Facebook est mon ami.
Je n'arrête pas de tourner en rond, plus aucunes nouvelles, je me suis mis à fumer, plus que de raisons, un peu à boire aussi.
Rien ne va, je ne sors plus du tout, je descends doucement mais je ne sais pas où.
J'évite mes amis, pour ne pas les surcharger de mon humeur.
Je fais le minimum vital, manger, boire, fumer et dormir.
J'analyse très bien tout ça en plus, comme si quelqu'un se trouve derrière moi.
Nous échangeons encore sur une plate-forme de contacts et sorties, qu'elle a pu dissimuler sur son ordinateur.
Ce qui me permet de l'avoir encore pas trop loin, sur un fil électronique.
Elle me répond, presque toujours, mais je sais qu'elle rentre tard et fatiguée.
Je suis toujours en train de décortiquer ses réponses.
Je sais bien aussi, que la franchise n'est pas son fort, j'en suis également conscient avec ce que j'ai appris de plus.
Elle me raconte qu'elle se sent triste d'avoir rêvé de moi sortant une autre fille.
Elle reprend certains termes de sa lettre, où elle peut m'aimer, mais que la raison l'en empêche.
Je ne comprends toujours pas, je sais que, si je veux, je peux, mais je ne vis pas sa vie.
Qu'elle soit occupée et cloîtrée, ne devrait pas mettre un frein à ses sentiments.
Elle ne m'en parle plus.
Elle m'écrit un jour qu'elle veut le meilleur pour moi, mais qu'elle ne peut plus.
Se sacrifier pour le bonheur de l'autre, n'est jamais une issue.
Si un sentiment se partage, cela devient deux malheureux.
De temps en temps, elle fait paraître une photo de l'endroit où elle travaille.
J'ose un avis généraliste, complètement dénué d’avis personnel.
Surprise, je vois apparaître le nom de Monsieur qui en commentaire reprend mes termes en les rehaussant.
Allons bon, voilà que le mari reprend son rôle, comme dans la pièce de Sacha Guitry.
Je lis dans une demande d'ami Facebook, une invitation émanant de Monsieur.
Je n'ai pas le beau rôle, mais je ne le connais pas et je n'ai rien à lui dire.
Je reste dans un certain respect à me refuser de répondre pour ne pas envenimer.
Et ainsi, sur d'autres photos, je retrouve ses commentaires en réponses aux miens, je ne répondrais jamais de toute façon.
Je laisse un message à Marie-Françoise pour l'informer.
J'apprends ainsi par ses réponses qu'elle a eu droit à certaines remarques acerbes de la part de Monsieur pour mes écrits, et qu'elle l'a surprise plusieurs fois à tenter de lire encore son téléphone.
Elle pense qu'il a copié en son temps, tous les noms de ses correspondants.
Il vérifie sans doute tous les appels.
Je pose un problème à Monsieur, c’est certain et compréhensible.
Il connaît bien sûr mon visage, au vu de nombreuses photos des sorties publiées.
Je me suis fait pirater, des années en arrière une messagerie peu sécurisée, je suis assez conscient des dérives d'internet.
Hormis mon prénom, nulle adresse, ni téléphone, ni mon vrai nom n'apparaissent.
Je suis sûr qu'un féru d'informatique serait capable de me retrouver, et encore.
Je ne suis pas trop manchot non plus, un de mes loisirs, mais j'ai plusieurs comptes séparés.
La famille à une adresse, et les amis une autre, je ne mélange pas les genres.
J'ai laissé mon compte amis ouvert, puisque c'est du général.
Mais je sais qu'il enrage de ne savoir qui je suis, ou je suis, elle s'en est faite l'écho.
C'est aussi pour cela qu'il lui fait une guerre quotidienne, ce que je ne savais pas.
Elle ne m'a jamais rien dit avant que je ne lui en parle.
J'en suis encore plus malheureux pour elle.
Et moi qui me détruis par petits bouts sans savoir ce qu'elle subit quotidiennement.
J'ai honte de moi, et peur pour elle, mais je ne lui dis rien.
C'est à cette période, qu'elle m'a demandé le numéro de téléphone d'une de mes amies qu'elle connaît pour l'avoir croisée et appréciée.
Elle se méfie de lui, et dans le doute d'un geste violent, elle voudrait pouvoir se réfugier quelque part.
Par respect, je n'ai pas insisté sur le fait qu'elle pouvait venir ici, mieux vaut une tierce personne.
Vers la mi-décembre, elle sonne à la porte, je suis surpris.
Elle m'embrasse et je l'embrasse, enfin.
__ Je n'ai pas beaucoup de temps, je viens de chez le coiffeur à côté, j'ai pu avancer le rendez-vous, donc je passe te voir.
Elle m'explique ainsi qu'il devient complètement hystérique à ne savoir qui je suis, où je suis.
Qu'il va contacter de ses amis informaticiens pour me repérer sur Facebook.
Je lui réponds que ça ferait plaisir aux services de renseignements de savoir comment on fait.
Blague à part, j'ai bien rigolé, quand elle me répète :
__ Il a des amis aux services secrets, ils vont te chercher.
Elle fouille dans son sac et en ressort la facture du coiffeur.
__ Il me piste Michel. S'il devient violent, c'est juste ça qui me fait peur, mais j'ai le numéro de ta copine.
Elle déchire la note devant moi, qui aurait pu servir de preuve, s’il vérifie bien tout.
Mais, je ne sais pourquoi, je sens que ce n'est pas pour cela qu'elle fait ce geste démonstratif, sans doute pour se rassurer et s’affirmer
Je me sens bête de penser ça, mais j’ai eu l’idée néanmoins.
Elle me raconte qu'il menace d'acheter une arme.
Pendant que nous sommes restés ensemble, je connais la sonnerie, sa messagerie retentit.
Elle me fait voir.
Il la noie de mots en tous genres, en prenant de ses nouvelles, lui souhaitant une bonne journée, de savoir quand elle rentre, qu'il l'aimait toujours.
__ Je suis à bout.
Et elle m'explique :
__ I l m'envoie tout ça, et rien ne change, il ne bouge pas de son fauteuil, il me regarde faire.
On s'engueule sans arrêt. Il tente de venir dans mon lit, je suis obligé de crier pour le faire partir. Dès que j'allume mon ordinateur, il arrive derrière pour voir ce que je fais, pour espionner.
Il n'a rien compris, c'est fini. Je l'avais déjà averti il y a des années de ça.
Il me menace que je vais perdre, il a tout scanné de toi, toutes tes photos, tes amis, il a plein de preuves. Ferme-lui ton mur, ça va le faire chier.
Une fois il est rentré directement au boulot, comme s'il était chez lui, j'ai été obligé de le foutre dehors.
Une collègue m'a dit qu'elle l'avait vu rôder plusieurs fois autour, pour surveiller ceux qui entrent.
Je suis allé faire des courses l'autre jour, je le croise en sortant. Il me suivait. Tu vois où j’en suis ?
Elle regarde l'heure, m'embrasse, et s'en va.
Une jolie tornade est passée, mais je n'ai pas eu le temps d'en profiter, ni de placer un mot.
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