Nouvelles
de Sofiane Sahar
Le soleil s'est levé. J'aurais aimé l'en empêcher. Il s'était levé sur un jour triste, comme tous les autres. J'étais éprise dans ma monotonie. Chaque fois que je pensais que ça allait changer, chaque fois que je pensais que le soleil se lèverai sur le renouveau, j'étais déçue. Terriblement déçue. Autrefois, moi aussi je brillait. Autrefois, moi aussi j'éclairais les gens, et ils ne pouvaient vivre sans moi. Ils... Mais ce pronom devrait être au pluriel. Parce que ce n'était que lui qui ne pouvait vivre sans moi. Chaque jour j'étais son soleil, sa vie, son amour. Je l'aimais, et il m'aimait.
Et quelques fois les souvenirs de nos joyeux moments me revenaient en tête et je réalisait nos torts. On ne savait pas à qui allait la faute, et seul Allah pourrait nous le dire. J'étais son jour, sa vie. Il était ma nuit, me portait conseil et m'apaisait. Chacune de ses paroles m'enivrait, telles la lumière de la Lune. Mais l'amour est comme l'aube et le crépuscule, un échange constant de lumière et d'obscurité, chaque moment de clarté rendant la nuit plus douce.
Jai enfilé un peignoir et me suit installée devant la grande baie vitrée, une tasse de thé à la main, contemplant les flocons de neige tomber sur le sol. Chaque fois que mes pensées se détournaient de lui, un détails les ramenait vers son existence. Où était-il ? Il avait promis d'être la jusqu'à la fin, jusqu'à la mort et peut-être même l'au-delà.
Mais notre histoire n'avait été qu'illusion. Une illusion longue et douce. Il avait eu ce qu'il voulait. L'intérêt avait été présent dans chacun de ses paroles sans même que je m'en rende compte.
Les jours passèrent, et je me contentais de me nourrir et d'observer les conflits extérieurs. Le monde était si abominable. Injures et meurtres étaient commis et prononcés chaque jour. Je n'en pouvait plus. Il n'était plus là pour adoucir ma réalité. La guerre fleurissait dehors, et le pardon sortait peu à peu du dictionnaire.
Un jour, ou plutôt, une nuit, un soir, on toqua à ma porte. J'ai ouvert, me posant bien des questions.
Il était là. Il était revenu, un bouquet de fleurs à la main. Et quand il m'a vu, des larmes ont coulé de ses yeux. Il m'a prise dans ses bras et m'a donné le bouquet, sans que je ne comprenne quoi que cela soit.
-"Chemsa, la femme de ma vie, mon amour et mon soleil, croyais-tu réellement que j'allais te laisser sur cette note, sur cette explication décevante ? "
Qu'entendais-je ? Une explication décevante ?
Je l'ai regardé, cherchant à savoir. Il avait des cicatrices.
-" Envoyé à la guerre et meurtri, voilà ce que je suis. "
Cette simple phrase prononcée sur un ton larmoyant suffit à faire chavirer mon cœur. Envoyé à la guerre et meurtri. Que disait-il ? Était-ce réel ou illusoire ?
A présent à l'intérieur, bien au chaud, et assis sur le divan où nous avions passé tant de temps ensemble, il me regardait avec de grands yeux. Et parfois il les baissait sur le sol, pleurant presque, les prunelles masquées par ses douces boucles que j'avais toujours aimées.
Nous avons repris notre vie ensemble. Mais ce n'était plus comme avant. La guerre l'avait rendu froid et agressif. Chaque soir il s'excusait pour son comportement, et j'acceptais son pardon, parce que je l'aimais le soutenais et le comprenait. Malgré tout, quelque chose flottait entre nous. Je sentais qu'il se retenait de m'avouer quelque chose, qu'il avait une chose importante à me dire. Et parfois, un regret le rattrapait et passait dans son regard.
Et le soir où je l'ai questionné, le soir où j'ai décidé qu'il devait se confier, à l'instant où il a ouvert la bouche, des coups ont frappé violemment la porte, souhaitant presque la détruire. Je me suis levée prudemment pour ouvrir, mais il m'a retenue. Il m'a dit que ce n'était pas une bonne idée, que ce serait mieux de laisser passer. Il en savait quelque chose, je m'en doutais.
J'ai gentiment dégagé sa main de mon épaule, et je m'en suis en allé accueillir nos violents visiteurs, qui tapaient encore contre la porte.
-"Nous venons chercher un homme du nom de Ryam El-Mekkali. Déserteur et traître de la nation! Honte sur lui, qu'il fut mort ou vivant. "
J'ai jeté un coup d'œil en arrière, et les quatre hommes devant la porte sont entrés, sans que je puisse dire quoi que ce soit. Ils ont saisi Ryam et l'ont emmené. Ils m'a regardé, ne pouvant dire un mot.
Alors Ryam disparu de nouveau, sans qu'on eu une seule nouvelle de lui. S'ébruita très tôt que Ryam était un traître, une honte, dans toute la ville. Ces mots se répandait comme une traînée de poudre et j'en souffrais. Je m'étais repliée sur moi-même et j'avais mal. Je versais souvent mes larmes dans un verre d'alcool ou deux, détournée de chacun de mes principes.
Je l'aimais. J'étais folle de lui. Et pourtant, les années passèrent, et me laissèrent pour seul souvenir ce soir d'hiver sombre où ces quatre hommes sont venus le chercher, l'insultant.
Un jour, j'ai pris le choix de sortir. J'ai acheté un bouquet de roses chez le fleuriste au bout de la rue. Je me suis rendue au cimetière, rendre visite à mes parents. Je traversais chaque allée, prenant le temps d'observer chaque pierre tombale.
Mais mieux aurait valu que je ne sois pas venue ici. Bien des tourments m'auraient été évités.
Sur un pierre au tout début de l'allée était inscrit le nom de Ryam El-Mekkali, avec la phrase " Chemsa, mon soleil de toujours. "
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[I] Soleil | Chapitre | 1 message | 1 an |
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