10 Rassemblement difficile.

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Après avoir franchi les portes de la forteresse, Konrad ordonna à tous d'aller se reposer et de se détendre jusqu'au lendemain. C'est ainsi qu'après avoir pu se laver et faire disparaître les traces de deux semaines de voyage, qu'Anna pu enfin savourer le plaisir de retrouver le confort de son lit. Elle se délectait de la douceur de la couverture caressant sa peau dénudée, et sentait toute la lassitude de son corps se dissiper petit à petit. Le lendemain matin après une longue nuit de repos, Anna s'attendait surtout à devoir se rendre au donjon pour faire un bilan de la mission réalisée, mais il n'en fut rien. Konrad avait décidé d'attendre les deux autres équipes parties en exfiltration pour faire un retour général sur la situation en croisant les différentes informations des trois missions. Mais pour cela il devait faire preuve de patience : une équipe était toujours manquante. L'équipe partie pour Milan n'était toujours pas revenue, alors que celle de Konrad dont la mission fut retardé par l'inquisition avait réussi à revenir avant eux. Certes, Milan était la ville la plus éloigné des trois où les équipes furent envoyées en mission. Cependant, même l'équipe partie pour Strasbourg, la ville la plus proche des trois de la forteresse, avait peiné à revenir et ses membres étaient revenus avec de nombreuses blessures. Contrairement à la première mission d'Anna, où elle et Van n'étaient restés absents que quelques jours de trop, Konrad n'envoya personne en direction de Milan, estimant suffisamment important le nombre de ses guerriers et sorcières envoyé en mission, pour qu'ils reviennent d'eux-mêmes.

Anna elle, gardait en mémoire l'horreur que fut sa première mission. C'est à cause de la situation ayant dérapé qu'elle y avait vécue, que toutes ces missions d'exfiltrations avaient été lancées. Puis, quand elle repensa à la facilité avec la quelle, l'inquisition avait déjoué leur plan et les avait coincés à Prague, elle ne put s'empêcher d'être inquiète. Sa première mission ressemblant à un piège, Prague et maintenant la disparition d'une dizaine de personnes à Milan, tout cela n'était pas un hasard pour elle et elle ne pouvait se sortir cette idée de la tête. Elle savait bien que Konrad lui avait demandé de garder le silence concernant ses soupçons de trahison, mais la situation lui pesait de plus en plus sur les épaules et elle avait besoin d'en parler à quelqu'un. Elle aurait bien voulu en discuter avec Van, mais elle n'avait jamais su où étaient ses appartements dans le donjon. Aélis était tout le temps occupé et Alisia bien qu'ayant appris à connaître Anna quand elle lui apprenait à nager, n'était pas plus proche d'elle qu'une autre au sein de la forteresse. La seule personne avec qui elle pensait pouvoir se confier, et pouvoir parler en toute confiance restait la doyenne Hildegarde. Elle était là quand avait été évoqué la question d'une possible fuite d'information chez eux, et donc elle pouvait évoquer le sujet avec elle sans enfreindre les ordres de Konrad.

Anna se dirigea alors vers les jardins où elle comptait se rendre de toute façon, afin de pouvoir au moins s'exercer durant son temps libre. Elle savait que c'était là-bas qu'elle avait le plus de chance d'y croiser celle à qui elle voulait parler. Et puis, la doyenne, Anna n'avait-elle pas une autre raison de vouloir discuter avec elle ? Elle n'avait pas eut de réponse de la part des autres sorcières, et elle n'avait pas osé en parler à Van, ses condisciples lui ayant bien fait comprendre que le jeune homme refuserait d'aborder le sujet avec elle. Une fois dans les jardins, elle fut soulagée car la doyenne y était bien présente. Cependant, elle semblait ne pas être en mesure de lui parler : ce jours-là une dizaine de filles dont l'âge variait entre sept et quatorze ans, faisaient cercle autour de la vieille dame. Celle-ci leur apprenait l'histoire des sorcières et leur vantait l'importance de la nature, et leur futur devoir d'en prendre soin, de la protéger. Anna avait bien appris sa leçon avec le temps, et savait qu'il ne servait rien de s'imposer et d'insister avec la doyenne quand celle-ci n'était pas en mesure de répondre, ou n'en avait tout simplement pas envie. Anna fit alors comme les quelques autres sorcières dans les jardins, et chercha un endroit isolé pour s'y exercer seule et dans le calme, afin de ne pas perturber l'enseignement d'Hildegarde.

Commençant par méditer comme le lui avait enseigné sa préceptrice, au bout d'une demi-heure elle commença à s'entraîner à maîtriser les formes et les mouvements de sa glace. Elle persévéra deux bonnes heures jusqu'à ce qu'enfin, la doyenne n'ait finie d'enseigner. En effet, les jeunes filles bien que sérieuses, avaient fini par perdre en concentration tant elles avaient besoin d'activité à leur âge, et avaient du mal à rester en place trop longtemps à seulement écouter la voix chevrotante de la vieille dame. Voyant que sa classe devenait dissipée et agitée, elle leur donna congé et leur suggéra d'aller profiter des grands espaces des jardins pour se défouler. Anna, voyant la vieille dame enfin seule et abordable, se risqua alors à s'approcher pour lui parler de ce qui la travaillait :

- Pardonnez-moi, madame, puis-je vous parler un moment ?

- Que veux-tu ma petite ?

- Il y a quelque chose qui m'inquiète et dont je ne peux parler à quelqu'un d'autre.

- Cela concerne un homme je parie !

La vieille dame se prit d'un fou rire en voyant le visage rouge et vexé d'Anna. Elle qui venait lui parler sérieusement, elle se retrouvait face à la doyenne qui s'amusait à blaguer dans un moment pareil ? Puis, Hildegarde reprit un visage sérieux et reprit la discussion comme si sa plaisanterie n'avait jamais existé :

- Je sais très bien ce qui t'inquiète ma petite, mais rassure-toi, tu n'as pas à t'en soucier pour l'instant.

- Mais enfin, comment voulez-vous que je m'inquiète pas ? Vous-même, vous devez bien être inquiète de cette situation, non ?

- Bien-sûr, mais j'en ai vue d'autres tout comme ceux qui vivent dans ce donjon. Ne sous-estime pas la puissance des Krutz, ils sont bien plus forts et plus organisé que tu ne le crois. Konrad et Siegfried doivent déjà faire ce qu'il faut pour gérer au mieux la situation. Deux siècles que cette forteresse tient tête à l'inquisition, tu ne crois tout de même pas que c'est un hasard, si ?

- Certes, je comprends ce que vous dîtes, mais je n'arrive pas à me sortir de la tête tout ce qui s'est passé dernièrement.

- Heureusement ! Sinon je t'aurais traité de petite écervelée ! Cela prouve que tu analyses et réfléchis plutôt bien à la question. Mais ne vas pas tirer des conclusions hâtives. N'oublie pas pourquoi on t'a demandé le silence sur le sujet.

- Je sais bien pourquoi je ne dois pas en parler. C'est justement pour ça que j'ai voulu en parler avec vous.

Anna afficha un air rassuré face au discours de la doyenne, et se sentit aussi fière car cette dernière lui avait fait un compliment ce qui était rare de sa part. Pourtant, sa voix elle semblait indiquer qu'elle n'avait pas fini de parler, et qu'il y avait autre chose qui lui occupait l'esprit. La vieille dame l'avait rapidement compris et demanda à Anna de s’asseoir pour discuter plus confortablement. Puis, elle prit la parole afin de comprendre ce à quoi pouvait bien penser la jeune femme :

- Tu as autre chose à me demander, alors crache le morceau et ne te fais pas prier.

- Pourquoi ne m'avez-vous pas parlé ce pouvoir qu'avaient les Krutz ? Celui d'être capable de fusionner avec l'âme d'un animal ? Après tout, comment puis-je être une bonne équipière pour Van si je n'ai pas toutes les connaissances pour l'aider ?

- Parce que cela n'aurait rien changé à part te donner des informations sensibles.

- Ça n'aurait rien changé ? À Constance ça nous aurait évité bien des problèmes !

- Vous n'auriez rien pu en faire, car la condition pour pouvoir user de cette technique c'est d'avoir une sorcière pour empêcher le possesseur de l'âme animale de perdre le contrôle de son corps. Mais pour cela il faut que l'esprit de la bête accepte la sorcière comme son second maître, quelqu'un ayant un droit, une autorité sur lui. Mais ce n'est pas ton cas concernant l'âme du loup de Van.

- Et comment je dois faire pour me faire reconnaître ce droit par l'âme du loup ? Je croyais que seul les Krutz avaient des pouvoirs sur les esprits d'animaux.

Hildegarde prit un long moment pour réfléchir à sa réponse. Elle savait bien qu'une fois qu'elle aurait expliqué le principe à la jeune femme, il ne serait plus possible de revenir en arrière. Ainsi, elle était consciente qu'elle allait provoquer un sacré bazar dans la vie d'Anna. Pourtant, cela n'empêchait pas la doyenne d'afficher un visage amusé au moment de répondre :

- C'est exact, seul les Krutz ont un pouvoir spirituel sur ces esprits. C'est pour cela que, pour que l'âme de l'animal accepte l'autorité d'une sorcière, il faut que celle-ci ait un fort lien spirituel avec l'âme de son maître. Et cela, ce n'est pas chose facile. Les Krutz peuvent forcer l'âme de l'animal à obéir grâce à leur pouvoir. Pour Alisia ou Aélis par exemple, elles n'ont pas le pouvoir spirituel pour imposer leur volonté à une âme par la force. Dans leur cas, c'est donc à l'esprit de l'animal de choisir ou non de se soumettre de lui-même.

- Pourquoi ça ? En gros il suffit qu'un Krutz utilise son pouvoir sur l'âme d'une sorcière.

- Complètement faux ! Leur pouvoir permet d'extirper et de soumettre une âme. Pour cela, il faudrait qu'il tue la sorcière dont il voudrait utiliser l'âme, et cela ne serait que théorique car le pouvoir des Krutz ne fonctionne pas sur les êtres humains.

- Mais alors, comment ont fait les autres ? Qu'est-ce qu'elles ont que je n'ai pas pour pouvoir utiliser ce pouvoir moi aussi ?

- Une très forte complicité avec leur partenaire. Sans une confiance et une complicité absolue avec Van, tu peux oublier tout de suite cette technique que tu as vue à Prague.

Il fallut un long moment pour qu'Anna arrive à digérer l'information. De la complicité ? Il y avait tant de façon de définir ce mot, et tant différente complicité : celle d'une famille, celle qui liait deux amis, ou encore celle que pouvait partager deux amants. Et puis, cette complicité dont parlait Hildegarde était-elle réellement nécessaire ? Après tout, elle ne l'avait pas ressentie chez les autres équipes quand elle avait passé du temps avec elles à Prague, pendant qu'ils voyageaient tous ensemble. Ou alors, était-ce une forme de complicité qui ne pouvaient être exprimée en public ? Elle avait bien une idée en tête sur ce genre de complicité plutôt intime, bien qu'elle ne l'ait jamais pratiqué ni vu de ses propres yeux. De plus, cela lui évoquait l'expression se donner « corps et âme ». Si elle avait vu juste, alors elle comprenait mieux pourquoi son équipier ne lui avait rien dit. Cependant, c'était une chose d'imaginer cette solution, mais comment demander confirmation d'un sujet plutôt intime ? De plus, elle pouvait aussi se tromper dans son hypothèse car après tout, Crona et Lucia pouvaient également user de cette transformation. Anna ne savait pas comment elle devait interpréter les paroles de la doyenne, et décida d'en savoir plus :

- Pourquoi Van ne m'a pas lui-même parlé de ça ? On est censé faire équipe, alors où est le problème ?

- Le problème de Van, c'est que c'est un solitaire qui n'en fait qu'à sa tête. Il n'aime pas faire équipe même si cela implique de renoncer à la puissance que procure la magie à l'âme du loup. Alors déjà qu'il prend mal le fait qu'on lui impose une partenaire, tu penses vraiment qu'il t'aurait parlé de ça ?

- Je comprends mais c'est exagéré comme comportement, on nous demande juste de travailler ensemble, et si cela nous permet de pouvoir nous sortir du pétrin, où est le mal à développer de la complicité ? Ce n'est pas comme si ça nous demandait de devenir intime.

Elle qui voulait faire dans la subtilité avait carrément mit les pieds dans le plat. Il ne lui restait plus qu'à attendre la réponse, tout en espérant s'être trompé et ne pas devoir en arriver à se forcer à être intime avec son partenaire pour pouvoir exploiter la même puissance que ce qu'elle avait vue à Prague. Déjà que le peu qu'elle s'était abaissée à faire, lors de l'incident de Constance, lui avez laissé un certain goût de honte. Mais face à ses propos, la vieille dame éclata de rire. Il lui fallut un long moment pour se calmer et répondre à Anna :

- De l'intimité ? Tu t'imagines quoi au juste ma petite ? Je te parle de confiance et de complicité, même si l'intimité peux aider, cela ne rentre pas dans les critères nécessaires. Et puis, si l'intimité n'est pas un moyen fiable, c'est aussi que c'est quelque chose pouvant être forcé. Imagine, toi et Van désirant ce pouvoir de transformation, vous chercheriez à créer une complicité forcée, et donc ça ne marcherait pas. Cependant, il arrive fréquemment que la complicité entre un guerrier et une sorcière débouche sur une liaison durable, mais il s'agit surtout d'une conséquence liée à une forte complicité entre eux, pas la cause de leur lien.

- Donc, en gros tout va se jouer sur le temps passer à faire équipe ensemble ?

- Exact, de la patience et du travail d'équipe. C'est pour cela qu'il vous est impossible d'arriver à cette forme de l'esprit animal, vous ne vous connaissez pas assez toi et ton partenaire pour espérer progresser. Maintenant, je conseillerais plutôt de renforcer ton propre pouvoir plutôt que d'en viser un hors de ta porté.

Anna passa les jours suivant à réfléchir aux explications de la doyenne : comment pouvait-elle renforcer son propre pouvoir ? Elle avait déjà l'impression d'en avoir atteint les limites et de ne pas pouvoir progresser plus, et que la seule voie de progrès qu'elle voyait, c'était d'améliorer son contrôle magique sur la glace qu'elle avait transmise à l'âme du loup de Van. Cependant, elle ne pouvait encore rien en faire car les rares fois où elle avait essayée en entraînement, l'esprit de l'animal s'était contenté d'ignorer la jeune femme bien qu'il possède sa magie de glace. En y repensant, elle comprit pourquoi la doyenne lui avait dit d'oublier le niveau supérieur, si elle n'avait aucune autorité sur le loup. Elle songea alors à réclamer du temps à son partenaire, afin qu'elle puisse s'exercer plus souvent avec l'âme du loup, occasion que le jeune homme ne lui laissait que rarement. Ce dernier l'évitait toujours en dehors des deux missions qu'ils avaient réalisées ensemble, et des réunions qui en découlaient. Pourtant, un après-midi où elle quittait les jardins après s'être exercé, une occasion d'aborder le sujet semblait se présenter quand elle croisa Van dans les couloirs du donjon. Cependant, un événement vint interrompre sa tentative.

Anna s'avançait dans le dos de Van, ce dernier n'ayant pas fait attention à sa présence. Puis, elle attrapa le dos de la chemise du jeune homme, afin de l'inciter à se tourner vers elle. Elle commença alors à ouvrir la bouche pour lui parler quand tout à coup, une grande agitation se manifesta dans les couloirs du donjon. Tous se ruaient en dehors du bâtiment pour rejoindre les portes de la forteresse, avec une telle précipitation que la jeune femme en oublia sa première démarche, la curiosité concernant cette agitation ne pouvant que lui occuper l'esprit. Anna suivit le mouvement pour voir et savoir ce qu'il se passait mais fut surprise en arrivant devant les portes : le troisième groupe envoyé en mission d'exfiltration venait enfin de rentrer. Cependant, Anna manqua de peu de vomir en voyant les hommes et les femmes qui venaient de faire leur retour. Pas de mort et pas de prisonnier, mais presque tous étaient revenu si blessés et mutilés , que le spectacle était insoutenable pour l'esprit encore jeune et innocent de la sorcière de glace. Des yeux crevés et des membres arrachés, sans oublier de nombreuses plaies profondes et mal cicatrisées dont certaines avaient commencés s'infecter et se gangrener. Anna aida comme elle put pour accompagner les blessés à l'infirmerie du donjon, où les guérisseuses eurent un mal fou à organiser les soins, tant toutes les blessures à traiter étaient importantes et prioritaires mais aussi car elles étaient peu nombreuses à l’œuvre.

Konrad avait suffisamment attendu et voulu faire un retour général concernant leurs missions. Cependant, les guérisseuses lui demandèrent de quitter les lieux, bien qu'il soit le chef de la forteresse. La situation était des plus préoccupante et la patience des habitants du donjon commençaient à arriver à bout. Pourtant, ce n'était pas la longueur de l'absence du troisième groupe, ni le temps nécessaire pour rentrer qui avait fini par détruire la patience de Konrad, mais l'état dans lequel était revenu cette troisième équipe. Ce groupe comportait tout de même six combattants et six sorcières, tous aguerris et aptes à combattre l'inquisition. À ce groupe s'ajoutait le duo qu'ils avaient exfiltré, ce qui faisait tout de même une équipe de quatorze personnes ce qui n'étaient pas négligeable. Alors, comment avaient-ils pu rentrer dans un état pire que les autres ? C'est cela qui énervait Konrad et avait tué sa patience : Konrad voulait des réponses et il les voulait immédiatement. Le lendemain, il entra brusquement dans l'infirmerie et demanda qu'au moins un membre du groupe en état de parler le rejoigne dans la grande salle du donjon. Les deux seuls capables de répondre à la demande du commandant étaient ceux qui avaient été exfiltrés. Faron et Wanda étaient des vétérans de la forteresse, un duo de quarantenaires qui en avaient assez vu pour réussir à revenir les moins amochés de leur équipe.

Faron était un homme massif, brun aux cheveux longs détachés et la barbe foisonnante. Il avait l'expérience du combat et passait autrefois son temps libre à former les jeunes garçons de la forteresse au combat pour qu'ils puissent la défendre si un jour, les Krutz venaient à disparaître et ne pouvaient plus protéger les habitants. Cependant, quand Alisia eût besoin de personnes expérimentés pour infiltrer les rangs ennemis, il n'hésita pas à reprendre du service pour les missions extérieures avec Wanda, une femme aux cheveux châtains et coupés court aux mensurations plutôt développées et agréables, qui était son ancienne équipière et compagne avec qu'il avait fini par fonder une famille et avoir une fille d'une dizaine d'années désormais. Le guerrier maniait très bien la lance et sa compagne maîtrisant la magie de pierre, lui offrait aisément une protection au combat avec une solide armure de pierre. Revenu de sa mission avec un œil crevé et une jambe en moins, il parcourut les couloirs du donjon avec une jambe droite artificielle en compensation, la magie de sa compagne lui étant très utile mais surtout indispensable désormais. Sa lance abritait un cerf de pierre dans une émeraude enchâssée dans le manche. Quand il pénétra dans la grande salle, il se retrouva face à Konrad ainsi qu'à une assemblée regroupant les deux doyens ainsi que tous les combattants et sorcières valides. Avant même que Konrad ne lui pose la moindre question, c'est lui-même qui prit la parole :

- Je ne sais ce que vous avez pu découvrir de votre côté, mais nous on a été pris en chasse pendant tout un mois par les répurgateurs. C'est pour ça qu'on n'a pas pu revenir ici avant de s'assurer qu'ils ne pouvaient plus nous suivre. Mais cette confrontation avec eux à clairement démontré ce que je cherchais à savoir depuis deux ans. On n'en sait pas assez sur les répurgateurs et cela est dangereux pour nous tous.

- Nétait-ce pas le but des trois missions engagées ? Demanda la doyenne. Strasbourg, Milan et Prague, trois villes où les répurgateurs sont les plus présents.

- Justement, il est là le problème, répondit Crona. Que nous manquions nous d'information sur eux est plutôt normal car ils ne vont pas nous envoyer une jolie lettre pour nous dévoiler leur secret. En revanche, du côté de l’Église pour qui ils sont censés travailler, il n'y a quasiment aucune information sur eux. Comme si leur ordre était apparu comme par enchantement. De plus, ils se sont montrés très actif ces derniers temps, et cela semble correspondent avec nos récents problèmes en missions.

- Si on considère qu'ils connaissaient si mal nos pouvoirs contrairement à celui des sorcières, et que l'inquisition ignore toujours notre position, on peut en conclure qu'il n'y a pas de fuite dans la forteresse et c'est bien plus dangereux pour nous, ajouta Faron. Si la fuite venait de chez nous, il aurait suffi de la trouver et de la supprimer pour être tranquille, mais nos problèmes récents viennent principalement des répurgateurs.

- Et cela ne gêne pas l’Église d'avoir des individus comme eux dont ils ne savent rien ? S'étonna Alisia.

- Pas du tout, l’Église leur laisse la liberté d'agir comme ils le souhaitent, expliqua Faron. Les répurgateurs savent combattre la magie à la perfection là où le reste de l'inquisition n'y connaît rien et se contente de brûler les femmes qu'ils considèrent comme sorcières. C'est justement ce qui est dérangeant dans l'histoire. L'inquisition vise aussi des hommes qu'elle croit sorciers, alors que les répurgateurs ne visent bien que les sorcières.

- Je ne comprends pas, en quoi cette distinction entre homme et femme ciblé fait une différence, demanda Anna.

S'estimant légitime à participer à la discussion après avoir vue les répurgateurs à Prague, la jeune femme s'était permise d'interrompre la discussion, ne comprenant pas pourquoi Faron insistait tant sur le fait que les répurgateurs ne visent que les sorcières. Mais en voyant se tourner vers elle, les visages sévères des personnes présentes dans la salle, elle s'attendait presque à ce qu'on lui reproche sont intervention. Cependant, la doyenne lui répondit avec une voix extrêmement calme :

- C'est une très bonne question, même si nous allions aborder le sujet et cela, même sans ton intervention ma petite. Hécate, Freyja et Artémis, trois femmes, trois déesses connues pour être les protectrices des sorcières. Étrangement, seules les femmes ont toujours été reconnues comme sorcières et ayant de véritables pouvoirs magiques pas ces déesses. Bien que nous ayons perdu la source de cette information à cause de l'inquisition, il reste une légende expliquant ce phénomène. Selon cette information, les déesses avaient choisies de ne confier la magie qu'aux femmes car elles estimaient que les hommes passant leur vie à faire la guerre, il aurait été trop dangereux pour le monde et pour toutes les formes de vies existantes qu'ils aient également des pouvoirs magiques.

- Et c'est là qu'intervient le problème des répurgateurs, poursuivit Wanda. L’inquisition ayant toujours considéré les druides ou les herboristes comme des sorciers, ils n'ont jamais faits de distinctions quand il fallait juger et brûler ceux qu'ils considéraient comme hérétiques, bien que les hommes furent peu nombreux à subir les foudres de l'inquisition. Mais les répurgateurs eux, pour une raison qu'on ignore, connaissent très bien cette légende et l'appliquent dans leur chasse aux sorcières.

- C'est pour ça que je souhaite proposer un plan en deux étapes, déclara Faron en s'adressant à Konrad. Premièrement, faire profil bas quelque temps et se faire oublier, même si ça implique d'abandonner les victimes de l'inquisition à leur sort. Puis, après s'être fait suffisamment oublier, reprendre petit à petit nos activités discrètement et enquêter sur les répurgateurs en les affrontant par petits groupes isolés.

Konrad resta silencieux un moment, réfléchissant à la proposition de Faron. Son idée est certes très pertinente, mais elle était aussi dangereuse vis-à-vis de la situation actuelle qu'ils avaient vécu. Anna avait encore Prague en tête, mais aussi depuis la veille, le carnage qu'elle avait constaté au retour de la troisième équipe. Elle était même surprise de voir Faron, l'un des mutilés de cette équipe, suggérer lui-même ce plan à peine un jour après son retour à la forteresse. Et même s'ils pouvaient de nouveau planifier des opérations sans risque de fuite, le danger des répurgateurs allaient continuer à planer sur eux. Alors pourquoi Faron proposait-il de prendre de tels risques ? Anna, comprenant à quel point la proposition de Faron semblait des plus folles, elle s'attendait alors à entendre Konrad la refuser. Cependant, il l'accepta alors l'idée de Faron mais y posa la condition qu'aucune opération ne saurait être décidé avant d'être sûr que toutes les blessures de ses effectifs soient entièrement guéries. Pourtant, Anna fut surprise pour une toute autre raison : aucun ne sembla s'opposer à ce plan et ils semblaient même l'approuver malgré le danger que cela impliquait. S'ils participaient au plan proposé par Faron, ils devraient partir en mission par binôme guerrier et sorcière, comme l'avaient fait elle et Van à Constance.

À ce moment-là, la menace des répurgateurs n'était pas connue à la jeune femme et déjà, le souvenir de sa première mission lui laisser un goût d'amertume mais aussi surtout une peur profonde dans son être. Face à la menace d'un ordre religieux capable de combattre aussi bien la magie que les pouvoirs spirituels des Krutz, Anna s'était vue rester longtemps à l'abri des remparts de la forteresse. Elle s'attendait à voir les Krutz jouer la prudence et rester cachés de l'inquisition mais au lieu de ça, ils s'étaient déjà mis en tête de retourner provoquer et affronter l'inquisition. Anna était terrifiée par la situation et elle ne pouvait le cacher, tremblante de la tête aux pieds. En ressortant de la grande salle, pour la première fois, ce fut Van qui vint à elle afin de passer du temps avec elle et tenter de la rassurer. Il daigna alors lui accorder du temps, pour qu'elle tente d'apprivoiser l'âme du loup à la quelle il était lié.

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