La vendeuse détaille ma carte d’identité avec minutie de son œil expert.

Elle la tourne en tous sens, sans se presser, avec la précision des gens qui ont le regard exercé.

Elle triture encore un peu la carte à moins d’un centimètre de ses pupilles, avant d’enfin me la restituer.

« Tout est en ordre. Veuillez attendre un instant. »

Elle s’éloigne de son pas précis et lent, disparaissant dans son arrière-boutique.

Resté seul, je ne peux que patienter dans l’angoisse.

Et si elle avait menti ? Et si elle était en réalité partie appeler les autorités ? Ma carte est pourtant à jour… Non ? Je l’ai fait refaire il y a à peine plus d’un mois !

…Et si j’avais raté l’abrogation d’une loi ? Il y en a tant… Il suffirait que j’aie raté celle qu’il ne fallait vraiment pas… Si ça se trouve, ma carte n’est plus du tout règlementaire ! La police va arriver, elle va m’emporter, je vais disparaitre, tout le monde m’oubliera, et…

La vendeuse réapparait.

Entre ses longs doigts, elle tient un minuscule pot où pousse un bébé cactus rond au multiple petits jumeaux tout aussi ronds.

« Voici votre cactus, jeune homme. Prenez-en bien soin. »

« M… merci, madame… »

« Mais de rien. Et que la loi soit de votre côté. »

« Oui, oui… de même ! De votre côté… ! »

Je prends le pot, lui donne la somme due, puis m’enfuit de la boutique, non sans la saluer encore une dernière fois, comme il l’est légalement exigé, en me retenant de ne pas courir !

Il serait dommage de me prendre une amende pour déplacement trop rapide sans justifications valables !