Chapitre 1

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« Adrénaline ! Non ! Attendez… Comment… ? »

Bip. Bip. Bip.

  Quand June ouvrit les yeux son premier réflexe fut de les refermer. Elle était aveuglée par la lumière blanche qui lui brûlait la rétine même à travers ses paupières. Sa bouche était pâteuse et la sensation de son corps était quasi-absente. Une douleur intense lui vrillait cependant le thorax, ce qui lui causait de la peine pour respirer. La jeune femme n’avait plus conscience ni de l’endroit où elle était, ni de ce qui lui était arrivé. Elle tenta une nouvelle fois d’entrouvrir les yeux. Sans succès. La clarté était beaucoup trop vive pour que son cerveau puisse l’accepter. A défaut de pouvoir observer les alentours elle essaya de remuer le bout de ses doigts. Un infime soulagement la parcourue quand elle réussit. Un mélange d’odeur de stérilisant, de sang et de médicaments emplissait ses narines. Elle percevait également les secousses et le vrombissement digne d’un véhicule lancé à vive allure. Et les sirènes. Ces éléments ajoutés au bruit incessant des bip qui l’entouraient, elle en déduisit qu’elle se trouvait dans une ambulance. Ou du moins un véhicule de soins qui l’emmenait sûrement à l’hôpital. Mais elle n’avait toujours aucune idée du pourquoi. Ignorant la brûlure de sa gorge sèche, l’oppression de sa poitrine et avec un effort surhumain, elle murmura :

« Que… que s’est…il… passé… ? »

  June sentit une main se glisser dans la sienne pour la serrer et des doigts agréablement tièdes se poser sur son front. Il faisait froid et ce seul contact la réchauffait quelque peu. Elle n’avait aucune idée de l’identité de la personne à ses côtés et elle n’en avait pas grand-chose à faire. La seule chose qui la préoccupait était de savoir ce qui lui était arrivée.

« Reste calme. Tu as froid, lui demanda une voix masculine. »

  Étonnement June était parfaitement calme depuis qu’elle avait repris conscience. Elle ne savait pas si c’était par faiblesse ou à cause des médicaments qu’on lui avait sûrement injectés mais elle ne parvenait pas à ressentir de panique. Elle hocha péniblement la tête en réponse à la question de son interlocuteur. Les mains qui étaient sur elle la quittèrent. Elle entendit un bruit de papier froissé et la seconde d’après, une matière bizarre la recouvrait, la réchauffant presque instantanément. Une couverture chauffante. Un imperceptible soupir de bien-être traversa ses lèvres. La jeune femme était encore vaseuse mais elle se sentait légèrement mieux. Les mains de l’homme revinrent se placer à leurs positions initiales et elle le sentit caresser son front du bout de son pouce.

« Nous allons à l’hôpital. Tu as eu un grave accident. Tu es chanceuse d’être encore là. »

  Il lui parlait d’une voix posée. Elle hocha à nouveau la tête et bascula dans un sommeil sans rêve où elle aperçut à peine le brouhaha de son arrivée à l’hôpital.

  Quand June émergea à nouveau elle ne savait pas combien de temps était passé depuis son réveil dans le camion. Elle ne se rappelait toujours pas l’accident non plus. Elle entrouvrit les yeux. La lumière était tamisée, la rendant bien plus vivable que celle du véhicule. Une plainte de douleur lui échappa quand elle tenta de se redresser pour observer les alentours. Sa mère était au-dessus d’elle avant même qu’elle n’ai eu le temps de la voir arriver.

« Ne bouge pas ma chérie ! Je vais redresser le lit. Ne bouge surtout pas. »

  Elle entendit vrombir le moteur alors que le haut du lit se relevait. Elle grimaça en sentant des douleurs se raviver çà et là. Quand elle fût en position semi-assise sa mère arrêta le lit et tira la chaise pour s’assoir à ses côtés.

« Bonjour mon cœur. »

  June la regarda lui sourire et vit des larmes au bord de ses yeux. La jeune femme glissa ses doigts jusqu’à la joue de sa mère et lui caressa doucement. Sa main retomba mollement sur le matelas sous l’effort. Elle prit un instant pour parcourir la pièce des yeux. Une chambre d’hôpital classique. Petite, blanche, avec une fenêtre qui donnait sur une grande cour intérieure. Elle vit aussi deux portes. Sûrement une qui donnais sur le couloir et la seconde pour accéder à la salle de bain. Son regard se posa sur les draps qui cachaient son corps. Elle vit plusieurs tubes et fils qui la reliaient à des machines, des perfusions et poches en tous genres. Elle vit quelques cicatrices sur ses bras. La force lui manquait pour soulever le drap et voir ce qu’il en était du reste de son corps. Elle soupira et reporta son attention sur la personne à ses côtés. Quand June voulu prendre la parole un sifflement sortit de sa gorge et elle toussa légèrement avant de faire une nouvelle tentative.

« Ça fait… combien… »

  Sa voix mourut sur ses lèvres et elle s’agaça en poussant un grognement. Sa mère lui prit la main et posa la seconde à l’arrière de son crâne pour caresser ses cheveux bruns.

« Tu es resté dans le coma pendant trois jours ma chérie. »

  La jeune femme baissa la tête et ferma les yeux face à cette révélation. Certes c’était peu mais elle n’imaginait pas que son état l’ai plongé dans le coma. Elle releva les yeux en entendant sa mère poursuivre.

« Tu es une battante. Les médecins ont tous été surpris par ta vitesse de guérison. Tes bleus sont presque tous partis, tes blessures ont cicatrisées à une vitesse fulgurante. Beaucoup ont dit qu’ils n’avaient jamais vu ça. Et la fracture que tu avais à la jambe et déjà à moitié guérie. Tu imagines ? »

  June fronça les sourcils en relevant la tête vers sa mère. Est-ce qu’elle se payait sa tête ? Aucune fracture ne pouvait à moitié guérir en trois jours. Ce n’était pas possible. Quand la femme vit le regard noir de sa fille elle se mit à bégayer.

« June je te promets sur tout ce que j’ai que c’est la vérité. Aucun des médecins n’a su expliquer comment c’était possible. C’est un miracle que tu sois encore là. Le choc aurait dû te tuer sur le coup. »

  L’intéressée détourna à nouveau les yeux et haussa les épaules. Comment pouvait-elle le savoir ? Elle ne se rappelait rien. Sa mère sembla alors le noter et lui posa la question. Quand sa fille secoua la tête en guise de réponse elle baissa la sienne.

« Tu as été percutée par un camion lancé à soixante kilomètres-heures. »

  June releva brusquement la tête et gémit en sentant une vive douleur dans ses cervicales. Soudain la chambre disparut devant ses yeux. Elle était sur le passage clouté, son téléphone à l’oreille, un sac rempli d’habits neuf dans la main opposée. Elle avait vu les phares plus qu’elle n’avait entendu les pneus crisser. Et puis le vide. La chambre revint autour d’elle. Ses mains s’étaient crispées sur les matelas sans qu’elle ne s’en aperçoive.

« Ton cœur s’est arrêté trois fois et il a mis trente-six minutes avant de redémarrer quand tu t’es réveillée dans le camion. Ils allaient t’injecter une dernière dose d’adrénaline car celle d’avant ne faisait plus effet. Ton cœur est reparti tout seul. Ça non plus personne ne sait l’expliquer. Tu es une miraculée June. »

  Une miraculée ? Non. Elle avait juste eu de la chance. Les miracles ça n’existe pas. Ça n’a jamais existé. Et surtout June n’y avait jamais cru. Le camion avait juste dû la pousser et elle s’était cogné la tête. Et leurs machines devaient être défectueuse. Il n’y avait que ces explications de plausibles. Rien d’autre.

« Je vais te laisser te reposer ma chérie. Tu as besoin de reprendre des forces. Je reviens demain d’accord ? »

  Quoi, déjà ? Elle était réveillée depuis un quart d’heure et sa mère s’en allait déjà. Mais il fallait avouer que June se sentait extenuée. De toutes façons elle n’arrivait pas à parler. Elle hocha la tête un peu tristement et fit un mouvement en arrière pour demander implicitement à sa mère de la rallonger. Celle-ci lui sourit et appuya sur le bouton. Le moteur vrombit à nouveau et le matelas se baissa. La jeune femme cligna des yeux pour remercier sa mère avant qu’elle ne lui embrasse le front. La brune ne sut pas si sa mère avait déjà quitté la chambre quand elle sombra dans un monde où elle revivait son accident en boucle. Elle entendait aussi une voix qu’elle ne connaissait pas. Elle l’appelait sans cesse.

  June avait du mal à reconnaître la fille qui lui faisait face dans le miroir. Pourtant pas grand-chose n’avait changé. Elle avait toujours ses boucles brunes. Mais elles semblaient mieux dessinées. Ses yeux étaient toujours verts mais bien moins ternes. Même son visage, aussi pâle soit-il, avait un éclat nouveau. Elle aurait dû ne ressembler à rien. Une personne qui sort d’un accident aussi grave ne ressemblait pas à ça. Et pourtant elle dégageait un charme qu’elle n’avait jamais perçu avant. Le plus étonnant résidait dans la marque qui était apparue sur son épaule gauche. Tout le monde avait pensé que c’était une cicatrice comme une autre. La jeune femme était persuadée que ce n’était pas le cas. Les contours étaient beaucoup trop parfaits pour être une simple cicatrice. Elle avait l’impression qu’on lui avait tatoué le cycle lunaire avec de l’encre couleur caramel. Mis à part le physique d’autres changements avaient opérés. Ses réflexes et sa force étaient accrus. Elle se sentaient différente. Sa guérison avait progressé en un temps record. Les médecins s’étonnaient encore du peu de rééducation dont elle avait eu besoin avant de pouvoir remarcher. Tous l’avaient félicité pour son énorme travail. Pourtant ses efforts n’avaient pas été si exceptionnels. Du moins elle n’en avait pas l’impression. Elle avait juste fait ce qu’on lui demandait quand on le lui demandait. Dix jours plus tard elle était de nouveau sur pied et tous les feux étaient au vert pour sa sortie.

  La jeune femme poussa un soupir et enfila sa veste avant de sortir de la petite salle de bain. Elle s’assit sur le lit qui l’avait accueilli pendant presque deux semaines en attendant que sa mère finisse de signer les papiers. Cette dernière arriva quelques minutes plus tard et aida sa fille avec le peu d’affaires qu’elle avait. Toutes deux prirent la direction de la sortie et une fois dehors, June inspira à plein poumons. Une fois dans la voiture elle se mit à rêvasser en regardant distraitement le paysage défiler. Le trajet ne dura pas et une immense joie l’envahit quand elle vit sa maison se dresser devant ses yeux. Enfin elle était chez elle. La brune descendit en hâte de la voiture et se précipita jusqu’à la porte qu’elle ouvrit à la volée.

« Surprise ! »

  Elle sursauta en entendant ses amis hurler à l’unisson et un sourire se plaqua sur ses lèvres. Ils n’étaient que trois mais ils faisaient partie des personnes les plus importantes de sa vie. Ils se jetèrent sur elle pour l’étreindre tous ensemble, la faisant rire aux éclats. Ces deux semaines avaient été longues sans eux. N’ayant plus de téléphone, sa mère lui donnait des nouvelles mais elle n’avait eu qu’une hâte : les revoir. Après de longues minutes à s’étreindre et à s’embrasser, ils se séparèrent enfin. Ce fut Mégane, la petite rousse aux yeux bleus qui prit la parole en premier.

« Mon dieu, June, on ne dirait pas que tu sors d’un accident ! Tu es resplendissante !

— Franchement ? Je te voyais au moins en fauteuil roulant ! Ç’aurait été cool de te faire rouler dans la descente du parc ! Plaisanta Alexandre.

— T’es vraiment nul Alex ! Tu pourrais surtout te réjouir qu’elle aille aussi bien, le sermonna leur amie. »

  Léandre était le seul à rester silencieux. C’était le meilleur ami d’enfance de June et elle lisait en lui comme dans un livre ouvert. Dans ses yeux bruns, elle voyait parfaitement le soulagement et la joie de la revoir indemne.

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