— Tu n’es qu’un monstre !

— Il est hors de question que mes enfants sortent avec toi, tu risques de les contaminer !

— Tu vas provoquer notre perte !

— Regarde, si tu n’es pas sage Eleon, tu seras puni par Dieu et tu lui ressembleras. Hait de tous, rejeté de notre société. Il a dû causer beaucoup de tort à ses parents pour être devenu un serviteur de Satan aussi jeune.

 Toutes phrases aussi blessante les unes que les autres adressées à une unique personne. Un petit garçon pas plus haut que trois pommes. Ses yeux brillaient. Ses jambes tremblaient. Il était perdu. Il avait besoin d’aide. Cependant, personne ne souhaitait avoir affaire avec lui. Jamais il ne serait le bienvenu ici. Les regards sombres que les personnes lui lançaient lui faisaient bien comprendre. C’était un intru. Une abomination de la nature. Quelqu’un qui n’aurait jamais dû naître. Au plus profond de lui, il en avait la certitude. Même ses parents semblaient feindre l’ignorance. En particulier son père qui n’avaient jamais oser lever un seul œil en sa direction, comme s’il était dégoûté.

 Le garçon finit par partir, rebrousser le chemin en courant le plus rapidement qu’il le pouvait. Il ne supportait pas d’être une bête de foire pour quiconque qu’il croisait. Chaque fois c’était pareil : il croiser des personnes, un attroupement se formait et il finissait par recevoir des injures continuellement. Parfois, ils lui lançaient même des objets ou de la nourritures pourries afin de l’humilier encore un peu plus et bien lui faire comprendre qu’il n’était pas le bienvenu.

 Il n’observait pas vraiment la route qu’il prenait, son regard devenait flou par les larmes qui commencèrent lentement à couler. Il fuyait. Il retournait sur ses pas, escaladant un anciens bâtiments, aujourd’hui en ruine. Sans ralentir son allure, il se retint de grimacer. Il ne devait pas broncher face aux nombreuses égratignures. Il se devait de rester fort pour leur prouver qu’il n’était pas faible. A qui ? Il n’en avait pas vraiment la moindre idée. Il souhaitait juste qu’on le considère à sa juste valeur et cela passer par ne plus être jugé de par son anormalité. Après tout, la douleur physique n’était pas si forte en comparaison aux humiliations qu’ils subissaient régulièrement.

 La respiration saccadée, petit à petit, son allure ralentissait. Il devait être assez loin de la ville et personne ne serait assez fou pour le suivre. Toujours au milieu des débris, il provoqua la panique chez certains animaux qui s’enfuirent à son approche. Même eux avaient peur de lui !

 Il se laissa tomber contre un des rares murs encore intact tout en ramenant les genoux vers lui. Son jean usé rendait encore un peu plus l’âme : troué à divers endroits très certainement dû à la petite course qu’il venait de faire. Ses cheveux blonds et sales retombaient sur son visage qu’il cachait dans ses jambes afin d’étouffer au mieux ses sanglots et de reprendre une respiration stable. En vain.

Il maudissait ce virus.

Il maudissait cette guerre.

Il maudissait cette société.

Mais par-dessus tout, il maudissait ses yeux.

 Il se concentra et lentement il reprit le contrôle de sa respiration alors que l’air se faisait plus lourd avec la pluie qui commençait à tomber. Cependant, il ne semblait pas plus perturbé que cela, comme habitué. Ses doigts le dérangeaient, ils crépitaient. Il jeta un regard vers le ciel tout en écartant quelques mèches qui lui cachaient la vue. Se son œil droit n’avait rien d’anormal, son œil gauche, lui, ne rentrait pas dans les cases de sa société : il était de couleur jaune.

  Un éclair zébra le ciel illuminant parfaitement son visage, comme s’il venait de le contrôler.