Une immense scène de théâtre
Une immense scène de théâtre
Le temps est ce flottement si incertain, cette nature qui cherche son équilibre sans vraiment le trouver. J’ai l’impression de rouler sur un tapis qui longerait une immense scène de théâtre avec, tout au fond, vers le sud, une bande rose pâle nageant à l’horizon alors que le reste du ciel est un genre de soie grise infinie dont on n’aperçoit que l’ondulation illisible. Quelques nuages, ici et là, glissent devant la nappe la plus claire. Ils ont une forme étrange. Ils dessinent des arêtes, des élancements, ils brillent d’un inhabituel éclat. Ils sont une belle géométrie, un habile feston posant sur l’air l’irréalité de leur apparition. Je m’arrête au somment d’une de ces collines de calcaire si typique du Causse. Un moutonnement blanc que rythment de courtes herbes. Je fais quelques pas pour me délasser.
Et, vois-tu, je suis un peu désemparé, tel un enfant découvrant une merveille dans un livre d’images. Ce qui se confondait avec un simple amoncellement de nuages : la chaîne des Pyrénées qui, vue d’ici, s’étale sur sa plus grande longueur. Claire au milieu, plus basse, plus foncée à sa périphérie. Comme si, d’un seul empan de la vue, je pouvais en saisir l’étonnante majesté depuis le Cap de Creus en Méditerranée, jusqu’au Cap Higuer et au golfe de Gascogne vers l’Océan. Sans doute n’y a-t-il plus belle confrontation de l’homme avec la nature, de l’infiniment petit à l’infiniment grand.
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