Les garçons étaient presque tous réunis et l’ambiance qui régnait était euphorique comme à l’accoutumé. Cependant, Brice manquait à l’appel. Ce qui était habituel. Il trouvait toujours le moyen d’arriver en retard pour bien marquer son entrée : ce garçon adorait être au centre de l’attention depuis notre rencontre.

Nous nous connaissions pour certains depuis le collège mais ce ne fut qu’au lycée que notre groupe fut au complet et depuis, nous devînmes inséparables, faisant nos quatre cents coups ensemble, formant un bloc solide et solidaire. Le lien qui nous unissait devint plus fort au fil du temps. Durant nos études secondaires, nous étions surnommés les 5 mousquetaires car comme disaient nos camarades de l’époque, nous formions un creuset représentatif de la société, une preuve que l’amitié n’avait ni couleur, ni race et encore moins de culture.

Brice Kenfack était d’origine camerounaise. Arrivé en France à l’âge de 10 ans, il s’était un peu trop bien intégré. Dès lors, il rejetait tout ce qui pouvait venir de sa culture d’origine et préférait le raffinement à la française. Nous le taquinions souvent en lui disant que dans une autre vie, il avait été un lord anglais ou un noble français car il mettait un point d’honneur à être distingué. On aurait dit qu’il avait grandi dans une famille aisée. C’était un jeune cadre bancaire très brillant du Crédit Agricole. Dynamique et compétent, il était chargé d’affaires bancaires auprès des entreprises. Il avait réussi l’exploit de développer un portefeuille client très important à seulement 30 ans. Il bénéficiait donc d’une forte rémunération qui lui permettait d’alimenter son style de vie couteux. Bref, Brice aimait bien qu’on lui accordât de l’importance et cela pouvait passer pour de la vantardise. Forcément, cette attitude pouvait agacer plus d’un lorsqu’on ne le connaissait pas bien. Mais au fond, c’était un gentil garçon juste heureux d’avoir réussi en dépit de son passé et de ses origines.