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Finalement, n’était-ce pas pendant ces années d’enfance, avant de partir à la Maison familiale, qu’il avait été le plus heureux ? Il en savourait chaque bribe qui remontait, monde joyeux, difficile et familier. Il n’avait pas de choix à faire, pas de responsabilité. Tout était inscrit, naturel.
Le patois revenait aussi avec les petites années, parlé à l’houstal*, interdit gentiment à l’école par le maitre, comprenant leur instinct, car il venait du pays.
Il avait le sourire aux lèvres en ranimant ces fragments épars, essayant de les rattraper, de les revivre, alors qu’eux s’ingéniaient à se mélanger, à se flouter, à lui échapper.
***
Ce matin, une femme qu’il reconnait vaguement est venue, accompagnée d’un homme, sans doute son mari. Ils l’emmènent en voiture jusqu’à une maison. Il ne sait pas où il est, mais tout lui semble familier, comme chez lui. Elle lui demande :
— Alors, André, content de te retrouver un peu chez toi ?
C’est chez lui ? Donc, l’endroit où il vit en ce moment, ce n’est pas sa maison ? Il ne comprend plus rien.
Elle lui explique qu’elle a besoin de papiers : se souvient-il où il rangeait les papiers importants ? Non, il ne sait pas ce qu’elle veut dire. Il va dans sa chambre, ouvre la vieille armoire et tire le tiroir du milieu. Elle parait satisfaite, il ne voit pas pourquoi. Il a oublié ce qu’il y a dans ce tiroir, et pourquoi il l’a sorti. Il renifle parce que l’odeur de ce lieu lui est douce, le réconforte. S’il devait acheter une maison, il aimerait en trouver une comme celle-là. Il s’y sent à l’aise. Le long de la cheminée, il découvre un bâton un peu tourmenté qu’il saisit. Il épouse agréablement sa main et il se dirige vers la porte, commençant à descendre l’escalier du bolet, quand l’homme l’attrape par l’épaule en lui demandant gentiment de revenir dans la maison. Il ne sait plus où il voulait aller, alors il rentre et s’assoit dans un fauteuil devant le cantou éteint. Ce fauteuil semble fait pour lui et il ne se réveille que pour remonter dans la voiture et retourner à cette autre bâtisse qu’il ne reconnait pas non plus.
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