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Allongé dans l’herbe tendre de cette fin d’été, je regarde voleter un papillon. Une nouvelle espèce qui vient de naitre sous mes yeux. La vie, la nature est quand même bien faite. En scannant ce nouveau lépidoptère, j’ai découvert un être capable de résister à tous les pesticides et autres insecticides que les humains épandent sans mesure sur cette planète. Et comme partout, alors qu’ils détruisent peu à peu ses merveilles, elle reprend petit à petit ses droits, créant des vies nouvelles pour résister à ses parasites qui ne cessent de se multiplier. Nul doute qu’elle ne gagnera, mais de là où nous sommes, nos observations nous montrent chaque jour à quel point son combat est rude.
Depuis plusieurs millénaires, nous n’intervenions quasiment plus dans la vie et l’évolution des humains, ni même de leur planète d’ailleurs. Nous nous contentons aujourd’hui de les observer de loin, étonnés par la facilité qu’ils ont à s’autodétruire au travers de la maltraitance de leur environnement et de leur désir de contrôle et de puissance.
Ce sont pourtant des êtres attendrissants. Contrairement à nous, ils éprouvent des sentiments. Et même si ceux-ci sont souvent contradictoires, s’ils arrivent aussi bien à s’aimer d’un amour sans mesure qu’à se haïr et s’entretuer sans aucun remord, ils restent pour nous de véritables énigmes.
Ils nous fascinent, nous les immortels, ou presque. Nous qui vivons et traversons nos vies depuis des milliards d’années. Nous que l’évolution génétique a rendu insensibles.
Nous avons essayé, au début de cette humanité naissante, d’intervenir, pour les guider vers nous, vers une vie et un avenir radieux. Eux qui nous offraient de vivre leurs sentiments par procuration, nous avons essayé, sans nous faire connaitre, de leur montrer le chemin.
Peine perdue, ces être sont indomptables, ils n’en font qu’à leur tête. Ils sont seuls maitres de leur destin, et ils gâchent joyeusement cette chance. Peut-être leur vie, si courte en comparaison de la nôtre, ne leur permet-elle pas de pouvoir appréhender le monde dans son entièreté et le plaisir qu’ils pourraient avoir à vivre en harmonie avec leur planète.
Si nous n’intervenons plus dans le déroulé de leur évolution collective, il nous arrive, par jeu, ou par intérêt, de nous mêler de leur destinée individuelle. Certains d’entre nous, comme mon frère Bel, le font pour tromper leur ennui, d’autres, comme Cup, parce qu’ils décèlent une étincelle particulière chez l’un de ces humains et souhaitent la voir grandir pour pouvoir l’observer plus intensément.
Pour ma part, je ne suis plus intervenu depuis longtemps, préférant les regarder eux et leur environnement, évoluer vers la destruction programmée des premiers et le renforcement du second, indifférent à un sort qu’ils ont eux-mêmes programmé.
Mais si, comme tous les miens, je ne ressens plus de sentiments depuis des milliards d’années, ce jour-là, tout a été chamboulé par l’une de leurs femmes.
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