Moi
Tic : À ce compte-là, peut-être que la seule différence, c'est d'être moi ou pas.
Pat : Hein ?
Tic : Oui, être moi, qu'on soit vivant ou mort.
Pat : Je veux pas être toi.
Tic : Non, ton but n'est pas d'être moi, c'est d'être toi, c'est-à-dire d'être moi.
Pat : Mais, de toi à moi, si je suis moi en étant le moi de tout le monde, je suis plutôt toi que moi, non ?
Tic : Non, tu es ton moi à toi.
Pat : Si je suis moi je suis comme toi, alors que si je suis toi, contrairement à toi, alors je suis comme moi.
Tic : L'essentiel n'est pas le mot, c'est le moi.
Pat : Si justement, l'essentiel est le mot, puisque le moi n'existe pas.
Tic : Ah bon ?
Pat : Ben non.
Tic : Et moi alors ?
Pat : D'un mois à l'autre, tu n'es pas le même moi. Et puis un mois tu clamses, et là tu n'es plus du tout le même moi. D'ailleurs, au fil des mois, tes cellules clamsent et tout ton corps est un autre moi.
Tic : Mais je peux être moi sans être le même moi. Peut-être que c'est le moi qui reste et le reste qui mue. Ainsi je suis moi en étant un autre moi.
Pat : Donc ce qui reste, c'est le mot moi.
Tic : Non, c'est moi.
Pat : C'est ce que je dis.
Tic : Donc tu t'en prends à moi ? À moi !
Pat : Ne me prends pas au mot.
Tic : Je te prends à moi.
Pat : En émoi tu veux dire ?
Tic : On se prend entre moi, c'est mon dernier mot.
Pat : On dit que les derniers mots d'un mourant ont le charme d'un mystère.
Tic : C'est bien ça, tu me menaces !
Pat : Cesse tes atermoiements !
Tic : Pas tant que tu t'en prendras à moi !
Pat : Je ne m'en prends pas à moi !
Tic : Non, à moi !
Pat : Soit on est moi selon le même moi, et je ne m'en prends pas à moi, soit on est moi selon différents mois, et alors je ne vois pas comment m'en prendre à ce moi inconnu.
Tic : C'est justement ça de s'en prendre à moi !
Pat : Je trouve que tu tournes en rond, c'est égoïste.
Tic : On n'est jamais qu'en soi.
Pat : Sauf quand on est en moi.
Tic : Berk.
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