♫ ♪ Libéré, délivré, je ne m’écraserai plus jamais ♫ ♪ Woops ! Je m’égare, c’est pas dans un anime, ça, c’est Disney, et même parodié, c’est pas vraiment le même monde…

Hmmm, je vous dois un mot d’explication, peut-être ?

***

Perso, l’astrophysique, puis le multivers, je capte que pouic ! Malgré les explications des scientifiques de la NASA, du CNRS… jusqu’à ceux de l’Institut Royal Météorologique de Belgique (si, si, ça existe, et on dirait pas mais ils sont sérieux), je n’ai rien compris à leur blabla sur les éruptions solaires à répétition, l’inversion du champ magnétique de la Terre, l’activité magmatique déréglée, mais le résultat est là : les cigognes migrent désormais vers l’Arctique, le thon a disparu des plateaux de sushi, on a eu une fête nationale sans pluie et… les personnages d’anime sont parmi nous !

Heureusement avec leur voix de doublage à l’endroit où ils apparaissent, sinon la VO nipponne les isolerait vraiment trop, on ne doit pas trouver beaucoup plus de japonophones ici qu’à Turin ou à Grenoble, mais pour le reste, c’est bien eux…

Joachim m’a dit qu’il s’est pris un coup de parapluie de Totoro dans un parc, Léo a vaguement dragouillé Monkey D. Luffy avant de renoncer car – je cite – ce mec est encore plus barré que dans la série ! Il y a jusqu’à mon Thomas qui prétend avoir passé une soirée avec Johan Liebert de Monster, mais là, j’y crois plutôt moyen, il est le roi des mythos, et surtout, il est parfois lourd, dans l’heure, il se serait fait dézinguer par l’autre sociopathe.

Notez, ça m’aurait débarrassé définitivement de ce manipulateur narcissique… auquel je ne peux jamais rien refuser, je sais. C’est peut-être ce qui a commencé à installer l’idée de le sortir de ma vie, vu que c’est bien plus ça que l’inverse, il n’en a jamais eu grand-chose à faire de moi. Jusqu’au coup de grâce…

— Jérémini, je pars une semaine à Cancun, tu t’occuperas de Bubulle, dis ?

— Ah ! Oui, ben oui, pas de problème, avais-je admis, bien trop facilement, en me maudissant d’être aussi dépendant.

— On t’enverra une carte postale.

On ? Comment ça, ‘on’ ? Que je n’aie pas les moyens de l’accompagner justifie la présence d’un autre ? Moyens qu’il n’a pas plus, maintenant que j’y pense… Il se serait trouvé un daddy friqué, mais il me garde pourtant sous le coude ?

Je me serais bien mis une baffe après lui avoir répondu ‘’Merci, c’est gentil’’, mais j’ai juste souri, en m’interdisant de trop souhaiter que leur avion explose en plein vol, mais juste pour les autres passagers innocents…

Il s’est mépris sur mon air rêveur, s’est collé dans mon dos et a murmuré ‘’Je vais te manquer, je sais… mais c’est juste sept jours, et je vais te laisser un souvenir…’’ avant de me pousser sur le matelas.

Il a grogné dans mon dos, puis a détaché ses lèvres de ma nuque pour asséner, encore plus indifférant que d’habitude ‘’Je t’ai connu plus réactif… Tant de persos d’anime à dispo, et je tombe sur l’étoile de mer dans Bob l’Éponge, c’est comment, lui, déjà ?’’

— Patrick… ai-je soupiré.

Le truc vite-fait-mal-fait, il marque son territoire pour la semaine. Et ce sera quoi, le niveau suivant, il pissera autour du lit ?

À plat ventre, le slim sur les chevilles, j’en étais à imaginer une injonction judiciaire d’éloignement, que je savais pourtant déjà trop ne jamais pouvoir respecter moi-même, lorsque… l’idée !

Le plus ironique, c’est que je la dois à Thomas, et sa prétendue rencontre avec le serial killer de Monster. Sauf que Johan aime voir ses victimes mourir sous ses yeux ! Je l’ai soigneusement évité, ainsi qu’une fin probablement assez pénible ! Par contre, un autre héros – encore faut-il s’entendre sur le terme – pourrait bien servir mes noirs desseins, m’étais-je dit. Et lui, je l’ai stalké comme aucun mec avant…

***

Hmmm… Là, je regarde un peu bêtement mes orteils qui s’agitent joyeusement sous le drap. Plus tard, j’arriverai bien à mieux classer la masse des sentiments qui se sont soudain dégagés de mon esprit, devenu un ciel bleu sans nuage…

Temporairement remplacés par les répliques du plaisir, puis surtout une immense satisfaction, vu que, bon, le mec qui se rhabille à deux mètres, là, c’est Light Yagami, le longiligne, beau et ténébreux châtain aux yeux en amande, dieu de la mort par intérim, le Kira de l’anime Death Note !

Puis, surtout, je ressens un immense soulagement, à la perspective potentielle d’enfin enterrer l’image vraiment omniprésente de Tom !

C’était pas gagné, j’avais un solide doute. Pas sur les préférences de Light, bien sûr, il suffisait de voir la tension sexuelle entre lui et Lawliet, le détective qui le traque, mais sur les trente-sept épisodes de l’anime (comme dans le manga, dont j’ai lu les huit tomes), jamais il ne touche L. Pas plus que Misa Amane, sa copine auto-proclamée, d’ailleurs, mais aussi, elle n’est là que pour protéger sa réputation de garçon irréprochablement normal.

Que Light – devenu Kira (killer en romanji) tient vraiment fort à cœur, en fait, vu sa réaction très discrète à la réception du mouchoir en papier que je lui avais glissé, et sur lequel j’avais noté mon numéro.

Tellement que je vais encore gratter un coup sur la corde sensible, tiens, histoire d’être certain que…

— Oh ! Quand je dirai à mes potes que je me suis tapé le sublime Light Yagami, ils vont gémir de dépit, ai-je soupiré.

Fidèle à son image, il s’est légèrement raidi, avant de lentement se tourner et de me jeter un regard assassin, le sourcil gauche relevé, puis, sans un mot, de récupérer son carnet noir, et de quitter l’appartement.

Je me suis rhabillé à mon tour, j’ai versé quelques paillettes dans le bocal de ce stupide poisson rouge, et j’ai rassemblé le courrier de Tom, que j’avais ostensiblement laissé trainer à plusieurs endroits, pour m’assurer que Light enregistre bien son nom.

Même sans avoir visionné les enregistrements des caméras de surveillance de l’immeuble, je suis sûr qu’il l’avait déjà noté pour signer une mort de plus dans son Death Note avant même d’être sorti de l’ascenseur.

***

— Ben ouais, ton Tom, sauf qu’il ne l’a jamais entièrement été, hein ! a dit Joachim, un peu cruellement. Crise cardiaque, tu le crois, ça ? L’histoire ne dit pas si c’était avec un cocktail au bord de la piscine ou avec un mec derrière un buisson mais à vingt-cinq ans, c’est nul, comme mort…

— Oh nooon ! ai-je gémi, avec tout le désespoir du monde dans la voix.

— Ne me dis pas que tu es désolé, Jérémie ! Après tout ce qu’il t’a fait subir… En plus, con comme il est… enfin, était, il n’a pas pris d’assurance-voyage, ça va coûter une blinde à ses parents de faire rapatrier le corps depuis le Mexique, il aura vraiment fait chier tout le monde jusqu’au bout, lui…

— Je vais devoir leur rendre les clés de son appartement, du coup. Tu penses qu’ils me laisseront garder Bubulle ?

— Bub… ? Attends, ne me dis pas que tu t’occupais encore de son poisson pendant ses vacances, qu’il passait sans toi, en plus ! Tu es désespérant, mec…

Light… Kira, donc, ne s’est même pas cassé la tête à m’imaginer une fin originale dans son Carnet de la Mort, j’aurais eu droit au traitement standard, le bête infarctus. Sauf qu’au final, c’est pas moi, là, c’est Thomas, bien sûr.

Tiens, je vais chercher comment on dit ‘d’une pierre deux coups’ en japonais, je ferais bien imprimer ça sur le ruban de la couronne mortuaire, ce serait original, et plutôt classe, non ?