XXXII- De l'invocation de l'Enfer 1/3
Le changement d'univers était violent. Comme je viens de le dire, nous nous retrouvions dans un bâtiment proche de la ruine et très sombre puisque les fenêtres ne semblaient pas donner sur l'extérieur mais sur des couloirs encore plus sombres encore. Deux choses m'ont parue très étrange sur le coup, la première était la sensation d'être tombé de quelques centimètres lorsque je suis apparu dans la pièce, la seconde était la lumière bleue éclairant timidement la pièce. L'origine de cette lueur était invisible, pas de torche, pas d'éclairage extérieur, rien, mais le fait était indéniable que l'on se voyait à distance et l'on distinguait bien la pièce.
Bien sûr, une troisième chose était troublante, qu'est-ce que c'était cette téléportation ? Est-ce que c'est vraiment le type en capuche qui l'a fait ? Si oui, comment est-ce possible ? Une lourde exclamation provenant de mon père fut une bonne réponse à mon questionnement :
"Merde ! Il fit d'abord en fronçant les sourcils. Puis il se mit à regarder tous côtés avec son regard averti. Sortez vos armes, nul ne sait ce qui peut nous tomber dessus... ici...
- Ici ? Demanda le Chevalier Arl qui n'a pas réussi l'atterrissage que je présentai avant et s'était retrouvé à terre.
- Œ." Répondirent en chœur mon père et le Chevalier Rollon.
Un cri féminin de panique coupa les deux hommes s'ils avaient voulu continuer. Il provenait de devant nous, au-delà d'une porte au fond de la salle. Des bruits d'une course rapide s'entendirent ensuite jusqu'à ce qu'une silhouette apparaisse à nos yeux, passe la porte et continue de courrir. La dame d'une quarantaine d'années regardait principalement derrière elle, elle ne nous vit pas tout de suite.
Par contre, je l’ai reconnu. Ce fut assez difficile parce qu'elle avait échangé les vêtements de paysan que je lui connaissais par une robe aux reflets bleues (dus à la lumière j'imagine) sale et déchirée à plusieurs endroits.
"Maman ?!"
Elle tourna le visage en ma direction, son expression paniquée que je n'avais jamais vue se transforma à la fois une joie de me voir et en une peur nouvelle. Mais sa première action fut de venir en ma direction et de me prendre dans ses bras. En revanche, pour aller avec ces expressions que je lui trouvais, elle me chuchota mille fois qu'elle était désolée. Je ne savais pas de quoi, mais je ne pouvais pas lui demander puisque mon visage était enfoui dans son corps.
Une ombre nouvelle mis fin à cette scène que je su apprécier à sa juste moitié. Un corps humain arrivait rapidement après ma mère. Il ne fit pas de bruit dans le couloir parce qu'il flottait à quelques centimètres du sol. L'homme était habillé a peu près de la même robe bleue que celle de ma mère mais sans avoir connu le même devenir.
"Le Ciel sera plus fort ! Cria ma mère en direction du nouveau venu et en me mettant devant elle, comme pour me présenter.
- Aaah, nos visiteurs !! Bienvenue ! Bienvenue ! Fit cet étrange personnage avant d'enchaîner un petit peu plus bas : Pour votre mort..."
Mais le suspens qu'il a mis à la fin de ses paroles tandis qu'il commençait à tendre ses bras vers nous fut écourté par une hache de jet planté dans son corps. Celle-ci venait d'être ajusté par le Chevalier Nonn.
"Aaah ! Il me restait une hache autour de la ceinture depuis la bataille, je suis content de lui avoir trouvé enfin une utilité ! L'ironie doit être de famille mais si sur l'instant elle provoqua la colère de mon père, je lui trouve après coup un rôle très sain.
- Mais ! Mais qu'est-ce que tu as fait ?! Fit mon père qui laissa le Chevalier dans le silence après avoir éteint son sourire.
- Je pense que... commença le Chevalier Rollon en marchant vers le corps, qu'il vient de nous sauver la vie. Ce fanatique n'aurait pas entamé la discussion."
La colère de mon père disparut de son corps après un soubresaut s'empêchant de répondre trop vite. Mais le souci pour le présent persista sur son front.
Ma mère prit à son tour la parole :
"Le rituel a commencé, Eirik, Rollon. Je n'ai rien pu faire seule, je pensais revenir et m'infiltrer mais je me suis fait prendre. Elle sourit tristement d'abords avec de continuer : Mais vous êtes là, à présent ! Il reste peut-être une chance ? Son visage finit par décrire un semblant d'espoir. Mais c'est moi qui sombrai dans la noirceur.
- Comment cela, "il reste peut-être une chance" ? Qu'est-ce que tu veux dire ? Et moi, la prophétie, la Porte de l'Enfer ? Des questions posées aussi bien à mon père qu'à ma mère qui me sourit une compassion que je sentais fausse.
- Je suis désolée... elle commença.
- Cela, je l'ai assez entendu ! Je l'interrompis violement. La suite ! Désolé de quoi ?
- De bien des mensonges... La voix de ma mère se fit de plus en plus basse.
- Assez de suspens ! Je repris. On doit se dépêcher, non ?! Alors on accouche rapidement de la vérité et on va en avant. Ma colère avait parlé à plus forte raison que ma retenue. Je suis persuadé cependant que la situation l'exigeait. Ma mère prit une posture de lamentations en me prenant le bras des deux mains pour que l'une se place dans ma main et l'autre sert chaleureusement ma peau.
- Tu es nés ici, à Œ. Tu fais partie de ma famille mais je ne suis pas ta mère. Tu n'es pas le seul à avoir le pouvoir que tu as, c'est un héritage de famille. Mais avec le cœur meurtri d'un passé révolu, nos frères et sœurs se sont tournés vers un obscur projet.
- Faire apparaitre des Portes de l'Enfer ? Je demandais.
- Le faire venir en notre monde plutôt ! Après l'avoir ressuscité ! S'exclama mon père.
- Hm... On parle d'un monde entier ou d'une personne là ? Je demandais avec hésitation. En même temps je remarquais que les spectateurs de la scène, les Chevaliers, Finn et Harlan, étaient plongés dans un silence et nous regardait fixement.
- Seul l'Elu, le premier, sait vraiment s'il y a une différence. Il l'a vu. Commença mon père.
- Il a écrit un carnet qui n'est connu que de nous, dans lequel il rapporte des choses compliquées à comprendre. Mais ils ont enfin réussi ! Alors le rituel a pu commencer."
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