LA MIRGUE *

Ce vilain rêve me tracassa toute la journée. Le cri de la pauvre mirgue s'imposait à mon esprit à tout moment. Tant et si bien que le soir venu, ne trouvant pas le sommeil, je m'installait au coin du feu, dans mon vieux fauteuil pour grignoter une pomme. Mon regard rencontra alors deux petits yeux ronds et brillants dans la pénombre. Je retins une exclamation de surprise car ces yeux étaient ceux d'une souricette. Pour me faire pardonner ce rêve affreux je lui en tendis un beau morceau que je posai au sol.
Elle m'observa encore un moment puis, ayant jugé que je n'étais pas dans de mauvaises intentions, elle se régala du fruit. C'est à cet instant que je vis le chat, à l’affût aussi immobile qu'une statue. Cette fois pas de panique, je me levai tranquillement, pris le félin dans mes bras et la mirgue disparut, sauvée de la convoitise de ce carnassier.
C'est ainsi que je rachetai mon erreur onirique dans cette réalité réelle. De ce jour, chaque soir je déposai dans le trou par où elle passait quelque provision à son intention, hors de vue du chat.

Et la petite mirgue si jolie devint mon amie.

* Mirgue, de l'occitan mirga : souris