Chapitre 2 : L'école Saint-Clair.
À l'aide du minuscule miroir dans la voiture, j'arrangeai le col de ma chemise dépassant de mon pull-over. Tandis que je passais une main dans mes cheveux, maman me gronda disant que j'allais les graisser.
Depuis que je m'étais levé, elle n'avait cessé de me faire des remarques. Un coup, mon jean descendait trop bas. Puis, ma chemise était de travers alors il valait mieux mettre un pull au-dessus de celle-ci. Il ne fallait pas un vêtement noir, car il n'allait pas avec mes cheveux trop sombres, mais du gris, pour faire ressortir la beauté de mes yeux bleus, comme disait ma mère. De plus, ma coiffure n'était pas à son goût. Heureusement, elle m'avait tout de même laissé porter mes baskets préférées. Cependant, elle refusait que je mette la veste que j'avais choisi avec soin, sous prétexte que le jour de la rentrée, je devais arborer une tenue des plus impeccables.
En effet, le jour tant attendu était enfin arrivé : aujourd'hui j'entrais à l'école St-Clair.
Je m'apprêtais à sortir de la voiture quand mon père me saisit par le bras. Il leva ses grands yeux vers moi et me rappela d'un ton menaçant qu'il fallait que je fasse tout ce qui était en mon pouvoir pour me rapprocher des Richess. Je hochais simplement la tête. Ma mère sortit à son tour et me tira complètement en dehors de la voiture avant que je ne puisse répondre quoi que ce soit. Elle fit quelques pas avec moi vers le portail et me serra très fort dans ses bras.
- Promets-moi de prendre soin de toi, mon chéri, me dit-elle.
- Tout ira bien, lui répondis-je.
- Et fait ce qu'il faut... Même si tu n'en as pas envie, me soupira-t-elle à l'oreille. Nous allons déposer tes bagages.
Je restais au pied du grand portail d'entrée devant lequel je me sentais minuscule, tandis que je les regardais partir vers l'internat non loin de l'école. Maman me faisait de grands signes, comme si nous n'allions plus jamais nous revoir.
Lorsque je ne vis plus la voiture, je me retournai et fixai les gigantesques bâtiments. Il était vrai que l'endroit avait du cachet. Je n'en attendais pas moins de la meilleure école de tout le pays. J'étais impatient d'en visiter chaque recoin.
Il y avait tout ce dont vous pouviez rêver à St-Clair. L'école pouvait accueillir près de 1600 élèves, soit la moitié du nombre qu’occupait la plupart des grandes universités du pays.
Pour accueillir autant d'étudiants, l'établissement possédait cinq bâtiments sur quatre étages. Le dernier étant consacré aux activités extrascolaires (les clubs), il y existait des salles d'art, de musique en tout genre, de cuisine, etc.
Il y avait également une bibliothèque servant de salle d'étude et de lecture qui se situait dans un autre bâtiment.
Mais la fierté de St-Clair, c'était son équipement pour les activités sportives. Il dépassait toute attente ! Entre un gymnase à l'américaine (c'est-à-dire terrain de basket et gradins), une piscine, un court de tennis et un terrain de foot, il y avait de quoi devenir un champion olympique.
Leur auditorium n'était pas non plus à envier. Toutes les grandes réunions s'y déroulaient, mais il servait principalement de salle de spectacle ou de répétition. J'avais entendu dire qu'à l'étage de celui-ci, il y avait non seulement une salle d'audio-enregistrement, mais aussi des salles de danse.
C'est justement là que se déroulait la cérémonie de début d'année. Ne sachant pas où je devais me rendre, je décidais de suivre la foule me disant que nous allions, de toute façon, tous au même endroit.
J'arrivais dans une énorme salle, très éclairée, dans laquelle il y avait des sièges en velours rouges à perte de vue et en son fond, une gigantesque scène. Les murs et le sol étaient recouverts de moquette tout comme dans une salle de cinéma ou d'un amphithéâtre. Il y avait déjà beaucoup de gens assis à l'avant, je pris donc une place dans les rangées du milieu. Comme je m'y attendais, les étudiants autour de moi avaient fière allure et leurs parents encore plus.
Tandis que j'attendais le début de la cérémonie, j'écoutais en silence le brouhaha d'approximativement trois mille personnes. J'entendais des bribes des conversations dans tous les sens. C'est grâce au discours de ces parents insistants sur la réussite scolaire, que j'ai compris comment survivre dans cette école. Je savais maintenant quels éducateurs je devais éviter et comment je devais m'y prendre avec tel ou tel professeur pour être sur la liste des favoris. Mais aussi quels élèves il était préférable de fréquenter, selon leur titre ou leur popularité, avec les Richess tout en haut de la liste, bien sûr.
Je me demandais s'il était possible que je sois le seul étudiant sans une mère ou un père venant d'un milieu noble, qui ne travaille ni dans la politique, ni dans la restauration, le marketing, la mode, banquier, avocat, PDG, musicien reconnu... Je levais la tête un instant vers le plafond. Je soupirais en imaginant déjà la pénible vie qui m'attendait dans cette école. Pour les autres, je ne serais qu'un roturier, certes génie sur les bords, mais plutôt pauvre... Et dire que mon père voulait que je me rapproche des Richess. J'avais du mal à imaginer comment un garçon comme moi pourrait ne serai-ce que leur adresser la parole alors que d'autres beaucoup plus haut dans l'échelle sociale n'y arrivait pas. Je commençais à croire que je ne me ferais pas d'amis du tout. Bien qu'il ne s'agissait pas d'une priorité.
Tout à coup, la luminosité de la salle diminua et le bruit cessa, laissant place aux applaudissements. Je suivis le mouvement et regardai vers la scène. Un grand homme quadragénaire apparut de derrière le rideau de théâtre, vêtu d’un costume. Il se dirigea fièrement vers le micro et attendit le silence pour prendre la parole :
- Mesdames, Messieurs, Chers étudiants, bien le bonjour ! Je me présente, je suis Monsieur Xavier. J'ai la chance d'être le directeur de cette magnifique école, autrefois construite par mon ancêtre, le fondateur, Monsieur Joseph Saint-Clair. J'espère que chacun d'entre vous sera satisfait, cette année encore, par la qualité de notre établissement. Quant aux nouveaux étudiants, je ne peux que leur souhaiter la bienvenue à St-Clair !
Le grondement dans la salle reprit, puis le silence. J'étais impressionné par le charisme que dégageait notre directeur. Il savait comment capter la foule.
Après les formalités, plusieurs autres personnes le rejoignirent sur la scène. Il nous présenta la proviseure, les éducateurs, les professeurs, le trésorier, toute l'équipe en somme. Puis, il nous expliqua en bref l'histoire et les valeurs de cette école. Il insista sur quelques points forts importants du règlement et après quelques conseils de vie, il se décida enfin à former les classes.
J'espérais vraiment que la classe dans laquelle je serai me plairait.
Annotations
Versions