Ba-Marcon, Igfride et Honorius l’adieu.
Honorius et Igfride étaient debout sur le chemin de ronde, le soleil se couchait là-bas dans la mer. Bientôt ils devraient se changer pour présider le banquet qui suivait le triomphe.
Honorius les deux mains sur le créneau scrutait l’horizon en fait il essayait de refouler les larmes qui lui montaient aux yeux. Igfride le dos au parapet regardait ses pieds aux sandales dorée aux ongles carmin.
- J’espère madame vous avoir heureusement surpris cela me coute cher mais je ne voyais pas d’autres issue à ce que je pourrai appeler notre relation.
- Il est vrai que je n’en vois point d’autre hormis me maintenir prisonnière.
- Il est dommage que je n’eusse pas put avoir avec vous le même succès qu’avec vos compagnes, elles ont toutes trouvé un mari parmi mes légionnaires. Et elles s’en trouvent heureuses je pense.
- Oui c’est là que j’ai compris à quel point vous étiez fin politique. J’ai dû me faire violence pour ne pas succomber à vos avances et résister aux honneurs dont vous vouliez me combler.
- J’ose espérer madame que nous étions comme deux astres, séparés par un incommensurable abime, et qui se jetaient éperdument leur lumière.
- À présent, l'abime est franchi, et j’ai vu mon mortel ennemi pleurer d'amour entre mes bras. Mais moi je ne vous aime pas.
- Je sais cela mais dites-moi…
- Je sais ce que vous allez demander et je puis vous répondre jamais je n’ai pu vraiment vous haïr.
- Vous êtes trop noble pour me mentir n’est-ce pas ? Et cette guerre je ne la voulais pas. J’en ai tiré mon parti c’est tout.
Elle ne répondit pas. Du dos de sa main il essuya ses yeux rougis. Et ses mains se reposèrent sur la pierre tiède. Elle se retourna et sa main se posa sur celle de son compagnon.
Il sentait sa peau son contact qui déjà le troublait, cette alchimie étrange qui le perturbait, il soupira, hésita entre la retirer et l’envie de la laisser, de sentir encore un temps celle qui allait le quitter peut-être pour toujours.
- Je sais, je vous tenais pour un ennemi généreux et grand mais dites-moi seulement si je n’avais pas été la reine qu’auriez-vous fait de mon peuple ?
- En vérité cela n’aurait rien changé pour votre nation, car voyez-vous je lutte contre l’esclavage, contre cette gangrène qui ronge mon empire et je ne me voyais pas exterminant tout un peuple, aussi en vérité j’eusse préféré que vous fûtes une simple femme et non la reine d’un peuple turbulent, écoutez bien ceci, vous serez libre après. Malgré cette guerre que nous nous sommes faits, malgré vos rebuffades, malgré nos morts mutuels j’espérai éteindre en vous ce ressentiment et qu’enfin apaisée vous vous seriez assise à mes côtés sur le trône impérial. Mais hier vous n’avez été que trop claire et dans votre regard je n’ai vu que du mépris aussi je me serai bien contenté de votre haine mais de votre mépris jamais. Demain vous pourrez quitter ce palais qui pour vous fut une prison, de vous je n’attends plus que le respect des traités et de la parole qui nous lie. Adieu madame ce soir je préside le banquet de la plèbe, vous celui du Sénat je crois que nous nous voyons ci-devant pour la dernière fois.
Il retira lentement sa main de sous celle d’Igfride s’inclina devant elle et très rapidement disparut avalé par l’escalier en colimaçon le soleil jetait ses derniers rayons dans un ciel ensanglanté « tout un symbole. » pensa t’il. Il avait le sentiment d’être en quelque sorte humilié d’avoir perdu une bataille mais il avait aussi le sentiment d’avoir malgré tout sauvé la face.
Igfride resta seule un moment encore et dans un sanglot à peine étouffé murmura :
- Adieu mon amour unique objet de mes pensées, tu ne sauras jamais à quel point je t’aime.
À son tour elle quitta le chemin de ronde où vint se poser la chouette effraie au disque facial en forme de cœur.
***
Le lendemain dans les appartements déserts d’Igfride il trouva sur le lit la couronne qu’il lui avait offerte lors du triomphe. Il pensa à Ser. "Avait-il aussi mal que lui ? Lequel des deux ? À destins farceur, mais sa solitude il se la devait. Il avait ouvert la cage à son oiseau de paradis. Décidément il n’avait pas de chance avec les femmes surtout avec celles qu’il aimait."
Il fit appeler sa sœur accorda son pardon à Genivira à l’unique condition qu’elle ne remette jamais les pieds au palais.
Il était temps de passer à autre chose.
D’abord mettre dix légions sur le pied de guerre en envoyer quatre par le fleuve vers Aquilata et les six autres par la route. Il devait aussi recevoir en audience privée Ba-Marcon et expédier quelques affaires.
Il était donc dans son bureau des audiences privées accompagné de Toila.
Ba-Marcon fut introduit presqu’en silence, il était habillé d’une toge à la mode Dominienne.
- Je te fais officier de cavalerie avec le grade de général et je te donne le titre de duc, cela te va-t-il ?
S’il n’avait pas vécu ce qu’il avait vécu s’il n’avait pas compris que l’on parlerait de guerre il aurait été surpris de cette question.
- Kazar*, si je suis ici c’est par hasard.
- Mon cher Ba-Marcon le hasard n’est-il pas un des noms de la providence ?
Alors raconte-moi donc ce merveilleux hasard car si je ne m’abuse on te donnait pour mort ; explique-moi ce miracle dont ton royaume est si friand.
- En deux mots j’étais parti pour négocier un accord commercial avec Subarnipal. Mais ce dément a voulu contre toutes les règles de la bien séance et de la diplomatie nous emprisonner. Je réussis à me sauver et après des pérégrinations sans nom je parviens à trouver le chemin de votre empire et se fut fort difficile car nous avons rencontré de grandes armées qui campaient aux pieds des montagnes du Kouff* et j’ai appris que Subarnipal a fait alliance avec les Mùspell* et les Niflheim* j’ai vu de mes yeux quatre armées fortes d’au moins cent mille hommes chacune, des vallées remplies de chevaux. Je demande à votre excellence l’autorisation de rentrer dans mon royaume où ma présence et je pense des plus souhaitable.
- Comme tu voudras mais sache que cette mort que tu as déjouée sur le lac de Taciphrène t’attend chez toi, ta reine la papesse Salamandra est maintenant le jouet de l’inquisition peut être est-elle encore en vie dans quelques cachots ou plus surement morte et je tiens pour acquis l’alliance contre nature de ton royaume et de Subarnipal tout cela pour quatre clous, ceux parait-il de votre vrai tau. Je ne pense pas que nous rentrions en guerre ouverte contre ton peuple, je pense que Subarnipal a acheté sa neutralité et peut être un droit de passage pour ses armées. Tu as le temps d’y réfléchir d’autan que bien des tiens et parmi les plus illustres sont ici à Domina, ils ont fui les procès de votre église. Tu en trouveras dans le nouveau quartier de la porte Aurélia, en attendant toi et tes amis êtes mes invités, un huissier te mènera à tes appartements. Ce soir je t’attends au banquet des vétérans. Toila, tu devrais emmener notre hôte à l’armurerie voir un cimmérien sans sabre me remplit de pitié et je pense que vous avez des choses à vous dire et peut être quelques épées à tirer. Au fait les Cimmériens ne sont plus en odeur de sainteté et tes parents ont dû quitter leur fief. Tu vois que nos intérêts convergent.
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