1 - Naturellement
Léa avançait à pas vif dans le long couloir d’hôtel à la moquette pourpre. Entre ses mains tachées de sang, elle tenait une clé de chambre dont le numéro désormais illisible avait été gratté, sans doute avec un couteau. Elle la regardait depuis quelques minutes, quand elle fut interrompue dans ses pensées.
Noll : Les étoiles.
Léa : Et zut ! T’as encore gagné.
Noll : Elle était pas très difficile. Je suppose que c’est toi qui l’as inventée.
Léa : Tu vas voir, vilaine bête.
Léa s’arrêta le temps de ranger la clé dans la poche de son jean, puis attrapa le serpent posé sur ses épaules et le posa par terre
Léa : Alors, asticot à écailles ? On fait moins le malin !
Noll, gesticulant piteusement : Léa ! Ce n’est pas drôle !
Léa : Voilà une opinion bien relative. Pour moi, c’est très drôle.
Noll : Mais-heu ! C’est pas bien de se moquer du malheur des autres !
Léa : Tu m’en diras tant… Et puis march… ramper te fera du bien.
Puis Léa se remis en route. Noll, d’abords immobile, fut contraint de suivre le mouvement après avoir douloureusement constaté que Léa ne plaisantait pas.
Noll : La moquette me gratte le ventre !
Léa : Pauvre chou. Vu le temps que tu as déjà passé à ramper dans les couloirs, ça ne devrait pas te déranger plus que ça.
Noll : En une semaine, j’ai pris l’habitude que tu me portes !
Léa : Mais voilà-t-il pas que monsieur prendrait des habitudes de luxe ?
Noll : Léa ! Je vais continuer à geindre jusqu’à ce que tu me reprennes sur tes épaules !
Léa se tourna alors vers lui, puis pliant ses genoux, agita devant son nez ses doigts couverts de sang séché.
Léa : Tu ne me feras pas craquer aussi facilement, ver de terre ! J’en ai déjà écrasé plus d’un.
Noll : Arrête ton char, Ben-Hur.
Léa, se relevant : Ah, t’es pas drôle ! Et puis d’où tu connais Ben-Hur ?
Noll : Peu importe… Tu me prends ?
Léa : Tu perds pas le nord, toi… Attends…
Léa ôta alors son sac à dos et en retira le skate-board qui en dépassait. Elle le posa sur le sol du couloir.
Noll : Qu’est-ce que tu fais ?
Léa : Je t’offre un tour de manège !
Noll : Jamais !
Noll bondit pour s’échapper, mais Léa l’attrapa au vol, puis le maintint contre le skate qu’elle poussa alors dans le couloir. Après une dizaine de mètres, le skate dévia sur la droite, puis heurta le mur.
Noll, loin : Aïe…
Léa : Ça va, princesse ?
Noll : …
Léa : Rien de cassé ?
Noll : Léa ! Viens vite !
Léa, courant vers le lieu de l’impact : Quoi ? Qu’est ce qui se passe ? Tu t’es fait mal ?
Elle arriva enfin devant son skate à côté duquel Noll attendait avec agitation.
Léa : Qu’est-ce qui t’arrive ?
Noll : Regarde !
Et, pour accompagner sa parole, il pointa du bout de sa queue un point un peu plus loin dans le couloir.
Noll : Il y a une porte ouverte, là-bas.
Léa : Par la malepeste !
Elle récupéra son skate, puis se dirigea vers la porte en question.
Léa : C’est pas trop tôt. J’ai hâte de me laver les mains.
Noll : Lé-a ! Je suis encore en train de ramper par terre !
Léa : Allez, plus que quelques mètres !
Noll : Tu me brises le cœur !
Léa sursauta.
Léa, à elle-même : Tu me brises le cœur…
Son visage se ferma soudain et son regard s’embruma.
Léa, presque murmurant : Dans ce cas, on sera deux…
Noll : Léa ? Tu as dit quelque chose ?
Léa ne répondit pas. Au lieu de cela, elle s’arrêta lentement, puis s’appuya contre le mur, les yeux regardant dans le vide.
Noll, inquiet : Léa ! Est-ce que ça va ?
Après quelques secondes, sa respiration se fit haletante, et ses jambes se mirent à trembler. Noll, impuissant, ne put que grimper sur son épaule.
Noll : Léa, tu m’entends ?
Soudain, Léa ferma les yeux, et serrant son poing, elle prit une grande inspiration. Enfin, elle se redressa, puis se remit à marcher en silence.
Noll : Léa, qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Aucune réponse.
Noll : Léa ! Arrête-toi !
Léa : Quoi ?
Noll : Ne fais pas semblant qu’il ne s’est rien passé. Il t’est arrivé quelque chose ! Explique-moi.
Léa : Non.
Noll : Arrête ça ! Je ne sais pas ce que c’était, mais ça avait l’air grave. Et si ça ne l’est pas, tu peux au moins m’expliquer. Je m’inquiète pour toi.
Léa : Tu ne devrais pas. Tu perds ton temps.
A ce moment, Léa, Noll sur son épaule, arriva au niveau de la porte ouverte. Elle prit délicatement le serpent dans ses mains, puis le posa sur le sol devant la chambre.
Léa : Attends-moi, tu veux ? Je ne serai pas longue.
Puis, sans laisser à Noll le temps de répondre, elle referma la porte et en tourna le verrou.
Noll resta ainsi devant la porte désormais close pendant quelques minutes qui lui furent interminables. Il ne connaissait Léa que depuis une semaine, mais elle n’avait jamais agi comme cela avant. Autant la crise soudaine que son attitude après celle-ci l’inquiétaient profondément. Même quand les choses se passaient mal, Léa parvenait toujours à arborer un sourire, plus ou moins convainquant, et elle semblait difficile à abattre. Sa froideur et son expression de colère demeuraient inexplicables aux yeux de Noll. Et son silence. Qu’est ce qui pouvait bien justifier le fait qu’elle ait refusé de s’expliquer, ou même de dire quoi ce que soit ? Non pas qu’il se soit attendu à ce qu’elle lui raconte tous ses secrets, mais au moins quelques mots.
Enfin, la porte s’ouvrit et Léa sorti de la chambre, un léger sourire sur les lèvres. Elle s’étira.
Léa : Rien d’intéressant dans celle-ci non plus. Est-ce que tu veux aller boire ?
Noll, la fixant : Non merci.
Une fois ses étirements finis, Léa prit Noll pour le remettre sur ses épaules.
Léa : Je sais que tu t’inquiètes pour moi, mais ne t’en fais pas. Rien de grave.
Noll : C’est pas l’impression que tu donnais.
Léa : Je sais… Mais ça ne sert à rien de s’inquiéter. Et si ça venait à se reproduire, alors je t’expliquerais.
Noll, pas convaincu : Mhh…
Léa : Allez ! On continue.
Puis elle reprit sa route dans le couloir de l’hôtel.
Léa : J’espère qu’on va bientôt trouver de quoi manger. Je commence à avoir faim. Tu penses qu’il y a un restaurant dans cet hôtel ?
Noll : De temps en temps, il y a des chariots qui passent pour le room-service.
Léa : Ça veut dire qu’il y a du personnel !
Noll : Peut-être…
Léa : Comment ça, peut-être ? Les chariots avançaient tout seuls ?
Noll : Aucune idée ! Dès que j’entendais quelqu’un arriver, je me cachais derrière un pot de fleur.
Léa : Quel héros !
Noll : Ho, ça va, hein ! Je te rappelle que j’ai pas de bras. Et pas de jambes non plus. J’ai pas envie de finir comme à la St Patrick, tu sais ?
Léa : Qu’est-ce qu’il se passe à la St Patrick ?
Noll, parcouru d’un frisson : Tu ne veux pas savoir…
Silence.
Léa : Tu aimes les pizzas ?
Noll : Est-ce que ça a un rapport avec l’idée que tu te fais du sort réservé aux serpents lors de la St Patrick ?
Léa : Pas du tout… En voilà, une idée saugrenue !
Regard suspicieux de Noll.
Léa : Et du coup ? Les pizzas ?
Noll : Pour être tout à fait franc, je ne mange pas.
Léa : What ?
Noll : Tu n’as jamais remarqué que je ne me nourris pas ?
Léa : Non, mais… Comment c’est possible ?
Noll : Hum… Je t’expliquerai un jour.
Léa : Pourquoi pas maintenant ?
Noll : Tu comprendras pourquoi.
Léa prit alors une pose en se frottant le menton tout en lançant un regard faussement suspicieux à Noll.
Léa : Quelqu’un nous fait des cachoteries…
Noll : Tu peux parler.
Léa : Bon, t’as gagné. On avance.
Silence.
Léa : Personnellement, je préfère les pizzas aux peppéronis. Au cas où tu aurais à choisir une pizza pendant que je ne suis pas là.
Noll : Certes.
Léa : Par contre, évite celles genre « quatre fromages » ou « savoyarde ».
Noll : Pas de fromage. C’est noté.
Léa : Tu peux laisser la mozzarella, par contre.
Noll : D’autres spécifications ?
Léa : Pas de fruits de mer, s’il te plait. Et si c’est possible… De l’eau !
Noll : Hein ?
Léa couru alors jusqu’à un point du couloir que rien ne semblait rendre particulier, puis colla son oreille contre le mur.
Noll, encore secoué par la course : Tu entEnds quelQue choSe ?
Léa : Quelqu’un est en train de prendre une douche.
Noll : Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
Léa : Tu n’entends pas le bruit d’eau ?
Noll : Je n’ai pas des oreilles aussi performantes… Et qui te dis qu’il y a quelqu’un ?
Léa : Parce que le « quelqu’un » est en train de chanter.
Noll : Il est peut-être au toilettes…
Léa : Tu chantes souvent aux toilettes en laissant couler l’eau ?
Noll : Qu’est-ce que j’en sais ? Je suis un serpent.
Léa : On va donc admettre que j’ai raison.
Léa s’approcha alors de la porte de la chambre tandis que Noll maugréait quelque chose. Elle tourna la poignée, et la porte s’ouvrit.
Léa : Qui laisse la porte ouverte quand il prend sa douche ?
Noll : C’est toi l’experte en comportements humains.
Léa : Rancunier, va. Et ça ne réponds pas à ma question.
Noll : Je hausserais bien les épaules, mais je n’en ai pas.
Léa pénétra prudemment dans la chambre tout en l’inspectant pour éviter toute surprise. Une fois à l’intérieur, Léa entendit clairement la personne dans la douche.
“We will be one forever
Like the sun and the moon in the sky
And baby be sure, sure, sure
That these four walls won’t stop us from fly
So take my hand and throw this dice
Let the unknown become our life”
Suivi ce qui sembla être le refrain, composé de “our life” répété encore et encore.
Noll : Flying.
Léa : Hein ?
Noll : Won’t stop us from fly-ing. Je sais que c’est pour la rime, mais ça reste grammaticalement incorrect.
Léa : C’est une chanson d’amour… Je crois que l’exactitude grammaticale n’est pas le but des paroles.
Noll fit une grimace pour exprimer son mécontentement.
Léa : Et puis c’est pas le plus important, grammar-nazi à la langue fourchue. On cherche quelque chose qui pourrait nous aider.
Noll : Si tu as encore faim, tu peux regarder dans le frigo.
Léa : Pas bête, pas bête !
Léa se dirigea donc vers le réfrigérateur placé sous l’écran de télévision et l’ouvrit. A l’intérieur se trouvaient diverses bouteilles et canettes, une brique de jus de pomme, des sachets de cacahuètes et de chips ainsi qu’une noodle-box instantanée.
Léa, attrapant une canette : Hé ! Du « Dr Pepper » !
Noll : Du quoi ?
Léa : C’est une boisson américaine qui, parait-il, est dégueu.
Noll : Pourquoi ils en mettraient dans le frigo d’une chambre, alors ?
Léa : Elle est juste très sucrée. C’est pas non plus du jus de poulpe.
Noll : J’espère bien.
Léa ouvrit la canette dans un « pschitt » sonore, puis la porta à ses lèvres.
Noll : C’est pas vraiment le moment, je crois. Prends plutôt ce qui t’intéresse et on prend la poudre d’escampette.
Léa, la bouche encore pleine de soda : Perlimpinpin !
Noll : Non, escampette.
Léa : Laisse tomber, tu peux pas comprendre…
Noll, dans un grognement : Peu importe ! Tu veux qu’on se fasse trouver en train de fouiner ?
Léa : Et après ? Au mieux, c’est quelqu’un de sympa, et au pire tu le mords avant qu’il appelle la sécurité.
Noll : Je suis pas venimeux, Léa !
Léa, tenant la canette de bout des doigts : Dans ce cas, on lui fait boire ce truc, parce que c’est vraiment dégueu.
???: Pardon me?
Léa et Noll se tournèrent alors vers la porte de la salle de bain désormais ouverte d’où émergeait un homme dans la trentaine encore humide de sa douche, vêtu d’une seule serviette posée sur son épaule.
Léa : Non ! Pas DSK !
Noll : Vite ! Balance-lui ta canette à la figure !
???: Hey! What is going on?
C’est à ce moment que Noll remarqua la nudité de l’inconnu. Il s’enroula alors autour des yeux de Léa qui tendait alors son bras dans l’objectif de jeter ce qu’elle tenait dans sa main. Privée de sa vue, Léa, qui de toute façon aurait raté sa cible, lança la canette contre le mur, un mètre à la droite de l’homme.
???: What the!
Léa : Lâche-moi ! Comment tu veux que je fasse quoi que ce soit comme ça ?
Noll, visiblement gêné : Mais… non !
???, avec un accent anglais : Qui vous êtes ?
Léa : C’est bon, je suis pas une vierge effarouchée !
Noll, souhaitant changer de sujet : Il a posé une question !
Léa : Lâche-moi, je te dis !
Noll : Je ne répondrai que si vous enfilez quelque chose !
???, toujours avec son accent anglais : Vous êtes qui pour dire ce que je dois faire ?
Léa : Je ne sors pas cette chambre sans un paquet de cacahuètes !
Noll : Léa, tu ne m’aides pas !
Pendant ce temps, l’inconnu, bon gré mal gré, ouvrit un tiroir et en tira un caleçon qu’il enfila en grommelant.
Léa : Noll ! Si tu ne me lâche pas, on va se faire égorger ! Par ta faute !
???: What is this nonsense? Je vais pas vous égorger ! Et maintenant que j’ai mon caleçon, vous pouvez me dire qui vous êtes ?
Noll, tournant la tête vers l’inconnu : Nous sommes… euh… égarés…
Léa, retirant Noll de son visage : Moi c’est Léa ! Et le serpent qui parle, c’est Noll !
???: Noll !?
Léa : Vous le connaissez ?
Noll : Heu… non.
???, plissant les yeux : …
Noll : Et arrêtez de me fixer !
Léa : Noll, tu es sûr que tu ne le connais pas ?
Noll : Je viens de dire non. Et vous, vous êtes qui ?
L’inconnu fixa les deux intrus en silence encore quelques instants.
???: Mon nom est Enn, et vous êtes dans ma chambre.
Léa : La porte n’était pas verrouillée.
Enn : Elle l’était.
Noll : Et on l’a ouverte comment, selon vous ?
Enn : Je me souviens très clairement avoir verrouillé la porte.
Léa : Et bien elle ne l’est plus.
Enn bondit alors vers la porte en jurant, puis inspecta le verrou. Après quelques jurons, il se rappela la présence des deux inconnus dans sa chambre.
Enn : Prenez un siège, s’il vous plait.
Léa se leva alors de devant le réfrigérateur, non sans emporter au passage quelques bouteilles et paquets qu’elle enfourna discrètement dans son sac. Noll soupira en levant les yeux au ciel. Enfin, Léa alla s’assoir sur l’unique siège de la pièce situé à côté de la fenêtre dont les rideaux entrouverts laissaient voir un paysage de montagne.
Noll, dans l’oreille de Léa : Non seulement il est impudique, mais en plus il est grossier.
Léa : Oh, c’est bon, toi ! Moi aussi je dis des gros mots.
Noll : Grumpf… Et c’était quoi, ce « je ne suis plus une vierge effarouchée » ?
Léa, rougissant : De un, j’ai dit « pas » ! De deux, j’ai dit ça pour le « effarouchée ». Et de trois, je n’ai pas honte de dire que je n’ai eu aucune aventure de quelque sorte avec qui que ce soit.
Noll : Madame est exemplaire.
Léa : Silence, abomination freudienne.
Grognement de Noll.
Pendant cette discussion, Enn fini d’inspecter l’intérieur et l’extérieur de la serrure, puis vint s’assoir sur le lit, en face des deux intrus qui semblaient se disputer. En attendant qu’ils aient fini leur argument, il se concentra sur le mystère de la porte ouverte. Elle n’avait pas été forcée, et les portes de cet hôtel étaient inviolables. Ou peut-être seulement réputées inviolables… Non. A la réception, ils avaient bien insisté sur le fait que « l’on entre pas dans une chambre qui ne nous est pas destinée »… Enn releva soudain la tête, et après que le serpent eu poussé un grognement, il posa la question enflammée.
Enn : Est-ce que vous avez une clé ?
Léa : Euh…
Noll et Léa échangèrent un regard, puis Noll hocha la tête.
Léa : Oui… Mais nous ne savons pas quelle porte elle ouvre.
Enn : Je peux la voir ?
Léa, sortant la clé de sa poche : Euh… naturellement.
Léa se leva légèrement de son siège afin de donner à Enn la clé au numéro effacé. Quand elle l’eut lâchée, un frisson traversa son corps. Enn se mit alors à regarder tous les détails de la clé.
Enn : Il y a des traces de sang ?
Léa : C’est le mien !
Noll, surprit de cette réponse, lança un regard insistant à Léa. Celle-ci répondit par un geste de la main.
Sans remarquer ce petit manège, Enn avait pris la clé posée sur sa table de nuit et entreprit de comparer les deux. Les porte-clés étaient visiblement les mêmes, prouvant que la clé sans numéro appartenait bien à cet hôtel. Quant aux clés en elles-mêmes, bien qu’ayant globalement la même forme, la ressemblance s’arrêtait là.
Enn : Votre clé est étrange… Où l’avez-vous eue ?
Léa : Je l’ai trouvée dans le couloir.
Noll serra une nouvelle fois les dents.
Enn, moyennement convaincu : Ce qui m’intrigue, c’est que sa structure n’est pas la même que la mienne.
Noll : Ça semble logique si elles n’ouvrent pas les mêmes portes.
Enn, légèrement agacé : Ce que je veux dire, c’est que votre clé n’est pas faite pour ouvrir une chambre. Elle doit ouvrir quelque chose d’autre…
Léa : Est-ce que ça pourrait être un passe-partout ?
Pour répondre à cette question, Enn se leva du lit et essaya d’insérer la clé dans la serrure de sa porte. La clé ne rentra pas.
Enn, retournant s’assoir : Non. Et je suis quasiment certain qu’elle n’ouvrira aucune chambre de cet hôtel.
Noll : Le porte-clé est pourtant le même que celui de votre clé.
Enn : J’avais atteint la même conclusion.
Silence.
Enn : Votre clé est spéciale. C’est tout ce que je peux dire.
Noll : Ça n’explique pas vraiment comment votre porte s’est ouverte.
Enn : J’ai mon idée là-dessus…
Léa : Est-ce qu’on peut aider ?
Enn : Non. Et pour être honnête, j’apprécierais beaucoup que vous sortiez de ma chambre.
Noll : Euh… certes.
Léa : Attendez ! J’ai des questions à poser !
Enn, grinçant des dents : Evidement…
Léa, après quelques instants : C’est quoi, cet hôtel ?
Enn, haussant le sourcil : L’Hôtel Hasard ! Vous ne l’avez pas vu en entrant ?
Léa : Pas vraiment… c’est compliqué… Et comment on en sort ?
Enn : Par définition, l’infini n’a pas de fin.
Léa : Vous voulez dire que cet hôtel est infini ?
Pas de réponse.
Léa : Mais c’est impossible !
Enn, dans un soupir: I am not sure about living forever…
Léa : Vous avez dit quelque chose ?
Enn : Maintenant que j’ai répondu à vos questions, sortez s’il vous plait.
Léa : Mais…
Noll : On y va.
A contrecœur, Léa quitta son siège et se dirigea vers la porte sous le regard sévère d’Enn. Au moment où elle s’apprêtait à sortir, elle se retourna une dernière fois.
Léa : Où est la réception ?
Enn : Prenez l’élévateur.
Et sur ces mots, il ferma la porte et tourna le verrou. Une fois seul, il se dirigea vers le lit et, se mettant à quatre pattes, en tira de dessous une valise. Il composa le code à quatre chiffres, et la valise s’ouvrit. A l’intérieur, des vêtements bien pliés et quelques objets divers. Enn fouilla entre deux chemises, puis émit un juron.
Il se releva soudain, et appuyant sa main contre son front, il prit un temps pour réfléchir. Après quelques minutes, il s’assit sur le lit.
Enn: Someone is going to change the topology of the line… I must warn the others.
* * *
Après de nombreuses minutes passes à marcher en silence, Léa décida de prendre la parole.
Léa : Il était bizarre.
Noll : Hum… Je pense que c’est dans sa nature.
Léa : Tu dis ça comme si tu le connaissais.
Noll : J’ai pas vraiment besoin de le connaître pour voir qu’il est bizarre. Tu l’as bien vu ?
Léa, avec un sourire narquois : Pas tout à fait…
Noll : Perverse !
Léa : Olala ! Monsieur morale ! Tu te rends compte que j’ai sans doute perdu ma seule chance de me rincer l’œil dans cet hôtel ?
Noll : Je vais te plaindre, tiens.
Léa : Bon…Et pour cette clé ? Elle ouvre quoi selon toi ?
Noll : Aucune idée. Il faudra demander ça quand on aura trouvé la réception.
Léa : Si on trouve la réception.
Noll : Si on trouve un ascenseur.
Léa : Bon, on va faire une pause avec les hypothèses.
Puis, Léa tira de son sac un paquet de chips, l’ouvrit et commença à grapiller.
Noll : Tu sais que ça sera compté sur sa note ?
Léa : Quel malheur…
Noll : Oui, en fait, maintenant que j’y pense, c’est bien fait pour lui. Il n’avait qu’à pas être désagréable.
Léa, murmurant : Perlimpinpin.
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