Chapitre 2 - La rescapée

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— Comment va-t-elle ?

Elrynd avait déposé la jeune femme à l'infirmerie de l'académie des Paladins avant de partir faire son rapport. A peine l'avait-il terminé qu'il était revenu pour prendre des nouvelles. Dans la grande salle , une dizaine de lits étaient alignés les uns à côtés des autres. Et dans l'un d'eux, la jeune femme qu'il avait trouvé.

La prêtresse, une vieille femme aux cheveux aussi blancs que la neige et aux grands yeux noirs, secoua doucement la tête, puis son regard se posa sur Jaelith qui dormait.

— Elle a subi un choc. Je ne sais pas ce qui lui est arrivé très exactement. A peine êtes-vous parti capitaine qu'elle s'est endormie. J'ai pu m'occuper de sa blessure. Rassurez-vous, de ce côté-ci, vous avez fait du bon travail. Elle s'en sortira physiquement...

Il y eu un long silence, puis Elrynd demanda :

— Vous pensez qu'elle se réveillera bientôt ?

— Habituellement, quand il s'agit de vos hommes, vous n'êtes pas aussi curieux de leur santé.

Elrynd manqua de s'étrangler.

— Mes hommes se remettent rapidement grâce à vos soins, dame Alma. Mais dans le cas présent, il s'agit d'une jeune inconnue.

— C'est ce que vous dites, mais vos yeux ne peuvent pas tromper une veille femme comme moi.

Un sourire malicieux illuminait le visage de la prêtresse. Elrynd, confus, baissa les yeux vers le sol. Alma posa sa main sur le front de la jeune femme. Il était brûlant. Doucement, elle dégagea les mèches de cheveux qui la gênaient, découvrant alors les oreilles pointues qu'elle pensait ne plus voir.

— Une elfe... Pas étonnant que vous ne compreniez rien de ce qu'elle disait capitaine.

— Je croyais que les elfes reclus à Saleah après la destruction de Castelfay... Il en reste encore par ici alors...

— Ils doivent être une poignée, pas plus. Je me rappelle très bien que l'impératrice Sidan Lokliar a juré de ne plus avoir un quelconque contact avec les humains après le massacre qui a eu lieu à Castelfay...

La main de la prêtresse s'illumina, et la douce chaleur qui en émanait illumina le visage de la jeune femme endormie. Alma retira alors doucement sa main, puis se tourna vers le paladin.

— Cessez de vous tourmenter pour elle et retournez vaquer à vos tâches habituelles. S'il se passe quoi que ce soit, je vous préviendrai.

***

Jaelith s'était réveillé, les yeux mouillés. Ses rêves étaient de plus en plus étranges. Ils semblaient si réels... Elle tenta de se relever, mais était encore trop faible et retomba lourdement sur le lit.

— Où suis-je ?

Elle essaya à nouveau de se redresser et parvînt avec difficulté à s'asseoir, à bout de souffle. Pourquoi respirer était une chose si difficile à faire pour elle ? L'air était frais. Elle ressentit une atroce douleur derrière le crâne. Elle regarda tout autour d'elle, mais il n'y avait personne. Calmement, elle retrouva peu à peu son souffle et la douleur s'atténua. Lentement, elle se leva, puis sortit de l'infirmerie.

La lumière des lieux la réchauffait d'une douce chaleur. De faibles chants semblaient provenir de la grande chapelle qui se trouvait en face de l'infirmerie. Jaelith traversa alors le carré de neige qui la séparait de cet endroit, foulant de ses pieds nus le sol glacé. Un vent frais la fit frissonner. Jaelith entendit alors plus distinctement les voix provenant de la chapelle. La lourde porte de fer forgée était entrouverte et elle osa jeter un coup d'œil.

La chapelle était immense. Plusieurs vitraux colorés laissaient entrer la lumière dans ce sombre endroit. Des dizaines d'hommes en armures, des paladins sans aucuns doutes, étaient debout, en rang, face à un autel. Derrière les paladins, il y avait des personnes que la jeune femme pu identifier comme étant des prêtresses au vu de leurs longues robes blanches immaculées. Elle comprit alors qu'elle se trouvait dans un temple de la lumière. Le chant qu'elle avait entendu s'arrêta, et sur l'autel, un vieil homme habillé d'une armure légère prit la parole.

— Sainte lumière, nous te remercions pour toutes les vocations qui ont fécondés ton ordre. Les Paladins sont prêts à t'accueillir pour protéger les faibles. Les prêtresses usent de ta chaleur pour soigner leurs frères et sœurs blessés. Sainte lumière, continue ton œuvre, nous t'en prions.

Les paroles prononcées touchèrent le cœur de la jeune femme qui écoutait avec attention. Jaelith ouvrit alors la porte et pénétra dans l'édifice, se plaçant derrière toutes les personnes présentes. Le vieux paladin continua son sermon.

— Ouvre le cœur et l'esprit des jeunes gens et des jeunes filles. La Sainte Lumière leur montrera le chemin et offrira à chaque être humain l'espérance...

A cet instant, tous se mirent en prière. Jaelith, décontenancée, resta debout. Elle se posta près d'une colonne et attendit. Au bout de quelques minutes, la plupart des personnes présentes s'étaient relevées et sortaient de la chapelle en silence et en rangs. Elle attendit un long moment, puis osa regarder à nouveau. Il ne restait plus que quelques personnes qui discutaient avec le vieil homme.

Une vieille femme aux cheveux blancs entra alors en trombe dans la chapelle, ne faisant pas attention à la jeune femme qui se cachait là. Elle salua le vieux paladin et parla avec l'un des hommes qui était là.

— Capitaine, la jeune femme que vous m'avez amené hier... Elle n'est plus là !

L'homme à qui elle s'adressait parut surpris.

— Elle a disparu ? Dans l'état où elle est, elle ne doit pas être bien loin... Je vais aller la chercher. Dame Alma, retournez à l'infirmerie au cas où elle reviendrait là-bas.

La prêtresse acquiesça. Elrynd, car c'était à lui qu'elle s'adressait ainsi, prit alors le chemin de la sortie lorsqu'il la vit. Il s'arrêta, interdit, devant ses grands yeux bleus qui le dévisageait. Puis il s'avança vers elle, tandis qu'elle se confondait en excuses.

— Vous semblez aller mieux en tout cas mademoiselle, c'est rassurant. Dame Alma et moi-même étions inquiets de votre état. Il faut dire que la journée d'hier n'a pas dû être très... réjouissante pour vous...

Jaelith baissa la tête, le visage empreint d'une immense tristesse. Elle repensa à son père. Elrynd, voyant qu'il en avait trop dit, tenta de détourner la conversation.

— Quel est votre nom ?

— Jaelith Librevent...

Non loin derrière, le vieux paladin sursauta à ces paroles. Il s'approcha des deux jeunes gens, et la jeune femme put s'apercevoir qu'il était aveugle.

— Vous avez dit Librevent ? Vous êtes de la famille de Palia ?

Jaelith semblait surprise d'entendre le prénom de sa mère dans la bouche de cet inconnu.

— Palia Librevent était ma mère, oui.

— Si vous saviez comme je suis honoré de faire votre connaissance, Jaelith, fille de Palia. Elle était mon élève vous savez... L'une de mes meilleures élèves. Il a fallu que ce maudit dragon... Enfin...

La voix du vieil homme tremblait. De colère ou de tristesse ? Jaelith n'avait pas vraiment fait attention. Il continua.

— Vous avez un endroit où aller ?

— Non seigneur paladin...

— Mon nom est Gareth Libram. Nous avons beaucoup de choses à nous raconter mon enfant.

Il se tourna vers Elrynd.

— Capitaine Kervalen, je compte sur vous pour trouver une chambre à cette jeune femme, faites-lui visiter l'académie aussi... Si elle suit la voie de la lumière comme sa mère avant elle, nul doute que cet endroit deviendra son nouveau foyer.

Le capitaine acquiesça. Jaelith remercia Gareth, puis suivit Elrynd à l'extérieur de la chapelle.

***

Jaelith et Elrynd marchaient dans les couloirs de l'académie. Il lui montrait sommairement les endroits important, comme la bibliothèque, la salle des prières, la terrasse d'entrainement, le réfectoire... Jaelith observait l'endroit sans poser de questions, ce qui n'était pas le cas de celui qui l'accompagnait.

— Et vous Jaelith... Comment se fait-il que vous soyez elfe par votre père ? J'ai cru comprendre qu'ils étaient tous partis vers le sud, s'enfermant derrière les grands murs de la cité d'argent.

— Mon père ne les a pas suivi... Il a préféré rester ici... Aux côtés de ma mère.

— C'était courageux de sa part en tout cas. Je ne sais pas si moi-même je laisserai tout derrière moi pour suivre l'élue de mon cœur...

Ils arrivèrent tout deux près des chambres. Elrynd salua quelques paladins qui se trouvaient ici, puis pénétra dans l'une des pièces. Petite, elle n'en restait pas moins accueillante. Un lit se trouvait dans un coin. Près du lit, une petite table. Une porte donnait sur une minuscule salle d'eau. Deux étagères vides se trouvaient accrochées sur le vieux mur de pierres blanches.

— Voici votre chambre Jaelith. Sur ce, je vous laisse vous installer et vous reposer pour le moment. Le seigneur Libram viendra surement vous voir dans l'après-midi.

La jeune femme entra dans la petite pièce et se sentit presque immédiatement comme si elle était chez elle. Elle se tourna vers la porte et remercia Elrynd qui l'arrêta presque immédiatement.

— Ne me remerciez pas, laissez-moi plutôt vous souhaiter la bienvenue, dame Librevent.

Lentement, il se retourna et referma la porte. Jaelith put entendre le bruit de ses pas s'éloigner doucement.

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