Chapitre 4

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Nas fut réveillé par une vive douleur dans les côtes. Il entrouvrit les yeux et aperçut Fukume qui le toisait. Elle conservait son expression neutre, ne laissant rien paraître, chose qui exaspérait Nas. Ou le mettait mal à l’aise. À voir.

Il se redressa péniblement, se tenant les côtes et comprit que cette douleur ne venait pas d’une position inconfortable pour dormir ni même de la dureté de sa couchette, mais d’un violent coup de pied que la chasseresse venait de lui décocher. Mais pour qui se prenait elle ? Furieux, il planta ses yeux dans les siens et lui lança un regard noir. Chose qu’il regretta car la froideur de ses prunelles suffit à ôter toute trace de reproche siennes.

Nas se leva sans pour autant sortir de ses pensés. La chasseresse soupira lorsqu’il fut enfin sur pied, et le jeune garçon se sentit encore plus remonté contre elle.

Elle lui fit signe de le suivre d’un geste de la main et se dirigea vers le fond de la cavitée. Il lui emboîta le pas sans oublier de lever discrètement les yeux au ciel. Il en avait assez de se faire prendre de haut.

Fukume souleva le rideau de peaux d’un geste rapide et disparut de l’autre côté, aussitôt imitée par le garçon roux.

Une odeur de renfermé régnait dans le garde manger, si bien que Nas se mit à respirer par la bouche. Sur le sol étaient disposées deux grosses mangues ainsi que le jaguar qui l’avait attaqué la veille. Du moins ce qu’il en restait.

Le corps était dépourvu de tête et de queue, Fukume avait dû les jeter sans qu’il ne s’en rende compte. La vision du corps sans tête aurait donné des nausées à n’importe qui, mais le jeune garçon n’avait jamais eu de mal avec ce genre de choses.

— Tu sais faire sécher de la viande ?

La voix rauque de Fukume le fit sursauter.

Elle se tenait appuyée au mur, le regard convergeant dans sa direction. Nas hocha la tête. Si il avait sût que son stage de troisième lui serait un jour d’une quelconque utilité !

Ayant fait tardivement sa lettre de motivation et ses demandes aux entreprises, son seul choix restant fut entre une boucherie et un cabinet dentaire !

Ses parents qui y voyaient l’occasion pour lui de faire son entrée dans le monde de la BD ou du scénario avaient été déçus. Nas était peut-être un rêveur, mais ça ne l’empêchait pas d’être un peu glandeur.

Fukume lui tendis un petit couteau en pierres taillés qu’il prit dans un soupir.

Tailler la viande rouge pour la faire sécher... Super occupation ! Et lui qui imaginait une folle épopée sauvage, la désillusion était totale.

Son hôte retourna s’adosser au mur sans un mot. Son silence et sa réticence à prononcer la moindre phrase mettait Nas mal à l’aise, mais pouvait il réellement en vouloir à une jeune fille vivant en solitaire dans la jungle depuis peut être plusieurs années de ne pas maîtriser l’art de la conversation ?

Il s’attela à dépecer le jaguar sous les yeux de Fukume. La jeune fille vînt plusieurs fois corriger ses gestes et lui indiquer de meilleurs emplacement pour couper et il était forcé d’admettre qu’elle s’y connaissait mieux que lui.

Il venait de finir de découper l’arrière train, non sans dégoût pour le sang qui imbibait ses vêtements à force de tailler dans la chaire, lorsque la chasseresse sortit du garde manger, le laissant seul avec son ouvrage.

Le jeune garçon se sentit soulagé de ne plus avoir le poids de son regard vide sur ses épaules. Il contempla le travail restant d’un air las. Il aurait aimé être absolument partout sauf ici.

Il inspira un grand coup et déchira violemment les muscles du poitrail du Jaguar. Il consacra l’heure voir les deux heures qui suivirent à dépecer l’animal et suspendre sa viande, non sans mécontentement. Puis, satisfait de son travail il sortis du garde manger.

Fukume était toujours dehors, chose qui l’arrangeait bien car un peu de solitude pour réfléchir n’étais pas de trop. Il s’allongea sur sa couchette, fixant le plafond d’un oeil préoccupé.

Il devait songer sérieusement à la manière dont il allait rentrer chez lui. Il avait fait tomber sa boussole la veille, et avais suivit son hôte sans s’en préoccuper, il ne lui restait que son sac à dos. Il aurait bien sûr pu contacter ses parents si il avait eu un portable, mais même si c’était le cas il n’y avait sûrement pas de réseau. Il pourrait attendre les secours, qui sont peut être déjà à sa recherche, mais ça pourrait prendre longtemps...

À présent il n’avait aucune information sur son emplacement, ni la direction à suivre pour regeoindre la civilisation. Non, sa piste la plus stable était Fukume. Et c’était franchement pas gagné...

Si la jeune fille possédait une quelconque information sur un éventuel moyen de rentrer chez lui, il devait le savoir ! Nas se promit de l’interroger là dessus le soir même, espérant des réponses.

Il était vrai qu’elle ne parlais presque pas mais il avait l’intuition que cette fois sa réponse serait différente. Après tout, il l’avait jusqu’ici seulement questionnée sur elle. Peut être qu’elle se montrerai plus ouverte sur d’autres sujets.

Le jeune garçon poussa un profond soupir. Pourquoi étais-ce si compliqué ? Et surtout, allait il un jour rentrer chez lui ? Retrouver sa mère, sa routine confortable, sa maison, ses amis ? À cette pensée, une larme roula sur sa joue, qu’il éssuya vivement d’un revers de main. Pas question de pleurer ! Il devait rester optimiste.

Nas reçu un violent coup de pied au tibias. Le jeune garçon se redressa vivement et aperçu sans surprise Fukume qui se tenait juste devant lui.

— Tu comprends vraiment pas que ça fait mal hein... ? Fit il sarcastique.

La chasseresse balaya ses propos d’un revers de main.

— Tu devais faire sécher la viande.

Fit elle de sa voix monocorde

— Et c’est fait.

Nas s’efforça d’imiter son ton neutre, comme pour lui prouver que lui aussi pouvait être froids. La jeune fille ne broncha pas. Elle se dirigea vers la sortie de la petite grotte et lui jeta un regard qui signifiait: 《suis moi.》

Nas leva les yeux au ciel. Il en avait assez de lui devoir quelque chose, mais d’un autre côté il était curieux à propos de cette hôte étrange. Il était à présent persuadé qu’elle cachait quelque chose, et il n’avait qu’une seule envie après retourner chez lui: le découvrir.

Il suivit la jeune fille pendant très peu de temps, car ils arrivèrent rapidement devant un bananier.

Après la cuisine, la cueillette. Rien de plus chiant par hasard ? Il regarda l’arbre. Son tronc était assez massif, et les larges feuilles semblables à celles d’un panier se trouvaient très élevées, au même niveau que les fruits. Impossible de les atteindres depuis le sol. Il s’apprêtait à le dire à Fukume, mais réalisa que celle ci n’était plus à ses côtés. Il balaya le paysage brousailleux du regard sans l’apercevoir. Alors qu’il commençait à s’interroger, il entendit sa voix venant d’au dessus de lui.

— Monte.

Encore un ordre hein ? La chasseresse se trouvait dans un arbre voisin au bananier, d’où l’on pouvait facilement attraper quelques fruits.

Il commença à grimper, s’accrochant aux branches basses avec difficulté. Il arriva bientôt à son niveau et se hissa sur sa branche, qui était sûrement le meilleur perchoir pour une cueillette. La jeune fille pointa du doigt l’arbre fruitier.

— Cueille ce que tu peux.

Elle ne lui laissa pas le temps de répondre et descendit de l’arbre avec une rapidité inimaginable. Mais d’où tenait elle cette agilité ? Il était tout de même improbable qu’elle ai acquises seule toutes ces connaissances en matière de survie.

Nas sortit un instant de ses pensées et posa un oeil sur les bananes qu’il était censé cueillir. Il soupira. Le jeune garçon espérait de tout coeur que cette vie inconfortable et ennuyeuse ne durerait pas. Mais une autre part de lui voyait cela comme une chance de sortir de son quotidien, de vivre une vie plus palpitante. Mouais...

Le rouquin tendis le bras et arracha un fruit jaune vert. À califourchon sur sa branche, il utilisa son tee shirt comme un récipient en en repliant un pan. Il posa le fruit qu’il venait de cueillir dans le creux du tissu et en arracha un suivant.

Nas se laissa aller à ses pensées alors qu’il s’attelait à la tâche. Il s’imagina montrant à Fukume le ville. Aurait elle ses repères immédiatement ou faudrait il qu’il la guide dans chacun de ses mouvements ? Il esquissa un sourire malicieux à l’idée de pouvoir lui donner des ordres comme elle le fesait.

Le jeune garçon constata qu’il avait récolté tout les fruits qu’il pouvait atteindre. Il soupira et descendit de l’arbre en tâchant de ne pas faire tomber sa récolte. Chose qui lui valut de s’écorcher la main contre une branche rugueuse non sans réprimer une grimace de douleur.

Il sauta enfin à terre et fut soudainement assaillis par le doute. Et si Fukume ne revenait pas ? Et si elle s’était débarrassé de lui ? Il leva les yeux au ciel devant sa propre stupidité. Si elle ne voulait pas de lui elle ne lui aurait pas fourni toît et nourriture. Enfin, toît... façon de parler. Nas s’assit en tailleur sur un tapis de mousse.

Le reste de la journée s’écoula rapidement. Nas fit une sieste en attendant la jeune fille, qui revînt avec un singe sur l’épaule. Elle avait profité de sa ceuillette pour chasser. De retour à la grotte, elle lui intima de dépecer l’animal pour mettre les cuisses sur le feu.

Une journée avait suffit à améliorer la communication avec elle. Il est vrai que son language silencieux était assez agaçant mais facile à comprendre.

Il attendait que la viande cuise lorsqu’il se souvint de sa résolution de ce midi. Il devait interroger la chasseresse sur la ville la plus proche. Il regarda la jeune fille. Elle ne lui prêtait pas la moindre attention et surveillait la cuisson de la viande. Il inspira un coup et se lança.

— Fukume ?

Pas de réponse. Bien sûr. Elle ne répondrait pas du premier coup. Il soupira, de plus en plus énerver par ce petit jeu mais repris la parole.

— Dit moi, tu sais où je pourrais trouver une ville ? Ou juste un chemin ?

Un long silence se fit, mais elle fini par répondre. Il lui fallait son temps de réaction après tout...

— Non.

La réponse était nette, tranchant et froide. Elle fit à Nas l’effet d’un coup de poignard. Comment cela non ? Ça n’était pas possible. Elle mentait. Elle devait bien venir de quelque part. Il ne voulait pas passer le restant de ses jours à faire sécher de la viande et cueillir des bananes. Le jeune garçon secoua la tête. Il devait rentrer chez lui !

Il reçut un violent coup de poing dans le crâne. Fukume. Alors qu’il allait déverser toute sa haine et son désespoir sur elle, sa voix résonna dans la caverne.

— Ça sert à rien.

Et elle se tut. Il la gratifia d’un sourire sarcastique, mais elle ne fesait plus attention à lui. Ça sert à rien... Facile à dire ! Surtout si on ne veut pas révéler quoi que ce soit. Si il voulait des informations, il faudrait la jouer plus fine. Pourquoi ne pas commencer par en apprendre plus sur elle ? Il prit un inspiration et dit:

— Pourquoi tu refuse de parler de toi ?

Trop direct. Il aurait dû réfléchir. Pour toute réponse, il reçut un soupir d’agacement.

Il regarda autour de lui et aperçu le MP3 dans la poche de côté de son sac à dos. Il sourit.

— Tu as déjà... Écouté de la musique ?

Elle lui jeta un regard surpris. Sa main attrapa une grande branche plus ou moins droite et elle commença à la tailler en pointe.

— Plusieurs fois, répondit elle enfin.

Voilà qui constituait un indice plutôt grand. Elle avait été en contact avec la civilisation assez de fois pour avoir pu écouter de la musique. Il aurait pu s’arrêter là, mais il ne put s’empêcher de sortir le MP3 de son sac. Il était curieux de savoir si la musique lui fesait un effet quelconque.

Fukume était toujours en train de tailler le bois. Il écoutait essentiellement du métal, il n’y avait donc que ça sur l’appareil. Le garçon roux fit défiler les titres et s’arrêta sur l’un d’eux.

"Undefeated" de Skillet.

Il esquissa un sourire.

— Écoute ça.

Nas appuya sur la touche play et des sonorités grondantes empirent la caverne, se répercutant sur les murs.

En entendant la musique rapide et grave, les mouvements énergiques de Fukume ralentirent, et son regard se perdit dans le vide. Un sourire fugace et mélancolique passa sur son visage.

Nas éclata d’un rire franc.

— Ça te dis quelque chose on dirait !

À ces mots, la jeune fille se reprit et son regard redevint froids. Elle se leva, lui pris l’objet des mains et arrêta la musique sans difficulté. Elle se rassit, gardant le MP3 à la main et redevenint interdite.

Le charme du moment était passé, mais pendant un court instant, elle s’était laissé allée. Elle avait retiré son masque impassible, laissant paraître un peu d’elle même.

Tard d’en la nuit, Nas fut réveillé par un mauvais rêve. Il s’assit pour reprendre ses esprits, plissant les yeux dans la pénombre. C’est alors qu’il fit une constatation pour le moins déconcertante: Fukume n’était plus nulle part dans la cavité.

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