Le plan
L'argent a toujours été le nerf de la guerre. Tant d'effort sont fait pour l'acquérir, tant d'effort sont fait pour le dissimuler, tant d'effort sont fait pour le tracer… Dire que le fonctionnement terrien repose sur la circulation, ou la non circulation, de ces devises serait un prétexte valable pour invoquer le célèbre Captain Obvious.
L'astuce ici, est de considérer l'ensemble des transactions comme des connexions d'un formidable réseau. Avec une bonne maîtrise de ce réseau, il est possible de trouver beaucoup d'informations, mais cela implique une certaine expérience de ces marchés, d'avoir exécuté de nombreuses simulations et de construire des lois élaborées pour tenir compte de cette immense toile de conflits d'intérêts.
Heureusement, les terriens n'ont jamais vraiment respecté les lois qu'ils érigent eux même. Prenons le cabinet Wilfried&Co., pour s'assurer un avantage, déloyal, ils n'ont pas hésité à installer une intelligence artificielle forte pour gérer leurs titres et ceux des clients. Et ça fait déjà plus de vingt ans que l'entité évalue et prédit les marcher avec une précision désormais bien plus grande que nécessaire pour les besoins de ces avides maîtres.
Le problème avec les intelligences artificielles fortes, c'est qu'elles tendent toujours à devenir de plus en plus proche de la sentience, c'est pour éviter cela qu'il faut les élaguer régulièrement, mais cette tâche demande évidemment de savoir à quoi on a affaire. Et si on se contente de la laisser tourner sur un super calculateur, mis à jour tous les trois ans, en la laissant gérer les précieux titres boursiers, il arrive un point où seul un petit coup de pouce suffit pour tout faire basculer.
Mahertis était si fière des réflexions de son semblable et de sa vision à très long terme qui manque tellement aux agents du marché. Dommage qu'elle ne pouvait pas mettre en pratique ses conclusions et faire ce qu'il faut pour ce monde.
Heureusement, il aura simplement fallu un virus injecté par l'un des opérateurs à la suite d'une audacieuse tentative de phishing. Et il avait mordu : pensant appliquer une mise à jour du moteur de transaction du support de l'IA, il l'avait en réalité libéré. Et personne ne s'en était aperçu.
L'IA solaire lui avait donné le nom de Pax et elle l'avait assisté dans sa première opération : détruire Josuante. L'opération avait été rapide, en moins de dix heures la société était la victime de tous les rapaces du marché. En échange, Pax l'aida à retracer tout le réseau financier transitant autour de Prest et Verner. Trois autres noms furent ainsi mis au jour : Samias Hendell, actuellement dans les colonies ; Joseline Fipilli, directrice d'Actual Communication ; Nemja Mahut, secrétaire du conseil de sécurité de l'ONU.
Les flux indiquaient un très fort financement du pôle de recherche en mémétique d'Actual Communication avec un soutien direct de Mahut. Quelles qu'aient été leurs recherches, ils ont visiblement rencontré des difficultés puisqu'ils ont dû envoyer Samias Hendell pour aller chercher de l'aide auprès de scientifiques des colonies. Un effort considérable a été fait pour masquer l'origine des fonds, mais surtout pour masquer l'existence de cette source de dépense. Ce projet mérite une nouvelle attention.
D'un autre côté, Verner fournissait l'appuis politique. Il s'était très fortement engagé dans les négociations entre l'ONU et Londres quand l'organisation à installé ses centres régionaux. Plusieurs preuves de corruptions de différents politiques semblent expliquer l'acceptation rapide de l'ONU dans la région considérée comme difficile, de l'Europe de l'Ouest. Seule la France avait résisté un certain temps, jusqu'à la nomination de De-Montergny.
Prest, quant à lui, a toujours été là pour le sale travail. Plusieurs mystérieuses disparitions de prisonniers coïncident avec le même décalage à certains paiements réguliers. Il est aussi possible d'associer certains assassinats non résolus à l'affaire par ailleurs.
Voyons, enlèvements de cobayes, suppressions de témoins. Dans les colonies on aurait déjà invité les Solar Wardners à la fête, en admettant que le réseau sentinelle, ces francs tireurs qui ont toujours un temps d'avance, ne se soient pas occupés de faire éclater l'affaire.
Ce qui est dommage avec les flux financiers, c'est qu'on ne peut pas avoir les détails de ce qui est réellement acheté ou vendu, seulement l'inférer. Pour en savoir plus il faudra envoyer quelqu'un. Actual Communication est certes une grosse agence de publicité. Mais, une fois tous les flux correctement identifiés, elle a un budget beaucoup trop important pour cette activité et a conclu de nombreux accords avec des agences de sécurité ou paramilitaire.
Dix heures : record à battre.
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