Sous l'écume, l'écueil.

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Mue par le souffle des alizés et la proximité de la plage aux raisiniers, Vague s'en est allée grimper aux arbres. Ces arbres qui appellent au vagabondage les âmes avides d'anonymat: la garantie du nomadisme, absolution, respiration, divine réconciliation entre nature et corps. Elle les appelle ses "arbres-sauvegarde".

Perchée face à l'océan elle oublie tout de ce qui la perturbe et se catapulte dans bleu mouvant.

Son sourire est large à l'image de sa foi, elle trouve à la vie un goût de framboises écrasées, de miel ambré, d'eau d'orage avalée bouche grande ouverte, de figues, de noisettes, de l'iode des fruits de mer....

Vague casse systématiquement ses lunettes de soleil, porte capuche plutôt que parapluie par peur de le perdre - on perd plus aisément son parapluie que sa capuche, non? -, oublie un nom de pays dès qu'elle l'a entendu, veut constamment être ailleurs et quand elle est ailleurs, rêve d'un autre ailleurs.

Elle ne répond pas quand sonne le téléphone, ne cherche pas de compagnie, oublie parfois de mettre une culotte, adore l'eau de rivière, revigorante à souhait...

Elle a une soif perpetuelle des quatre horizons qu'on ne croise qu'en pleine mer et que dans la caraïbe on appelle "à Miquelon".

De manière globale, elle entend plus sa voix intérieure que les voix courantes.

Elle est solitaire mais pas sauvage... ou plutôt on la croit solitaire. La vérité c'est qu'elle vit dans sa tête, et dans sa tête voyez vous, elle n'est pas seule du tout!

Son meilleur ami reste son instinct.

On dit d'elle qu'elle est empathique et bienveillante. Elle se trouve plutôt très douée dans l'art douteux de la procrastination et celui, plus inspirant, de la contemplation...

Elle aurait voulu être "écrivain-pêcheur" mais a râté elle ne sait quel coche....

Alors elle rêve, elle bulle, elle nage au large et fait crapahuter ses pieds nus sur toutes les surfaces: le sable, l'herbe, le bitume, le gravier, l'argile, la boue, la terre....

Je ne dirais pas d'elle qu'elle est folle ni même déséquilibrée mais je la pense borderline, toujours au bord de la fêlure, sauvée de justesse par son intégrité sans faille.

Au moment où ce livre commence, elle porte une robette verte et un Bakoua qui la protège d'un soleil caribéen toujours fort. Elle est au jardin, à l'arriere de sa kaz: elle arrose ses plantes, presse légèrement les feuilles du citronnier ou du basilic pour en prendre l'odeur sur ses doigts, soupèse doucement les fruits dodus de l'exubérant maracudja, admire les fiers régimes de bananes, l'imposant Aloé et les précieux pieds d'Amnésia...

Alors qu'elle s'apprête à ramasser les crottes de ses deux chiennes -dont elle se sert pour fabriquer un excellent engrais naturel- un énorme grain la précipite à l'intérieur pour éviter d'être trempée.

Elle regrette aussitôt et ressort , bras levés vers le ciel, pour en savourer l'offrande rafraîchissante. Les colibris et autres sucriers l'imitent et s' les ailes avec bonheur. Les oiseaux sont de fabuleux acrobates...

Elle rigole, se sent heureuse et chanceuse de vivre sur ce coin de terre où la pluie en transit jamais ne transit.

Elle ignore encore tout des coups qui vont la terrasser bientôt même si au fond, elle en a toujours eu l'angoissante prescience.

Elle porte en elle l'écume de son prénom, sous-entendu de vents violents...

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