Travaux de vacances.

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Les choses se sont calmées, nous reprenons de nouveau un rythme illusoire de faux couple, toujours en fonction de ses disponibilités.

Quelques restaurants, cinémas, visites chez des amis, et beaucoup moins de sorties voyantes dans les boites, nous en avons moins besoin, nous nous suffisons.

Je me sens bien, et je crois qu'elle aussi, de pouvoir mettre ses obligations entre parenthèses.

Un certain jour du début de l'été, il lui prend l'envie de repeindre et de remettre en forme la salle de bain et les toilettes, je crois que mon côté ours célibataire a repris le dessus.

Un relent d'indépendance refait surface, non pas que les pièces n'en aient besoin, mais elle est en train d'agir comme si elle vit à demeure.

Cela ne me dérange pas vraiment outre mesure, elle a tellement raison, mais par mauvaise foi j'ai résisté pendant des jours sans raisons vraiment valables, je crois qu'elle le sait.

Finalement, j'ai capitulé, elle a le don extraordinaire pour changer un lieu, tout ce qu'il y a de plus basique en une pièce agréable.

Ce fut un réel plaisir de la voir peindre, orner, habiller, travailler ces endroits communs, elle en conceptrice et moi en ouvrier, maladroit quelquefois, mais volontaire.

Passer quelques minutes en ces lieux d'aisance obligatoire, devient une oasis de repos que je ne manque pas de montrer aux visiteurs occasionnels de mes amis.

Le seul petit détail qui me gêne, est qu'elle peut presque tout faire ici.

Ranger, laver, orner, ordonner, changer, fournir, alors que je ne peux rien lui offrir qui puisse venir de moi.

Que ce soit des vêtements, des bijoux, réparer quelque chose pour elle, l'aider et participer, je ne fais que recevoir sans ne jamais pouvoir donner, hormis de la douceur et du sentiment.

Je vis à sens unique sur le matériel.

Je suis frustré, et je le manifeste dans mon refus à son envie de continuer la réhabilitation des autres pièces, c'est difficile à expliquer, mais c'est ainsi que je le comprends, sans pouvoir le lui dire.

Comme quoi l'amour-propre a de drôles de raisons.

Je commence néanmoins, à voir certains petits changements dans ses attitudes.

Elle devient plus posé, plus calme, plus couleur locale de cette région Toulousaine ou tout se gère sans affolement.

Une personne qui la connaît bien, m'avait justement dit, qu'elle la trouve beaucoup plus sereine, moins agitée.

De mon côté, je m'intéresse un peu plus à ses passions, ses massages et ses cartes, que je ne connais pas bien, et surtout, je tente, ce qui est un fait rare, de ralentir la cigarette et l'alcool pour être au diapason de ses consommations.

Bon, il y aura du boulot, je me connais, mais jamais ces idées ne m'avaient effleuré l'esprit auparavant.

Quand elle me dit :

__ N'allume pas de cigarette, viens à côté de moi.

Je peux surseoir sans problèmes, bien que ça me démange d'aller en griller une.

On ne gomme pas ainsi plus de trente ans de dépendance, mais j’ai choisi mon camp.

Les temps chauds pointent leurs rayons de soleil, ses tenues s'en ressentent, mon esprit s'échauffe aussi à la voir ainsi vêtue.

Quelle drôle d'impression, je la connais nue, un régal pour les yeux, mais la voir habillée d'aussi légers atours, renouvelle mon goût à tenter de séduire une aussi belle personne.

Il est prévu quelques sorties en bord de mer, puisqu'elle a l'usage d'une petite maison de vacances dans un domaine clos d'habitations en villégiatures.

Je dois attendre le passage programmé de membres de sa famille et de certaines personnes qu'elle a l'habitude d'inviter.

Situé a quelques centaines de mètres des plages méditerranéennes, je suis certain que beaucoup demandent de ses invitations mais elle trie heureusement pour ma venue.

Elle me précède de quelques jours.

Je m'engage sur l'autoroute du soleil pour rejoindre ma belle, mon arrivée était prévue pour vingt heures, le meilleur moment pour profiter des derniers rayons du soleil et de la vue d'un couchant sur la mer.

Manque de chance, certains amis me nomment GPS man, et malgré l'appareillage, je suis arrivé vers vingt-deux heures, je me suis complètement perdu à ne penser qu'à elle.

Ma coûteuse formation militaire capable de se repérer en tous lieu n'avait plus fait effet.

C'est un très joli pavillon avec cour, entouré de verdure, et d'autres constructions, dans le genre club Med, ce que je suppose, je ne connais pas.

Trois ou quatre pièces avec cuisine aménagée et salon, complètent le tableau pour des vacances de rêves.

Je n'ai pas pris de congés de plus de deux jours depuis plus de vingt ans, j'étais aux anges et surtout avec celle qui faisait office de délicieuse hôtesse.

Bien entendu, elle était habituée des lieux, il faut comme d'habitude faire illusion.

Je suis un ami invité, donc pas questions de débordements extérieurs, j'ai une certaine routine, et je tiens à respecter sa vie, donc ses proches de ragots insipides.

Elle se lève, comme tous les matins à ses heures, habillée d'un unique sous vêtement et d'un ample tee shirt, pour tenter de dompter la nature et les plantes extérieures.

Tout autour de la maison, des arbres et des tiges, bardés d'épines, demandent son attention, et c'est ainsi qu'armée d'outils de jardinage, elle sarcle, coupe, entretien et élague en tenue légère, au bénéfice des rares passants du matin.

Une amazone au combat, c'est ainsi que je la vois à mon réveil, parce que pour préserver mon sommeil matinal, elle se lève sans bruits. Mais un fil invisible me retient à elle, je le sais, je la sens, et le temps de déjeuner, je prends plaisir à la regarder.

Elle ne me demande jamais de l'aider, quelques choses de droite et de gauche elle me dit de bricoler tout simplement, quel qu'entretiens de sécurité sur sa voiture qu'elle n'a pas remarqué, j'avais un beau rôle.

Les après midi de bord de plage, me font toucher l'eau plus facilement que je ne le crois.

J'ai vécu mon enfance en Afrique, et je n'ai travaillé que dans des pays ou la température de l'eau atteint la température ambiante d'ici.

Je n'avais jamais plus trempé, ne serait ce qu'un orteil dans les flots européens, trop glacés a mon goût.

Elle part se baigner de temps en temps, je ne veux pas que cette mer profite de son corps et de sa joie de jouer avec les flots.

Je réussis à m'avancer, bien que timidement à ses côtés, suis-je devenu jaloux d'un élément aqueux ?

Les nuits se passent bien, et les journées aussi, des connaissances à elle viennent pour l'apéro, ou les siestes sur la plage, nous sommes en vacances entre amis.

Je joue mon rôle à la perfection, mais je vois bien dans le regard de certains, que nos frôlements, ne passent inaperçus, que ce soit de mon fait ou du sien.

J’ai dû lire quelque part qu'‘ un grand amour ne peut se dissimuler ‘, je n'ai plus les références, mais j'y crois, question d'ambiance sans doute.

Toutes belles choses ont une fin, je suis parti à mon initiative, pas que je le veuille, mais une facette de ma personnalité que je n'aime pas, vient de faire surface.

Un matin très tôt, elle se lève doucement comme à son habitude.

Je la sens, je le sais dès qu'elle bouge, depuis que nous sommes ensemble.

Je n'ai jamais pu dormir sans me réveiller plusieurs fois dans la nuit à la regarder somnoler.

Elle s'installe sur la banquette du salon à côté et se met à pianoter sur son téléphone.

Je l'aperçois par la porte entrebâillée, mais je retourne me coucher à moitié endormi.

Au bout de quelque temps, n'y tenant plus parce qu'elle ne revient pas, je me lève pour la rejoindre.

Elle est allongée les yeux ouvert et me regarde, surprise que je sois levé aussi tôt.

Elle sait très bien que ce n'est pas dans mes habitudes, je crois que le soleil commençait à darder ses rayons.

__ Tu as dormi sur le canapé ? Pourquoi pas dans le lit ?

__ Je n'avais plus envie de dormir, alors je me suis levé pour ne pas te réveiller en bougeant.

Je la sais habituée, s'amuser à tirer les cartes sur des sites de pseudo médiums avec son téléphone, quelque chose a dû la déranger dans la nuit, elle a dû faire une lecture de son avenir supposé.

On en rit quelquefois, mais elle y trouve souvent un parallèle à sa vie.

C'est ainsi qu'elle m'avait baptisé St Michel Archange qui est venu sur terre pour l'accompagner et l'aider.

Je ne sais si elle y croit vraiment, mais au fur et à mesure de ses tirages, elle ne voit en moi qu'une personne bénéfique qui ne lui veut que du bien.

J'en suis flatté, parce que c'est la réalité, et tout avis extérieur, Quelle que soit la source et qui me fait aimer d'elle me convient.

Ce qu'elle me dit ne me suffit pas, et je n'ai pas osé demander plus d'explications, de peur d'une vérité ou d'un mensonge ?

Mais je suis de petite humeur, parce que si même on n'ose déranger la personne à vos côtés, elle accepte néanmoins presque tout et vos travers.

Après avoir bu mon café, je reprends un des livres que j'ai toujours avec moi et me plonge dans la biographie d'Henry de Monfreid, un pavé de plus cinq cents pages que j'ai déjà largement entamé.

Il faut que je donne l'impression de ne pas lui parler parce que je lis.

Je ne veux pas qu'elle sache que je boude, comme un enfant gâté que l'on aurait privé de dessert.

Je ne veux pas qu'elle le sache, mais je veux qu'elle le voit.

Drôle de posture infantile.

Je viens de décider de partir le soir même, et non un ou deux jours après comme prévu, et il faut que je trouve une raison, soit valable, soit potable pour ne pas perdre la face d'un départ précipité.

Toute la matinée, elle continue son combat contre les plantes rebelles extérieures, venant de temps en temps pour boire ou bien se reposer.

Je vois bien qu'elle me regarde quelquefois, je lis une très légère ironie dans ses yeux, pas méchante bien sure, mais un soupçon d'amusement, pas de moquerie.

J'ai vraiment du mal à lire, je reprends sans arrêt des chapitres, je perds le fil de mon histoire, je n'arrive pas à me concentrer à force de jeter des coups d'œil à mon amazone des jardins.

Il n’est pas loin de midi, elle se pose enfin sur une chaise pas trop loin, et allume son téléphone.

Elle a sans doute besoin de lire ou de répondre à ses messages, le besoin des vacances n'inclut pas forcément le fait de s'isoler.

Nous n'avons pas échangé plus dix mots depuis mon réveil, et je ne lui réponds que par onomatopées, je m'en veux, mais ma fierté mal placée prend le pas.

__ Je sais que les hommes ont besoin de s'isoler quelquefois, de s'enfermer dans une bulle étanche aux autres. Je viens de le lire sur un site de psychologie.

Elle vient encore de me sidérer, en ayant une réponse farfelue à mon état dont je ne lui parle pas.

Je devine qu'elle sait que je boude, mais elle a respecté mon silence.

Elle ne sait sans doute pas pourquoi, ne le sachant pas vraiment moi non plus, mais je suis têtu, j'ai tellement envie de la prendre dans mes bras quand elle me regarde ainsi, et je persiste bêtement.

__ Il faut que je parte ce soir, j'ai certaines choses à faire.

C'est la vérité, sauf pour l'empressement, un demi mensonge, dont j'ai honte.

Elle acquiesce sans rien demander de plus.

Je me radoucis tout au long du repas et de l'après midi.

Nous n'en avons plus reparlé, je n'arrête pas de me traiter d'imbécile et d'abruti, mais j'ai décidé.

Je crois que la volonté mâle dominante, enfin, c'est ce qui se dit, est le pouvoir de décider, de s'arroger la volonté infaillible de ne jamais se tromper.

Je suis en plein dedans, avec des gênes qui me dictent une posture héritée des hommes des cavernes.

Le sexe fort ne se trompe jamais et n'agit pas en girouette en se déjugeant à tout bout de champ.

En bref, l'homme est un abruti, et je viens de lui en faire, sans qu'elle le sache, la démonstration.

Je viens de lui montrer ainsi mon pouvoir de décision inaltérable que rien ne pouvait influer, et je suis reparti le soir même, dans la grande ville sécher les larmes de ma honte.

Je n'ai pas osé lui demander précisément pourquoi elle s'était levé ce matin là sans me rejoindre, c'était la vérité sans aucuns doutes, mais une pointe de jalousie mal placée, une décision unilatérale et bornée, un besoin de possession, m'ont entraîné dans une espèce de méandre.

Je ne veux pas qu'elle subisse ce côté sombre de ma personnalité, un tout petit détail devenait une montagne, mon esprit s'emballe quelquefois sur de tout petits riens.

Comme si de rien n'était, nous continuons à prendre des nouvelles l'un de l'autre, avec des photos de sa part montrant qu'elle tient toujours à moi, je crois que j'ai pleuré de rage.

Elle allait bientôt rentrer, et s'ennuyait sans moi.

Je ne suis qu'un abruti borné !

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