Une histoire de chanson

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17 ans. Comme tous les adolescents, je croyais qu'à cet âge là j'aurais déjà donné un sens à ma vie. BAC en poche, études dans un domaine qui me passionne, âme sœur à mon bras et j'en passe. Bon j'ai mon BAC, ça fait déjà une chose en moins sur ma liste. Par contre pour les études passionnantes et l'homme de ma vie, c'est une autre histoire. Encore une fois, la gentille petite Amélia vient de se faire jeter comme une vieille chaussette.

Je soupire bruyamment en m'adossant contre le banc. Je viens toujours au parc quand ça va mal. C'est-à-dire environ deux fois par jour. Le fait qu'il ne soit qu'à une centaine de mètres de chez moi aide beaucoup.

J'observe les gens autour de moi. Est ce qu'ils sont là aussi parce qu'ils ne vont pas bien ? Est ce qu'ils peuvent lire sur mon visage à quel point je suis dégoûtée ? Non, non je ne crois pas. Sinon cette femme ne rirait pas autant. Cet enfant ne serait pas aussi bruyant. Ce jeune homme ne me sourirait pas.

Minute ! Est ce que ce jeune homme vient de me sourire à moi ? Je reporte mon attention sur lui, mais il est déjà perdu dans les méandres de son téléphone.

Il est assis sur un banc en face de moi. Je grimace en remarquant qu'il porte un pantalon noir en coton simple et une chemise à carreaux bleue. Pourtant il n'a pas l'air d'avoir plus de 19 ans. Quel jeune s'habille comme ça de nos jours ? Ses cheveux bruns sont impeccablement peignés en arrière et une paire de lunettes complète la panoplie.

Flûte alors ! Pour une fois qu'un inconnu me sourit, il faut que ce soit un type chelou. Déjà j'aime pas les bruns, je préfère les blonds. En plus il a des lunettes, ça signifie qu'il est ringard et sans doute accro aux jeux vidéos et aux BD de super héros. Et puis sa coiffure "tout en arrière" est définitivement ridicule.

Une douleur me traverse tandis que je me rends compte de ce que je suis entrain de faire. Les mots utilisés par Matthieu mon ex me reviennent en tête.

"Amélia, tu ne mets jamais de décolletés, ni de talons, ni de maquillage. Pour faire court, tu as l'air d'une sainte-ni-touche extrêmement coincée. Je sais qu'il n'en est rien, mais mes potes ne le savent pas. Je t'aime et c'est pour ton bien que je te quitte. Quand tu auras compris l'importance de l'apparence et que tu auras changé la tienne, je te récupérerai. Ciao."

Je te récupérerai. Ciao.

Et voilà que comme ce salaud, cet idiot de la pire espèce qui soit, je suis entrain de rejeter quelqu'un pour son apparence.

Je reporte mon attention sur le jeune homme, bien décidée à dépasser les apparences.

Il n'y a pas un seul pli sur ses vêtements. Preuve qu'il est soigné et fait attention aux détails. Ou alors que c'est un fils à maman. Ou un maniaque. Esprit ouvert Amélia, esprit ouvert.

Sa chemise est tendue sur ses bras et avant-bras. J'ai toujours apprécié les mecs musclés mais pas trop.

D'un doigt, il remonte ses lunettes sur son nez et je ne peux m'empêcher de trouver ce geste incroyablement craquant. Ses sourcils froncés par la concentration, lui donnent un air adorable. Ses lèvres sont pleines, légèrement rosées. Comment cela serait de l'embrasser ? Je rougis légèrement en y songeant.

Oui, oui cet inconnu a du charme. Je crois même qu'il me plaît. Il suffirait que je passe la main dans ses cheveux à l'aspect si doux pour faire disparaître cette forme qu'il leur donne.

Comme se sentant observé, il lève les yeux de son écran et plonge son regard gris dans le mien. Un gris clair qui me transperce. Il me sourit à nouveau et je cligne plusieurs fois des yeux, éblouie.

Oui il est vraiment mignon. Surtout quand il sourit.

Sans plus réfléchir, je me lève d'un bond et marche vers lui. Arrivée, je me mets à me dandiner d'un pied sur l'autre en me tordant les mains.

Et maintenant Amélia ? Dis quelque chose ! Fais quelque chose !

Levant la tête vers moi, il pose un bras sur le dossier du bras. Puis, après avoir remonté encore une fois ses lunettes, il m'adresse un regard perplexe.

- Oui ? Je peux t'aider ?

Plutôt que de lui répondre, je souris bêtement en me disant que sa voix est vraiment sexy. Comment en suis je arrivée là déjà ? Il n'y a pas une minute je le trouvais ringard !

- Eh oh ! Tu m'entends ?

Bordel bouges toi Amélia !

- Euh... Oui, oui. Tu m'as souris...

Il fronce les sourcils. J'ai déjà dit que ça lui donnait un air adorable.

Déjà arrête de te dandiner Amélia. Et puis, "tu m'as souris" ? Sérieusement ?

Soudain, il éclate de rire. Il passe une main pour bien renvoyer ses cheveux en arrière. Il faut que je lui dise que cette coupe ne lui va pas du tout.

- Désolé, c'est juste que, je ne te souriais pas à toi. Mes sourires étaient adressés à la petite fille là bas. Tu vois ? Celle qui joue avec le CHAT. Derrière ton banc.

En m'expliquant, il sourit encore à la fille en question, qui lui adresse un signe de la main en retour.

Je suis conne. Et surtout je suis ridicule.

Okay Amélia, c'est le moment de sortir une remarque spirituelle et de rentrer chez toi.

- Moi aussi j'avais un chat. Je l'avais appelé Miaou. Sauf qu'il s'est sauvé après que je l'aie fait castré, mais j'étais obligée. En même temps il sautait sur tout ce qui bouge. Même la chienne de la voisine !

Un silence gênant suit ma tirade. Le gars doit être entrain de se demander sur quelle genre de folle il est tombé.

- Ah. Euh... C'est original comme prénom Miaou.

- Tu trouves ?! Moi aussi !

C'est de pire en pire. Il faut que je me sauve. Je fais volte face et entreprend de retourner à ma place comme ci de rien n'était. Mais c'est sans compter ma créativité légendaire qui n'a d'égale que ma bêtise. Je me retrouve donc de nouveau face à l'inconnu, prise d'une soudaine inspiration.

- Hey tu sais que je te veux ! Ton amour a été fait pour quelqu'un comme moi. Allez maintenant suis moi. Je suis sûrement folle je sais pas. Dis moi si je parle trop, allons danser et mets ton corps contre moi. Allez maintenant suis moi !

Je ne viens pas de citer Ed Sheeran en français, si ?

Le garçon me regarde bouche ouverte. Je me serais mise des baffes si j'étais pas si douillette. Putain qu'est ce qui m'a pris !

Quand je me retourne cette fois-ci, c'est avec la ferme intention d'aller m'enterrer bien profond.

- I'm in love with the shape of you. We push and pull like a magnet do. Although my heart is falling too, I'm in love with your body.


Alors que j'ai parlé assez rapidement sans aucune harmonie, le garçon lui il chante. Magnifiquement bien en plus. Doucement, je me retourne à nouveau vers lui.

- J'ADORE cette CHANSON, il m'informe en souriant. Mais je ne l'ai pas vite reconnue étant donné que tu l'as récité en français.

Ne sachant pas quoi répondre, je me contente de rougir.

- Je m'appelle Daniel.

Je saisis la main qu'il me tend et un frisson me parcourt tandis que je la serre.

- Et toi ?

- Moi quoi ?

- Ton nom.

Il a un sourire moqueur en coin. Évidemment qu'il se moque. Quelle piètre image je renvois.

- Oh ! Euh.. Amélia. C'est comme ça qu'on m'appelle.

- Enchanté celle qu'on appelle Amélia.

- Cette coupe de cheveux ne te va pas.

Il sourit. Il est vraiment beau quand il sourit. Je l'ai déjà dit ?

- Je sais. Mais la coiffeuse va piquer une crise si j'ose y mettre la main.

- La coiffeuse ?

La petite fille au chat nous rejoint en courant avec justement son chat.

- Je suis fatiguée ! Rentrons à la maison !

- D'accord petite nièce.

Je note le petite nièce en me disant qu'il l'a sûrement précisé pour moi.

Alors quoi ? Je lui plais ?

- Bon bah... bon retour chez vous inh ! N'oublie pas de nourrir le chat petite nièce.

Après les avoir gratifié d'un sourire chacun, je me dirige vers la sortie sans demander mon reste.

Je me désespère. Je vais aller m'enfermer dans ma chambre et écouter Shape of you en boucle en machouillant du chewing-gum à défaut d'avoir un pot de glace.

- Hey, on vient de se rencontrer et je sais que c'est fou. Mais prends mon numéro et appelle-moi, peut être ?

Mon regard va du bout de papier à Daniel. Daniel qui vient de m'imiter en récitant Call me maybe en français. Daniel au sourire si craquant. Daniel qui remonte ses lunettes d'un doigt.

Fidèle à moi-même, je le serre dans mes bras et lui claque une bise sonore sur la joue droite. Ensuite je rougis et me mords la lèvre inférieure.

- Désolée. Je ne sais pas ce qui m'a pris.

- Oh, tu peux me sauter dessus autant de fois que tu veux. À bientôt Amélia. J'espère.

- J'espère aussi !

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