INTERLUDE - La vie d'un démon

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Si la vie des anges était organisée, celle des démons l’était également. Neuf cercles infernaux et autant de bureaux chargés de gérer les âmes déchues.

On ne traitait pas n’importe comment une âme.

Et chaque bureau était tenu par un supérieur. Un démon mineur.

Et au-dessus de chaque démon mineur se tenait des chefs de légions infernales.

Et au-dessus des chefs de légions il y avait les démons majeurs.

Ardat-Lilli était une démone de Babylone, elle soufflait la volupté aux hommes et les faisait succomber sous ses attraits. On la surnommait la Ravisseuse et son maître était le démon femelle Alouqua, succube et vampire qui épuise les hommes et les conduit au suicide.

De vieilles tentatrices mais de rang mineur parmi les rangs démoniaques.

La démonologie ne les citait qu’à peine.

Ardat-Lilli était du bureau des âmes prêtes à tomber. Normalement, elle n’avait que peu de discussion à mener avec les condamnés à l’Enfer. Ils étaient déjà marqués du sceau de l’Infamie.

Alors pourquoi avoir rencontré l’ange des âmes déchues ?

Parce qu’Alouqua avait décidé de lui laisser sa chance de devenir une démone d’un rang supérieur. Alouqua connaissait depuis des milles et des ères Ardat-Lilli, les deux démones avaient vécu la chute de Babylone et la naissance de Rome, la chute des Empires et la naissance des Religions.

Alouqua avait de l’amitié pour cette succube, elle se voyait bien l’avoir comme adjoint dans cet Enfer si fatiguant à gérer.

Et ce fut cette pensée intéressée qui la poussa à interroger sa succube lorsqu’Ardat-Lilli revint de sa chasse.

« Un souci ?, fit Alouqua, surprise de capter un regard aussi concentré chez sa subalterne.

- Une pensée.

- Une pensée ? Dis-moi ! »

Alouqua, démone et maîtresse succube, était une magnifique créature et Ardat-Lilli l’aimait beaucoup. Elle appréciait de lui plaire et de lui apporter du contentement.

Alouqua était assise sur son trône de pierre noire, dure comme son cœur, une robe largement fendue, aux couleurs chatoyantes de l’Enfer. Une belle démone, les cheveux noirs comme l’ébène et les cuisses veloutées.

Ardat-Lilli obéit à l’injonction et vint s’agenouiller aux pieds de sa maîtresse.

« Il y a un ange, commença la succube.

- Il y a toujours un ange, asséna la Maîtresse, laissant sa main caresser les boucles rousses de la succube.

- Il me plaît.

- Mhmmm. Un ange est un bel animal. Impossible à traiter.

- Je pourrais essayer, fit la douce voix tentatrice d’Ardat-Lilli, plus près de la démone assise.

- Essayer quoi ?

- Faire tomber un ange. »

Alouqua rit, réellement amusée, tandis que les mains de la succube remontait sa robe, dévoilant les longues jambes, les cuisses joliment gainées de cuir.

« Lilli ! Tu es ambitieuse !

- Et si je réussis ?

- Mhmmm. Je pourrais t’avoir une rencontre avec Agrat…

- L’ange de la prostitution ?

- Il me doit des faveurs et il a l’oreille de Mahlat. »

Un souffle.

Mahlat, la Succube Reine des Enfers.

Jamais en des millénaires de bons et loyaux services, Ardat-Lilli n’avait eu le droit d’approcher la Reine des Succubes.

« Faire tomber un ange ma Lilli. Et comment penses-tu réussir cet exploit ? Je n’ai pas vu tomber d’ange depuis les Premiers-Nés.

- Je suis certaine de la tenter.

- Par tes beaux yeux ?

- Par le plaisir !

- Mhmm. Orgueilleuse petite Lilli.

- Je suis la meilleure de tes succubes…

- Prouve-le. »

Un ordre donné sur un sourire amusé.

Les jambes s’écartèrent d’elles mêmes et Ardat-Lilli ne perdit pas de temps. Elle souleva assez la robe pour accéder au plaisir caché dans ses profondeurs.

Une bouche, des doigts, des lèvres, des dents, une langue. Il n’en fallut pas plus pour faire gémir la vénérable Alouqua.

Oui, Ardat-Lilli était la meilleure des succubes qu’Alouqua avait à son service, elle ramenait des âmes déchues dans son sillage et un parfum de tentation.

C’était bien pour cela qu’Alouqua lui avait confié la gestion des âmes prêtes à tomber.

Un gémissement.

Alouqua saisit tout à coup avec brutalité la succube par ses longs cheveux roux et la força à se reculer. Pour la regarder en face.

« Tu as intérêt à réussir Lilli, sinon je t’offre au service de Nergal et ce salopard aura raison de ton orgueil. »

Un frisson de peur saisit Ardat-Lilli à ce nom.

Nergal, le Maître de la Grande Ville, dieu de la mort babylonien et chef de la police secrète de l’Enfer, maître-espion et spécialiste des basses besognes. Il n’aurait de cesse de faire d’Ardat-Lilli un être à son service, corvéable à merci et brisé par les chaînes de l’esclavage.

« Tu peux avoir confiance Maîtresse. »

Un regard profond, calculateur et mauvais.

Alouqua la relâcha et lui intima l’ordre de poursuivre sa tâche.

Intelligente petite succube, une bouche et des doigts à se damner.

Si cela n’était déjà fait…

Le cri de plaisir de la démone fut perceptible dans de nombreux bureaux de l’Enfer lorsqu’elle vint sous les soins empressées de sa servante.

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