99
Quelle journée, je suis fourbue. J’envoie valdinguer mes chaussures dans l’entrée, enlève mon manteau. Direction la cuisine où je me prépare une boisson bien alcoolisée pour me détendre et les cahuètes qui vont avec. Décompresser. Me relaxer en écoutant la radio.
Dans le salon, une vieille femme est assise dans mon fauteuil préféré. Que fait-elle là, comment est-elle entrée ? Elle me regarde et me sourit, accueillante. Elle ressemble à ma mamie sans être elle. Au cas où, je lui demande :
—Mamie ?
—Elle est morte depuis belle lurette. Elle t’embrasse, au fait.
—Alors qui êtes-vous ?
—On va abréger un dialogue qui risque de s’éterniser. Je suis toi, une possibilité de toi. J’ai quatre-vingt-dix-neuf ans.
—Et que me vaut le plaisir qui me fait m’assoir sur le pouf instable et trop bas qui menace à chaque instant de chavirer ?dis-je histoire de gagner du temps, sidérée que je suis par son aplomb.
—Toujours aussi charmante, je vois. Ne change rien. Ton mauvais caractère te permettra, d’un bon coup de canne, d’obtenir une place assise dans le bus.
—Tu veux boire un verre ?
—Non, merci. A ce propos, je suis venue te prévenir d’arrêter de boire, c’est mauvais pour ta santé.
—Ah non, pas de ça Lisette, j’ai arrêté les clopes, je fais du sport régulièrement et essaie de manger léger – les cahuètes se marrent dans leur soucoupe- si, léger avec quelques entorses qui me font du bien au moral. Si je supprime tout, tu parles du plaisir de vivre.
—Je te dis ça, je dis rien, fais ce que tu veux, tu es libre, tu as le choix. On a toujours le choix. Mais sache que le prix à payer est une vie saine. Quatre-vingt-dix-neuf ans, réfléchis, ça vaut le coup, non ?
—Des clous ! Maintenant, vieux moi, tu dégages, repart d’où tu viens et fiche-moi la paix.
Je prends une grosse poignée de cahuètes et hop, tout dans la bouche d’un coup.
—Kuf kuf, krrrrrrr, kruf, ca… Cra… ka… huèt’…. De l’eau…. Kuf, kuf….
GAME OVER
Annotations
Versions