Reconnexion
De retour au refuge, Ney prépare l'antenne de communication pendant que Tsadir vérifie les alentours, surveillant toute potentielle intrusion dans le périmètre de sécurité.
Le dispositif de communication n'est rien d'autre qu'une antenne parabolique réfléchissante accompagnée d'un émetteur laser UV, le tout monté sur une armature capable d'orienter l'appareil avec précision et de suivre la position d'un engin en orbite. Pour l'heure, Mahertis n'est pas joignable et de toutes façons, utiliser l'antenne de nuit serait sans doute le meilleur moyen de se faire repérer.
La semi-renarde bascule sur les informations, tentant de déterminer la situation. Apparemment, les hommes de Dunstar sont désormais en garde à vue, arrêtés pour détention et usage d'un appareil auto-réplicant, trafique d'armes, de stupéfiants, menaces de morts et, pour Dunstar lui-même, abus de pouvoir durant l'exercice de ses fonctions au conseil municipal. Les jeunes sont pour le moment considérés comme des témoins et des victimes potentielles. Il ne faut aucun doute que quelqu'un surveillait cette affaire depuis longtemps : mais alors, est-ce que leur opération furtive a servi de déclencheur ou est-ce un simple concours de circonstance.
Tsadir revient, rassurée et constate que Ney a installée la grande valise au sous-sol. Va-t-elle lui explique ce qu'est cette fameuse surprise ? La renard se tourne vers elle et lui sourit. Elle ne pouvait pas simplement détruire le constructeur universel : leur mission sur Terre n'est pas encore terminée et tant que la liaison n'aura pas été rétablie, elles ne peuvent prédire de quel matériel elles auront besoin. Aussi en a-t-elle fabriqué un plus compact.
Les deux décident d'employer ce moment d'attente pour se reposer. Ney continue de suivre l'affaire du fablab, mais elle ne parvient pas à en apprendre plus. Elle se concentre alors sur l'implémentation d'un module de contrôle pour les foglets. Le quartier regorgeant de déchets abandonnés, elle ne manque pas de matière première.
Quand Tsadir se réveille, elle est enveloppée dans une couverture réfléchissante, une boule de poils orangés blottie contre elle, probablement Ney, et la tête reposant sur un oreiller confortable. La pièce a été expurgée de toute poussière et des foglets forment un décor de filaments bleutés éclairant la pièce dans un mouvement agréable. Au milieu, d'autres foglets forment un affichage holographique où l'intégralité du quartier semble référencé. Tsadir constate que pendant son sommeil, Ney a placé pas loin de soixante-dix drones de surveillances connectés en point à point par une communication laser. C'est un périmètre de plus de 6 kilomètres qui est ainsi couvert et aucune trace onusienne n'est à déplorer.
Tsadir se lève en essayant de ne pas réveiller la peluche qui aura beaucoup à faire dans quelques heures. Mais au fait, depuis quand a-t-elle besoin de dormir ? La cyborg secoue gentiment la renarde qui fait mine de s'éveiller avant d'exploser de rire.
Dans un coin de la pièce, le constructeur universel attend des instructions, non loin, un petit réchaud a été installé avec quelques couverts, les conserves soigneusement rangées à côté. De l'autre côté de la pièce, dans le coin, Ney a visiblement installé un toilette à vide, relié par de fins tubes au constructeur universel comme pour matérialiser les propos de Lavoisier.
Ney se lève et enfile sa nouvelle cape qui arbore pour le moment une couleur rouge vif. Puis elle s'assoit au milieu des essaims de foglets et l'ensemble de la scène de surveillance se transforme en une vue orbitale affichant nombre de vecteurs et différents comptes à rebours. L'un d'eux passe à zéro et le brouillard utilitaire matérialise l'établissement du faisceau laser. Quelques secondes passent, puis une réponse : l'avatar de Mahertis apparaît au milieu des foglets.
Ney se lève triomphante et accueille chaleureusement l'IA qui s'upload dans le contrôleur de foglet.
« Avant toutes choses, ne vous en faites pas pour le fablab, j'y ai apporté ma maigre contribution, m'assurant que les trafiquants soient punis et les idéalistes récompensés. » Cette unique phrase démontre alors l'emprise que l'IA avait réussi à obtenir sur le réseau. « Je suis désolé de ne pas être arrivé à vous prévenir, mais il était très important que je ne fasse pas tomber votre couverture. La trahison de Prest est en train de se faire remarquer au sein de l'ONU, mais je n'ai pas souhaité affronter la sécurité du siège régional pour savoir si De-Montergny était lui aussi de mèche. À mon sens la mission doit continuer et vous avez établi un avant-poste beaucoup plus solide que vous ne le pensez. »
Tsadir ironise : « Donnez un constructeur universel à une IA forte… » L'assemblée rie à cette remarque puis Mahertis reprends : « Je suis entré en contact avec l'ambassade des colonies : ils ne sont pas au courant de votre venue sur Terre. À mon avis, notre ami Verner va avoir pas mal de choses à expliquer. »
Les trois synchronisent leurs informations, mettant à jours leurs protocoles de communication et admirant le travail de l'IA venue du ciel : ce petit justicier venait de mettre un terme à plusieurs années de trafic d'armes et de drogues qui maintenait en place trois gangs de la banlieue nord. Une goutte dans un océan, mais qui sur le long terme donnerait, selon l'intelligence, une bien meilleure situation.
Les foglets manifestent un nouvel envoi vers l'orbite, Mahertis envoyant les nouvelles données à son instance restée en haut. Puis la communication se coupe, le vaisseau étant trop incliné sur l'horizon pour pouvoir être contacté.
Tsadir relance la conversation en indiquant : « La mission doit continuer, la vie d'un enfant est probablement en jeu. »
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