La première chose qu'il vit en ouvrant les yeux fut la noirceur d'un ciel encre, l'éclat jaune et terne du soleil rendant l'âme, les arbres ployant sous l'élément acharné, ainsi qu'un éclair rare et vif zébrant le ciel. Sa vue était floue, ses yeux mi-clos. Il ne parvenait pas à déterminer si c'était le sang qui battait furieusement à ses tempes ou un choc quelconque dont il n'avait aucun souvenir. Il avait tantôt froid, tantôt chaud. Faiblement il fronça les sourcils, toujours allongé sur la terre qui, buvant la tasse à cause du temps déchaîné, recrachait tout ce qu'elle n'arrivait plus à boire depuis plus d'une heure.

Il avait peut-être marché pendant une minute ou une heure lorsqu'un son épouvantable, un genre de corne de brume, lui fit prendre conscience du changement d'environnement autour de lui. La nature dans le plus pur de ses états, avait cédé la place à un décor inconnu qui piqua sa curiosité. Il avançait désormais sur un sol sombre et dur. Le bruit trop grave et trop assourdissant le paralysa. Il ferma les yeux et posa ses mains sur ses oreilles, mais le klaxon enfoncé du véhicule arrivant sur lui, résonnait dans son corps malgré tout. Il rouvrit les yeux au seul moment où une voix agressive remplaça le bruit insupportable. Son regard tomba sur un monstre imposant, dans lequel un homme le surplombait, la face rouge et les yeux étrécis.

• Espèce de malade, va te suicider ailleurs !

Il était furieux. Le camion reprit brusquement de la vitesse après avoir ralenti, mais lui resta planté au milieu de la bande rugueuse, immobile, sans comprendre ce qui venait de se passer. Sans comprendre ni ceci ni tout le reste d'ailleurs.

Toujours il devait avancer. Alors, il continua.