Chapitre 8 - Complot
Quelques mois passent. Les jours à Tourloing s’écoulent dans une languissante monotonie. Personne ne se doute que tout est sur le point de changer et que le village va vivre des évènements hors du commun !
Alors qu’une nuit bleue veille sur le bourg, Sacha traverse les rues désertes de la ville endormie, en direction du château des sœurs Sinistrel. Nul ne le croise et c’est tant mieux, car Sacha n’est autre que le fils du grand méchant loup ! Son corps, entièrement recouvert de poils bruns, nuancés d’une teinte chocolat, forme un contraste étrange avec son museau blanc que rehaussent de fines babines sanguines. Ses moustaches droites frémissent quand il rit, ce qui arrive à chaque fois qu’il commet une mauvaise action.
Sacha est une connaisance des sorcières, je ne peux pas employer le terme d’amis, car les monstres n’aiment personne. Néanmoins, tous trois ressemblent à des camarades dans le monde des méchants. Sacha est bien connu des enfants ; c’est son père qui, il y a longtemps, a pourchassé les trois petits cochons, avant d’avoir voulu dévorer le chaperon rouge et sa grand-mère. Il fut tué par un chasseur qui sauva les deux femmes. Pour le moment, Sacha n’a commis que quelques larcins, mais il s’est juré d’atteindre le niveau de méchanceté de son prédécesseur.
Cela va-t-il se produire aujourd’hui ?
Arrivé devant la porte du château, le loup frappe trois coups. Ses griffes en acier éraflent le bois. Circella, une chauve-souris perchée sur l’épaule, s’approche pour lui ouvrir.
— Ah, tu as reçu notre invitation… entre.
Sacha suit la sorcière dans les couloirs dont la tapisserie part en lambeaux. Ils descendent des escaliers dont les marches émettent un sinistre craquement. Le couple débouche dans un cachot aux pierres grises suintantes, où des chaudrons rouillés trônent, vides de potions. Assise dans un coin, Pétunia, observe le loup qui s’avance vers elle. Circella s’approche de sa sœur et pose une main sèche sur son bras. Les deux parentes fixent leur regard sur Sacha, qui patiemment, attend qu’elles prennent la parole.
C’est Circella, l’allure hautaine qui explique :
— Si nous avons fait appel à toi c’est que nous savons que tu fais partie d’une famille qui a toujours été dans le camp du mal. En ce qui nous concerne, c’est un gage de qualité. Ma sœur et moi avons donc un travail à te confier.
— Bien payé ?
— Oui. Tu auras des pierres précieuses.
— Je veux aussi un cochon bien gras.
Le loup a déjà de la bave aux babines à la seule pensée de cette viande fraîche.
— D’accord.
— Bon, maintenant que ce point est réglé, expliquez-moi ma tâche ?
— Il s’agit simplement d’un vol… un vieux manuscrit.
— Un livre ? s’écrit Sacha avec une moue dégoûtée.
— Oui, mais très important pour nous.
— Qu’est-ce qu’il contient ?
Les deux sœurs échangent un regard. Circella réplique sèchement :
— Ça ne te concerne pas.
— Et pourquoi ne dérobez-vous pas, vous-même, cet ouvrage ?
— On ne peut pas. Il ne faut pas qu’on sache que nous sommes au courant de l’existence de ce parchemin.
— Et je le vole à qui ? Il est où ce précieux manuscrit ?
— Chez Merlin.
— L’Enchanteur ?! maugrée Sacha contrarié.
— Oui. Tu comprends pourquoi il nous faut quelqu’un de courageux, le flatte Circella.
— D’accord, mais quand même… Merlin c’est pas n’importe qui. Bon de toute façon, j’ai très envie d’un cochon, donc c’est d’accord.
— Tant mieux, ronronne Pétunia.
Une fois le loup parti, cette dernière se tourne vers sa sœur et demande :
— Tu crois qu’il arrivera à voler la prophétie ?
— Il le faut. Nous avons besoin de savoir ce qu’il va se passer.
— Tu veux dire…, n’ose terminer Pétunia.
La voix de Circella se fait métallique et dure.
— Oui. Nous devons connaître le nom de celle qui est condamnée à mourir.
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