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Souvent, nous nous retrouvions entre habitués du Club au petit matin. Chacun racontait ses expériences de la nuit autour d’une soupe à l’oignon. Des amitiés se nouaient, des asservissements, des rendez-vous se négociaient. C’est ainsi que le projet apparu.
Entre-temps le Damn’s fut fermé pour travaux quelques semaines. Nous avions participé à la définition du nouveau lieu, offrant des nouveautés extraordinaires. Le manque d’occupations et de stimulations fut sans doute une des causes de mon idée. L’anniversaire de William approchait. Je me sentais plus amoureux que jamais, alors qu’il me paraissait toujours lointain, malgré nos épousailles. Je voulais marquer le coup. Un long weekend de printemps se profilait, sans projet particulier.
Le vendredi soir, après le diner, je me blottis contre Will, lui montrant mon envie de caresses. Il réagissait peu, malgré le gonflement de son sexe sous ma main.
— Will, es-tu heureux avec moi ?
— Bien sûr, Nic !
— Mais encore ?
— Tu me plais et j’aime quand nous baisons !
— Mais encore ?
— Nic, ne viens pas me chercher…
Je sortis de derrière le canapé les cordes et le fouet, que j’avais préparés.
— Tiens !
Le temps qu’il réalise, j’étais nu devant lui.
— Will, je veux, une fois, pour ton anniversaire, recommencer. J’ai besoin de ça. Je suis en manque…
— Nic, tu sais qu’avec toi, je perds mes contrôles. Tu as un effet désinhibiteur…
— Je sais. Je sais ce que je risque, mais je le veux, je te le donne.
— Nic…
— Ce soir, c’est sans limites, sauf la figure bien sûr. Va jusqu’au bout, je m’en fiche, je suis à toi. Fais-moi sentir le frisson ultime.
— Nic, je vais te tuer !
— Mais non ! Tu t’arrêteras avant ! Mais nous aurons été loin. C’est ton cadeau, mais je vais en profiter.
Je ne sais pas pourquoi j’argumentais, car ses yeux avaient réagi avant sa volonté.
Il me prépara, me haussant pour avoir les pieds loin du sol, ballon sans défense pour recevoir ses coups. L’adrénaline me faisait jouir. Il commença par de petits claquements secs, sur mes fesses et mes parties génitales. Leur déploiement accentua leur fréquence. Cette douleur particulièrement aiguë me permettait de monter. Les mouvements prirent de l’ampleur. La lanière me faisait tournoyer en se libérant. J’étais bien, dans un monde à part. Je dus perdre connaissance, car un coup plus violent me fit gémir. J’étais au maximum du supportable. J’aurais voulu qu’il le devine et qu’il calme ses coups. Je ne voulais pas défaillir et luttais contre l’évanouissement.
Je me réveillais dans notre lit, sortant de cauchemars horribles. Un premier mouvement m’arracha un hurlement. Je me calmais en reprenant le contrôle de mon corps et de mon esprit. Mon cri fit rentrer William et Charles. Je sus que j’avais gagné en voyant les yeux de Will. Ils avaient retrouvé leur bleu brillant. Il me serra doucement dans ses bras. Charles nous regardait. Il était un grand habitué du Damn’s, toujours du côté des dominants. J’aimais passer dans ses mains, car il savait distiller une souffrance fine et précise. J’appris à cette occasion qu’il était médecin. J’étais resté deux jours dans un état semi-comateux. Je ne pouvais voir mon torse et mes jambes, mais je devinais les entailles profondes. Il m’avait suturé à de multiples endroits.
La douleur me relançait au moindre mouvement. J’aimais cette impression en fin de séance. Malheureusement, elle s’estompait rapidement. Charles me dit que j’en avais pour une bonne semaine. Will lut sur ma tête un remerciement.
Plus tard, il me dira qu’il m’avait fouetté, battu, me réveillant pour recommencer. Des heures durant. Quand il était revenu à lui, il fut effrayé par mon état, suspendu depuis des heures, évanoui trop longtemps. Charles était arrivé rapidement. Il avait rassuré Will, mais s’était interrogé sur la nécessité d’un appel au SAMU. Cela aurait eu de graves conséquences pour William et sans doute pour le Damn’s Club. Il avait pris le risque de me soigner seul. C’était une histoire entre adultes consentants. Je lui dis qu’il avait bien fait. Il ne fallait pas chercher à expliquer à des tiers nos amusements hors normes.
Will n’était pas d’accord. Il était prêt, disait-il, à assumer ses actes et sa folie. Il avait été choqué par sa violence tournée contre moi. J’étais le seul qu’il voulait détruire, alors que j’étais la personne la plus précieuse pour lui. Il me demanda pardon. C’est moi qui lui avais proposé, connaissant parfaitement « sa folie » et ses conséquences possibles. C’était moi qui avais profité de ces débordements, même si ma perte de conscience m’avait privé de la phase la plus intense. Qu’avais-je à lui pardonner ? Ne l’avais-je pas manipulé ?
Nos amis défilèrent. Tous, ils me félicitèrent de cette performance, disant que j’étais allé jusqu’au bout. William était vraiment extraordinaire d’avoir bien voulu le faire et m’accompagner.
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