Réveil marin
Le vent souffle fort. Des rafales transpercent le corps de Domenico Scribus et le laissent frigorifié. La tempête fait rage autour de son bateau et pourtant, il ne réagit pas. Il est attaché au mat, inconscient. Des vagues énormes se déversent sur le pont du navire qui tangue et menace de se briser à chaque assaut de la mer en furie. Heureusement, les voiles ont été repliées avant que les éléments naturels ne se déchaînent… Mais la situation est critique…
« Réveille-toi, Domenico ! Arrête de rêver ! Réveille-toi ! Je ne veux pas finir au fond de l’océan ! »
L’enquêteur italien entend la petite voix de son anneau magique dans sa tête. Il est surpris par ce qu’il dit. Pourquoi veut-il donc qu’il se réveille ? Y aurait-il une jolie femme à ses côtés ? Si c’est le cas, elle a dû prendre tous les draps car il meurt de froid. Il ouvre un œil pour voir ce qu’il en est et le referme tout de suite… Non ! Ce n’est pas possible !! Que se passe-t-il ?
Une nouvelle vague submerge l’embarcation et arrose copieusement notre célèbre enquêteur qui est dans une situation dont il risque de ne pas réchapper vivant.
Domenico ouvre cette fois les deux yeux et essaie de comprendre ce qu’il se passe. Le cataclysme qui l’entoure le rend fou. Il ne sait pas comment il a fait pour se retrouver ici, mais le plus important n’est pas là ! Comment va-t-il faire à s’en sortir ?
Il crie aussi fort que possible :
« A l’aide ! Aidez-moi ! »
Mais, avec le vacarme causé par les vents et les flots déchainés contre le navire, même lui n’entend pas le son de sa voix. Il est seul… Il va devoir se débrouiller, comme il a toujours réussi à le faire par le passé.
Il referme les yeux et cherche à oublier le désordre et l’horreur autour de lui afin de retrouver le calme et la clarté de sa pensée. Ce n’est pas aisé car le bateau chevauche les vagues de plusieurs mètres de haut et retombe à chaque fois de manière brutale dans des bruits de craquement effrayants. Cependant, Domenico est plein de ressources et il parvient à faire abstraction de tout ça pour laisser son cerveau analyser la situation.
Premièrement, il est sur un cogue, un de ces voiliers utilisés pour le commerce. Il doit donc être dans la mer du Nord, bien loin de Beaune, la ville où il était selon ses derniers souvenirs. Comment a-t-il pu embarquer ? L’a-t-on fait monter de force ou bien a-t-il rejoint l’expédition de son plein gré ?
Deuxièmement, il est attaché. C’est que quelqu’un l’a entravé. Pour quelle raison ? Pour le protéger ? Ou alors pour le condamner ? Domenico secoue la tête perdu dans ses pensées car ces questionnements ne le mènent nulle part… Il devrait réfléchir aux moyens de se libérer. Ou même, il devrait se demander si c’est une bonne idée de se libérer et de se retrouver emporté par les flots…
Ces dernières questions lui font comprendre combien sa situation est désespérée. Il a le choix entre mourir attaché au bateau ou succomber noyé dans la mer glacée. Cette pensée lugubre emporte toutes les autres dans sa tête où l’obscurité prend de plus en plus de place. Domenico va abandonner le combat. A quoi bon lutter pour la vie et résister quand l’issue ne peut être que fatale ?
Un nouveau bruit fort de craquement. C’est le navire qui cède après avoir vaillamment résisté. En retombant brusquement après une énième vague, il ne peut plus résister et commence à se disloquer. Le mat auquel est accroché Domenico est arraché. La voile qui se déplie, détachée de ses liens, s’ouvre en grand et le vent s’y engouffre sans ménagement, soulevant l’Italien toujours relié à cette aile improvisée.
Domenico ouvre les yeux mais la pluie glaçante qui le frappe et l’obscurité à peine perturbée par les éclairs ne lui permettent pas de distinguer quoi que ce soit, à part le sentiment étrange de voler. Et quand il se crashe dans l’eau, la chute est cinglante et foudroyante. Domenico se sent partir dans un tourbillon gelé où il s’enfonce, heureux que le choc ait annihilé tous ses sens. C’est la fin, il le sait et il l’accueille avec la joie de pouvoir enfin rencontrer son Créateur.
Quand il reprend conscience, il est ébloui par une forte lumière et une douce chaleur. Une femme d’une trentaine d’années le regarde, l’air inquiet. Domenico parvient à émettre un son d’une voix rauque :
« Dieu, vous êtes donc une femme ? »
La jeune femme lui sourit gentiment et lui répond dans une langue qu’il ne connait pas :
« Jeg forstår ikke. Jeg vil hjælpe dig. » (note du rédacteur : c’est du danois ! Et ça veut dire : Je ne comprends pas. Je vais vous aider.)
Domenico, rassuré par le ton réconfortant de la jeune femme, referme les yeux et se laisse aller à la fatigue qui le submerge.
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