Chapitre Premier

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Julie était une petite fille joyeuse. Elle aimait aller à l’école retrouver ses amis, faire du sport et aider papa et maman à bricoler dans le jardin. Mais il y avait une chose qu’elle aimait plus que tout : les cours de violon du samedi matin.

Chaque weekend elle prenait son petit violon, le lavait et le plaçait soigneusement dans son étui avant d’aller jouer avec Mr Aleksei. Il avait un drôle d’air Mr Aleksei, avec sa grosse barbe et ses petites lunettes rondes ! Mais il était très gentil.

Ils commençaient toujours les cours à discuter en mangeant des petits gâteaux à la noisette. Après ils prenaient leur violon et ils jouaient. Les ballades du pays de ce vieux monsieur était compliquées. Mais elles étaient si belles, si entrainantes que Julie était prête à tous les efforts pour réussir à les jouer.

Parfois, lorsque ses parents étaient en retard à cause du travail, Julie s’asseyait à côté du gros poêle et écoutait les histoires que lui racontait Mr Aleksei jusqu’à ce que le ciel devienne noir et que la nuit tombe.

Julie avait horreur du noir. Elle en avait si peur qu’elle ne pouvait pas se coucher sans qu’une lampe soit allumée dans sa chambre. Elle s’endormait dans la lueur de la lampe, et se réveillait par la lumière du soleil. Pourtant, chaque matin Julie trouvait la lampe éteinte.

Une lampe qui s’éteint toute seule, c’est bizarre ça ! Papa et maman ne semblaient pas vouloir expliquer pourquoi la lampe était éteinte chaque matin. Soit, Julie le découvrirait par elle-même.

Ce soir la petite fille s’installa sous sa couette. Elle laissa ses yeux ouverts un tout petit peu, et attendit que la lumière s’éteigne en serrant fort l’étui de son violon dans ses bras. L’attente fut longue, très longue. Mais au bout d’un moment la lumière vacilla, puis disparu.

Vite ! En un clin d’œil Julie sort des couvertures et rallume la lumière. Elle regarde partout, quelqu’un doit bien l’avoir éteinte. Ce n’est qu’après un moment qu’elle voit le petit bonhomme qui la regarde caché par la lampe de chevet.

Il n’était pas plus gros qu’un tout petit doigt, et avait tout l’air d’un enfant lui aussi. Il était habillé d’un short bleu, d’une étrange chemise à froufrous et d’un haut de forme bien trop grand pour sa minuscule tête.

- « Qui es-tu ? »

Dis la jeune fille.

- « Et bien en voilà une question » dit le petit homme vexé. « Je suis le protecteur des lumières »

Julie n’en croyait pas ses yeux.

- « Tu n’es pas bien grand » dit-elle en rapprochant sa tête « Tu protège vraiment les lumières ? »

- « Je suis bien assez grand pour m’occuper d’elles ! D’ailleurs tu n’es pas si grande que ça non plus »

Il fit tourner son chapeau et Julie se mit à devenir de plus en plus petite, jusqu’à ce qu’elle ne soit pas plus grande que le plus petit des petits doigts.

- « Mais qu’est-ce que tu… »

- « Allez dépêche-toi ! »

Sur ces mots, le petit bonhomme prend la main de julie et saute de la table de nuit. Le haut de forme se met alors à gonfler. Il gonfle tant qu’il prend maintenant plus de place que julie et le gardien des lumières réunis. Les deux enfants flottent longtemps dans les airs avant de se poser doucement sur le parquet de la chambre.

Sans même s’excuser de la frayeur qu’il lui a causée, l’étrange garçon entraine Julie sous le lit dès que leurs pieds touchent le sol.

- « Mais…mais où on va ??? »

S’écrie la jeune fille qui peinait à courir en gardant son étui à violon sous le bras.

- « Je t’emmène au refuge »

Les deux s’arrêtent alors face à un trou dans le parquet. Le gardien des lumières époussette ses vêtements, fini de dégonfler son haut de forme et saute dans le trou.

- « Suis-moiiiii ! »

Sa voix devient de plus en plus faible, puis disparait. Julie piétine devant le trou…sauter là-dedans c’est tout de même effrayant… mais ça fait toujours moins peur que de rester dans le noir. Elle serre son étui à violon dans ses bras et saute.

La petite fille glisse alors dans un véritable toboggan miniature. Ça monte, ça descend, ça tourbillonne ! Ce n’est pas un toboggan tout noir comme celui de la piscine. Julie voit souvent des sortes de petites créatures brillantes dans des lanternes accrochées à un grand escalier à côté du toboggan. Elle aurait même juré que certaines lui faisaient coucou…

La glissade s’arrêta sur un gigantesque vol plané jusqu’à un énorme tas de plumes d’oie. Plus de peur que de mal !

La pièce parfaitement ronde était remplie de centaines de lueurs. Il y en avait de toute sorte : des petites qui rentrent dans la poche, des grosses qui éblouissent, des farceuses projetant des étincelles, des antiques dans leurs vieilles lampes à huile... Il y en avait tant que les murs étaient recouverts de lampe du sol au plafond, et qu’il n’était pas rare de trébucher sur l’une d’elle quand on ne faisait pas attention. Bizarrement, elles avaient toute l’air bien pales remarqua Julie.

Le gardien des lumières attendait au milieu près du monceau de plumes. Il avait l’air triste.

- « Ben qu’est-ce qu’il y a ? » Demande Julie en chuchotant

Il faut dire qu’avec toutes ces lumières, on se sentait tout petit. Le gardien des lumières regarda ses pieds en rougissant.

- « Normalement je n’ai pas le droit de vous parler…mais c’est mon grand-père. Il est tombé très malade et je ne sais pas comment le soigner. Il me racontait toujours comment les humains pouvaient résoudre leurs problèmes avec des idées farfelues. Je me suis dit que tu pourrais trouver quelque chose. »

Les deux enfants traversèrent la pièce, puis passèrent par une cuisine, une bibliothèque, deux placards et 3 salons - Tous très éclairés - avant d’arriver à une petite chambre. Un vieil homme était allongé dans le lit et dormait d’un sommeil plein de cauchemars. Il remuait, gémissait, et avait tellement de fièvre que sa grosse barbe blanche était toute trempée et que son crâne chauve ruisselait. Une toute petite étincelle, pas plus lumineuse qu’une lueur de guirlande, éclairait la pièce.

- « Mon grand-père est le gardien des lumières. Lorsque que quelqu’un laisse une lampe trainer et qu’il ne s’en préoccupe plus il abandonne la lumière qui y vit. Nous venons la chercher et nous lui donnons une nouvelle maison ici. Il a voulu aller chercher cette petite lumière au milieu d’un énorme tas de déchet, il est tombé malade en revenant. Depuis il est comme ça. »

Le garçon se rapprocha de Julie

- « Je t’en prie, dis-moi que tu peux faire quelque chose »

Elle aurait bien aimé faire quelque chose, mais elle n’était pas médecin. Et puis elle n’était même pas sure qu’un médecin saurait s’occuper d’un gardien de lumières. La jeune fille regarda le vieux monsieur. Il ressemblait vraiment à Mr Aleksei avec sa grosse barbe…il avait l’air tellement triste.

Julie eu une idée.

- « Peut-être qu’une jolie musique lui redonnera au moins le sourire »

Elle sort son violon, le place sur son bras comme elle l’a appris, et elle commence à jouer. D’abord une musique douce, pour qu’il ne se réveille pas en sursaut. Puis elle joue la ballade la plus entrainante, la plus joyeuse, la plus chargée d’espoir et de sourires qu’elle connaisse. Les notes s’envolent et virevoltent autour de Julie dans un spectacle acrobatique. La jeune fille ferme les yeux, y met tout son cœur. Pendant un instant hors du temps il n’existe plus rien que le doux son du violon. Elle fait ce qu’elle sait faire de mieux jusqu’à ce qu’elle n’ait plus de force et que l’archet cesse de glisser sur les cordes du violon.

Julie s’assoit sur le gros tapis à l’entrée de la chambre. Elle est épuisée. Iil ne fait plus si noir dans la pièce. Tout est si silencieux… et le petit garçon a disparu. Julie commence à avoir peur.

- « Gardien des lumières ? »

Soudain un véritable tonnerre d’applaudissements éclate dans la maison alors qu’une voix grave et dansante retentit.

- « Bravo petite madroushka ! Bravo ! Ça c’est de la musique »

Deux têtes apparaissent au bord du lit : le petit garçon et son grand père, qui n’a plus du tout l’air malade. Celui-ci ressemble maintenant comme deux gouttes d’eau à Mr Aleksei avec son grand sourire. Les deux descendent du lit et aident Julie à se relever.

- « Mais excuse-moi, je ne me suis pas présenté. Je suis le gardien des lumières. Et cette maison est le refuge des lumières. »

L’étincelle flotte doucement à côté de l’épaule de Julie qui est de plus en plus fatigué : elle baille, se frotte les yeux. Un lit serait le bienvenu.

- « Votre petit fils m’a parlé de vous. »

- « Et j’ai beaucoup parlé de vous à Igor » dit-il en ébouriffant le crane du petit garçon

- « Merci pour ce traitement jeune fille, tu m’a redonné de l’espoir. »

La lueur s’était à présent posée sur le dos de la main de Julie. Ca faisait tout chaud, et ça chatouillait.

- « Cette petite étincelle est la dernière lumière que j’ai recueillie, mais je ne crois pas qu’elle se plaise tant que ça ici. » Dit le vieil homme pensif

- « Ça te dirait de l’adopter ? »

Adopter une lumière ? La petite fille avait toujours voulu d’un ami, et puis ça ne perdait pas ses poils une lumière : papa et maman ne pouvaient pas refuser ça quand même.

- « Oui ! Ca serai génial.. » dit Julie en baillant à s’en décrocher la mâchoire

Alors qu’elle s’endormait sur le tapis, elle aurait juré entendre la petite lumière chanter doucement

- « Très bien…passe une bonne nuit Julie, merci pour tout »

- « Merci Julie ! »

Et la petite fille s’endormit sous le regard du gardien des lumières et de son petit-fils.

Julie se réveilla dans son lit. Comme tous les matins sa lampe de chevet était éteinte.

Rien n’a vraiment changé depuis cette étrange nuit…

Ah, si.

Ses parents se sont étonnés que la jeune fille éteigne sa lampe de chevet chaque soir. Pauvre petite lumière, il fallait bien qu’elle se repose elle aussi. Son amie l’étincelle lui tenait compagnie maintenant. Julie n’avait plus peur du noir.

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