0.5

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  Ici non plus, rien n’avait changé : Roy le remarqua d’emblée. Figé devant l’entrée de l’imposante villa, qui lui opposait une blancheur aveuglante, il chercha en sa mémoire l’exacte émotion inspirée par cette vision. Te remémores-tu comme cela avait marqué ton esprit ? Il se souvenait encore, bien sûr, de la stupéfaction qui l’avait saisi quand il aperçut ce tableau pour la première fois. À dire vrai, il se souvenait de tout, et ce depuis le jour où elle l’avait fait entrer dans le monde des vivants. C’est ton fardeau et j’en suis navrée. Cette vue, en particulier, avait pour lui un goût inexhaustible. Comme un écho inaltéré venu du passé, elle avait la parure des premiers jours.

  Roy sourit avant de glisser sur l’allée de dalles en direction de la porte. Celle-ci était ouverte, comme toujours et sur ce constat, il entra. Sans même laisser le temps au majordome siliconé de l’accueillir, il franchit le hall à grandes enjambées, cavala dans les escaliers sans le moindre effort et se retrouva devant sa chambre. Ma chambre. Sentant monter en lui une nervosité nouvelle, il posa sa main sur le bois synthétique de la porte sans oser la pousser. Lui fallait-il une pause ? Un temps de réflexion afin qu’il se décidât pour de bon ? Pourquoi hésitait-il ? Le doute est humain, Roy. Il secoua la tête comme pour en chasser quelque chose et finit par entrer dans la pièce.

  Elle était là. Je suis là. À peine avait-il quelques pas à faire pour la retrouver, mais il ne bougea pas. Ce qu’il voyait, il l’avait certes déjà vu, il en était convaincu, mais il avait visiblement oublié. Cela ne lui était jamais arrivé auparavant.

  L’analyse de la gêne occasionnée par l’oubli terminée, Roy glissa sans un bruit vers le centre de la cellule, car c’était bien de cela dont il s’agissait. Ma prison. En effet, bien qu’il reconnut tous les éléments d’une chambre d’enfant, Roy ne pouvait considérer le mur de plexiglas coupant la salle en deux, comme étant un composant légitime de l’ensemble. Intrigué, il s’approcha de cette frontière de plastique, ne quittant pas des yeux l’être qui dormait de l’autre côté : une jeune femme, presque adulte. Presque…

  Il l’observa longuement, ne faisant aucun cas de l’andromédic qui tentait, en vain, de diagnostiquer la potentielle dangerosité de sa présence.

Elle était là. Je suis là.

Elle l’attendait. Je t’attends…

  Roy ignorait parfaitement comment faire, mais il devait la rejoindre. Il entendait qu’elle l’appelait. Roy… Elle l’appelait depuis si longtemps.

  S’approchant de plus en plus, résistant de moins en moins, il tendit une main hésitante vers cette entrave invisible et la toucha du bout des doigts. Alerté, son regard se porta sur le médecin de garde, jusqu’alors simple observateur soupçonneux, il semblait s’ébranler d’une fureur nouvelle. Son initiative avait-elle hâté l’évaluation de son cas ? Peu lui importait. Il ne se laisserait pas distraire. En un réflexe, Roy sortit l’argument majeur dont il disposait pour faire valoir son droit de visite et le pointa sur le garde-malade. L’instant d’après, une odeur de silicone calciné emplit la pièce. Roy, dubitatif, ne put s’empêcher de toiser le corps inerte qui gisait dans un coin : c’était la première fois qu’il se tirait dessus.

Roy, je t’attends…

Il entra.

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