Ubu chez l'antiquaire
La scène se déroule chez un antiquaire.
Père Ubu : Merdre !
Harpagon : Hors d’ici tout à l’heure ! Vous n’insulterez point ainsi ma marchandise !
Père Ubu : Ah, monsieur, vous me faites injure, et ce que vous essayez de me vendre est de la merdre !
Harpagon : Gibier de potence ! Si vous ne m’achetez rien, je m’en vais faire quérir la justice !
Mère Ubu : Et que nous proposez-vous, monsieur le vendeur ?
Harpagon : A de tels clients, je me dois de présenter ce luth de Boulogne.
Père Ubu : De par ma chandelle verte, bernique, vous tentez de m’escroquer !
Harpagon : Si cela ne vous convient point, voici une peau de lézard…
Mère Ubu : Je crains que ce ne soit trop cher pour nos maigres bourses.
Père Ubu : Mère Ubu, en parlant ainsi, vous équarrissez mes oneilles. Combien de rixdales avons-nous ?
Mère Ubu : Autant que vous pouvez en compter.
Père Ubu : Bougre de merdre, merdre de bougre ! Nous voilà miséreux.
Harpagon : Hé bien ! Qu’est-ce que cela veut dire ?
Père Ubu : Ah ! Sinistre drôle ! Que disez-vous dans mon dos ?
Harpagon : Pendard !
Père Ubu : Comment ? Bouffre ! Tas d’arabe !
Harpagon : Le coquin !
Mère Ubu : Hola, monsieur mon mari. Calmez-vous donc, je vous vois prendre la coloration du homard.
Père Ubu : Ma tendre épouse, estes-vous donc cousine des vipères pour avoir la langue aussi vénéneuse ?
Mère Ubu : Tu es si bête !
Harpagon : Plût à Dieu que j’eusse de meilleurs clients !
Père Ubu : Par le saint Pinpirou et la non moins sainte Soubique, je m’en vais vous lacérer le postérieur !
Harpagon : Ouais ! Des commissaires, des archers, des prévôts, des juges, des gênes, des potences…
Un homme au gros nez entre dans le magasin. Il voit un des articles.
Le client : Damnation ! Objet grotesque et abominable. Je l’achète !
Harpagon, adressant une courbette au client : Je suis votre très humble serviteur !
Le client : Lefuneste en sera vert de jalousie ; il apprécie ce qui lui ressemble.
Fin
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