2.5 Cassandra Seize ans *
* On évoque le traumatisme et le mal -être suite au viol sur tout le chapitre. L'état mental peut gêner certains même si les mots utilisés ne sont pas gores*
État 34, An 3188
Maman m'a confié à une Epsilon qui a pris soin de moi, mentalement et physiquement. La femme me parlait sans cesse et m'invitait à me confier pour que je puisse tourner la page et continuer à vivre. Même si je suis en colère contre Maman, je dois reconnaître que ses appels réguliers m'ont aidé à aller mieux. Je ne veux plus mourir. Je veux tuer et faire souffrir. Je veux me venger.
Mon amie Sophie est devenue ma confidente. Elle est la seule des jeunes Alphas qui sait ce qui m'est arrivé. Célia l'ignore même si elle se doute que quelque chose de grave est survenu. Clara est une enfant qui ne doit pas savoir cette horreur. La jolie blonde, malgré sa jeunesse, a su trouver des mots apaisants et encourageants.
Je pense que je ne guérirais jamais de cette abomination. Je ne peux que tenter de me réapproprier mon corps et cesser de pleurer sans raison. Il m'est arrivé de vouloir m'ouvrir les veines ou de me taillader le visage, par douleur mentale. Maintenant, je vais un peu mieux malgré le sentiment de saleté que je traîne chaque jour. J'ai éliminé les miroirs de mon chemin. Je ne supporte plus ma face.
Sophie est d'une grande aide. Chaque jour, elle est là pour moi. Elle m'aide à avoir des projets d'avenir. C'est la seule à qui j'ai parlé des documents historiques que j'ai trouvés par hasard. Elle les a lus et m'a confirmé que j'avais bien compris le sujet et l'importance de ces archives. Il s'agit d'une méthode ancestrale améliorant la fécondité et assurant sans acte sexuel, une fécondation. D'après les dates indiquées que nous avons trouvées parfois, cette méthode aurait mille cent cinquante ans. elles proviennent d'un âge où la médecine était à son apogée, au moment même de la création des premières amazones, bien avant les pertes inestimables liées au grand chamboulement.
Sophie m'a présenté la Zêta qui s'est occupée d'elle Bébé. La femme est une ancienne médecin et chercheuse en biologie cellulaire médicale. Au moment de sa ménopause, elle fut rétrogradée en Zêta. Totalement dévouée à Sophie, la considérant comme sa fille, cet ex Delta rêve de retrouver ses privilèges d'avant. La jolie blonde a une énorme confiance en elle et a exigée de la garder à son service afin de lui assurer une fin de vie décente. Grâce à la femme, les documents ont été étudiés et j'ai quelques pistes de recherches pour mes futurs travaux en médecine.
Le mois dernier, j'ai été intronisée Alpha de l'État 34. J'ai de nombreuses choses à faire. La première est de créer mes centres d'endoctrinement de Zêtas. Suite à l'assassinat de Gwendoline, les Alphas en poste ont accepté la création de notre petit projet. Maman s'est occupée de le présenter au Conseil en enjolivant. D'autres centres sont déjà en cours de création dans chaque État.
Avec l'aide de Maman et un peu de la Suprême, j'ai analysé les données de mon État. Le grand nombre de bébés orphelins me permet de modifier le fonctionnement des orphelinats. Dorénavant, les Zêtas seront séparées des autres femmes. Ainsi, je garde un petit bâtiment pour former les reproducteurs, un grand pour éduquer les Deltas, Epsilons et Gammas. J'ai de quoi créer quatre orphelinats pour les Zêtas, deux pour les tâches ingrates, un pour les soldats endoctrinées et un officiellement pour d'autres soldats, cependant en réalité, il formera des jeunes filles stratèges et sportives qui espionneront pour moi les autres femmes.
Maman est très heureuse d'avoir enfin la possibilité d'avoir des servantes efficaces. À sa demande, je la nomme discrètement professeur dans ce centre particulier. Aux yeux des Alphas en poste, je prépare une bonne retraite à ma maman chérie. Comme elle a peaufiné le projet depuis des années, sa supervision me délestera d'une grosse partie du travail. Les données me remonteront directement de toute manière et je serais la seule à tout savoir en totalité. Je transmettrais à Maman que ce qui m'arrange. Célia me copiera dans deux ans et nous couperons l'herbe sous le pied à Maman afin que je prenne le trône en fin de poste d'Alpha.
Sans tout dire à Sophie, Marie et Katia, je leur ai parlé de mon projet d'utiliser les endoctrinées pour prendre le contrôle quand les soldats seront assez nombreuses. Déborah sera alors Suprême et il nous sera facile d'évincer cette chiffe molle. Toutes les trois, solidaires avec moi et mes sœurs, nous préparons un coup d'État d'ici une bonne vingtaine d'années.
Mon nouveau statut entraîne pour moi un très gros souci. En tant qu'Alpha, je dois me reproduire. Or, depuis le drame, je ne supporte plus que qui que ce soit me touche et encore moins un immonde mâle. J'en ai reçu trois pour mon intronisation. Ils me répugnent. J'ai eu envie de les frapper à peine je les ai vus.
Pour mon plus grand malheur, Maman veille à distance sur l'accomplissement de mon devoir de conception. Elle veut des petites filles. Je dois donc avoir des rapports les lundis, mercredis et vendredis. L'Epsilon qui prend soin de moi, amène dans ma chambre un de mes reproducteurs chaque soir défini. Je serre les dents pour ne pas pleurer. Ils croient mal faire. Ils m'écœurent. Je n'ai pas le choix. Ils accomplissent leurs devoirs en silence puis regagnent leurs couches dans le couloir, tranquilles pour une semaine.
Au moindre mot de leur part, au moindre geste non-nécessaire, je les frappe sans pitié. Je les électrocute et me défoule de ma colère. Une fois, un d'eux a osé me dire que l'éjaculation faisait mal. Je m'en fiche. Qu'ils souffrent donc, ces animaux répugnants. Vivement que je tombe enceinte pour enfin ne plus avoir à les supporter. Le peu de contact avec leurs peaux me donne envie de vomir.
Il n'y a pas que mes reproducteurs que je maltraite. Mes Zêtas, celles que je vois tous les jours, ont droit elles-aussi à leurs coups de fouets et de cannes. Elles ne valent guère mieux que les reproducteurs. Je ne fais preuve d'aucune compassion, tout comme celles qui m'ont maintenue au bureau pour que je me fasse violer. Celles à mon service actuel payent pour les précédentes.
Un jour, quand je serais Suprême, je leur ferais porter des entraves elles-aussi. Il faut que les autres femmes, celles qui méritent ce nom, puissent enfin traiter les Zêtas à leur juste valeur, celle de bêtes de somme, bonnes à travailler sans possibilité de se plaindre, n'ayant pour valeurs financières que le travail qu'elles effectueront.
Oui, les Zêtas seront nos nouveaux animaux domestiques. C'est tout ce qu'elles méritent. Je les endoctrinerais toutes à me servir. Je m'assurerais d'une armée obéissante et fidèle, prête à mourir pour me protéger et me servir. Elles me débectent par l'idiotie qui s'en dégage. Quand je pense que j'ai pu penser un jour qu'elles avaient un cerveau et un cœur. J'étais si jeune et naïve. Je ne ferais plus l'erreur d'avoir de la compassion pour elles ou pour les reproducteurs.
Si Edouard ne s'était pas suicidé, je l'aurais torturé par vengeance. Maman a été trop douce en les tuant tous. Elle aurait dû leur arracher chaque centimètre de leur peau à la pince à épiler ou les brûler à l'acide ou au tisonnier. J'aurais voulu qu'ils souffrent comme je me sens morte en moi. J'aurais voulu voir le désespoir dans leurs yeux, les faire mourir à petit feu, comme je me meurs.
Deux choses me donnent encore de la force. La première, c'est mon amitié avec Sophie dont les propos très matures pour son âge me font entrevoir un futur si merveilleux. Elle croit de tout son cœur à un avenir glorieux. Je lui ai proposé le poste de Vice-Suprême quand je serais au pouvoir, quitte à détrôner mes sœurs avec qui j'ai moins d'affinités. Même Célia n'arrive pas à la cheville de la jolie et maligne blondinette.
Sophie me fait parfois des allusions à double sens. Je crois qu'elle sait que je suis lesbienne. Elle s'en fiche et je me demande si elle ne l'est pas aussi. Ou alors, elle me le fait croire pour me plaire, ayant réalisé qu'elle me met en émoi malgré son jeune âge. Ma douce amie est assez ambitieuse pour me faire miroiter des possibilités dans le seul but d'assurer son ascension sociale. Peu importe, elle aura ce qu'elle veut pour peu qu'elle m'accorde de temps en temps un baiser.
Son ancienne nounou est redoutablement efficace. Je lui ai confié un laboratoire incognito et elle a repris ses anciennes fonctions pour étudier plus attentivement ma découverte. Pour mon compte, elle a recruté discrètement des chercheuses en chimie et en biologie moléculaire ainsi qu'en clonage de plantes.
Les avancées qu'elles font en si peu de temps sont incroyables. À l'aide des formules chimiques trouvées, elles ont réussi à reproduire des hormones et substances chimiques très complexes. Du peu que je saisis, il s'agirait de molécules favorisant la fertilité féminine ou modifiant son cycle menstruel. La femme médecin me dit que j'ai trouvé un trésor inestimable.
Les substances à peine créées, je décide de les tester immédiatement sur de jeunes Zêtas, sans passer par le stade petit mammifère. je veux gagner du temps. Les chercheuses injectent les produits puis étudient les cobayes, quitte à les disséquer ou à les vider de leur sang. Les Zêtas n'ont aucune valeur pour moi. Les utiliser directement fera gagner un temps précieux. L'avancée de la science fait oublier toute notion d'humanité à mes chercheuses.
Un jour, si cela fonctionne, je pourrai tomber plus facilement enceinte, voire procréer sans contact avec un immonde mâle. Je pourrais satisfaire Maman et m'assurer une descendance en m'affranchissant de cet acte abominable de fécondation par contact charnel écœurant.
Mes scientifiques étudient aussi un des aspects masculins du problème. Trois vieux reproducteurs, peu fertiles et ayant tenté de se suicider ont rejoint le laboratoire. Officiellement, ils ont réussi leurs suicides. Au sein de notre officine secrète, les trois hommes sont drogués, et sous l'emprise d'alcool, forcés à coucher avec des mannequins de silicone pour récupérer leurs semences.
Malheureusement, ils éjaculent peu, refusant d'obéir et parvenant à se contrôler malgré les drogues. Je réglerais ce problème plus tard. Je trouverais le moyen d'obtenir du sperme sans leurs consentements. Je les trayerais comme on le fait d'une vache.
Pour l'instant, mes scientifiques tentent la congélation et décongélation des semences de faible qualité, pour perfectionner la méthode. Quand elles trouveront une recette valable, je leur enverrais des reproducteurs en meilleure forme, qui pour l'instant fécondent des jeunes femmes.
Alors, débuteront les premiers essais de fécondation en laboratoire et d'implantation en utérus avec de la semence fraîche, les ovules et utérus de jeunes Zêtas. Si cela fonctionne, je construirai des usines à bébés dans le plus grand secret et je relancerais la natalité dans mon État. Quitte à sacrifier l'amélioration du génome temporairement, je ferais pondre sans arrêt les Zêtas pour accroitre ma population.
Je sais que j'ai en main la solution qui sauvera l'espèce humaine de façon pérenne. Si mon État produit un grand nombre de bébés, je pourrai avoir une puissance suffisante pour dominer les autres États. Je me mets à rêver d'obtenir le rôle de Suprême sans avoir besoin de passer par les armes. Pour cela, je dois faire très attention. Personne au sein des Alphas, mis à part Sophie en qui j'ai totalement confiance, ne doit avoir vent de ma méthode.
Celle à qui il va m'être le plus difficile de cacher une telle énormité est Maman. Non seulement, elle est douée pour tirer les vers du nez des personnes qu'elle rencontre, mais en plus, Maman a un odorat perfectionné pour sentir les mensonges et omissions.
La seule chose qui m'aide, c'est que je fais passer pour morte toutes les personnes entrant au sein du laboratoire, que ce soit pour y travailler et chercher, ou pour servir de cobaye. Les suicides et mortalités précoces étant courants dans le monde, les quelques dizaines d'humains qui disparaissent passent inaperçus.
En un an de règne, je n'ai pas chômé. Si je n'ai pas réussi à être fécondé, mon corps refusant sûrement la semence de ces dégoûtants êtres mâles, j'ai toutefois énormément avancé sur l'ensemble de mes projets. Deux orphelinats de Zêtas sur quatre formeront des femmes dévouées à ma cause dont les premières devraient sortir d'ici cinq à six ans. Je possède plusieurs substances prometteuses pour booster la fertilité féminine et un processus de stockage de sperme est en cours de création. D'ici cinq ans d'après ma chercheuse en chef, j'aurais une méthode expérimentale, relativement encourageante.
Pour la récompenser de ses efforts, je lui accorde un petit privilège. Sa fille biologique est une Delta en cours de formation dans mon État qui présente des aptitudes pour le métier de médecin et de chercheuse. Alors, j'autorise ma chercheuse à finir de former sa fille puis à la prendre dans notre équipe de recherches. Il faut savoir récompenser les personnes méritantes.
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