Acte II: activation des codes
Le hurlement lointain d’un loup réveille Éric en pleine nuit. Les bougies sont presque entièrement consumées. Il se lève et va vers la fenêtre, restée ouverte, qui laisse entrer le vent faisant danser au passage les lourdes tentures. Il attrape les volets pour les fermer – il déteste être réveillé aux aurores par la lumière du jour- quand il capte du coin de l’œil une forme blanche vers l’étang. Il concentre alors son regard dessus, mais il ne distingue rien d’autre que les reflets de la lune sur la surface de l’eau et l’ombre mouvante des arbres.
Il bâille, ferme les volets et la fenêtre, puis retourne se coucher. Il décide de relire une dernière fois le message contenu dans le carnet, mais, cette fois, un détail l’intrigue. Il avait cru à une erreur au début, cependant, en y repensant, une telle faute d’orthographe dans un texte qui n’en comporte aucune autre, cela lui paraît douteux. Surtout que le même mot est bien orthographié un peu plus haut. Il relit la phrase en plissant les yeux.
Si tu me lis, ces lignes sont encodées et réveilleront tes propres mémoires ou bien, rien ne se passera si cela n’est pas ta voix.
Ta voix. Pas ta voie, comme il l'a d’abord cru. Alors il essaye à nouveau. Il énonce les codes à voix haute. La première fois, rien ne se passe. Il prononce ensuite chaque chiffre un par un au lieu de nombres. Et là, quelque chose d’extraordinaire survient.
Les codes s’illuminent d’un éclat doré et semblent flotter au-dessus du papier, les lettres et les chiffres sont comme doués de vie. Ils s’assemblent en une spirale qui se met à tourner dans le sens des aiguilles d’une montre. Soudain, avant qu’Éric ait pu réagir, la spirale rentre à l’intérieur de son front, et le jeune homme se retrouve projeté dans une lumière aveuglante, dans une époque qui ne lui appartient pas et dans un corps qui n’est pas le sien, mais celui d’une femme. Il sait de qui il s’agit avec la certitude la plus absolue. Annabelle.
Dans son esprit, qu’il partage à présent avec Annabelle, il entend une voix qui sonne comme une douce mélodie à ses oreilles.
« Tu es parvenu à activer les codes. Tu es maintenant le témoin de mon histoire. Certains diraient qu’elle est triste, d’autres incroyable. Je te laisse te faire ton opinion. Sache que tu pourras ressentir tout ce que j’ai ressenti, voir tout ce que mes yeux ont vu, entendre la moindre de mes pensées, mais tu ne pourras, en aucun cas, changer le cours des évènements. Cela a été gravé dans le cristal originel. »
Alors, le jeune homme assiste en spectateur passif au récit incroyable d’une jeune mortelle devenue immortelle.
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