II - Antoine

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Pourquoi t'es parti ?

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Tu peux pas imaginer combien ça a été dur.

Les remises en question incessantes, les séances de psy. Maman et Papa anéantis. Je pouvais à peine marcher, et voilà que je devais les soutenir. Impossible. Je suis parti. Je voulais comprendre, alors j'ai pris les doubles de tes clés que tu avais laissés chez eux. Et quand j'ai poussé la porte de ton appartement, j'ai réalisé que tu ne serais plus jamais là pour m'ouvrir.

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Quel foutoir. Ton appartement est à l'image de ta vie. Tellement rempli... Une orgie de choses. Un trop plein qui masque le vide béant que tu avais dans tes tripes.

Oh... Un psy pourrait dire ça.

Je ne comprends toujours pas pourquoi...

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J'ai mis un moment avant de me persuader que rester là ne m'apporterait rien. À dormir dans ton lit, manger dans tes assiettes. Pour nos parents, j'étais censé vider l'appart'. Mettre toutes tes affaires dans des boîtes. Ce qui reste de toi est déjà dans une urne, logique que ton bordel connaisse le même destin.

C'est comme ça qu'on fait notre deuil, chez nous : tout doit finir empaqueté. Caché.

Puis un beau matin, quelqu'un a sonné à la porte.

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J'ai ouvert.

Je m'attendais à te voir. À ce que tu m'engueules de squatter chez toi, comme ça, sans prévenir. Mais à la place, il y avait ce type, là, d'environ quarante ans. Plutôt beau mec, du genre à vendre des réfrigérateurs dans le désert. Et à réussir.

Je crois que la première chose que je lui ai dite, c'était : « Je ne suis pas intéressé ».

Mais il a insisté.

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Il a mis le pied dans la porte et m'a regardé avec un air quelque part entre la tristesse et la stupeur.

Il m'a dit qu'il ne comprenait pas.

Qu'est-ce qu'il voulait comprendre, ce con ?

Je lui ai dit que t'étais mort.

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Comme ça, sans fioriture. Directement dans la tronche, qu'il a pris ton "départ".

Il a continué de me regarder fixement, complètement perdu, et m'a demandé si je ne me foutais pas de lui. Il m'a appelé par ton prénom. Noë. Là, j'ai percuté.

J'ai compris qu'il ignorait que tu avais un frère jumeau. Alors je me suis présenté.

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Quand il a fait mine de rebrousser chemin, je lui ai présenté mes excuses. Je l'ai invité à prendre un café.

Louis, qu'il s'appelait.

On a discuté un peu. Beaucoup. Des heures. De toi. De ta vie cachée. De vos vies cachées, à vous deux. Le poids de la trahison faite à une femme, sa femme, que tu ne connaissais pas, du reste. Mais vous vous aimiez.

Ça c'est sûr.

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Il n'a pas pu m'en dire davantage sur les raisons de... de ce que tu as fait. Vous n'aviez jamais parlé de vous enfuir tous les deux, il ne t'avait jamais promis de quitter sa moitié. Je suis resté sur ma faim. Tard dans la soirée, le type est parti.

Quand il a claqué la porte derrière lui, un courant glacial a parcouru mon dos.

J'ai eu l'impression que je ne le reverrais jamais.

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Il s'est passé des semaines depuis la visite de... ton amant. Une éternité.

J'ai commencé à ranger tes affaires dans des cartons. J'en ai trouvé une pile devant une boutique. Quand je les ai vus, je me suis dit que c'était le moment.

J'ai fait ça toute la journée. Je suis vanné.

On sonne à la porte.

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Je crois bien que je suis passé de l'autre côté de la barrière. J'ai trop tiré sur la corde. Ça a du me foutre le cerveau à l'envers, de rester chez toi aussi longtemps. De m'approprier tes choses.

Pourquoi ?

Pourquoi tu es revenu ?

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