Chapitre 5
Maman se brûle avec son café et manque de s'étouffer. Papa lâche son téléphone qui glisse sous le canapé.
- Répète s'il te plaît ? Demandent-ils d'une même voix.
Je n'arrive pas à ouvrir la bouche. Mes yeux s'embrument.
- De qui ? Interroge Maman. Ne me dites pas que c'est volontaire...
- Je ne suis pas sur que là soit la question, intervient mon père.
- Emma, comment avez-vous fait pour que cela arrive ? Tu sais qu'il faut se protéger !
- Oui maman et nous l'avons fait !
- Explique-moi comment ce bébé a pu arriver alors !
- Je ne sais pas ! Je ne sais pas...
Mon père se lève et s'asseoie à mes côtés. Je m'écroule dans ses bras. Il me caresse les cheveux comme il l'a toujours fait lorsque j'avais peur étant petite.
- ça va aller, on va vous aider, me chuchote-t-il. Avez-vous réfléchi à ce que vous alliez faire ?
Je secoue la tête.
- Vous savez que l'avortement existe ?
Je murmure : - Je ne veux pas avorter. Vous m'avez toujours appris à assumer mes choix ou mes erreurs.
- Emma, tu n'es pas majeur, on ne connaît pas Dylan, tu ne crois quand même pas que je vais te laisser avec un bébé sur les bras ? Hausse la voix, maman.
- Alors quoi ? Tu vas me faire quitter la maison, comme Alexandre ?
- Emma !
- Tu as raison, on va partir. On va se débrouiller. Tu ne verras plus celle qui te déshonnore, je crache.
Je me souviendrai toujours de cette discussion entre mon frère et elle. Un soir où il rentrait tard, il avait demandé à lui parler pour lui annoncer que Lisa était enceinte. J'avais entendu un verre se casser puis ma mère lancer : "Va-t-en, tu nous déshonnores". Mais Lisa a avorté alors elle n'en a plus parlé.
- Comment peux-tu dire ça ?
- Tu as dis la même chose à Alexandre, maman. Il n'y a pas de raison pour que cela ait changé en trois ans.
- Je ne veux juste pas que vous reproduisiez nos erreurs ! s'écrit-elle.
- Vos erreurs ?
Je la vois hésiter. Je comprends qu'elle cache quelque chose.
- Vous n'êtes pas les seuls à avoir eu un enfant si tôt. Ton père et moi avons aussi été dans cette situation or nous n'avons pas eu de soutien et... nous n'avons eu d'autre choix que l'abandonner. J'y repense toutes les nuits depuis ce jour. Il n'y a pas un jour où je ne regrette pas et si je pouvais revenir en arrière je pense que je le ferai. Je n'ai pas eu le courage d'assumer cet enfant et je m'en mords les doigts même s'il est heureux dans une autre famille.
Elle éclate en sanglots. J'enfonce ma tête dans mes mains et lâche mes larmes. Dylan m'encercle de ses bras tandis que papa fait de même avec maman. Je me lève et vais m'asseoir à côté d'elle.
- Je suis désolée maman. Vraiment désolée... Je ne savais pas tout ça. Je comprends tu sais. Je comprends maintenant. Je ne t'en veux pas de nous protéger. Mais je suis prête à assumer.
- Je serai là, renchérit Dylan.
- Vous ne savez pas la charge que cela représente. Lisa aussi pensait pouvoir assumer.
- Je ne suis pas Lisa maman, bien qu'elle soit courageuse.
- Nous savons ça Emma. Mais vous ne pourrez pas faire demi-tour une fois que vous aurez fait votre choix.
Etonnement, j'attends avec impatience la fin de la journée. Je m'en ronge même les ongles.
- Arrête ! Tu vas saigner, m'alerte Mathéo. Je t'observe depuis le début tu cours et tu n'es pas attentive ? Où est ta tête ?
- Désolée, j'ai hâte d'être ce soir.
Il hausse un sourcil mais ne relève pas.
La voiture de papa est garée au coin de la rue.
- Bonsoir ! Bonne journée ?
Nous arrivons rapidement dans une rue calme, juxtaposée à des commerçants. Nous remarqucons la plaque de location et nous garons devant. Une petite dame sort de l'appartement et nous acceuille chaleureusement. Après quelques échanges, elle nous fait la visite.
Une grande pièce de vie s'ouvre à nous ouverte sur la cuisine. En face, une baie vitrée qui donne vue sur une petit jardin. Un escalier, à droite de l'entrée, mène à une chambre, grande et lumineuse, une autre plus petite et une salle de bain à laquelle on peut accéder par la première pièce à coucher. La salle de bain n'est ni grande ni petite mais très fonctionnelle : elle comporte une baignoire en plus de la douche ainsi que de nombreux rangements, ce que j'apprécie tout autant.
- Alors, dites-moi, qu'en pensez-vous?
Je n'arrive pas à croire que je suis là. Se retrouver face à un avenir que je n'avais pas une seconde envisagé me déboussole. Je n'ai d'autres mots pour exprimer mon état : je suis perdue. En même temps que la peur me paralyse, l'excitation me gagne peu à peu pour envahir mon cerveau et me faire monter le rouge aux joues. Je reviens à la réalité par un coup de chaleur.
- Cela m'arrive rarement de me projeter mais je dois avouer que je nous vois plutôt bien évoluer ici, confie Dylan.
Je ne suis pas très intéressée par l'administration mais j'aimerais que nous puissions signer ce soir.
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