Chapitre 10
Plume
Je ne sais comment, mais j'ai réussi à atteindre la maison de Callie et Paul. Dès que j'ai passé le seuil de la porte, ils m'ont sauté dessus comme deux Bouledogues enragés en voyant mon état, tout en me passant un sweat-shirt par-dessus la tête. Je ne peux pas leur en vouloir, j'ai envoyé mon fils les rejoindre en urgence pendant que je me faisais malmener par un Wolf Sanguinaire !
Erwann ? Où est-il ?
Paul anticipe ma question et m'indique qu'il est dans la chambre qu'il occupe quand il vient chez eux et qu'il n'a rien. Que je devrais plutôt m'occuper de mon propre état.
À ce moment-là, leur porte s'ouvre avec fracas, je me retourne beaucoup trop rapidement et perds le peu d'équilibre que j'ai. Des bras puissants et musclés me réceptionnent, alors que je m'attends à heurter le plancher.
Quand mes sens se réveillent, j'essaye de repérer l'endroit où je me trouve. Des tableaux de paysages que je connais, ainsi que la couleur jaune poussin de la porte menant à la salle de bain adjacente m'apporte toutes les indications dont j'ai besoin.
Je suis chez Paul et Callie ! Je laisse échapper un soupir de soulagement. En voulant bouger mon bras gauche, je me rends compte que quelque chose, ou plutôt quelqu'un m'en empêche. Baissant les yeux vers la demi-portion qui bloque mes mouvements, je ne peux qu'afficher un petit sourire. Son visage est posé sur ma poitrine, l'un de ses bras encercle mon ventre. Je le soulève doucement pour déplacer mon bras et pouvoir le poser derrière sa nuque pour lui caresser les cheveux avec tendresse.
Heureusement, il n'a rien !
Sentant mes caresses contre son crâne, il se pelotonne encore plus contre moi en ouvrant légèrement les yeux pour me regarder avant de murmurer : Maman, tu vas bien... Je t'aime. Mon cœur se gorge d'amour, mais aussi de douleur pour lui avoir fait subir ses chamboulements. Je n'y suis pour rien, je sais, mais je ne peux m'empêcher de m'en vouloir de n'avoir pas pu anticiper l'attaque. Je le rapproche de ma tête et pose un doux baiser sur son front avant de lui murmurer à l'oreille.
— Maman va bien. Ne t'inquiète pas mon cœur. Je t'aime aussi.
Sa respiration ralentit au bout de quelques minutes, j'en profite pour scruter l'extérieur, il fait nuit.
Quelle heure est-il ?
Je continue de prodiguer à mon chéri de tendres caresses. Au bout d'un moment sentant que le sommeil m'a totalement quitté, je me lève le plus silencieusement possible du lit et vais rejoindre la cuisine. J'ai mal partout, comme si un rouleau compresseur m'avait roulé dessus. Avançant avec toute la discrétion dont je suis capable dû à mon état, j'aperçois autour de la table Paul et Callie qui relèvent d'un coup la tête avant de m'adresser un petit sourire.
— Je suis désolée, dis-je doucement sans trouver quoi dire.
Ils me regardent et leurs visages n'expriment que la joie de me savoir vivante, ainsi qu'une pointe d'inquiétude quant à mon état.
— Je vais bien, ne puis-je m'empêcher de leur dire d'une voix rauque.
J'ai la gorge sèche, les jambes qui flageolent, je décide donc de m'asseoir avec eux autour de la table. Callie anticipe mes besoins et me ramène un grand verre d'eau, avant de sortir une tasse pour me servir une tisane. J'attrape le verre d'eau entre mes mains tremblantes et le bois d'une seule traite, sous le regard inquiet de mes amis, ça fait du bien. Je les fixe chacun leur tour.
— Parlez.
Paul et Callie se concertent d'un regard, avant que le premier ne se racle la gorge.
— De quoi te souviens-tu, Plume ?
— On courait tranquillement avec Erwann, quand un loup sanguinaire a voulu l'attaquer. Je me suis interposée de justesse et lui ai fait signe de partir de toute urgence pour vous rejoindre.
Je souffle un bon coup, tachant de me remémorer les événements du mieux possible.
— Je ne faisais pas le poids face à ce loup, j'ai tenu aussi longtemps que possible, car il fallait absolument que je protège mon fils, au moins le temps qu'il rejoigne le village le plus proche. J'ai réussi à me défendre, avant d'être projetée contre un arbre, j'étais en piteux état et ne parvenais plus à me lever. Il allait m'assener le coup de grâce, quand deux loups sont venus me prêter main forte. Aucun des trois ne faisait attention à moi, dès que j'ai repris suffisamment mes esprits, mon angoisse pour Erwann et l'adrénaline, je pense, m'ont donné les forces suffisantes pour vous rejoindre.
Je ferme les yeux tentant de me souvenir des derniers instants avant que je ne perde connaissance.
— Quelqu'un m'a rattrapé avant que je ne perde connaissance... ce n'était aucun de vous deux !
— En effet, ma belle, la porte s'est ouverte brusquement, tu t'es retournée vers les nouveaux arrivants avant de vaciller et de perdre connaissance dans les bras de Zander, Keylan était à ses côtés.
Qui ?
Voyant mon regard interrogateur, Paul reprend ses explications.
— Keylan est celui que tu as aidé dans la forêt. Quant à Zander, c'est celui qui t'a sauvé lors de l'attaque du loup.
Mon visage doit devenir livide, car ils me regardent avec inquiétude. Prêt à me retenir si je tombe de mon assise.
Les exécuteurs m'ont aidée ?
Je pose mon coude contre la table et ma tête tombe mollement sur mon poing.
Maintenant, c'est sûr. Ils connaissent ma nature et mon fils... Quoi d'autre ?
Callie me lance un regard inexpressif.
— L'un de tes pendentifs est cassé...
Je relève la tête vivement vers elle.
— Tu portais le sweat de Paul, donc ils n'ont pas dû voir le reste de ton collier, mais ils ne me lâchaient pas les basques. Par contre, j'ai dû leur expliquer que ton bracelet camoufle ton odeur et qu'il bloque ta guérison.
Si tant est que mon visage eût encore des couleurs, je pense que définitivement je peux me faire passer pour un fantôme qui hante les plaines. Je frotte mes paupières de ma main, pour tenter de calmer mon cœur qui bat à tout rompre. Après l'annonce de mon amie, ma main se porte automatiquement sur mon collier pour attester ses dires. Je suis loin d'être rassurée. Lequel a cassé ? Où est-il tombé ? Dans la forêt pendant le combat ? Mon cœur palpite de plus en plus vite, ma main s'accroche à mes pendentifs pour repérer lequel n'est plus entier. Sous mes doigts hésitants, je sens celui qui arbore une tête de loup et un croc en guise de corps, un léger soupir s'échappe de mes lèvres avant de toucher le second et de me rendre compte que la larme de sang est toujours intacte, par contre le poignard accroché à celle-ci à perdu une partie. La cassure est tranchante, elle m'égratigne le pouce. Je décale le collier de sous le sweat-shirt afin d'observer l'état du pendentif cassé. Les larmes me montent aux yeux, sans être décidées à couler. Je les retiens du mieux possible.
L'angoisse, la peur et la peine prennent possession de mon corps. Je me lève d'un bond et me hâte vers la porte d'entrée. J'ai besoin d'air ! De respirer ! Une fois dehors, je colle mon dos au mur froid de la bâtisse, ferme les yeux tout en essayant de retrouver mon calme. Impossible ! Les souvenirs me submergent ! Je revois du sang, beaucoup de sang dégoulinant d'un homme face à moi et son bourreau juste à côté qui m'observe avec un sourire sadique et satisfait accroché aux lèvres.
Je sursaute quand une main se pose sur mon épaule et me tourne vivement vers la personne à mes côtés. Callie recule d'un pas quand elle comprend que j'étais partie à mille lieues de là. Mes épaules s'affaissent, ma respiration se calme progressivement. J'accepte la cigarette qu'elle me tend. Je fume très rarement, sauf quand la situation ou les émotions me submergent, là clairement j'en ai besoin.
— Ça va aller ma belle, dit-elle d'une voix calme et sereine. Tu sais, quand les deux loups sont entrés dans le salon, ils avaient peur pour toi. Je sais très bien ce que tu nous as expliqué vis-à-vis du croc à leur oreille et leur fonction. Mais pourquoi ne pas tenter de leur expliquer la situation comme tu l'as fait avec nous ?
— Non ! ne puis-je m'empêcher de répondre vivement.
Je me masse les tempes pour tenter de lui expliquer ce qu'elle ignore.
— Les Exécuteurs sont à la solde de la Haute Instance Lycans... Leur raconter mon histoire, annonce soit la fin de ma pseudo liberté, soit mon exécution. Que deviendra Erwann ? Soit il sera exécuté avec moi. Soit mon père le récupèrera et le modèlera à son image. Ce que je refuse !
Ma main se crispe et mes griffes sortent sans que je ne m'en rende compte, je reviens à moi quand l'odeur cuivrée du sang me monte aux narines, puis baisse les yeux vers ma main. Le sang a taché le perron. J'écrase ma cigarette dans le cendrier devant moi, alors que Paul nous rejoint et hésite à me parler. Il regarde sa femme puis moi.
— J'ai entendu votre conversation. Zander et Keylan ont été clairs, dans les jours à venir, ils viendront te voir pour discuter. Je ne sais pas s'ils ont trouvé le morceau de ton pendentif. Mais tu vas devoir leur parler un minimum. Tu es parvenue à leur cacher ta nature, de plus les villageois ne leur ont pas donné d'informations malgré leur insistance.
Il pose une main sur mon épaule, pour tenter de me calmer. Je dois faire ce qui est le mieux pour mon petit bonhomme et moi. Fuir ? Non, je ne ferais que reporter le problème et puis, soyons lucides, ce sont des Exécuteurs, donc la traque c'est un domaine qu'ils maîtrisent très bien. Je ne ferais que repousser le moment.
Mes deux amis me regardent avec inquiétude, à leur place je serais dans le même état. Ils ne peuvent rien faire pour m'aider, mon monde et ma situation les dépassent. Mais ils sont le soutien dont j'ai besoin.
— Allez-vous reposer vous êtes tout pâles, dis-je avec un petit sourire. Je ne partirai pas.
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Hello :)
Plume va mieux :)
Heureusement que Zander et Naël étaient là pour l'aider, lors de l'attaque.
Oups, un de ses pendentifs à cassé :/
Devrait-elle parler à la meute de Zander et expliquer son passé ? Hum..hum...
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