Rien à comprendre.
Je n'ai jamais restreint ma page Facebook, je n'ai rien à cacher, c'est du domaine général.
Je commence à voir certains commentaires de Monsieur sur mon mur, juste après la venue de ma belle et de nos envolées.
Du genre :
__ Le 11.43 fait de gros trous.
Ou encore :
__ Tu vas finir dans le sang et l'alcool.
J'évite de répondre, comme à mon habitude.
Je crois qu'il a su, je ne sais pas comment, pour sa venue.
Bon, pour l'alcool, possible, et de petites coupures, je ne vois rien de plus que ce que mon horoscope, ou mon médecin me prédisent.
Je ne suis pas inquiet, je sais me défendre contre les griffures d'importuns.
Par respect pour ma belle, je ne relève pas, je ne fais que des copies écran.
Malgré qu'il soit vindicatif, j'ai du respect pour lui, mais il y a des moments où il faut savoir passer la main et accepter de perdre.
Je comprends réellement ce qu'il doit endurer, mais je suis à ma place du bouffon de la reine.
Je ne connais ma sorcière que depuis deux ans, les reproches qu'elle me cite envers lui, je suis certain que beaucoup en ont autant à l'encontre des conjoints respectifs.
Le ciment quotidien, n'a jamais été fait d'enfants et de factures, l'amour en fait parti.
J'ai vécu ainsi une bonne dizaine d'années avec la mère de mes enfants, j'ai déjà entendu ces reproches sous une autre forme, mais je suis parti quand on s’est épuisé.
J'ai perdu la maison que j'avais en grande partie construite de mes mains, tous les souvenirs de nos petits, jouant dans le jardin, leurs rires, leurs cris.
Jamais je n'ai perdu de vue, le respect d'une vie de famille aimante, quand tout le monde est d’accord.
Les aléas du modernisme, quand une chose est usée, il faut qu'on la remplace.
Je ne juge pas, je constate.
Personne n'appartient à personne, je ne comprends simplement pas, son envie d'aliéner.
La force de l'habitude d'une chose que l'on possède et qui vous sert ?
La peur de solitude, de n'avoir que le chat pour convive ?
J'entends sa douleur et sa perte de possession, mais je ne respecte pas ce choix.
Ma page Facebook n'est devenue ouverte qu'à mes amis, je l'ai banni.
J'ai su un peu plus tard, que ça l'a rendu fou, malgré qu'il ait scanné et tout sauvegardé.
Il tenait encore à surveiller mes écrits et photos, sans doute du matériel à discussions pour nourrir un peu plus sa colère.
Mais là, c'en était trop, je venais de m'éloigner de son horizon.
J'existais bien sans doute, mais je venais de me cacher aux tréfonds d'internet, il ne pouvait plus en un clic, me faire apparaître, disparaître à sa guise.
Tout le mois de janvier, nous discutons avec ma belle, sur la seule plate-forme qu'il ne connaît pas.
Je n'arrive pas au long des discussions à la faire dévier de son état, que je comprends bien sur, je ne lui parle pas de ma douleur pour elle, je reste attentif à la sienne.
Elle me parle de destins croisés, de vies antérieures non finies, de sa fatigue, de sa nervosité.
Je n'arrive pas à dévier son fleuve de pensées négatives
Mais j'arrive à la faire rire et sourire, elle me le dit, elle reprend un peu de corps quelquefois.
Je tente, par petites touches, pour ne pas la brusquer :
__ Quand pourrais-je te voir ? Tu me manques.
Elle élude, et ne répond jamais directement.
Elle ne sait pas quand elle sera plus au calme.
Je n'insiste pas trop.
Un soir, elle m'écrit qu'elle est de sortie avec la patronne, mais ne sait pas encore où.
Finalement, ce sera un bar à Tapas que l'on connaît bien tous les deux.
Je suis convié naturellement, ainsi que Florence.
Je crois qu'elle a dû parler de ses soucis personnels à son travail, édulcorés, transformés, bien sûr.
Je me demande en quel rôle j'apparais.
Un amoureux transi assez envahissant ?
Un gentil coup de cœur ?
Un ami de toujours ?
Je ne sais plus à force, mais je suis convié, sans vraiment qu’elle insiste.
Elle est surtout très contente de pouvoir de nouveau respirer au dehors.
Elle me décrit ainsi comment elle sera habillée, faisant aussi références à certains détails de ses sous vêtement.
Cela nous amusait beaucoup du temps où nos rencontres étaient plus régulières.
Avec tous ses écrits, je ne savais plus quoi penser.
Une sorte d'écran de fumée diluait nos rapports, mais elle repart de plus belle quelquefois, avec certaines parties qui nous sont personnelles.
Je vais revoir ma belle, mais je ne savais plus en quel sens me tourner.
J'arrive dans le lieu le premier avec Florence, tellement en hâte d'arriver, que je n'ai pas eu le temps de m'habiller correctement.
Elle me présente quelques-unes de ses collègues de travail, et nous allons nous attabler.
Elle est belle et joyeuse, elle me frôle, elle me touche, danse juste devant moi, comme pour moi, que pour moi.
Elle s'assied contre moi, mais sans gestes explicites, nous discutons de tout et de rien.
Son travail, ses clients, tout le monde participe, nous ne parlons de nous, juste du général.
Je discute avec sa patronne, une sympathique personne, et je me rends compte qu'effectivement, elle est au courant de notre liaison par certains éléments, mais sans en parler directement.
Jusqu'à une heure avancée de la nuit, nous grignotons, dansons et papotons, sans rien de plus.
Arrive l'heure de partir pour tout le monde.
J'embrasse ses collègues, et je suis surpris que chacune soit arrivée par ses propres moyens.
J'étais certain que Marie-Françoise les avait amené, parce que nous connaissons bien le lieu, mais nous n’avons pas vraiment discuté de ce détail.
__ Pourquoi c'est toi qui as amené Florence ? Tout le monde rentre, mais toi, tu dois la raccompagner. Je suis venue seule, j'avais la nuit à moi.
Je ne comprends rien, ou alors je comprends justement, mais quoi ?
J'ai mon neurone qui se débat en tous sens.
Tout peux me sembler évident, comme son contraire.
Nous sommes restés de longues, ou trop courtes minutes à nous embrasser à côté de sa voiture.
Nous câliner, nous retenir, nous caresser, nous étreindre.
Je suis en train de regretter d'avoir une passagère qu'en un geste d'impolitesse, je vais laisser ici.
Et Florence qui nous tourne autour.
__ Mais vous faites quoi là ? Je ne comprends rien, mais rien de rien.
Nous décollons nos lèvres de brefs instants pour répondre.
__ Nous non plus, mais c'est comme ça.
__ Tu ne peux pas comprendre ce que c'est.
J'avoue que moi non plus, ne m'importe que ses baisers.
Florence continue de sauter comme une puce autour de nous.
Elle regarde sans comprendre, persuadée que nous ne sommes plus du tout ensemble, du fait des circonstances.
__ J'ai froid, il faut partir, on ne va pas rester là.
J'espère un éclair qui va la foudroyer sur place, et Marie-Françoise qui me dit entre deux baisers.
__ Mais elle ne peut pas nous laisser tranquille, elle voit bien ce que l'on fait.
Il a bien fallu que l'on s'arrête, parce que Florence commence à s'énerver, et nous énerver aussi.
Mais je suis heureux, je sens le sourire ravi de ma belle, son corps contre le mien.
Je ressens son bonheur, je reconnais son corps à travers nos vêtements.
Le temps de se dire quelques mots, nous nous sommes quitté ainsi.
Dans la voiture, Florence n'arrête pas de répéter.
__ Je n'ai rien compris, rien. Mais pourquoi vous faites ça, ce n'est pas normal. Pourquoi vous vous êtes embrassé ?
__ Je ne sais pas, j'en avais envie, on en a eu envie en même temps, personne n'a commencé en premier. Je suis un peu comme toi, comme elle aussi sans doute, rien n'est sous contrôle.
Rien n'a jamais été simple, mais c'est pour cela que je la connais, pour cela que certaines fibres de mon être sont attirées vers une certaine sorcière de mon cœur.
J'ai ramené Florence chez elle, tout en maudissant ma patience de ne pas l’avoir laissé sur place.
Depuis ces retrouvailles, une drôle d’idée commence à me trotter dans la tête.
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