Chapitre 2
La fillette trottait sur le chemin de l'école, parfois, elle sautillait d'un pied sur l'autre en chantonnant.
Peu après son départ, elle avait tourné dans la rue Alphonse Daudet. De charmantes petites maisons étaient disposées de chaque côté de la chaussée, certaines agrémentées d'un jardinet fleuri. La rue Alfred de Musset, plus étroite encore, lui succédait ; on devinait des habitations cachées derrière des arbustes ou des murs quelque peu austères, destinés sans doute à protéger des regards indiscrets.
Arrivée à l'extrémité, elle atteignait la rue du caillou gris qu'elle remontait avant d'obliquer à droite pour rejoindre l'institution religieuse où elle était scolarisée. Ces noms de rues sonnaient joliment à ses oreilles.
Certains murs restaient gris, mais une grande majorité alignait leurs attrayantes briques rouges, tellement gaies.
Les maisons typiques étaient basses, sur un seul niveau. Un grand nombre de constructions neuves venaient compléter le décor qui avait conservé une grande simplicité, refusant l'ostentation de certaines villes enrichies par l'activité viticole.
La végétation s'adaptait aux températures élevées qui sévissaient parfois dans la région. Des pyracanthas s'accotaient aux murs, érigeant leurs épines et dressant leurs petites baies colorées. Des arbres fruitiers offraient leurs productions juteuses et sucrées. D'imposants catalpas et autres albizzias étendaient leurs ramures généreuses qui constituaient des îlots de fraîcheur. Des parfums entêtants se dégageaient de haies au feuillage exubérant, alourdies de grappes aux pétales blancs.
Observant tout autour d'elle, parfois par crainte, parfois par curiosité, l'enfant respirait l'air empli des effluves des fleurs aux multiples couleurs. Depuis toujours, son isolement favorisait son sens de l'exploration, souvent, elle examinait attentivement des événements variés, allant de la couture au jardinage en passant par la coiffure ou la mécanique.
S'éloignant de chez elle, elle s'encourageait à s'enhardir. C'était impressionnant de s'aventurer seule et de constater qu'elle parvenait fort bien à se débrouiller. En même temps, ce n'était pas si compliqué, lui aurait-on rétorqué.
Pour balayer ses inquiétudes et dissiper sa tristesse, la fillette tentait de s'évader et d'imaginer des jeux, des histoires peuplées de personnages du quotidien ou de feuilletons télévisés. Mais elle ne parvenait pas à s'éloigner de la réalité, se trouvait alors dans l'incapacité d'inventer des situations originales. Elle occupait de son mieux le temps qui s'étirait dans une monotonie pesante.
Pour tromper l'ennui, éloigner la solitude, quand elle ne lisait pas, des chansons réjouissaient sa tête. Elle s'investissait tant dans cette activité que la mélodie finissait parfois par prendre des allures lancinantes qui troublaient son sommeil fragile.
Haut dans le ciel, des martinets criaient sur un ton de désespoir.
Annotations
Versions