Voilà, c'est fini, il n'y a plus rien à détruire sur ces petites îles, je ne laisse rien, que la tristesse et la désolation, que des cris et des larmes. J'abandonne ces cailloux désertiques hululant de lamentations. Ma queue balaie les derniers vestiges d'humanité encore debout, écrase une dernière fois ce qu'il y a à détruire, et puis le ciel, pris de pitié, ouvre les vannes et pleure pour les humains brisés.

Je les entends gémir derrière moi, je m'en vais sans me retourner.

Déjà mon œil unique se fixe sur les îles voisines. J'ai encore faim, je suis affamée. J'ai pris tout mon temps pour détruire, je suis encore plus forte, nourrie de terreur humaine. Ma trajectoire remonte au nord, où il y a plus d'îles et d'hommes à broyer.

Et puis un jour, quand j'en aurais eu assez de briser, de mugir, de tuer, j'apaiserai mon courroux et retournerai chez moi, dans le grand océan. Je raconterai à mes petits frères et sœurs qui m'écouteront avec extase en rêvant de me surpasser.

Certains parleront encore de moi dans quelques années, comme un souvenir funeste, la destruction faite de mer et de vent, puis ils reconstruiront leur petit monde et tout recommencera…

Mais tous ceux qui m'auront connue trembleront en entendant mon nom, et leurs enfants avec eux, et les enfants de leurs enfants. Pour tous je serai synonyme de fin du monde, on prononcera mon nom du bout des lèvres, comme une malédiction.

Car mon nom, ceux-là ne l'oublieront jamais.

Je m'appelle Irma !