe à la base et qu’il est tout à fait respectueux ? S’il est en colère parce que je ne le laisse pas se calmer, il a déjà oublié ce que je lui reprochais au départ. S’il l’a seulement entendu. Mon message passé à la trappe, il a juste dit Stop et a vu le non-respect. Ensuite il se fâche " légitimement ". Ma cause première n’est certainement pas légitime puisqu’elle a mené au chaos.
Accepter un mauvais comportement de la part de son conjoint et passer à autre chose dans sa journée, le conseil donné et le secret du bonheur en couple à l’écouter. Proteste et il y mettra terme rapidement ou subit le chaos. Entendre et accepter dans le calme ce que l’autre lui reproche (et le respect, et le respect) serait comme lui faire avaler une couleuvre. Comment évoluer et avancer avec une telle rigidité ? Quelle perspective ?
C'est beau l'empathie. Le problème c'est que quand on en a trop, on se croit capable de tout endurer, tout comprendre. Et elle est là la connerie.
Aujourd'hui, je m'offre la liberté. C'était la dernière fois que tu cognais du poing tout ce qui t'entourais, que tu me hurlais dessus comme un fou furieux à deux centimètres de mon visage, que tu me jettais à la figure ce que tu avais sous la main, que tu me touchais, que tu pleurais, que tu t'excusais de ne plus jamais recommencer.
Le passé est propre à chacun, mais elle ne devrait pas être une excuse pour continuer à agir ainsi. Car l'Homme est perfectible. Une si belle âme, un enfant meurtri, des émotions exacerbées, incontrôlées, subies... Si je viens de sortir de cet enfer, certains n'en sortiront peut-être jamais.
Ne pas oublier que l'on est responsable de nos actes. Que c'est également notre choix de continuer à subir et manger la merde ou en sortir. Nous ne sommes pas responsable des autres, de leurs actions, ni de leur destin, seulement le nôtre en qui nous avons le plein pouvoir. Alors respectons nous un petit peu.
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