Opération en cours
Ce que j’ai à dire à Zach a du mal à sortir de ma bouche.
— Qu’est-ce qu’il y a, t’as vu la dame blanche ou quoi ?
— J’aurais préféré. Non, c’est Étienne. On était tranquillement en train de faire une balade quand ils nous sont tombés dessus. Ils le retiennent prisonnier.
— Quoi, qui ça, ils ?
— Un balafré et un colosse, ça te dit quelque chose ?
— Oh, putain, c’est pas vrai ! dit-il soudain, hors de lui.
— Tu les connais ?
— Le balafré est le meurtrier de ma mère. Je lui ai planté une fourchette dans la main quand je me suis enfui de l’appart.
J’accuse le coup. Il est en totale panique. Je ne suis pas loin derrière.
— Oh, putain de merde, je suis vraiment désolé, Manu. Décidément, cette histoire ne s'arrêtera jamais.
— Calme toi, on va trouver une solution. Ils veulent te parler.
— Oui, c’est ça, me parler gentiment avec une arme à la main.
Je baisse les yeux, impuissant.
— Cette fois-ci, je crois que nous n’avons plus le choix. Il faut prévenir les flics, c’est trop dangereux. J’aurais dû faire ça depuis le début au lieu de me la jouer perso. Je suis vraiment trop con. Ca nous aurait éviter bien des emmerdes. Ils sont où exactement ?
— On a pris le chemin qui fait le tour du terrain de ta grand-mère. Étienne s’est arrêté pissé au niveau de l’entrée de la forêt. C’est là où ils lui sont tombés dessus.
— Ok, je vois très bien où c’est. Ces connards ont bien choisi leur endroit, c’est éloigné de la maison et…
Mon téléphone vibre.
— Un message de Jérémie ! Ils nous dit de rester là où on est, et de ne pas jouer aux supers-héros.
— Hein ? De toute façon, vu mon état, je n’irais pas bien loin.
— Jérémie m’assure qu’il gère la situation.
— Je veux bien croire qu’il n’a aucun mal à nous géolocaliser, mais pour le reste, comment a-t-il fait ?
— J’en sais rien, ça me dépasse totalement. Nous n’avons pas d’autre choix que de lui faire confiance.
— S’il arrive quoi que ce soit à Étienne, je m’en voudrais toute ma vie.
— On en est pas là, Zach.
— Je sais, mais c’est plus fort que moi, je peux pas rester sans rien faire. J’appelle mon père. Il s’empare aussitôt de mon portable.
— Allô papa, t’es où, t’es avec Pierrette ? … Quoi, ils sont déjà arrivés ?…Oui, avec Manu, on va bien, t’inquiète... Oui, Jérémie nous a prévenu… Papa, j’ai peur…Attends, je te le passe. C’est mon père, il veut te parler.
Zach est obligé de s'asseoir sur le canapé, tellement il tremble. Je lui prend le téléphone des mains.
— Allô ? Oui… On a reçu son texto… Oui, ça va aller, vraiment. Ton petit prince est sur le canapé, dis-je en regardant Zach qui commence à se ronger les ongles. Je ne le quitte pas des yeux… Oui, promis. Très bien. À tout à l’heure.
— Qu’est-ce qu'il t'a dit ?
Je m’assois à ses côtés, ma main posée sur son genoux.
— Tout va bien se passer, un gendarme est venu leur dire qu’une opération était en cours.
— Comment ça, quelle opération ?
— Le balafré n’a pas surveillé ses arrières, quand il vous a suivi jusqu’à Mezange. Visiblement, Jérémie a été diablement efficace. En ce moment même, il y a toute une équipe de gendarmes qui encerclent la propriété. Le balafré et son pote sont cernés, aucune chance qu’ils s’en sortent.
— Il a tué ma mère, je te le rappelle. C’est un fou ce mec. Manu, je vais péter un câble si je reste planté là.
— Moi aussi j’aimerais aider, mais on ne peut rien faire, là, maintenant. Il nous reste plus qu’à attendre ici sagement.
— Comment peux-tu être aussi calme, Manu ?
— Calme moi, tu plaisantes ? Je pense que c’est surtout grâce à toi, dis-je en le prenant dans mes bras.
Zach se laisse faire. Sa respiration est aussi rapide que la mienne. J’ai si peur !
Annotations